Enquête sur la sécurité du transport aérien A19C0145

Le BST a terminé cette enquête. Le rapport a été publié le 4 août 2022.

Table des matières

    Impact sans perte de contrôle
    North Star Air Ltd.
    Douglas DC3C Basler Turbo Conversions TP67, C-FKAL
    Aéroport de Sachigo Lake (Ontario)

    Voir le rapport final

    L'événement

    Le 3 décembre 2019, un commandant de bord et un premier officier de North Star Air Ltd. (North Star Air) devaient effectuer un vol de transport de fret de jour à bord de l’aéronef Douglas DC3C Basler Turbo Conversions TP67 (DC3-TP67) (immatriculation C-FKAL, numéro de série 25285) de l’aéroport de Red Lake (CYRL) (Ontario) à destination de l’aéroport de Sachigo Lake (CZPB) (Ontario). Pendant la planification de vol, le commandant de bord a vérifié les conditions météorologiques : à 7 h (heure normale du Centre) (HNC), CYRL signalait un plafond couvert à 700 pieds au-dessus du sol (AGL). L’aéroport de Muskrat Dam (CZMD) (Ontario), situé à 30 NM au sud-est de CZPB, signalait des conditions météorologiques de vol aux instruments (IMC) avec un plafond couvert à 500 pieds AGL. Selon les prévisions à CZMD, le plafond devait monter à 1500 pieds AGL avec une fluctuation possible jusqu’à 700 pieds AGL et une visibilité réduite vers 9 h (HNC), soit l’heure d’arrivée prévue de l’aéronef à CZPB. L’aéronef a décollé de CYRL selon les règles de vol à vue (VFR) à 8 h (HNC). Les conditions météorologiques signalées à ce moment-là étaient un plafond de nuages fragmentés à 1200 pieds AGL et un couvert nuageux à 2000 pieds AGL.

    Peu après le décollage, l’aéronef a pénétré dans des couches nuageuses et est monté au-dessus de celles-ci avant d’atteindre l’altitude de croisière prévue, ce qui n’était pas conforme à la réglementation applicable aux vols VFR. Avant d’entamer la descente vers CZPB, les pilotes ont obtenu le compte rendu météorologique horaire de 8 h (HNC) à CZMD, qui était resté généralement inchangé par rapport à celui de 7 h (HNC), et ont choisi d’effectuer une approche visuelle vers la piste 10. Le commandant de bord a amorcé une descente à travers les couches nuageuses en se reportant aux instruments de vol.

    Une fois l’aéronef sorti des nuages à très basse altitude, il n’était pas en position de poursuivre l’approche visuelle prévue. Le commandant de bord a effectué des manœuvres à basse altitude afin de tenter d’atterrir, y compris un large virage de 360°, à une hauteur aussi faible que 100 pieds AGL (soit environ 400 pieds au-dessous de l’altitude minimale requise), puis a effectué une manœuvre semblable à un circuit vers la gauche, ce qui a amené l’aéronef à proximité d’un obstacle important (une tour de 150 pieds de hauteur) dans des conditions inférieures aux conditions météorologiques minimales requises pour le vol VFR. Puisque le commandant de bord n’avait pas fait un exposé au premier officier, ce dernier ignorait quelles étaient les intentions du commandant de bord et a commencé à annoncer la vitesse anémométrique et l’altitude. Lors de la dernière tentative, pendant l’étape vent arrière à basse altitude, lorsque l’aéronef se trouvait par le travers du seuil de la piste 10, le commandant de bord a amorcé un virage à gauche et a commencé une descente. Environ 10 secondes plus tard, l’aéronef a percuté le relief, les ailes presque à l’horizontale, à environ 650 pieds au sud-ouest du seuil de la piste 10. Il a glissé sur le sol sur 350 pieds en direction sud avant de s’immobiliser sur un cap sud-ouest.

    Le commandant de bord a probablement éprouvé un rétrécissement de l’attention alors qu’il effectuait une approche visuelle présentant une charge de travail élevée à très basse altitude en IMC. Cela a très probablement entraîné une descente involontaire, mais maîtrisée, qui n’a pas été détectée avant que l’aéronef n’entre en collision avec le relief.

    Les pilotes, qui n’ont pas été blessés, ont évacué l’aéronef par la fenêtre de droite du poste de pilotage. L’aéronef a été lourdement endommagé; toutefois, il n’y a pas eu d’incendie après impact.

    La radiobalise de repérage d’urgence (ELT) de 406 MHz s’est déclenchée; cependant, l’antenne fouet avait été arrachée lors de l’impact, et aucun signal n’a été détecté par le système de recherche et de sauvetage assisté par satellite. Le BST avait déjà recommandé que Transports Canada (TC) établisse de rigoureuses exigences relatives à la capacité de résister à l’écrasement pour les systèmes ELT, et TC a depuis lors mis en œuvre des règlements actualisés pour l’approbation de la conception des nouvelles ELT; toutefois, ces exigences ne s’appliquent pas aux ELT existantes comme celle qui se trouvait à bord de l’aéronef à l’étude. Si des aéronefs sont exploités avec des ELT approuvées en vertu d’anciennes normes de conception, il existe un risque que des signaux de détresse susceptibles de sauver des vies ne soient pas détectés en raison des dommages causés au système ELT lors d’un accident.

    Même si la réglementation n’exigeait pas que l’aéronef à l’étude soit muni d’un enregistreur de données de vol ou d’un enregistreur de conversations de poste de pilotage (CVR), North Star Air avait installé un CVR. Toutefois, après des réparations, le CVR a été remis dans les stocks au lieu d’être installé de nouveau dans l’aéronef à l’étude en raison d’une erreur administrative. Au moment de l’événement, cela faisait 329 jours que le CVR avait été retiré, soit plus de 200 jours au-delà de la durée maximale autorisée indiquée dans la liste d’équipement minimal. Sans le CVR, des renseignements précieux n’étaient pas disponibles pour aider l’enquête. Si les enregistrements de données de vol et de conversations de poste de pilotage ne sont pas disponibles, il est plus difficile d’évaluer avec précision la gestion des ressources de l’équipage, l’exécution et l’efficacité des procédures d’exploitation normalisées, et la gestion de la charge de travail. Par conséquent, l’absence d’enregistrements de vol à bord peut limiter la constatation de lacunes de sécurité et l’avancement de la sécurité.

    L’enquête a révélé que la sous-culture axée sur les résultats de certains pilotes d’aéronefs DC3-TP67 de North Star Air, qui mettait l’accent sur l’achèvement de la mission plutôt que sur la conformité réglementaire, a fait en sorte que des vols VFR, comme le vol à l’étude, étaient effectués en IMC. L’enquête a également établi que le commandant de bord avait l’habitude d’effectuer des vols VFR en IMC. La décision de décoller pour un vol VFR et de le poursuivre en IMC a été influencée par une perception déformée du risque résultant d’une expérience passée réussie dans des situations similaires. De plus, la compagnie était structurée de telle façon qu’aucune gestion des opérations et aucune supervision quotidienne directe n’était exercée sur les opérations aériennes et les équipages de conduite des aéronefs DC3-TP67 aux bases éloignées de la compagnie, ce qui n’est d’ailleurs pas exigé par la réglementation. L’absence de supervision directe signifiait que les pilotes de la compagnie disposaient d’une grande latitude pour prendre des décisions opérationnelles liées à la météo. Au fil du temps, une culture de non-conformité s’est développée sans être détectée par l’équipe de gestion de la compagnie. Si la supervision des équipages de conduite est minimale au sein des opérations aériennes d’une compagnie, il y a un risque que des pratiques dangereuses ou non conformes déjà décelées persistent.

    En décembre 2017, TC a informé North Star Air qu’il avait reçu des allégations au sujet d’aéronefs DC3-TP67 de la compagnie exploités à de nombreuses occasions en vol VFR en IMC. TC a fourni l’information sur ces allégations à la compagnie pour son enquête interne. En réponse, le gestionnaire des opérations a communiqué avec tous les commandants de bord d’aéronefs DC3-TP67 verbalement et par courriel pour leur rappeler l’obligation de se conformer aux règlements, mais la compagnie n’a décrit aucune mesure supplémentaire pour surveiller l’exploitation de ses aéronefs DC3-TP67 afin d’éviter toute récidive. De plus, TC a lancé une inspection de processus réactive en février 2018 qui comprenait 3 inspections en vol, qui se sont déroulées sans incident.

    North Star Air avait un système de gestion de la sécurité (SGS), même si la réglementation ne l’exigeait pas au moment des allégations. Un rapport SGS sur les dangers a été créé et saisi dans la base de données SGS de North Star Air. Toutefois, le SGS n’a pas permis de déceler les facteurs sous-jacents qui ont mené aux cas signalés d’aéronefs de la compagnie effectuant des vols VFR en IMC, et aucune mesure supplémentaire n’a été prise pour surveiller l’exploitation de ses aéronefs DC3-TP67 afin de s’assurer que les vols étaient effectués conformément à la réglementation. En outre, l’inspection de processus de novembre 2018 de TC n’a pas inclus un examen des allégations de 2017. Par conséquent, les pratiques dangereuses décelées précédemment ont persisté et ont joué un rôle direct dans l’événement à l’étude. Si TC s’en remet aux exploitants pour enquêter sur des allégations de non-conformité à la réglementation sans les surveiller, il y a un risque accru que les pratiques dangereuses qui font l’objet de l’enquête persistent.

    La gestion de la sécurité figure sur la Liste de surveillance du BST et y restera jusqu’à ce que les transporteurs qui ont un SGS démontrent à TC qu’il fonctionne bien et qu’il permet donc de cerner les dangers et de mettre en œuvre des mesures efficaces pour atténuer les risques.

    L’enquête a révélé que l’approche de TC envers la surveillance a fait en sorte que le SGS de North Star Air a été approuvé même si plusieurs éléments n’étaient pas entièrement mis en œuvre. Si TC approuve le SGS d’une compagnie sans avoir d’abord effectué un examen approfondi pour s’assurer que tous les éléments requis sont présents et efficaces, il se peut que les entreprises disposant d’un SGS n’aient pas la capacité de gérer efficacement la sécurité.

    Le BST a déjà recommandé que TC effectue des évaluations régulières des SGS pour déterminer la capacité des exploitants de gérer efficacement la sécurité. Dans sa plus récente réponse, en septembre 2021, TC a indiqué qu’il prenait des mesures pour actualiser et améliorer ses procédures de surveillance.

    La surveillance réglementaire figure également sur la Liste de surveillance du BST et y restera jusqu’à ce que TC démontre, au moyen d’évaluations des activités de surveillance, que les nouvelles procédures de surveillance permettent de déceler les non-conformités et que TC s’assure qu’une entreprise se conforme à nouveau à la réglementation en temps opportun et qu’elle est en mesure de gérer la sécurité de ses activités.

    Après l’événement, North Star Air a mis en place un programme d’assurance de la qualité des opérations aériennes. De plus, en décembre 2020, TC a effectué une inspection de processus axée sur l’évaluation et l’efficacité du plan de mesures correctives à long terme lié aux constatations relatives aux opérations aériennes de l’inspection de processus de décembre 2019. TC a conclu que les mesures correctives à long terme prises par North Star Air étaient efficaces.


    Ressources pour les médias

    Communiqué de presse

    2022-08-04

    La poursuite d’un vol avec repères visuels dans des conditions météorologiques de vol aux instruments a contribué à la collision avec le relief survenue en 2019 à Sachigo Lake (Ontario)
    Lire le communiqué de presse

    Avis de déploiement

    2019-12-04

    Le BST enquête sur la collision avec le relief survenue hier près de Sachigo Lake (Ontario), le 4 décembre 2019

    Winnipeg (Manitoba), le 4 décembre 2019 — Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) mène une enquête sur la collision avec le relief impliquant un appareil Douglas DC3C-TP67, survenue hier près de Sachigo Lake (Ontario).


    Informations d'enquête

    Carte de la région

    A19C0145

    Impact sans perte de contrôle
    North Star Air Ltd.
    Douglas DC3C Basler Turbo Conversions TP67, C-FKAL
    Aéroport de Sachigo Lake (Ontario)

    Enquêteur désigné

    Image
    Photo of Kristen McCallum

    Kristen McCallum est entrée au service du BST en 2019, à titre d’enquêteure principale régionale, Opérations, au bureau régional du Centre, à Winnipeg (Manitoba). Elle est titulaire d’une licence de pilote de ligne et compte plus de 6000 heures de vol à bord de divers avions à turbopropulseurs et à réaction.

    Avant d’entrer au service du BST, Mme McCallum a travaillé comme pilote dans l’industrie de l’aviation pendant 10 ans, puis a passé cinq ans à Transports Canada à titre d’inspectrice de la sécurité de l’aviation civile – Opérations aériennes. À Transports Canada, en plus de certifier des exploitants aériens et des pilotes, et d’être pilote vérificatrice, Mme McCallum a mené et géré des activités de surveillance réglementaire avec des équipes de surveillance de divers exploitants aériens. Mme McCallum continue de servir de mentore à de nouveaux pilotes qui commencent leur carrière.

    En 2018, Mme McCallum a été nommée au palmarès de Wings Magazine des 20 personnes âgées de moins de 40 ans ayant le mieux réussi, en reconnaissance de sa contribution à l’industrie et à la sécurité de l’aviation.


      Voir des images en haute résolution sur la page Flickr du BST.

    Catégorie de l’enquête

    Cette enquête est une enquête de catégorie 2. Ces enquêtes sont complexes et portent sur plusieurs problèmes de sécurité exigeant une analyse approfondie. Les enquêtes de catégorie 2, qui donnent souvent lieu à des recommandations, se concluent généralement en 600 jours. Pour de plus amples renseignements, consultez la Politique de classification des événements.

    Processus d'enquête du BST

    Une enquête du BST se déroule en 3 étapes :

    1. L'étape du travail sur le terrain : une équipe d'enquêteurs examine le lieu de l'événement et l'épave, interviewe les témoins et recueille toute l'information pertinente.
    2. L'étape d'examen et d'analyse : le BST examine toute la documentation liée au dossier, effectue des tests en laboratoire sur des composantes de l'épave, établit la chronologie des événements et identifie toute lacune en matière de sécurité. Lorsque le BST soupçonne ou constate des lacunes en matière de sécurité, il en informe sans tarder les organismes concernés sans attendre la parution du rapport final.
    3. L'étape de production du rapport : une version confidentielle du rapport est approuvée par le Bureau et envoyée aux personnes et organismes qui sont directement touchés par le rapport. Ceux-ci ont l'occasion de contester ou de corriger l'information qu'ils jugent erronée. Le Bureau tient compte de toutes les observations fournies avant d'approuver la version définitive du rapport, qui est ensuite publiée.

    Vous trouverez de plus amples détails à la page sur le Déroulement des enquêtes.

    Le BST est un organisme indépendant qui mène des enquêtes sur des événements de transport aérien, ferroviaire, maritime et pipelinier. Son seul but est de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n'est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales.