Enquête sur la sécurité du transport aérien A19P0142

Le BST a terminé cette enquête. Le rapport a été publié le 8 décembre 2022.

Table des matières

    Défaillance des pales du rotor principal et collision avec le relief
    E & B Helicopters Ltd.
    Bell 206B (hélicoptère), C-GEBY
    Campbell River (Colombie-Britannique)

    Voir le rapport final

    L'événement

    Le 24 septembre 2019, l’hélicoptère Bell 206B (immatriculation C-GEBY, numéro de série 3375) exploité par E & B Helicopters Ltd. effectuait un vol selon les règles de vol à vue de la base de l’exploitant à l’héliport (CCR6) de Campbell River (E & B Heli) (Colombie-Britannique) jusqu’au lac Moat (Colombie-Britannique) avec le pilote seul à bord.

    Peu après le départ, alors qu’il volait vers le sud-est en longeant la côte, l’hélicoptère s’est brièvement mis en palier à 615 pieds au-dessus du niveau de la mer (ASL), puis a amorcé une descente. Alors que l’hélicoptère se trouvait à 417 pieds ASL, il a effectué un virage en montée vers la droite en direction de la terre ferme, puis a repris sa descente. Au cours de cette descente, à 11 h 03, heure avancée du Pacifique, la maîtrise de l’hélicoptère a été perdue alors qu’il se trouvait à environ 200 pieds au-dessus du sol et l’hélicoptère s’est écrasé au sol, percutant un bâtiment et 2 véhicules. Le pilote a reçu des blessures mortelles. Personne au sol n’a été blessé. L’hélicoptère a été détruit par les forces d’impact et l’incendie qui a suivi.

    L’enquête a permis de déterminer qu’une anomalie liée à la puissance du moteur s’est probablement produite pendant que l’hélicoptère était en vol de croisière et, par conséquent, le pilote a fait demi-tour et a amorcé une descente cohérente avec une autorotation. Après l’événement, un examen visuel et microscopique des pales du rotor principal a révélé plusieurs signes de défaillance structurale en vol. À un moment donné pendant le vol, les deux pales du rotor principal se sont déformées. Même si des signes de fatigue étaient présents après l’événement, il n’a pas été possible de déterminer la mesure dans laquelle cette fatigue a contribué à la déformation. L’enquête a également permis de déterminer que dans les derniers instants du vol, probablement en raison de la déformation des pales, le régime du rotor principal a diminué au point de ne plus pouvoir soutenir le vol en autorotation, et l’hélicoptère est tombé verticalement et a percuté le sol.

    L’enquête a en outre révélé que le circuit de carburant du moteur ne présentait pas les accumulateurs et le double clapet antiretour appropriés pour l’hélicoptère Bell 206. Au cours de l’installation du moteur, le programme de contrôle de la maintenance de l’entreprise n’a pas permis de s’assurer que l’installation du moteur respectait les recommandations du fabricant, notamment avoir la configuration correcte de l’accumulateur et du double clapet antiretour pour l’appareil Bell 206. Si les procédures de maintenance ne comprennent pas un examen approfondi de toutes les instructions et de tous les bulletins connexes, il y a un risque que l’aéronef soit remis en service même s’il n’est pas en état de navigabilité.

    L’enquête s’est penchée sur la culture de sécurité de l’exploitant aérien. La culture de sécurité au sein d’une entreprise peut se résumer à « notre façon de faire ». Le pilote était le propriétaire, le gestionnaire supérieur responsable et le gestionnaire des opérations de l’entreprise, de sorte que les directives sur la façon dont le service de maintenance devait réagir à une perte partielle de puissance du moteur s’étant produite une semaine avant l’événement émanaient de lui. L’enquête a révélé que de nombreuses décisions liées aux opérations et à la maintenance étaient prises en fonction d’une opinion unique plutôt que d’un processus de validation exécuté par une hiérarchie de superviseurs indépendants et compétents. En outre, plusieurs occasions d’améliorer la sécurité du vol n’avaient pas été saisies. Si la direction de l’entreprise s’écarte régulièrement des exigences réglementaires, il existe un risque accru qu’une faible culture de sécurité se développe et ait une incidence à l’échelle de l’organisation.

    L’enquête s’est penchée sur le processus de certification des pales de rotor principal en matériau composite. Un essai de résistance à la fatigue structurale, effectué dans le cadre de l’évaluation des menaces pesant sur les éléments structuraux principaux, vise à assurer le maintien de la navigabilité d’un composant structural dont la défaillance pourrait être catastrophique. Une évaluation de la charge dynamique permet de déterminer la taille maximale des dommages à infliger à l’échantillon d’essai de résistance à la fatigue structurale. L’enquête a permis de déterminer qu’aucune évaluation dynamique n’avait été réalisée pour la certification du modèle de pale en matériau composite de Van Horne installé sur l’hélicoptère à l’étude. Si un essai de résistance à la fatigue structurale ne comprend pas d’évaluations quantitatives et de dommages simulés d’étendues probables et à des emplacements critiques déterminés à partir d’une évaluation de la charge dynamique, les limites de navigabilité qui en résultent risquent de ne pas être suffisantes pour prévenir les défaillances ou les déformations excessives de la structure.

    Les pales en matériau composite de Van Horn sont certifiées en fonction de la méthode « sans accroissement », qui est utilisée pour montrer que [traduction] « la structure, qui présente des dommages, est capable de résister à des charges répétées de valeur variable sans qu’il y ait un accroissement détectable des dommages dans un délai de remplacement donné. »Note de bas de page 1 Toutefois, le processus d’assurance de la qualité de Van Horn ne prévoit aucune inspection des défauts internes après la production ni aucun critère quant à la taille admissible des défauts internes. Par conséquent, il est possible qu’un défaut intrinsèque inconnu puisse exister après la production, qui pourrait dépasser une limite de dommages prédéfinie et nuire à l’intégrité structurale des pales de l’hélicoptère. Si les processus de fabrication des pales de rotor principal d’hélicoptère ne comprennent pas d’inspections internes visant à détecter les défauts ou de critères relatifs aux défauts admissibles, il existe un risque que les défauts qui nuisent à l’intégrité structurale ne soient pas repérés.

    Enfin, l’enquête s’est penchée sur l’approche adoptée par Transports Canada (TC) pour la gestion de la santé cardiovasculaire et l’hypertension chez les pilotes. À l’aide d’une variété de calculateurs de risque et de tous les renseignements médicaux disponibles sur le pilote dans l’événement à l’étude, un examen cardiologique indépendant a été réalisé dans le cadre de cette enquête et a permis de déterminer que le risque réel du pilote d’être victime d’un événement cardiovasculaire incapacitant soudain, évalué chaque année, dépassait 5 % par an. Ce chiffre dépasse le seuil de 2 % fixé par TC et le seuil de 1 % recommandé par les cardiologues pour les opérations à un seul pilote. Les résultats de l’autopsie ont confirmé la présence d’une coronaropathie athéroscléreuse étendue aux 4 artères coronaires principales, accompagnée d’une sténose importante (>75 %). Cette analyse a révélé que le pilote présentait bon nombre des indicateurs clés d’un événement cardiaque à haut risque. Dans l’événement à l’étude, le système d’évaluation de l’état de santé du pilote utilisé par TC n’a pas permis d’évaluer avec précision le niveau de risque présenté par le pilote. Si les documents d’orientation de TC et le rapport d’examen médical de l’aviation civile n’exigent pas que le médecin examinateur de l’aviation civile (MEAC) effectue une évaluation cardiovasculaire globale, il existe un risque accru qu’un pilote présentant des facteurs de risque cardiovasculaire élevés soit victime d’une incapacité pendant qu’il exploite un aéronef, en conséquence d’un événement médical prévisible.

    L’enquête a permis de déterminer que le pilote n’était pas franc avec ses MEAC au sujet de ses problèmes de santé faisant l’objet d’un suivi par son médecin de famille. De plus, le médecin de famille n’a pas signalé l’état de santé du pilote à TC, ce qui a contribué à la mauvaise compréhension de TC concernant l’état de santé de ce dernier. Si les pilotes ne déclarent pas tous leurs problèmes de santé aux MEAC de TC ou si les médecins de famille des pilotes ne déclarent pas les troubles médicaux susceptibles de poser un danger pour l’aviation, tel qu’exigé, TC peut ne pas être en mesure d’évaluer avec exactitude l’état de santé des pilotes, ce qui peut se traduire par un risque accru que les pilotes exploitent leur aéronef malgré des troubles médicaux diagnostiqués susceptibles de nuire à la sécurité du vol.


    Ressources pour les médias

    Communiqué de presse

    2022-12-08

    La défaillance des pales du rotor principal lors d'un atterrissage d'urgence a entraîné un accident mortel d'hélicoptère en 2019 à Campbell River (Colombie-Britannique)
    Lire le communiqué de presse

    Avis de déploiement

    2019-09-24

    Le BST déploie une équipe d'enquêteurs suite à un accident d’hélicoptère à Campbell River (Colombie-Britannique)

    Richmond (Colombie-Britannique), le 24 septembre 2019 — Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) déploie une équipe d'enquêteurs sur les lieux d’un accident d’un hélicoptère Bell 206 survenu à Campbell River (Colombie-Britannique). Le BST recueillera des informations afin d’évaluer l'événement.


    Informations d'enquête

    Carte de la région

    A19P0142

    Défaillance des pales du rotor principal et collision avec le relief
    E & B Helicopters Ltd.
    Bell 206B (hélicoptère), C-GEBY
    Campbell River (Colombie-Britannique)

    Enquêteur désigné

    Image
    Photo of Jonathan (Jon) Lee

    Jonathan (Jon) Lee est directeur régional de l’Ouest pour le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) à Edmonton (Alberta). Enquêteur sur les événements d’aéronefs depuis 19 ans, il a en outre dirigé le bureau d’Edmonton pendant huit de ces années. Il a pris part à environ 50 enquêtes. M. Lee a également eu l’occasion de participer à des enquêtes à l’étranger sur des incidents mettant en cause des produits aérospatiaux canadiens. La collaboration avec le National Transportation Safety Board (États-Unis), l’Aviation Safety Council (Taiwan), l’Aviation and Railway Accident Investigation Board (Corée du Sud) et l’Aviation Accident Investigation Board (Mongolie) a permis à M. Lee de mieux mesurer l’importance du rôle du BST dans l’aviation mondiale.

    Avant d’enquêter sur les accidents, M. Lee a accumulé de l’expérience dans l’industrie en tant que pilote au sein de divers types d’entreprises, des sociétés aériennes régionales au transport de marchandises transcontinental en passant par les évacuations sanitaires et la formation des pilotes. Il a piloté plus de 35 types d’aéronefs, et a cumulé 6500 heures de vol. Il détient toujours une licence de pilote de ligne en règle.


      Voir des images en haute résolution sur la page Flickr du BST.

    Catégorie de l’enquête

    Cette enquête est une enquête de catégorie 2. Ces enquêtes sont complexes et portent sur plusieurs problèmes de sécurité exigeant une analyse approfondie. Les enquêtes de catégorie 2, qui donnent souvent lieu à des recommandations, se concluent généralement en 600 jours. Pour de plus amples renseignements, consultez la Politique de classification des événements.

    Processus d'enquête du BST

    Une enquête du BST se déroule en 3 étapes :

    1. L'étape du travail sur le terrain : une équipe d'enquêteurs examine le lieu de l'événement et l'épave, interviewe les témoins et recueille toute l'information pertinente.
    2. L'étape d'examen et d'analyse : le BST examine toute la documentation liée au dossier, effectue des tests en laboratoire sur des composantes de l'épave, établit la chronologie des événements et identifie toute lacune en matière de sécurité. Lorsque le BST soupçonne ou constate des lacunes en matière de sécurité, il en informe sans tarder les organismes concernés sans attendre la parution du rapport final.
    3. L'étape de production du rapport : une version confidentielle du rapport est approuvée par le Bureau et envoyée aux personnes et organismes qui sont directement touchés par le rapport. Ceux-ci ont l'occasion de contester ou de corriger l'information qu'ils jugent erronée. Le Bureau tient compte de toutes les observations fournies avant d'approuver la version définitive du rapport, qui est ensuite publiée.

    Vous trouverez de plus amples détails à la page sur le Déroulement des enquêtes.

    Le BST est un organisme indépendant qui mène des enquêtes sur des événements de transport aérien, ferroviaire, maritime et pipelinier. Son seul but est de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n'est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales.