Sortie en bout de piste
de l'Airbus 340-313
du vol 358 d'Air France
à l'aéroport international de Toronto / Lester B. Pearson (Ontario)
Le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) a enquêté sur cet événement dans le but de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n’est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales. Le présent rapport n’est pas créé pour être utilisé dans le contexte d’une procédure judiciaire, disciplinaire ou autre. Voir Propriété et utilisation du contenu.
Résumé
L'Airbus A340-313 d'Air France immatriculé F-GLZQ, de numéro de série 0289, quitte Paris en France à 11 h 53, temps universel coordonné (UTC), pour effectuer le vol 358 d'Air France (AFR358), une liaison à horaire fixe à destination de Toronto (Ontario). À bord se trouvent 297 passagers et 12 membres d'équipage. Avant de partir, l'équipage obtient les prévisions météo à l'arrivée qui font état d'un risque d'orages. En approche sur Toronto, l'équipage de conduite est avisé de retards dus au mauvais temps. En approche finale, l'équipage est avisé que l'équipage d'un avion qui vient de se poser a signalé que le freinage était mauvais. Le radar météorologique d'AFR358 montre de fortes précipitations qui atteignent la piste par le nord-ouest. À quelque 200 pieds au-dessus du seuil de piste, lors de l'approche ILS (système d'atterrissage aux instruments) de la piste 24L, avec le pilote automatique et la poussée automatique débrayés, l'avion dévie de sa trajectoire pour se retrouver au-dessus de la trajectoire de descente, et la vitesse sol se met à augmenter. L'avion franchit le seuil de piste à quelque 40 pieds au-dessus de la trajectoire de descente.
Lors de l'arrondi, l'avion traverse une zone de forte pluie, et le contact visuel avec la piste est fortement réduit. Il y a de nombreux éclairs, notamment en bout de piste. L'avion touche des roues à quelque 3800 pieds au-delà du seuil de piste. L'inversion de poussée est sélectionnée environ 12,8 secondes après l'atterrissage et l'inversion maximale est sélectionnée 16,4 secondes après le toucher des roues. L'avion ne peut faire un arrêt complet sur la piste de 9000 pieds et sort en bout de piste à une vitesse sol d'environ 80 noeuds. L'avion finit sa course dans un ravin à 20 h 2 UTC (16 h 2, heure avancée de l'Est) et prend feu. Tous les passagers et membres d'équipage réussissent à évacuer l'appareil avant que le feu n'atteigne les voies d'évacuation. Deux membres d'équipage et 10 passagers sont grièvement blessés lors de l'accident et de l'évacuation.
1.0 Renseignements de base
1.1 Déroulement du vol
1.1.1 Le départ
L'Airbus A340-313 d'Air France portant l'immatriculation F-GLZQ et le numéro de série 0289 a décollé de la piste 09L de l'aéroport international de Paris-Roissy-Charles-de-Gaulle (LFPG)Note de bas de page 1, en France, à 11 h 53, temps universel coordonné(UTC)Note de bas de page 2 pour assurer le vol 358 d'Air France (AFR358), une liaison à horaire fixe à destination de l'aéroport international de Toronto/Lester B. Pearson (CYYZ) (Ontario); à bord se trouvent 297 passagers et 12 membres d'équipage. Pendant les préparatifs du vol, l'équipage de conduite a obtenu les prévisions météorologiques à l'arrivée, lesquelles faisaient état d'un risque d'orages. Compte tenu d'éventuels retards à l'arrivée dus aux conditions météorologiques, 3 tonnes supplémentaires de carburant (3000 kg) permettant de tenir 23 minutes de plus en attente à Toronto ont été embarquées.
La circulation au sol et le décollage se sont déroulés sans incident. Le commandant de bord a été désigné pilote aux commandes (PF) pour le décollage et la première moitié du vol. Le copilote devait être le PF pendant la seconde moitié du vol, y compris pendant l'approche et l'atterrissage à CYYZ. Les tâches de PF/PNF (pilote non aux commandes) avaient été interverties afin de permettre au commandant de bord d'effectuer un décollage au cours de ce vol. Les tâches ont été échangées à 16 h 17, et l'équipage est passé du pilote automatique no 1 au pilote automatique no 2.
1.1.2 La croisière
Le plan de vol renseignant sur la traversée océanique avait été déposé comme suit : route Bravo - niveau de vol 350 (FL350) au point d'entrée océanique. Montée au FL360 à la longitude de 40° ouest (40°W) et montée au FL370 à 60°W. Avant d'arriver au point d'entrée dans le réseau des routes océaniques, l'équipage de l'avion a reçu une autorisation prévoyant la route Alpha, une route plus au nord que celle prévue au plan de vol. Grâce au système embarqué de communications, d'adressage et de compte rendu (ACARS), l'équipage a reçu de la compagnie un nouveau plan de vol opérationnel tenant compte de ce changement de route. L'équipage a suivi cette route, étant entendu qu'il ne devait pas monter au-dessus du FL350 pendant la traversée de l'océan Atlantique. En fin de compte, l'avion a été autorisé à monter au FL360 à 17 h 16, altitude la plus élevée atteinte par l'avion pendant le vol.
À 13 h 51, l'équipage de conduite a reçu de l'ACARS les renseignements météorologiques demandés concernant d'éventuels aéroports de secours le long de sa route de sortie du réseau océanique au-dessus du nord-est du Canada.
À 14 h 44, l'équipage de conduite a demandé, au moyen de l'ACARS, le message d'observation météorologique régulière pour l'aviation (METAR) et la prévision d'aérodrome (TAF) du terrain de destination (CYYZ) et du terrain de dégagement, à savoir Niagara Falls (KIAG), dans l'État de New York, aux États-Unis. Les METAR de 14 h sont parvenus à l'avion mais, à la place des TAF demandés, c'est le message « TAF NIL » (aucun message TAF) qui a été reçu. Cette réponse s'expliquait par le fait que l'équipage avait envoyé la commande " TAF Short " (TAF courts) alors que ces deux aéroports ne disposaient que de « TAF Long » (TAF longs) (voir le paragraphe Section 1.6.17 - Système embarqué de communications, d'adressage et de compte rendu). Les METAR de 14 h de CYYZ et KIAG ne contenaient aucun renseignement digne de mention. Aucune activité orageuse n'était signalée à l'un ou l'autre des deux aéroports. À 16 h 8, l'équipage de conduite a reçu le message de 16 h du service automatique d'information de région terminale (ATIS) pour CYYZ, lequel faisait état d'un plafond et d'une visibilité de bonne qualité ainsi que d'un vent léger. À 16 h 17, les membres d'équipage ont échangé leurs tâches de PF et de PNF, ce qui s'est traduit par un passage du pilote automatique no 1 au pilote automatique no 2. À partir de ce moment-là, c'est le copilote qui a été le PF.
À 17 h 50, AFR358 a envoyé un message aux opérations d'Air France à CYYZ pour indiquer une heure d'arrivée prévue (ETA) de 19 h 39. À 17 h 53, il a reçu une réponse dans laquelle figuraient des renseignements sur la porte d'embarquement assignée. Le message n'indiquait pas qu'une alerte rougeNote de bas de page 3 était en vigueur à CYYZ, car informer l'équipage des alertes rouges ne faisait pas partie des procédures ou des exigences que doit respecter le chef d'escale. L'équipage connaissait bien la procédure d'alerte rouge, et des renseignements relatifs à cette procédure figuraient sur les cartes d'approche d'Air France.
À 18 h 49, l'équipage de conduite a reçu les renseignements météorologiques des METAR demandés pour KIAG, CYOW (Ottawa), le terrain de dégagement en route, et KCLE (Cleveland). Des orages étaient signalés au nord-ouest de KIAG et se déplaçaient au sud-est. Aucune activité orageuse n'était signalée à KCLE ou CYOW. Une fois de plus, l'équipage n'a pas reçu les renseignements des TAF à cause d'une demande de TAF courts. À ce moment-là, la quantité estimée de carburant restant était d'environ 12,2 tonnes. D'après les calculs de carburant effectués par l'équipage, il devait en rester 8,7 tonnes à l'arrivée. CYOW étant l'éventuel terrain de dégagement, l'équipage a calculé qu'il lui faudrait 7,3 tonnes de carburant pour se dérouter vers CYOW, ce qui lui en laissait suffisamment pour attendre 14 minutes à Toronto.
À 19 h 3, l'équipage de conduite a établi le contact initial avec le Centre de contrôle régional (ATC) de Toronto - le secteur ATC de Killaloe - et s'est enquis des conditions météorologiques à CYYZ. Le contrôleur a indiqué à l'équipage de conduite qu'il allait le tenir au courant des conditions météorologiques.
À 19 h 4, un message a été envoyé aux opérations d'Air France à CYYZ pour indiquer que, s'il devait y avoir déroutement, AFR358 irait à CYOW. Il n'a pas informé l'ATC de la demande de changement de terrain de dégagement, mais il n'était pas tenu de le faire à ce moment-là.
À 19 h 13, il y a eu une discussion entre l'équipage de conduite et l'ATC sur les renseignements relatifs au déplacement du phénomène météorologique actif.
À 19 h 15, AFR358 a reçu l'instruction de réduire sa vitesse au minimum à cause de retards à l'atterrissage à CYYZ. AFR358 a demandé et a reçu des vecteurs afin d'éviter le mauvais temps.
À 19 h 17, l'équipage de conduite a reçu les renseignements météorologiques du METAR demandé pour CYYZ, lequel contenait des renseignements sur les orages et la forte pluie.
1.1.3 La descente et l'approche
À 19 h 19, l'équipage a fait un exposé sur la procédure en cas de cisaillement du vent. Dans l'éventualité d'un cisaillement du vent, l'équipage avait prévu de faire une approche interrompue.
À 19 h 22, AFR358 a été informé que les avions commençaient à pouvoir rentrer vers CYYZ et qu'il recevrait une nouvelle autorisation à 19 h 50. Compte tenu du niveau de carburant d'AFR358, attendre jusqu'à cette heure allait être proche de la limite d'attente maximale. Alors qu'il suivait le cap 040° en éloignement de l'aéroport, AFR358 a rappelé deux fois au contrôleur qu'il continuait de s'éloigner de l'aéroport.
À 19 h 28, AFR358 a été autorisé à suivre la procédure d'arrivée Simcoe 2 de Toronto. Il restait alors 9,3 tonnes de carburant et l'avion se trouvait à 137 milles marins (nm) de sa destination.
À 19 h 30, l'équipage a passé en revue la politique/procédure de la compagnie pour savoir à quel moment déclarer une situation de carburant minimum. (Voir le paragraphe 1.17.5 - Planification des vols, pour avoir une description de cette procédure dans le cadre du vol de l'accident.)
À 19 h 33, l'information ATIS diffusée indiquait, à CYYZ, une visibilité réduite dans des orages et de la forte pluie, et des conditions météorologiques changeant rapidement. La piste 24L était la piste prévue. En outre, AFR358 a reçu par l'ACARS les messages METAR pour KCLE, CYOW et KIAG. Il a alors été décidé de prendre CYOW comme terrain de dégagement, l'avion ayant six minutes de carburant pour attendre à Toronto.
Entre 19 h 36 et 19 h 40, il y a eu un exposé sur l'approche à l'aide du système d'atterrissage aux instruments (ILS) de la piste 24L. Cet exposé n'a traité ni de la longueur de la piste ni de la procédure d'approche interrompue. Il n'y a eu aucune discussion entourant des calculs de distance sur piste mouillée ou contaminée.
À 19 h 40, AFR358 a demandé une mise à jour des conditions météorologiques pour CYYZ et a été avisé que les avions pouvaient maintenant se diriger vers CYYZ, mais il n'y a eu aucune prédiction quant à la façon dont le trafic allait s'écouler. L'équipage de conduite a demandé à être tenu au courant de l'évolution de la situation, des délais supplémentaires et de toute aggravation des conditions météorologiques. À 19 h 47, le chef de cabine principal a été informé que, en cas de déroutement, l'avion se rendrait à CYOW. Pendant cette période, quelques avions se trouvant sur la même fréquence radio ont fait savoir à l'ATC qu'ils se rendaient à leurs aéroports de dégagement.
À 19 h 49, AFR358 a demandé à s'écarter de sa route pour contourner le mauvais temps en approche, demande qui a été acceptée. À ce moment-là, la fréquence de la tour de CYYZ était celle utilisée dans le poste de pilotage, et d'autres avions se posaient.
À 19 h 53, l'ATC a demandé à l'avion numéro un en approche (AFR358 était numéro trois) quelle était la probabilité qu'il réussisse à se poser. Celui-ci a répondu que le mauvais temps se trouvait au nord et que cela ne semblait pas beau du tout. On ne sait pas si l'équipage de conduite d'AFR358 a entendu ce message. Les deux avions en avant d'AFR358 se sont posés sans encombre.
À 19 h 53, il y a eu passage en revue de la liste de vérifications de l'approche. Le mode approche a été sélectionné, puis les volets ont été sortis à la position 1. La page des systèmes a été choisie manuellement pour la faire passer de celle de la croisière à celle des disjoncteurs. Il y avait une indication de panne du phare d'empennage éclairant le logo, laquelle a été supprimée du moniteur électronique centralisé de bord (ECAM). L'avion a été établi sur le faisceau d'alignement de piste à environ 16 nm du seuil.
Pendant la descente initiale, les volets ont été mis en position 2 et le train d'atterrissage a été sorti. Il y a eu débrayage du pilote automatique, suivi d'une rentrée des aérofreins alors que l'avion passait 4000 pieds au-dessus du niveau de la mer (asl) en descente. Les volets ont été mis en position 3 puis ont été sortis complètement et, alors que l'avion se rapprochait du faisceau d'alignement de descente en passant 3000 pieds asl, le pilote automatique a été réembrayé. Le faisceau de la trajectoire de descente a été intercepté à quelque 8,7 nm du seuil, l'avion étant stabilisé et en configuration d'atterrissage.
À 19 h 58, AFR358 se trouvait en approche finale à la vitesse d'approche. L'avion précédent avait fait savoir que le freinage était mauvais; les instruments de mesure du vent de la tour ne fonctionnaient pas, car ils avaient sauté pendant l'activité orageuse; les derniers renseignements disponibles à la tour faisaient état d'un vent du 230° à 7 noeuds; enfin, il y avait des éclairs tout autour de l'aéroport. Le mode de freinage automatique a été reconfiguré afin de le faire passer de basse à moyenne intensité, puis les instructions entourant les annonces à faire en cas de remise des gaz ont été passées en revue.
À 19 h 58, l'équipage a voulu passer en revue la liste de vérifications avant atterrissage mais s'est aperçu que le mémo d'atterrissage de l'ECAM faisant partie de la liste de vérifications n'apparaissait pas encore. Bien que l'équipage puisse vérifier les éléments de l'ECAM sans que la liste de vérifications soit affichée, l'équipage a retardé le passage en revue de la liste de vérifications avant atterrissage. Les questions et réponses de la liste de vérifications avant atterrissage n'ont pas été passées en revue avant que l'avion se pose, quand bien même, dans le cadre des activités normales dans le poste pilotage, toutes les mesures qui s'imposaient quant aux articles de la liste de vérifications avaient été prises. Un Regional Jet atterrissant devant AFR358 avait signalé que le vent soufflait du 90° de 15 noeuds à 20 noeuds et que le freinage avait été mauvais jusqu'à ce que l'avion ait décéléré au-dessous de 60 noeuds.
Les conditions météorologiques pendant le reste de l'approche ont varié entre des conditions météorologiques de vol à vue (VMC) et des conditions météorologiques de vol aux instruments (IMC), l'avion évoluant dans des nuages très sombres, de la turbulence et de la forte pluie. AFR358 a établi le contact visuel avec le sol alors que l'avion se trouvait de 2 à 3 nm de la piste. À une altitude comprise entre 1000 et 1500 pieds au-dessus du sol (agl), environ la moitié de la piste était visible et, à l'occasion, l'aire de trafic était parfaitement visible en tout ou en partie. La piste était couverte d'eau, ce qui lui donnait un aspect réfléchissant comme un miroir. Il y avait des éclairs des deux côtés ainsi qu'à l'extrémité la plus éloignée de la piste. Le radar météorologique de l'avion montrait de fortes précipitations, une zone rouge atteignant la piste par le nord-est, et une autre, par le sud de la piste. L'équipage de conduite a obtenu la vitesse et la direction du vent à partir de l'écran de navigation de l'avion, lequel indiquait un vent traversier soufflant de la droite de 70 à 90° à une vitesse de 15 à 20 noeuds. Les essuie-glaces du pare-brise ont été mis sur SLOW (basse vitesse) à 4 nm de la piste et y sont demeurés pour le reste du vol.
Le pilote automatique et la poussée automatique étaient embrayés en approche. Alors qu'il était en vol automatique, l'avion était stabilisé sur les faisceaux d'alignement de piste et de descente et volait à la vitesse cible de 140 noeuds. À 20 h 1 min 18 s, au moment où l'avion passait 323 pieds agl en descente, le PF a coupé le pilote automatique et, deux secondes plus tard, il a débrayé la commande de poussée automatique. Le PF a ensuite augmenté la poussée des moteurs, la faisant passer d'environ 42 % de N1 (vitesse de rotation du compresseur moteur) à environ 82 % de N1, car il sentait que la vitesse diminuait et que l'avion s'enfonçait. L'enregistreur de données de vol (FDR) montre une légère diminution de la vitesse à ce moment-là. L'avion s'est alors mis à dévier au-dessus du faisceau d'alignement de descente. Presque au même instant, le vent a changé de direction, passant d'une composante de vent traversier à 90° jusqu'à une composante de vent arrière augmentant jusqu'à 10 noeuds.
1.1.4 L'atterrissage
L'avion a franchi le seuil de piste à environ 40 pieds au-dessus du faisceau d'alignement de descente. Il n'y a eu aucune annonce pour signaler les écarts par rapport aux performances ou à la trajectoire souhaitées de l'avion. L'appareil est entré dans une zone de forte pluie, il y avait de nombreux éclairs et le contact visuel avec la piste était fortement réduit.
Le PF a commencé l'arrondi alors que l'avion se trouvait à quelque 40 pieds au-dessus de la piste. Entre ce point et le toucher des roues, il y a eu de nombreuses, et parfois importantes, corrections en tangage faites à partir du mini-manche latéral du PF, et l'avion est resté en palier à environ 25 pieds pendant 2½ secondes. Pendant ce temps, il y a également eu des corrections régulières, et parfois importantes, en roulis faites à partir du mini-manche latéral du PF. Mises ensemble, toutes ces corrections semblent vouloir indiquer que le PF était confronté à une charge de travail importante et devait faire preuve d'une attention soutenue pour maîtriser l'avion. L'équipage a amorcé une réduction progressive de la poussée à partir d'une N1 de 76 % alors que l'avion se trouvait à 50 pieds, les manettes des gaz atteignant la position de ralenti au moment où l'avion est arrivé à quelque 20 pieds au-dessus de la piste.
L'avion a touché des roues à 20 h 1 min 53 s à quelque 3800 pieds au-delà du seuil de la piste de 9000 pieds. Au moment de l'atterrissage, le train principal droit était légèrement à gauche de l'axe de piste, et l'avion était en crabe d'environ six degrés à droite. Les déporteurs sont sortis automatiquement, comme ils étaient censés le faire, après le toucher des roues du train principal avec la piste. L'équipage de conduite a immédiatement appuyé à fond sur les freins et a essayé d'aligner l'avion dans l'axe de piste. Le ralenti poussée inverse a été commandé 12,8 secondes après le toucher des roues du train principal, et l'inversion de poussée maximale a été commandée 16,4 secondes après le toucher des roues du train principal. Le PNF n'a pas fait les annonces standard de sortie des déporteurs et des inverseurs de poussée. L'avion n'a pas pu s'immobiliser sur la longueur de piste restante. Il est sorti en bout de piste à une vitesse sol d'environ 80 noeuds et a fini sa course dans un ravin. L'avion est sorti de la piste à 20 h 2 min 19 s.
Au moment de l'atterrissage, trois ou quatre éclairs orange vif ont été remarqués à partir de la tour de contrôle au travers de la forte pluie. Le superviseur de la tour a immédiatement été avisé et l'alarme d'accident a été déclenchée. Le système « 1 Alpha » alerte les organismes d'intervention d'urgence de l'intérieur et de l'extérieur de l'aéroport qu'un accident vient de se produire à l'aéroport et il entraîne une mobilisation complète de tous les services de sauvetage et de lutte contre les incendies qui sont disponibles.
Le personnel navigant commercial (PNC) a ordonné l'évacuation dans les secondes qui ont suivi l'immobilisation de l'avion, alors que des flammes étaient visibles du côté gauche de l'appareil et que de la fumée pénétrait dans la cabine. Il n'y avait aucune alimentation électrique à bord d'AFR358 et les radios ne pouvaient pas fonctionner pour appeler la tour. Après avoir quitté son siège avec difficulté, le copilote a pris une lampe de poche et s'est rendu à l'arrière de l'avion en compagnie du chef de cabine principal et d'un des PNC afin de s'assurer qu'il n'y avait plus personne dans la cabine ou dans les toilettes. Ils sont ensuite retournés à l'avant de l'avion en empruntant l'autre ligne d'évacuation, pour confirmer que la cabine avait été entièrement évacuée, puis ils ont quitté l'avion par la porte L1, de laquelle ils ont dû sauter, car le toboggan ne s'était que partiellement déployé. Le copilote a été le dernier à sortir de l'avion.
Le commandant de bord a lui aussi essayé de voir s'il restait des passagers avant de sortir, mais il a dû rebrousser chemin à cause de la fumée pendant que le copilote et les deux autres personnes finissaient de vérifier s'il restait des passagers à bord. Le commandant de bord a quitté l'avion par la porte R1, ce qu'il a eu du mal à faire parce qu'il avait subi des blessures au dos.
Tous les passagers et membres d'équipage ont réussi à évacuer l'avion avant que le fuselage soit presque entièrement consumé par l'incendie. L'accident est survenu à 20 h 2 (16 h 2, heure locale), avant le coucher du soleil, par 43° 39′20″ N et 79° 37′27″ W.
1.2 Victimes
Èquipage | Passagers | Tiers | Total | |
---|---|---|---|---|
Tués | - | - | - | - |
Blessés graves | 2 | 10 | - | 12 |
Blessés légers/Indemnes | 10 | 287 | - | 297 |
Total | 12 | 297 | - | 309 |
Trente-trois personnes ont été transportées à l'hôpital en ambulance. De ce nombre, 21 ont été traitées pour des blessures légères et ont pu quitter l'hôpital, tandis que les 12 autres (2 membres d'équipage et 10 passagers) ont été hospitalisées en raison de la gravité de leurs blessures. Neuf personnes ont été grièvement blessées à la suite de l'impact, et trois l'ont été au cours de l'évacuation. Les deux membres d'équipage grièvement blessés à l'impact ont été en mesure de s'acquitter efficacement de leurs tâches en situation d'urgence. Les passagers blessés à l'impact étaient capables de se déplacer pendant l'évacuation. Un des PNC, qui était assis dans la même partie de l'avion que l'équipage et les passagers grièvement blessés à l'impact, s'en est tiré indemne. Le siège de ce PNC faisait face vers l'arrière, alors que les autres sièges faisaient face vers l'avant.
1.3 Dommages à l'aéronef
L'avion a été lourdement endommagé au moment de la sortie en bout de piste, avant d'être détruit par l'incendie qui a suivi l'accident.
1.4 Autres dommages
Au cours de l'accident, la piste n'a pas été endommagée, pas plus que la plate-forme anti-souffle en bout de piste. Deux feux d'extrémité de piste ont été détruits ainsi que les cinq dernières barres de feux d'approche de la piste 06R (les barres les plus proches de la piste). Voir le paragraphe 1.12 - Renseignements sur l'épave et sur l'impact.
1.5 Renseignements sur le personnel
Commandant de bord | Copilote | |
---|---|---|
Licence de pilote | Pilote de ligne | Pilote de ligne |
Date d'expiration du certificat de validation | 31 janvier 2006 | 31 août 2005 |
Heures de vol totales | 15 411 | 4834 |
Heures de vol sur type | 1788 | 2502 |
Heures de vol dans les 90 derniers jours | 100 | 173 |
Heures de vol sur type dans les 90 derniers jours | 100 | 173 |
Heures de service avant l'accident | 10,5 | 10,5 |
Période libre avant la prise de service | 12 jours | 12,5 heures |
1.5.1 Le commandant de bord
Le commandant de bord avait effectué son premier vol en solo à bord d'un planeur le 1er décembre 1963. Il était entré dans l'armée en attendant un emploi dans l'aviation civile. En août 1973, il était entré chez Touraine Air Transport (TAT), une entreprise française de transport aérien régional. Par la suite, il était entré chez Air Inter, où il a piloté l'Airbus A300. Le commandant de bord est devenu un employé d'Air France lorsqu'Air Inter a fusionné avec Air France en 1997.
Une fois chez Air France, le commandant de bord a piloté des Airbus A319, A320 et A321. Il a d'abord été commandant de bord et instructeur sur A320. Par la suite, il a demandé à passer aux vols long-courriers sur A340 et sa demande a été acceptée. Par la suite, on lui a proposé de devenir instructeur, offre qu'il a refusée car il souhaitait d'abord en apprendre davantage sur l'avion et sur les vols long-courriers. Il a obtenu sa qualification sur A340 en 2001.
Le commandant de bord était considéré comme un bon employé loyal, et ses compétences de pilote et d'instructeur ne soulevaient aucune question. Il avait la réputation d'être une personne avec qui il était facile de voler et il avait des relations de travail positives avec les PNC. Dans sa façon de traiter avec l'équipage de l'avion, il avait pour priorité d'entretenir des communications ouvertes dans un environnement professionnel détendu. Il a indiqué que la formation qu'il a reçue et la formation à Air France en général sont de première qualité.
Le commandant de bord avait passé sa dernière visite médicale aéronautique le 7 juillet 2005 et détenait un certificat médical de classe 1 valide jusqu'au 31 janvier 2006, lequel était assujetti à une restriction l'obligeant à porter des verres correcteurs en vol. Il avait subi sa dernière vérification en ligne le 8 octobre 2004. Il avait passé son dernier contrôle de compétence pilote le 19 avril 2005 et avait effectué six décollages et cinq atterrissages sur A340 au cours des 90 derniers jours. Le commandant de bord était qualifié et certifié conformément aux exigences de la compagnie et à celles de la réglementation. Le commandant de bord travaillait selon des horaires de vol réduits. (Pour plus de détails, voir le paragraphe 1.13 - Renseignements médicaux.)
Le dernier segment de vol du commandant de bord avait eu lieu les 18 et 19 juillet 2005, soit 12 jours avant le vol de l'accident. Le 18 juillet 2005, il avait agi à titre de commandant de bord du vol AFR018 entre LFPG et l'aéroport international de Newark (KEWR), dans le New Jersey, aux États-Unis. Pendant ce vol, AFR018 s'était dérouté vers Boston (KBOS), au Massachusetts, aux États-Unis, à cause de retard dus aux conditions météorologiques à KEWR. Après avoir attendu une heure au sol à KBOS, l'avion était reparti vers KEWR, où il s'était posé sans incident. Le 19 juillet 2005, le commandant de bord avait accompli le vol de retour vers LFPG.
Le commandant de bord s'était reposé et il ne s'était livré à aucune activité éprouvante physiquement pendant la fin de semaine qui avait précédé le vol de l'accident. Il avait dormi suffisamment et n'avait pas de problème de fatigue. Le jour de l'accident, le commandant de bord s'était réveillé à 6 h 30, heure locale. Il habite dans le sud de la France, et il avait pris le train jusqu'à LFPG, un trajet d'environ 2 heures et demie. Le commandant de bord était arrivé à la préparation de vol quelque 2 heures et demie avant l'heure de départ prévue.
Environ deux heures avant le départ, il avait rencontré le copilote, qu'il connaissait pour l'avoir déjà rencontré au cours d'une séance de simulateur, et il s'attendait à ce que le vol se passe bien. Le commandant de bord ne connaissait aucun PNC assigné à ce vol, mais il a immédiatement établi de bonnes relations avec le chef de cabine principal. Tout le monde semblait de bonne humeur, et le commandant de bord était satisfait des bonnes communications qui régnaient entre les membres d'équipage.
1.5.2 Le copilote
Le copilote avait été embauché chez Air France en mars 1985 à titre de PNC. En 1986 et 1987, il avait suivi un cours de formation au pilotage dans une école aux États-Unis, période après laquelle il avait continué à acquérir de l'expérience de pilotage en France en pilotant des monomoteurs et en étudiant la théorie du pilotage en vue du processus de sélection des pilotes d'Air France. Il avait accumulé 800 heures de vol et 100 heures de simulateur.
Le copilote avait entrepris sa formation de pilote chez Air France en janvier 1991, mais celle-ci avait été annulée à la fin de février 1992 à cause de la guerre du Golfe. Il avait repris son travail de PNC avant d'être promu chef de cabine principal en 1995, poste qu'il a occupé pendant un an et demi. En 1996, le programme de formation des pilotes d'Air France avait été relancé, et le copilote avait terminé sa qualification multimoteur. Il a commencé à travailler comme pilote chez Air France le 1er avril 1997. Il a été copilote sur Airbus A319/A320/A321 pendant trois ans et demi avant de recevoir sa qualification de type sur A340 le 11 septembre 2001. Il a travaillé à titre de copilote sur ce type d'aéronef pendant des vols longs-courriers jusqu'au jour de l'accident.
Air France a indiqué qu'elle considérait le copilote comme un pilote prudent et compétent qui n'avait éprouvé aucun problème en ligne ou pendant sa formation. Il avait bonne réputation auprès de la gestion et des pilotes formateurs. Bien que n'ayant encore jamais volé avec le commandant de bord du vol de l'accident, il l'avait rencontré le 18 août 2000 au cours d'une séance en simulateur alors que les deux travaillaient sur A320. À cette occasion, le commandant de bord agissait à titre de pilote vérificateur, et le copilote participait à un vol de vérification en simulateur en compagnie d'un autre commandant de bord. Ce vol de vérification avait été un échec pour les deux membres d'équipage, à cause d'un problème de rendement du commandant de bord subissant le test. Conformément à la politique d'Air France, le copilote avait suivi une séance de formation additionnelle et avait passé un vol de vérification en simulateur le 20 août 2000 en présence d'un autre pilote vérificateur. Le copilote considère avoir reçu une formation de première qualité et est d'avis que l'environnement opérationnel d'Air France est très professionnel et offre un très bon soutien.
Le copilote avait passé sa dernière visite médicale aéronautique le 8 février 2005 et détenait un certificat médical de classe 1. Il avait subi sa dernière vérification en ligne le 24 octobre 2004, et son dernier contrôle de compétence pilote, le 7 février 2005. Avant le vol de l'accident, il avait effectué 8 atterrissages et 6 décollages sur A340 dans les 90 derniers jours. Pendant cette période, il avait également exécuté 2 décollages et 2 atterrissages sur le simulateur d'A340. Le copilote était qualifié et certifié conformément aux exigences de la compagnie et à celles de la réglementation.
Avant le vol de l'accident, le dernier vol au cours duquel le copilote avait agi à titre de membre d'équipage avait été la liaison aller-retour entre LFPG et Atlanta, en Géorgie, aux États-Unis, qui avait eu lieu entre les 26 et 28 juillet 2005. Avant le vol vers Atlanta, le copilote avait été en vacances pendant trois semaines. La veille de l'accident, il avait participé à une séance de formation (à titre de copilote) pour un autre pilote d'Air France qui suivait la formation de commandant de bord.
La séance en simulateur s'était terminée vers 22 h 45, heure locale, et le copilote était arrivé à son domicile vers 23 h 30. Même s'il n'avait pas trouvé le sommeil tout de suite, il avait bien dormi. Il s'était réveillé vers 8 h 45 et se sentait bien reposé à son arrivée à LFPG le lendemain matin vers 11 h 15, heure locale. Il avait alors bénéficié de 12 heures et demie de temps libre.
1.5.3 Le personnel navigant commercial
Poste du personnel navigant commercial | Expérience du personnel navigant commercial à Air France |
---|---|
L1 (chef de cabine principal - PNC minimal) | 20 ans |
L2 (chef de cabine avant - PNC minimal) | 18 ans |
L3 (PNC minimal) | 8 ans |
L4 (chef de cabine arrière - PNC minimal) | 13 ans |
R1 (PNC supplémentaire) | 5 ans |
R2 (PNC supplémentaire) | 10 ans |
R3 (PNC minimal) | 10 ans |
R4 (PNC minimal) | 5 ans |
Siège PNC no 9 (personnel complémentaire de bord [PCB]) | 5 semaines |
Siège PNC no 10 (PNC supplémentaire) | 4 ans |
Il y avait 10 PNC à bord, à savoir neuf PNC plus une personne non encore qualifiée. Conformément à la réglementation française, tous les PNC du F-GLZQ étaient certifiés et qualifiés pour exécuter les tâches qui leur avaient été assignées.
En Europe, l'article 1.990 des Joint Aviation Requirements (JAR-OPS) exige notamment la présence d'un PNC par tranche complète ou incomplète de 50 passagers sur le même pont d'un avion. Le PNC formant le personnel minimal doit être qualifié sur le type d'avion exploité. Le vol AFR358 nécessitait 6 PNC comme personnel minimal.
Les membres du PNC minimal avaient été affectés aux postes PNC L1 (chef de cabine principal), L2 (chef de cabine), L3, L4 (chef de cabine), R3 et R4, conformément aux procédures d'exploitation de la compagnie. Ces PNC étaient responsables de la sécurité des passagers. Le PNC transporté en plus du PNC minimal exigé est appelé PNC supplémentaire et il n'est pas tenu d'être qualifié sur le type d'avion utilisé.
Sur le vol de l'accident, il y avait 3 PNC supplémentaires qui avaient été affectés aux postes R1, R2 ainsi qu'au siège PNC numéro 10 dans la cabine arrière, entre les offices 6 et 7. Le PNC supplémentaire peut effectuer des tâches reliées à la sécurité des passagers pendant un vol normal et pendant une situation d'urgence, à condition d'en avoir reçu l'ordre d'un PNC minimal.
Le PCB était à bord aux seules fins du service aux passagers. Cette personne avait commencé à travailler chez Air France le 30 juin 2005 et avait effectué quatre vols avant le vol de l'accident, lequel était son second vol sur Airbus A340. Le siège PNC numéro 9 avait été assigné au PCB, siège qui est situé à côté du siège PNC numéro 10. Dans des conditions d'exploitation normales, les PCB ne peuvent se voir confier des tâches reliées à la sécurité des passagers. Toutefois, dans une situation d'urgence, ils peuvent effectuer de telles tâches s'ils en ont reçu l'ordre d'un PNC minimal (cela est également vrai pour tout passager valide).
1.6 Renseignements sur l'aéronef
Constructeur | Airbus |
---|---|
Type et modèle | A340-313 |
Année de construction | 1999 |
Numéro de série | 0289 |
Certificat de navigabilité | Délivré le 7 septembre 1999 |
Total des heures cellules | 28 426 |
Type de moteur (nombre) | CFM International 56-5C4 (4) |
Masse maximale au décollage | 271 000 kg |
Types de carburant recommandés | Jet A, Jet A1 |
Type de carburant utilisé | Jet A1 |
1.6.1 Généralités
L'Airbus A340-313 est un avion de transport de passagers gros porteur (bicouloir). Le pont principal était divisé en trois zones distinctes : le poste de pilotage, la zone de repos de l'équipage de conduite et la cabine passagers. Une zone de repos destinée au PNC se trouvait dans la partie inférieure de l'avion.
Le poste de pilotage est conçu pour deux pilotes, en plus de posséder des sièges pouvant accueillir deux autres occupants. La zone de repos de l'équipage de conduite, un compartiment fermé, est située du côté droit de la cabine avant, immédiatement en arrière du poste de pilotage. Elle renferme deux couchettes qui peuvent être converties en sièges certifiés pour le décollage et l'atterrissage. La porte de ce compartiment se trouve à côté du couloir menant au poste de pilotage, et elle ouvre vers l'intérieur.
La cabine passagers de l'avion était configurée de manière à pouvoir recevoir 291 places passagers. Ces sièges étaient placés 6 de front en classe affaires (cabine avant), et 8 de front en classe économique (cabine centrale/arrière). Il y avait 30 sièges en classe affaires (rangées 1 à 6), 140 dans la première section de la classe économique (rangées 14 à 31) et 121 dans la deuxième section de la classe économique (rangées 32 à 48). Des coffres de rangement supérieurs étaient situés sur les parois de la cabine au-dessus des sièges. Des coffres de rangement supérieurs additionnels suspendus au plafond étaient installés au centre de la cabine. Les coffres de rangement supérieurs étaient prévus pour supporter 50 kg (110 livres). Les coffres de rangement supérieurs étaient munis de portes conçues pour se verrouiller dans les positions ouverte et fermée.
L'avion possède six portes de cabine, trois du côté gauche (L1, L2 et L4) et trois du côté droit (R1, R2 et R4), ainsi que deux portes issues de secours (L3 et R3). Les portes de la cabine sont utilisées pour permettre aux passagers et à l'équipage d'entrer dans l'avion et d'en sortir. La cabine de l'avion était dotée de huit postes PNC, un à côté de chaque porte ou porte issue de secours de la cabine. Le poste PNC situé à la porte L1 possède deux sièges. Une fois assis, les PNC doivent pouvoir atteindre certains éléments de l'équipement de secours, comme le combiné de l'interphone et du système de sonorisation cabine. Deux autres sièges PNC se trouvaient dans l'office arrière.
1.6.2 Masse et centrage de l'aéronef
Le FDR indique que la masse du carburant au moment de l'atterrissage était d'environ 7500 kg et que la masse de l'avion sans carburant était de 177 500 kg; par conséquent, la masse de l'avion à l'atterrissage s'élevait à 185 000 kg. Cette masse à l'atterrissage a été vérifiée par Airbus grâce à une étude des performances aérodynamiques de l'avion en approche. La masse maximale à l'atterrissage pour l'avion est de 190 000 kg et la masse maximale sans carburant est de 178 000 kg. Le FDR indique que le centre de gravité de l'avion au moment de l'atterrissage se situait à 29,8 % de la corde aérodynamique moyenne (MAC), chiffre qui se situe à peu près au milieu des limites permises.
1.6.3 Vitesses d'atterrissage
Pour un atterrissage à une masse de 185 tonnes, pleins volets, la vitesse certifiée de survol du seuil de piste (VREF) est de 135 KIAS (vitesse indiquée en noeuds) et la vitesse d'approche (VAPP ou vitesse cible) est de 140 KIAS.
1.6.4 Calculs de la distance d'atterrissage
Les renseignements qui figurent dans les trois tableaux suivants sont tirés du manuel d'exploitationNote de bas de page 4 (MANEX) d'Air France. La distance d'atterrissage calculée sur une piste recouverte de moins de 3 mm d'eau (piste mouillée), en prenant l'altitude de l'aéroport de Toronto (CYYZ) et en supposant un freinage automatique réglé sur basse intensité, un vent nul, pleins volets, et aucune utilisation de l'inversion de poussée, s'élève à 2196 m (7203 pieds).
Réglage du freinage automatique | Piste sèche | Piste mouillée |
---|---|---|
Basse intensité | 2185 m (7167 pi) | 2196 m (7203 pi) |
Moyenne intensité | 1652 m (5419 pi) | 1777 m (5829 pi) |
Tiré du MANEX TU 04.01.64. 14 A340-313 Distance d'atterrissage pour Toronto (CYYZ), pleins volets Altitude-pression de 500 pieds asl - Vent nul - VREF + 5
D'après le MANEX TU 04.01.64. 14, la distance d'atterrissage augmente de 21 % en présence d'un vent arrière de 10 noeuds. Le tableau présenté ci-dessous montre les distances d'atterrissage corrigées pour tenir compte d'un vent arrière de 10 noeuds. En supposant un vent arrière de 10 noeuds, une piste mouillée, un freinage automatique réglé sur basse intensité et aucune utilisation de l'inversion de poussée, la distance d'atterrissage calculée s'élève à 2657 m (8715 pieds).
Réglage du freinage automatique | Piste sèche | Piste mouillée |
---|---|---|
Basse intensité | 2644 m (8672 pi) | 2657 m (8715 pi) |
Moyenne intensité | 1999 m (6557 pi) | 2150 m (7053 pi) |
Tir du MANEX TU 04.01.64. 14 A340-313 Distance d'atterrissage pour Toronto (CYYZ), pleins volets Altitude-pression de 500pieds asl - Vent arrire de 10 noeuds - VREF+5
La distance d'atterrissage calculéeNote de bas de page 5 sur la piste 24L de CYYZ dans les conditions qui prévalaient au moment de l'atterrissage et en supposant la présence de ¼ de pouce d'eau (environ 6 à 7 mm) sur la piste (contaminée) ainsi qu'un freinage au pied, est résumée dans le tableau qui suit.
Vent | Sans les inverseurs | Avec les 4 inverseurs |
---|---|---|
nul | 2670 m (8780 pi) | 2403 m (7883 pi) |
5 noeuds de vent arrière | 3071 m (10 075 pi) | 2764 m (9068 pi) |
10 noeuds de vent arrière | 3471 m (11 388 pi) | 3124 m (10 249 pi) |
Tir du MANEX TU 04.02.50. 13 A340-313 Distance d'atterrissage pour Toronto (CYYZ), pleins volets Altitude-pression de 500pieds asl - Freinage au pied
Le manuel de formation des membres d'équipage de conduite (FCTM) d'Airbus indique que le fait de survoler le seuil de piste à une hauteur de 100 pieds plutôt que de 50 pieds fait augmenter la distance totale d'atterrissage d'environ 950 pieds (300 m).
1.6.5 Performances d'arrêt
Il a été demandé à Airbus de fournir des renseignements sur les temps normaux de déploiement des inverseurs de poussée et des calculs sur la distance d'arrêt de l'A340-313 pour un ensemble de variables dans les performances réelles et attendues de l'avion. Dans le calcul de la distance d'arrêt, le manuel de vol (AFM) de l'A340-313 prévoit 5,1 secondes entre le toucher des roues du train principal et la sélection des inverseurs de poussée, et 1 seconde pour leur déploiement.
Tout en tenant compte des conditions environnementales qui régnaient sur la piste 24L au moment de l'atterrissage et de la véritable configuration d'AFR358, les distances d'atterrissage ont été calculées à partir des renseignements enregistrés par le FDR. Pour une vitesse réelle de toucher des roues de 143 KIAS, avec un vent arrière de 10 noeuds et un temps réel de déploiement des inverseurs de poussée de 16,4 secondes, l'avion aurait dû s'immobiliser 6674 pieds (2034 m) après le toucher des roues. Si l'inversion de poussée maximale avait été sélectionnée conformément au manuel de vol, la distance de piste nécessaire aurait été de 5938 pieds (1809 m). Si l'inversion de poussée maximale avait été sélectionnée après le toucher des roues conformément au manuel de vol et que l'avion avait touché des roues à la vitesse recommandée, la distance de piste nécessaire aurait été de 5574 pieds (1699 m). Comme cela a été dit au paragraphe 1.1.4, l'avion a touché des roues à 3800 pieds au-delà du seuil de la piste longue de 9000 pieds.
1.6.6 Sièges et dispositifs de retenue de l'avion
Les sièges du poste de pilotage étaient certifiés en vertu de l'article 25.561 des JAR. Un examen des documents de conception des sièges du poste de pilotage a montré que lesdits sièges dépassaient les exigences minimales de l'article 25.561 des JAR. Les deux sièges du poste de pilotage et celui du troisième occupant étaient montés sur une colonne. Le siège du quatrième occupant consistait en un strapontin fixé à la cloison arrière située du côté droit du poste de pilotage. Tous les sièges du poste de pilotage étaient équipés d'un baudrier quatre points.
Les sièges passagers et les sièges PNC étaient certifiés en vertu des articles 25.561 et 25.562 des JAR (prévoyant respectivement 9 g et 16 g horizontalement). Les sièges passagers étaient munis d'une ceinture sous-abdominale. Les sièges PNC et les sièges installés dans la zone de repos PNC étaient munis d'un baudrier trois points. Conformément à l'OPS 1.730 (sous-partie K) des JAR-OPS, des ceintures à boucle supplémentaire étaient fournies pour les enfants en bas âge.
L'amendement 13 des JAR 25, en vigueur le 5 octobre 1989, servait de base de certification de l'avion F-GLZQ. La fiche de données du certificat de type de Transports Canada identifie la base de certification de l'A340-300 comme étant le chapitre 525 du Manuel de navigabilité, modificatif 1, en date de janvier 1987 (ce qui équivaut aux JAR 25, amendement 12), plus des exigences additionnelles qu'Airbus a choisi de respecter. Cette dernière incluait les JAR 25, amendement 13, où était apparu l'article 25.562 applicable aux sièges passagers qui traite des conditions dynamiques pendant un atterrissage d'urgence.
Transports Canada a indiqué que l'actuel Règlement de l'aviation canadien (RAC) exige que tous les sièges d'aéronef respectent les exigences de l'article 525.562, Conditions dynamiques pendant un atterrissage d'urgence. Les normes de certification de l'Agence Européenne de la Sécurité Aérienne (AESA) exigent que les sièges passagers respectent les exigences de l'article 25.562 de ces normes. Bien que l'article 525.562 du RAC ne soit pas harmonisé avec l'article 25.562 des normes de certification de l'AESA, les exigences de l'article 525.562 du RAC s'appliquent actuellement à toute nouvelle demande d'utilisation d'un aéronef au Canada. À l'heure actuelle, rien n'est prévu pour harmoniser l'article 25.562 des normes de certification de l'AESA avec l'article 525.562 du RAC.
1.6.7 Issues de secours
La cabine passagers était dotée de huit portes (voir le paragraphe 1.6.1) pouvant servir d'issues de secours. Les six portes de la cabine (L1, L2, L4, R1, R2 et R4) sont des issues de secours de type A, tandis que les deux portes issues de secours (L3 et R3) sont des issues de secours de type I. La construction et le fonctionnement des portes de type A et de type I étaient similaires. Les portes de ces deux types étaient conçues pour être ouvertes aussi bien de l'intérieur que de l'extérieur. Les portes ont un très léger mouvement d'ouverture vers l'intérieur, puis elles s'ouvrent vers le haut, l'extérieur et l'avant. Dans le manuel d'exploitation d'Airbus pour les PNC, les instructions d'ouverture des portes depuis l'intérieur précisent que, pour ouvrir une porte en situation normale, il faut relever complètement la poignée de la porte, ce qui a pour effet de dégager deux verrous en haut de la porte et, ainsi, de la déverrouiller.
Chaque porte est munie d'un amortisseur actionneur (ou dispositif d'assistance de porte) composé d'un amortisseur et d'un vérin servant en situation d'urgence. L'amortisseur limite le déplacement de la porte en situation normale, notamment dans des conditions venteuses. En cas d'utilisation en situation d'urgence, il agit comme un dispositif de commande d'ouverture automatique de la porte. L'amortisseur et le vérin servant en situation d'urgence sont actionnés au moyen d'azote comprimé stocké dans une bouteille munie d'un manomètre (communément appelé « pression porte »). L'azote comprimé est expulsé au moyen d'un actionneur commandé par le levier d'armement du toboggan. Une fois le levier d'armement du toboggan en position ARMED, comme c'est le cas à l'atterrissage, et que la poignée de la porte est relevée d'environ 90°, le dispositif d'assistance entre en action et fait ouvrir la porte automatiquement. Chaque porte issue de secours possède un hublot d'observation muni d'une lentille prismatique.
1.6.8 Dispositifs d'évacuation d'urgence
L'avion était équipé de huit dispositifs d'évacuation prévus pour faciliter une sortie rapide des occupants en cas d'urgence : 2 toboggans à une ligne d'évacuation aux issues de secours L3 et R3, et 6 toboggans-radeauxNote de bas de page 6 à deux lignes d'évacuation aux issues de secours L1, L2, L4, R1, R2 et R4. Les toboggans du F-GLZQ étaient repliés dans des logements situés dans la partie inférieure de chaque porte de cabine et avaient été fabriqués par la société Goodrich.
Il y a déploiement et gonflage automatiques du dispositif lorsque la porte est ouverte en mode ARMED. Quand la porte commence à s'ouvrir, deux cordons de la goupille de déverrouillage libèrent le paquetage de la porte et le mouvement vers l'extérieur de la porte permet d'extraire le toboggan; tandis que le paquetage sort, le toboggan tombe au-dessous du seuil de la porte et un cordon de mise à feu entre en action. Le toboggan est alors alimenté en gaz primaire et commence à se gonfler. Au cas où le gonflage ne débuterait pas automatiquement, chaque toboggan est muni d'une poignée rouge de gonflage manuel. Une attache intermédiaire limite le déploiement du toboggan à environ un tiers de sa longueur totale, le but étant de l'empêcher de se gonfler sous le fuselage. Une fois le toboggan suffisamment pressurisé, cette attache se libère et le toboggan est projeté vers l'extérieur et vers le bas afin d'atteindre le sol. D'après les normes de certification, la séquence complète de déploiement, de l'ouverture de la porte jusqu'au gonflage complet du toboggan, ne doit pas prendre plus de 16 secondes. Toutefois, sur l'A340, la durée typique d'ouverture de la porte et de gonflage du toboggan est de 8 secondes. Rien n'indique que les normes de certification pertinentes n'aient pas été respectées au cours du présent accident, exception faite du problème ayant affecté la porte L2.
1.6.9 Système d'alarme d'évacuation
L'avion était équipé d'un système d'alarme d'évacuation, lequel n'était toutefois pas obligatoire en vertu de la réglementation. Sur un panneau supérieur du poste de pilotage se trouvaient :
- un bouton-poussoir EVAC ON qui, une fois enfoncé, fait allumer des voyants clignotants rouges « EVAC » dans le poste de pilotage et dans la cabine, en plus de déclencher des avertisseurs sonores à chaque porte de la cabine, signalant au PNC qu'il doit commencer à faire évacuer les passagers;
- un bouton-poussoir HORN OFF qui, une fois enfoncé, coupe les avertisseurs sonores;
- un commutateur à bascule à deux positions - CAPT et CAPT & PURSER. Lorsque le commutateur est sur CAPT, l'alarme ne peut être déclenchée que du poste de pilotage; lorsqu'il est sur CAPT & PURSER, l'alarme peut être déclenchée soit du poste de pilotage, soit de la cabine.
Le panneau PNC situé dans la cabine avant était muni d'un bouton-poussoir EVAC/CMD. Lorsque celui-ci est enfoncé, des voyants clignotants rouges EVAC s'allument dans le poste de pilotage afin de signaler une demande d'évacuation provenant de la cabine. L'alimentation de secours du système d'alarme d'évacuation provient de batteries de secours logées dans le compartiment avionique.
1.6.10 Éclairage d'urgence de la cabine
L'avion est équipé d'un système d'éclairage d'urgence qui peut être commandé manuellement du poste de pilotage et du panneau PNC. Le commutateur à bascule EMER EXIT LT du poste de pilotage a trois positions : ON - l'éclairage d'urgence, les panneaux sortie/exit et le chemin lumineux au plancher s'allument; OFF; et ARM - l'éclairage d'urgence de la cabine s'allume en cas de panne de l'alimentation électrique normale de l'avion ou si le bouton-poussoir EVAC ON est activé.
Le commutateur EMER EXIT LT est normalement en position armée et il est muni d'un verrou mécanique qui le protège de toute utilisation depuis la position ARM ou ON. Le tableau PNC est doté d'un bouton-poussoir EMER qui, une fois enfoncé, fait allumer l'éclairage d'urgence, les panneaux sortie/exit et le chemin lumineux au plancher. Le bouton-poussoir EMER possède un cache protecteur qui en empêche toute utilisation accidentelle. L'éclairage d'urgence comprend huit lumières (une au-dessus de chaque cadre de porte marquée sortie/exit), neuf panneaux sortie/exit situés au plafond dans les zones où se trouvent les issues, et 25 plafonniers d'urgence le long des couloirs et d'un chemin lumineux au plancher. Il y a également des indications sortie/exit et des lumières à basse intensité situées près de chaque issue au niveau du plancher et sous les sièges des passagers ainsi que des bandes lumineuses électroluminescentes le long des couloirs de la cabine.
Huit blocs d'alimentation d'urgence (EPSU) installés au plafond dans la zone où se trouve chaque issue alimentent la totalité des enseignes lumineuses sortie/exit et le chemin lumineux au plancher. De plus, les toboggans de l'avion sont munis d'un système d'éclairage intégré. Les lumières des toboggans s'allument automatiquement au moment du déploiement des toboggans. Ce sont ces blocs qui fournissent l'alimentation électrique aux lumières des toboggans.
1.6.11 Système de sonorisation cabine
Conformément à l'OPS 1.695 (sous-partie K) des JAR-OPS, l'avion est équipé d'un système de sonorisation cabine, lequel a été certifié en vertu des exigences de la spécification 15 de la Civil Aviation Authority (CAA) du Royaume-Uni. Si le circuit électrique de l'avion cesse d'alimenter le système de sonorisation cabine, ce dernier est alors alimenté par deux batteries logées dans le compartiment avionique.
1.6.12 Équipement de secours
La cabine était dotée d'un équipement de secours portatif conforme aux exigences réglementaires applicables. Le schéma de l'Annexe D contient une description de cet équipement et précise les divers endroits où il se trouvait dans l'avion.
1.6.13 Système de vol automatique
L'A340 est équipé d'un système de guidage et de gestion de vol (FMGS) qui aide l'équipage dans ses tâches de navigation, de planification de vol et de guidage en vol dans tous les modes de vol, y compris en atterrissage automatique. Les pilotes peuvent dialoguer avec le système grâce à l'un ou l'autre des deux moyens suivants :
- en utilisant l'un des trois blocs de commande et d'affichage multifonctions (MCDU) se trouvant sur la console située entre les deux pilotes : le pilote se sert de cette interface pour entrer les renseignements sur la route préétablie dont se sert le FMGS pour produire les profils vertical, latéral et de vitesse que l'avion va suivre en vol. Lorsque l'avion vole en suivant de tels profils, il est en mode géré;
- en utilisant le module de commande de vol (FCU) se trouvant au centre de l'auvent situé entre les deux pilotes. Les pilotes entrent dans le FCU une vitesse, un cap, une altitude ou une vitesse verticale cibles. Une fois le dispositif embrayé, les valeurs entrées dans le FCU deviennent prioritaires, et on dit alors que l'avion vole en mode sélectionné.
Pour passer du guidage géré au guidage sélectionné, le pilote doit entrer la valeur cible choisie dans la fenêtre appropriée et tirer sur le sélecteur. Pour revenir en guidage géré, le pilote doit pousser sur le sélecteur. Le système assure le guidage en vol au moyen du pilote automatique, de la commande de poussée automatique et des directeurs de vol. Les renseignements sont présentés aux pilotes par le FMGS grâce aux deux écrans du système d'instruments de vol éélectroniques (EFIS), à savoir l'écran de vol principal (PFD) et l'écran de navigation. Il est possible de régler le mode de présentation des renseignements par l'un ou l'autre des panneaux de commande de l'EFIS se trouvant des côtés gauche et droit de l'auvent. L'annonciateur de mode de vol (FMA), lequel est situé en haut des deux PFD, indique la situation du système de vol automatique.
Pendant une approche ILS, les modes pilote automatique et/ou directeur de vol qui sont employés sont les suivants : G/S* (capture du signal d'alignement de descente) et G/S (suivi de la trajectoire de descente) pour le guidage vertical, et LOC* (capture du signal d'alignement de piste) et LOC (suivi de la trajectoire d'alignement de piste) pour le guidage horizontal.
Le pilote sélectionne ces modes en appuyant sur le bouton APPR du FCU. Une fois le bouton enfoncé, les modes sont embrayés en séquence si toutes les conditions d'embrayage du mode sont respectées. En vertu de la procédure d'embrayage du mode APPR utilisée par Air France, le pilote doit embrayer le mode LOC et évaluer la capture du signal d'alignement de descente avant d'embrayer le mode APPR, le but étant d'éviter la capture d'un faux signal de trajectoire de descente.
En mode vitesse gérée, la vitesse indiquée ciblée est variable en approche. Elle est calculée par le FMGS à l'aide de la fonction « ground speed min » (vitesse sol minimale) et elle apparaît au PFD en magenta. Le calcul, par le FMGS, de la vitesse sol minimale permet de connaître le niveau minimal d'énergie qu'aura l'avion au moment du toucher des roues (d'après la vitesse d'atterrissage souhaitée et le vent signalé par la tour, lequel est entré par l'équipage de conduite). La vitesse indiquée ciblée est recalculée continuellement en approche afin que la vitesse de l'avion demeure à la vitesse sol minimale ou au-dessus. La vitesse sol minimale n'est pas présentée à l'équipage; seule la vitesse indiquée ciblée est affichée au PFD.
Si la poussée automatique est embrayée en mode de vitesse gérée, elle va maintenir l'avion à la vitesse indiquée ciblée. Si cette même fonction est débrayée, l'équipage devra maintenir cette vitesse cible manuellement. Pour embrayer le mode de remise des gaz, il faut avancer au moins une manette des gaz jusqu'au cran décollage et remise des gaz (TOGA). Le mode de remise des gaz combine le système de référence vitesse (SRS) pour le guidage vertical et le mode GA TRK (trajectoire de remise des gaz) pour le guidage latéral.
Au cours d'une approche de catégorie I, la hauteur minimale de débrayage du pilote automatique est fixée à 160 pieds agl. Il est permis de laisser le pilote automatique embrayé au-dessous de 160 pieds en approche, pourvu que certaines précautions indiquées dans le manuel d'exploitation de l'équipage de conduite (FCOM) de l'Airbus A340-313 à propos de l'atterrissage automatique en approche de catégorie I aient été prises. Si ces critères sont respectés mais que l'équipage décide de faire une approche automatique sans atterrissage automatique, le paragraphe 3.01.22 du FCOM d'Airbus exige de débrayer le pilote automatique au plus tard à 80 pieds agl.
Air France n'a pas de directives spécifiques sur le moment de débrayer le pilote automatique pendant l'exécution d'une approche de catégorie I. Les pilotes d'Air France consultés dans le cadre de l'enquête ont indiqué qu'ils préféraient débrayer le pilote automatique bien au-dessus de la hauteur de décision à l'approche pour mieux sentir l'avion. Airbus ne fait aucune recommandation sur le moment propice au débrayage du pilote automatique en approche, et même si l'avionneur a sondé divers pilotes et exploitants pour voir si une préférence générale se dégageait, les réponses étaient variées. Les exploitants d'avions Airbus sondés pendant l'enquête ont exprimé une grande confiance dans le système de vol automatique et ils s'attendent à ce que leurs pilotes laissent le pilote automatique embrayé le plus longtemps possible.
Pour débrayer la poussée automatique à l'atterrissage, la méthode ordinaire consiste à amener les manettes des gaz au cran de ralenti. Dans les autres phases de vol, la façon normale de procéder consiste à appuyer sur la commande de débrayage qui se trouve sur les manettes des gaz. En cas d'utilisation de cette dernière méthode, le réglage de la poussée va changer afin de correspondre au réglage actuel des manettes des gaz. Par conséquent, le pilote devrait d'abord amener les manettes des gaz au réglage de poussée actuel (indiqué par un cercle blanc sur l'affichage des paramètres moteur) avant d'appuyer sur la commande de débrayage.
Airbus recommande d'utiliser la poussée automatique en approche et à l'atterrissage. Toutefois, si le pilote a l'intention d'atterrir en réglant la poussée manuellement, le FCOM recommande de débrayer la poussée automatique à 1000 pieds agl en approche finale. L'utilisation de la poussée automatique est autorisée avec ou sans le pilote automatique ou le directeur de vol en mode géré ou sélectionné, et la poussée automatique peut être laissée armée pendant tout le vol. Si elle n'est pas coupée, elle va se débrayer lorsque l'équipage de conduite va mettre les manettes des gaz au cran de ralenti au moment de l'arrondi et se réembrayer si l'équipage met les manettes des gaz au cran TOGA. Air France ne précise aucune hauteur minimale à laquelle couper la poussée automatique.
1.6.14 Gestion et surveillance du carburant
Deux calculateurs de surveillance du carburant aident l'équipage à gérer la charge et les transferts de carburant ainsi que les autres tâches connexes. La situation du carburant de l'avion est présentée à l'équipage sur la page de l'ECAM consacrée au carburant. Cette page donne une représentation schématique du circuit carburant et fournit les renseignements suivants à l'équipage : carburant consommé par chaque moteur et carburant total consommé; carburant disponible dans chaque réservoir; carburant total disponible; masse totale de l'avion et centre de gravité; situation des robinets et des pompes carburant.
La quantité totale de carburant à bord est également affichée sur la page des moteurs de l'ECAM. De plus, des renseignements additionnels sont disponibles à la page des prévisions de carburant des MCDU, y compris la quantité prévue de carburant à destination et au terrain de dégagement sélectionné. Les renseignements affichés concernant le présent accident sont les suivants :
- Ligne 1 : Affiche l'heure d'arrivée prévue et le carburant restant à la destination prévue.
- Ligne 2 : Affiche les mêmes prévisions, mais pour le terrain de dégagement sélectionné.
- Ligne 3 : Affiche le carburant actuel à bord.
- Ligne 4 : Affiche les réserves en route en quantité et en pourcentage du carburant restant pour le vol. En vol, cette ligne affiche les valeurs sous la forme d'un pourcentage du carburant restant pour aller de la position actuelle jusqu'à destination (autrement dit, cela permet de savoir si l'avion va avoir besoin de ses réserves en route pour atteindre sa destination).
- Ligne 5 : Affiche le carburant final et le temps d'attente possible à l'arrivée au terrain de dégagement.
- Ligne 6 : Affiche le carburant et le temps d'attente possible à l'arrivée à destination (avant de devoir se dérouter).
Les calculs sont effectués en utilisant le terrain de dégagement sélectionné dans le plan de vol actif. Les modifications au terrain de dégagement actif sont apportées dans un plan de vol temporaire qui peut être sélectionné comme étant le plan de vol actif.
1.6.15 Radar météorologique
L'A340 est équipé d'un radar météorologique possédant deux circuits distincts, dont un seul fonctionne à la fois. Le panneau de commande du radar se trouve sur la console située entre les deux pilotes, et il permet de choisir lequel des deux circuits utiliser, en plus d'en permettre divers réglages (gain, inclinaison, mode, arrêt ou marche de la fonction de suppression du sol, arrêt ou marche de la fonction de prédiction du cisaillement du vent).
Les échos du radar météorologique sont affichés sur l'écran de navigation. La portée de l'écran de navigation de chaque pilote peut être réglée de façon indépendante à l'aide d'un bouton de commande situé sur l'auvent. Après l'accident, le bouton de réglage de la portée de l'écran de navigation du commandant de bord et celui du copilote ont été trouvés à un réglage de 10 nm, la portée la plus basse possible.
La représentation du mauvais temps sur l'écran de navigation se fonde sur l'intensité des précipitations détectées par le radar. L'intensité la plus faible des précipitations (aucune précipitation) apparaît en noir (aucune image), les couleurs verte et jaune montrant des zones de précipitations de plus en plus intenses. Les zones où l'intensité des précipitations est la plus élevée (supérieure à 12 mm/heure) apparaissent en rouge. Les zones de turbulence présentes dans les zones de précipitations et situées jusqu'à 40 nm de l'avion apparaissent en magenta.
Les radars météorologiques des avions ne détectent que la pluie, la grêle fondante et la turbulence associés aux précipitations. Ils ne détecteront pas les nuages, le brouillard, le vent, la turbulence non associée à des précipitations, la neige, la glace ni la grêle d'un diamètre inférieure à 3 cm, le cisaillement du vent non associé à des précipitations, pas plus que les éclairs. Compte tenu de ces limites, en plus des limites comme l'atténuation (quand le radar est incapable de détecter l'humidité au-delà d'une zone de précipitations denses), le radar météorologique ne devrait être considéré que comme un simple outil servant à éviter le mauvais temps.
1.6.16 Détection et prédiction du cisaillement du vent
En phase d'approche et d'atterrissage, le système de détection du cisaillement du vent permet d'avertir de la présence d'une zone de cisaillement du vent entre des altitudes radar de 1500 et de 50 pieds, à condition que les becs de bord d'attaque et les volets soient au moins en CONF 1. S'il est en marche, le système va générer un signal dès que le niveau d'énergie (basé sur l'angle d'attaque) diminue au-dessous d'une valeur minimale. Une fois généré, ce signal va déclencher une alarme visuelle et une alarme sonore. Le message « WINDSHEAR » (cisaillement du vent) va apparaître en rouge pendant au moins 15 secondes sur les deux PFD, et le mot « Windshear » va être répété trois fois dans les haut-parleurs du poste de pilotage.
L'avion est également équipé d'un système de prédiction du cisaillement du vent qui, à partir de renseignements fournis par le radar météorologique, avertit de la présence d'un cisaillement du vent plus loin en avant. Ce système est actif sous une altitude radar de 2300 pieds, bien que, pendant la phase d'atterrissage, la totalité des avertissements et des alertes de cisaillement du vent soit neutralisée au-dessous d'une altitude radar de 50 pieds. Si un cisaillement du vent est détecté entre 50 et 1500 pieds, une alarme, une alerte ou un avis va être généré, en fonction de l'altitude de l'avion et de sa distance de la zone où un cisaillement du vent est suspecté. Les indications propres à ces divers messages sont les suivantes :
- une alarme se compose d'une alarme vocale indiquant : « Go around windshear ahead » (remettre les gaz, cisaillement du vent en avant), d'une indication « W/S ahead » (cisaillement du vent en avant) de couleur rouge sur le PFD et d'une indication de cisaillement du vent sur l'écran de navigation.
- une alerte se compose d'un message vocal indiquant « Monitor radar display » (surveiller l'écran radar), d'une indication « W/S ahead » (cisaillement du vent en avant) de couleur ambre sur le PFD et d'une indication de cisaillement du vent sur l'écran de navigation.
- un avis se compose uniquement d'une indication de cisaillement du vent sur l'écran de navigation.
Au cours de l'approche et de l'atterrissage qui ont mené à l'accident, ni le système de détection de cisaillement du vent ni celui de prévision du cisaillement du vent n'ont généré d'indications de cisaillement du vent. L'écran de navigation donne aux pilotes des renseignements sur la direction et la vitesse du vent. Ces renseignements sont également enregistrés par le FDR. Le vent n'est enregistré que toutes les quatre secondes, avec une précision de ± 5 noeuds et de ± 10°.
1.6.17 Système embarqué de communications, d'adressage et de compte rendu (ACARS)
Les avions d'Air France possèdent plusieurs dispositifs leur permettant de communiquer en phonie et par liaison de données avec des stations au sol, à savoir par radio très haute fréquence (VHF), par radio haute fréquence (HF), par ACARS et, sur certains avions comme l'avion accidenté, par système de communications par satellite.
L'ACARS permet de transmettre et de recevoir des messages par liaison de données qui sont envoyés par radio VHF ou par satellite, selon l'endroit où se trouve l'avion et en fonction de l'équipement dont il dispose. Parmi les messages couramment envoyés par l'ACARS figurent des renseignements météorologiques, des renseignements sur les services aux passagers échangés avec la compagnie, des renseignements intéressant la maintenance envoyés à la compagnie (automatiquement ou manuellement), des autorisations avant le départ à certains aérodromes, des autorisations océaniques et des messages ATIS.
L'équipage dialogue avec l'ACARS grâce aux écrans du MCDU. La météo est l'une des options du menu principal. Le fait de choisir le bouton WEATHER amène l'utilisateur à la page par défaut de demande de renseignements météorologiques à partir de laquelle il peut demander les METAR et les TAF courts de trois stations. Si l'utilisateur veut des renseignements autres que les METAR et les TAF courts, il doit sélectionner le bouton WEATHER TYPE de cette page. L'utilisateur va alors être amené à une page où figurent six options de demande de renseignements météorologiques, à savoir : METAR, TAF ShortNote de bas de page 7, TAF Long, METAR + TAF Short (valeur par défaut de la page précédente), RCNI.NOTAMS (RCNI = NOTAM d'Air France), SIGMET. Le fait de sélectionner l'un de ces boutons va amener l'utilisateur à la page où il pourra choisir le genre de renseignements souhaités, et ce pour un maximum de trois stations.
Il est possible de demander l'information ATIS à partir de l'ACARS. Une remarque figurant dans le manuel d'exploitation indique que le fait d'obtenir l'information ATIS par liaison de données ne libère pas l'équipage de l'obligation d'écouter l'information ATIS. Il est possible d'obtenir l'information ATIS à partir des pages PRE-FLIGHT, ENROUTE ou REQUEST. Différents types de messages ATIS peuvent être demandés, comme ceux concernant le départ, la croisière ou l'arrivée. En cas de demande d'un ATIS d'arrivée, il est possible de sélectionner une option supplémentaire permettant d'obtenir une mise à jour automatique à chaque fois qu'un nouvel ATIS est diffusé.
1.6.18 Déporteurs sol
Six déporteurs sur chaque aile font office de déporteurs sol. On les arme en poussant sur le levier des déporteurs pour le mettre en position armée. Une fois armés, les déporteurs vont sortir automatiquement pendant un décollage interrompu ou pendant un atterrissage, à condition que les amortisseurs des deux trains principaux soient comprimés et que les quatre moteurs soient au ralenti. S'ils ne sont pas armés, les déporteurs vont sortir au moment où on commande l'inversion de poussée d'au moins deux moteurs symétriques. Si un seul amortisseur du train principal est comprimé dans les premiers instants du toucher des roues, les déporteurs sol vont sortir partiellement afin de faire diminuer la portance et de faciliter la compression du second amortisseur du train d'atterrissage principal.
1.6.19 Circuit de freinage et antidérapage
L'avion est équipé d'un circuit de freinage produit par Messier-Bugatti-Goodrich. Les huit roues principales sont munies de freins au carbone multidisques qui peuvent être actionnés par un ou l'autre des deux circuits de freinage indépendants. Les roues du train avant et du train central ne possèdent pas de frein. Le freinage normal est fourni par le circuit de freinage vert. Le freinage au pied (pédales) et le freinage automatique sont disponibles. Huit modes de freinage sont offerts avec modulation de freinage antidérapage. S'il est sélectionné, le freinage automatique est activé lorsque le module de commande de freinage et d'orientation du train (BSCU) reçoit deux des trois signaux des déporteurs. En cas de freinage au pied, il y a freinage maximal lorsque les pédales de frein sont enfoncées à fond.
1.6.20 Commandes moteur
Les manettes des gaz des quatre moteurs se trouvent sur la console centrale située entre les deux pilotes. Elles ne se déplacent que si un pilote les fait se déplacer, et elles demeurent immobiles en cas d'utilisation de la poussée automatique. Les manettes des gaz peuvent se déplacer dans une plage allant de la poussée de ralenti à la poussée de décollage/de remise des gaz, quatre crans étant prévus pour des réglages bien précis, à savoir : ralenti, montée, poussée maximale continue et décollage/remise des gaz. Les manettes des gaz sont munies d'un bouton poussoir servant à débrayer la poussée automatique.
En avant des manettes des gaz se trouvent quatre manettes d'inversion de poussée, lesquelles entrent en action lorsqu'on les déplace vers le haut et vers l'arrière. Elles possèdent un cran correspondant à la position de ralenti poussée inverse. Le fait d'amener les manettes au-delà de ce cran entraîne une augmentation de la poussée inverse. Les manettes d'inversion de poussée des moteurs 1 et 4 sont asservies et ne peuvent être amenées au-delà du cran de ralenti poussée inverse à moins que les inverseurs de poussée de ces deux moteurs soient entièrement déployés.
1.6.21 Systèmes d'élimination de la pluie
L'A340 est équipé de deux systèmes permettant d'aider à éliminer la pluie sur le pare-brise, à savoir des essuie-glaces et un système chasse-pluie, les commandes des systèmes du commandant de bord et du copilote se trouvant sur les côtés opposés du tableau supérieur. Les essuie-glaces ont deux réglages, à savoir basse et haute vitesse. À haute vitesse, il semblerait que les essuie-glaces soient très bruyants. Lorsqu'ils ne fonctionnent pas, les essuie-glaces sont logés hors de la vue de l'équipage.
Le système chasse-pluie est conçu pour une utilisation dans de la pluie d'intensité moyenne à forte. Lorsque le bouton chasse-pluie du commandant de bord ou du copilote est enfoncé, une quantité précise de chasse-pluie est envoyée sur le côté correspondant du pare-brise. Au moment de l'accident, l'utilisation du chasse-pluie ne faisait l'objet d'aucune procédure spécifique au sein d'Air France, si ce n'est qu'il fallait vérifier la quantité et la pression du liquide au moment de la préparation prévol du poste de pilotage.
Dans le cadre de la présente enquête, un sondage informel portant sur l'utilisation du chasse-pluie a été effectué auprès de pilotes et d'exploitants d'A340. Les diverses opinions émises allaient de personnes n'utilisant pas le chasse-pluie à d'autres y voyant une amélioration notable par rapport aux essuie-glaces et une grande augmentation de la sécurité dans de la pluie allant de moyenne à forte. Parmi les personnes n'utilisant pas le chasse-pluie, un grand nombre n'avait qu'une expérience limitée, voire pas d'expérience du tout, de son utilisation.
1.7 Conditions météorologiques
1.7.1 Généralités
Le jour de l'accident, la région de Toronto était essentiellement sous l'influence météorologique d'un système anticyclonique allant du nord de la baie d'Hudson, au Canada, jusqu'à l'est du Kentucky, aux États-Unis, et d'un système dépressionnaire situé au nord-est de Québec (Québec), au Canada, associé à un faible creux barométrique en surface s'étendant le long du fleuve Saint-Laurent et au-dessus du sud de l'Ontario.
Les prévisions et les bulletins météorologiques aéronautiques canadiens propres au présent accident sont diffusés par le Centre météorologique aéronautique du Canada - Est (CMAC-E) du Service météorologique du Canada (SMC) faisant partie d'Environnement Canada. Les prévisions météorologiques et les SIGMET de l'Est du Canada, y compris la région de l'Ontario et CYYZ, sont préparées par le CMAC-E.
1.7.2 Prévisions de zone graphique (GFA)
La GFA publiée à 0 h et valide jusqu'à 18 h ne montrait aucune activité de convection. La GFA de 0 h ne renfermait aucune prévision pour 18 h.
La GFA publiée peu avant 6 h et valide jusqu'à 12 h n'indiquait aucune activité de convection. À 18 h, elle indiquait des cumulonimbus (CB) épars montant à 45 000 pieds asl accompagnés d'orages et de visibilités de 1 mille terrestre (sm) dans de la forte pluie et de la brume.
La GFA publiée peu avant 12 h et valide jusqu'à 0 h indiquait des CB épars montant à 45 000 pieds accompagnés d'orages et de visibilités de 1 sm dans de la forte pluie et de la brume. À 0 h (le 3 août), elle indiquait également des CB épars montant à 45 000 pieds accompagnés d'orages et de visibilités de 1 sm dans de la forte pluie et de la brume.
La GFA publiée peu avant 18 h, deux heures avant l'accident, indiquait des CB isolés montant jusqu'à 45 000 pieds asl accompagnés d'orages et de visibilités de 1 sm dans de la forte pluie et de la brume, ainsi que des cumulus bourgeonnants isolés montant jusqu'à 20 000 pieds asl et des visibilités de 6 sm dans de fortes averses de pluie et de la brume. À 0 h (le 3 août), elle indiquait des CB épars montant à 45 000 pieds, accompagnés d'orages et de visibilités de 1 sm dans de la forte pluie et de la brume.
Les GFA publiées à partir de 0 h prévoyaient des orages dans la région de Toronto avec des conditions orageuses minimales accompagnées de visibilités de 1 sm dans de la forte pluie et de la brume.
1.7.3 Prévisions d'aérodrome (TAF)
1.7.3.1 Aéroport international de Toronto/Lester B. Pearson (CYYZ)
Le message qui suit est la version en langage clair du message TAF que l'équipage de conduite a reçu de la régulation des vols d'Air France avant de partir :
Publié à 5 h 39 et valide entre 6 h et 6 h (le 3 août); vent de surface du 280°V à 10 noeuds, visibilité supérieure à 6 sm, nuages épars à 4000 pieds agl; à partir de 17 h, vent variable à 3 noeuds, visibilité supérieure à 6 sm dans de légères averses de pluie, couche de nuages fragmentés à 3000 pieds agl; entre 17 h et 22 h, 30 % de probabilité de visibilité réduite à 2 sm dans des orages et de la pluie d'intensité moyenne, couche de cumulonimbus fragmentés à 2000 pieds agl; à partir de 22 h, vent de surface du 300°V à 8 noeuds, visibilité supérieure à 6 sm, couche de nuages fragmentés à 3000 pieds agl; prochaine prévision d'ici 9 h.
L'équipage de conduite n'a pas obtenu de mise à jour des renseignements du message TAF de CYYZ avant le décollage ou pendant la croisière.
Voici le dernier message TAF de CYYZ publié avant l'atterrissage de l'avion :
Publié à 18 h 51 et valide entre 18 h et 18 h (le 3 août); vent de surface du 300°V à 8 noeuds, visibilité supérieure à 6 sm, couche de nuages fragmentés à 4000 pieds agl; temporairement entre 18 h et 20 h, visibilité de 2 sm dans des orages et de la pluie, couche de cumulonimbus fragmentés à 2000 pieds agl; à partir de 20 h, vent de surface du 320°V à 10 noeuds, visibilité supérieure à 6 sm, couche de nuages fragmentés à 4000 pieds agl; temporairement entre 20 h et 24 h, visibilité de 5 sm dans de légères averses de pluie et de la brume; entre 20 h et 24 h, 30 % de probabilité de visibilité réduite à 2 sm dans des orages et de la pluie, couche de cumulonimbus fragmentés à 2000 pieds agl; à partir de 0 h, vent variable à 3 noeuds, visibilité supérieure à 6 sm, couche de nuages fragmentés à 3000 pieds agl; entre 8 h et 12 h, 30 % de probabilité de visibilité de 1 sm dans de la brume; prochaine prévision d'ici 21 h.
1.7.3.2 Aéroport international de Niagara Falls, dans l'État de New York (KIAG)Dans son dossier météo avant le vol, l'équipage de conduite d'AFR358 avait reçu le message TAF de KIAG qui suit :
Publié à 5 h 20 et valide de 6 h à 6 h (le 3 août); vent de surface du 240°V à 5 noeuds, visibilité de 5 sm dans de la brume, quelques nuages à 15 000 pieds agl; temporairement, vent de surface du 060°V à 10 noeuds, visibilité de 3 sm dans de la brume, nuages épars à 1500 pieds agl; à partir de 12 h, vent de surface du 230°V à 5 noeuds, visibilité supérieure à 6 sm, nuages épars à 25 000 pieds agl; à partir de 15 h, vent de surface du 250°V à 12 noeuds, visibilité supérieure à 6 sm dans de la brume sèche, nuages épars à 4000 pieds agl; à partir de 20 h, vent de surface du 250°V à 12 noeuds, visibilité supérieure à 6 sm dans de la brume sèche, couche de cumulonimbus fragmentés à 4000 pieds agl; à partir de 1 h, vent de surface du 230°V à 6 noeuds, visibilité supérieure à 6 sm, nuages épars à 4000 pieds agl.
L'équipage de conduite n'a pas obtenu de mise à jour du message TAF de KIAG avant le décollage ou pendant la croisière.
1.7.3.3 Aéroport international d'Ottawa/Macdonald-Cartier (CYOW)
Dans son dossier météo avant le vol, l'équipage de conduite d'AFR358 avait reçu le message TAF de CYOW qui suit :
Publié à 5 h 39 et valide de 6 h à 6 h (le 3 août); vent de surface variable à 3 noeuds, visibilité supérieure à 6 sm, nuages épars à 3000 pieds agl; à partir de 7 h, vent de surface variable à 3 noeuds, visibilité de 6 sm dans de la brume, nuages épars à 800 pieds agl; temporairement entre 7 h et 11 h, visibilité de 2 sm dans de la brume, couche de nuages fragmentés à 800 pieds agl; à partir de 11 h, vent de surface du 260°V à 8 noeuds, visibilité supérieure à 6 sm, nuages épars à 3000 pieds agl; temporairement entre 11 h et 13 h, visibilité de 5 sm dans de la brume, couche de nuages fragmentés à 1200 pieds agl; à partir de 19 h, vent de surface du 270°V à 12 noeuds, visibilité supérieure à 6 sm dans de légères averses de pluie, couche de nuages fragmentés à 4000 pieds agl, 30 % de probabilité entre 19 h et 22 h de visibilité de 2 sm dans de la pluie provenant d'orages, couche de cumulonimbus fragmentés à 2000 pieds agl; à partir de 0 h, vent de surface variable à 3 noeuds, visibilité supérieure à 6 sm, nuages épars à 3000 pieds agl; prochaine prévision d'ici 9 h.
L'équipage de conduite n'a pas obtenu de mise à jour du message TAF de CYOW avant le décollage ou pendant la croisière.
1.7.4 Messages d'observation météorologique régulière pour l'aviation (METAR)
1.7.4.1 Aéroport international de Toronto/Lester B. Pearson (CYYZ)
Dans son dossier météo avant le vol, l'équipage de conduite d'AFR358 avait reçu le METAR de CYYZ qui suit :
Publié à 8 h, vent du 350°V à 2 noeuds, visibilité de 15 sm, ciel dégagé, température de 22 °C, point de rosée de 19 °C, calage altimétrique de 30,03 pouces de mercure (po Hg); remarques : pression au niveau de la mer de 1016,6 hectopascals (hPa).
En vol, l'équipage de conduite d'AFR358 a reçu par l'ACARS les METAR de CYYZ qui suivent :
Publié à 14 h, vent du 360°V à 4 noeuds, visibilité de 15 sm, quelques nuages à 3500 pieds agl, quelques nuages à 26 000 pieds agl, température de 28 °C, point de rosée de 19 °C, calage altimétrique de 30,07 po Hg; remarques : cumulus 1/8, cirrus 1/8, pression au niveau de la mer de 1017,9 hPa.
Publié à 16 h, vent du 330°V à 3 noeuds, visibilité de 15 sm, nuages épars à 4500 pieds agl, nuages épars à 12 000 pieds agl, nuages épars à 26 000 pieds agl, température de 30 °C, point de rosée de 20 °C, calage altimétrique de 30,05 po Hg; remarques : cumulus 3/8, altocumulus 1/8, cirrus 1/8, pression au niveau de la mer de 1017,3 hPa.
Publié à 18 h, vent du 120°V à 8 noeuds, visibilité de 8 sm dans de légères averses de pluie provenant d'orages, cumulus bourgeonnants épars à 3500 pieds agl, couche de nuages fragmentés à 9000 pieds agl, température de 23 °C, point de rosée de 22 °C, calage altimétrique de 30,03 po Hg; remarques : cumulus bourgeonnants 3/8, altocumulus 3/8, cumulonimbus associés, pression au niveau de la mer de 1016,7 hPa.
Publié à 19 h, vent du 220°V à 7 noeuds, visibilité de 4 sm dans de fortes averses de pluie provenant d'orages, couche de nuages fragmentés à 5000 pieds agl, couche de nuages fragmentés à 8000 pieds agl, température de 24 °C, point de rosée de 23 °C, calage altimétrique de 30,03 po Hg; remarques : cumulus bourgeonnants 6/8, altocumulus 1/8, cumulonimbus associés, pression au niveau de la mer de 1016,8 hPa.
Un METAR a été publié à 20 h, deux minutes avant l'accident. Il donnait les conditions météorologiques suivantes : vent du 290°V à 11 noeuds, visibilité de 4 sm dans de la forte pluie et des orages, couche de cumulus bourgeonnants fragmentés à 5100 pieds agl, couche de nuages fragmentés à 14 000 pieds agl, température de 23 °C, point de rosée de 22 °C, calage altimétrique de 30,02 po Hg, remarques : cumulus bourgeonnants 6/8, altocumulus 1/8, cumulonimbus associés, éclairs entre nuages visibles au sud-ouest et au nord-ouest, pression au niveau de la mer de 1016,4 hPa. L'équipage n'a pas reçu ce METAR, car il était alors en approche finale.
Un message d'observation météorologique spéciale (SPECI) a été publié à 20 h 4, deux minutes après l'accident. Les conditions météorologiques signalées étaient les suivantes : vent du 340°V à 24 noeuds avec rafales à 33 noeuds, visibilité de 1¼ sm dans de la forte pluie et des orages, nuages épars à 1500 pieds agl, couche de nuages donnant un couvert à 4500 pieds gl, avec cumulus bourgeonnants et cumulonimbus associés.
1.7.4.2 Aéroport international d'Ottawa/Macdonald-Cartier (CYOW)
Dans son dossier météo avant le vol, l'équipage de conduite d'AFR358 avait reçu le METAR de CYOW qui suit :
Publié à 8 h, vent du 250°V à 4 noeuds, visibilité de 10 sm, ciel dégagé, température de 18 °C, point de rosée de 18 °C, calage altimétrique de 29,97 po Hg; remarques : pression au niveau de la mer de 1015,0 hPa.
En vol, l'équipage de conduite d'AFR358 a reçu par l'ACARS les METAR de CYOW qui suivent :
Publié à 18 h, vent du 270°V à 10 noeuds avec rafales à 16 noeuds, visibilité de 15 sm, quelques nuages à 6000 pieds agl, nuages épars à 14 000 pieds gl, température de 32 °C, point de rosée de 17 °C, calage altimétrique de 29,91 po Hg; remarques : cumulus 2/8, altocumulus 1/8, pression au niveau de la mer de 1012,9 hPa.
Publié à 19 h, vent du 280°V à 11 noeuds, visibilité de 15 sm, quelques nuages à 6000 pieds agl, nuages épars à 12 000 pieds agl, température de 33 °C, point de rosée de 17 °C, calage altimétrique de 29,90 po Hg; remarques : cumulus 2/8, altocumulus 1/8, pression au niveau de la mer de 1012,3 hPa.
1.7.4.3 Aéroport international de Niagara Falls, dans l'État de New York (KIAG)
Dans son dossier météo avant le vol, l'équipage de conduite d'AFR358 avait reçu le METAR de KIAG qui suit :
Publié à 7 h 44, vent calme, visibilité de 1¼ sm dans de la brume, ciel dégagé, température de 21 °C, point de rosée de 20 °C, calage altimétrique de 30,03 po Hg.
En vol, l'équipage de conduite d'AFR358 a reçu par l'ACARS les METAR de KIAG qui suivent :
Publié à 13 h 53, vent du 300°V à 6 noeuds, visibilité de 10 sm, quelques nuages à 1500 pieds agl, nuages épars à 15 000 pieds agl, température de 27 °C, point de rosée de 19 °C, calage altimétrique de 30,07 po Hg.
Publié à 17 h 53, vent du 330°V à 9 noeuds, visibilité de 10 sm, quelques nuages à 3500 pieds agl, nuages épars à 4000 pieds agl, nuages épars à 14 000 pieds agl, couche de nuages fragmentés à 20 000 pieds agl, couche de nuages fragmentés à 25 000 pieds agl, température de 31 °C, point de rosée de 18 °C, calage altimétrique de 30,04 po Hg; remarques : éclairs occasionnels au loin vers le nord-ouest, cumulonimbus au loin vers le nord-ouest se déplaçant vers le sud-est.
Les METAR de KIAG qui suivent ont été publiés près de l'heure de l'accident :
Publié à 19 h 18, vent du 200°V à 9 noeuds, visibilité de 10 sm dans de la pluie légère provenant d'orages, cumulonimbus épars à 6000 pieds agl, couche de nuages fragmentés à 9500 pieds agl, température de 28 °C, point de rosée de 21 °C, calage altimétrique de 30,03 po Hg; remarques : éclairs occasionnels entre les nuages et entre les nuages et le sol du sud-ouest au nord-est, orages du sud-ouest au nord-est se déplaçant vers le sud.
Publié à 19 h 53, vent du 220°V à 14 noeuds, visibilité de 10 sm dans de la pluie légère provenant d'orages, quelques cumulonimbus à 3600 pieds agl, couche de nuages fragmentés à 4900 pieds agl, couche de nuages fragmentés à 10 000 pieds agl, température de 26 °C, point de rosée de 21 °C, calage altimétrique de 30,03 po Hg; remarques : fréquents éclairs entre les nuages et entre les nuages et le sol du sud-est au sud-ouest, orages du sud-est au sud-ouest se déplaçant vers le sud.
1.7.5 Renseignements météorologiques significatifs (SIGMET)
Message SIGMET K1 publié à 19 h 13, valide de 19 h 15 à 23 h 15 : Une bande d'orages a été observée sur 20 nm de chaque côté d'une ligne débutant 20 nm à l'ouest de Buffalo, dans l'État de New York (lat. 42° 56′ N, long. 079° 11′ W), et allant jusqu'à 50 nm au sud-ouest de Muskoka (lat. 44° 22′ N, long. 080° 07′ W). La ligne brisée où se trouvent les orages a été observée au radar, sur les images satellite et par les détecteurs de foudre. Les sommets les plus hauts culminent à 44 000 pieds asl. Cette ligne est quasiment stationnaire et faiblira vers 0 h.
Message SIGMET K2 publié à 22 h 4, valide de 22 h 5 à 2 h 5 : Une bande d'orages a été observée sur 20 nm de chaque côté d'une ligne débutant 30 nm à l'ouest de Buffalo, dans l'État de New York (lat. 42° 56′ N, long. 079° 24′ W), et allant jusqu'à 40 nm au nord-ouest de Toronto (lat. 44° 06′ N, long. 080° 03′ W). La ligne brisée où se trouvent les orages a été observée au radar, sur les images satellite et par les détecteurs de foudre. Les sommets les plus hauts culminent à 44 000 pieds asl. Cette ligne est quasiment stationnaire et faiblira vers 0 h.
Message SIGMET K2 annulé à 23 h 55 - Il n'y a plus que des orages isolés qui ont quitté la région.
1.7.6 Renseignements sur le vent à l'aéroport international de Toronto/Lester B. Pearson (CYYZ)
Les renseignements sur le vent affichés dans la tour de contrôle de l'aéroport international de Toronto sont présentés sur le système d'affichage numérique de calage altimétrique et de vent (WADDS). Ce système reçoit les renseignements sur le vent en provenance d'un anémomètre, mesure la pression statique, calcule le calage altimétrique et transmet le tout aux systèmes de renseignements numériques et aux dispositifs d'affichage locaux. Les renseignements sur le vent proviennent de deux sources. La source nord se trouve près de l'extrémité ouest de la piste 05; les données sur le vent qui proviennent de cette source sont communiquées aux avions qui utilisent la piste nord. La source sud se trouve au site d'observations de NAV CANADA à mi-longueur et au sud de la piste 24L; les données sur le vent qui proviennent de cette source sont communiquées aux avions qui utilisent les pistes sud. Si une source n'est pas disponible, il est possible d'utiliser l'autre. Les renseignements sur le vent sont affichés sur les écrans du WADDS aux postes des contrôleurs sol nord et sud et des contrôleurs tour nord et sud. Il y a également un affichage, appelé système d'affichage amélioré (EXCDS), lequel reçoit une copie et assure la présentation des renseignements sur le vent des sources nord et sud. La plupart des contrôleurs consultent l'écran du système EXCDS pour avoir des renseignements sur le vent.
Le système d'indication du vent de la tour sud est tombé en panne vers 19 h 54, tout juste 8 minutes avant l'atterrissage d'AFR358. Les contrôleurs ont averti les avions à l'atterrissage que la tour ne disposait plus des renseignements sur le vent, mais ils ont continué à transmettre les renseignements sur le vent fournis par les avions qui se posaient. Ils n'ont pas transmis les renseignements sur le vent provenant de l'affichage de la tour nord, contrairement à ce qu'exige l'article 2.7.3 des procédures de la tour de Toronto. Des rapports signalant un mauvais freinage ont été transmis à la tour par deux avions CRJ ayant atterri devant AFR358, rapports que la tour a relayés à AFR358.
Au moment même de l'éclair qui s'est produit à 19 h 54, le dispositif WADDS du sud du terrain a cessé de fonctionner. L'anémomètre se trouvant sur le site d'observation du sud du terrain a continué de fournir des données sur le vent destinées aux METAR. Les renseignements sur le vent provenant de l'unité d'affichage du processeur de l'anémomètre se trouvant sur le site d'observation de NAV CANADA sont envoyés au dispositif WADDS situé à l'émetteur de secours et, enfin, aux écrans WADDS de la tour de contrôle et de la tour de secours. Il a fallu qu'un technicien réinitialise sur place le dispositif WADDS du sud du terrain, ce qui a été fait à 23 h.
Les contrôleurs ont continué à donner des renseignements sur le vent aux aéronefs à l'atterrissage à partir des renseignements obtenus auprès des avions à l'atterrissage. En cas de panne d'affichage des données provenant des appareils de mesure nord et sud, la tour ne dispose d'aucun dispositif de secours donnant les renseignements sur le vent.
Un anémomètre distinct se trouvant à l'endroit où sont faites les observations météorologiques officielles fournit la vitesse et la direction du vent aux installations d'exploitation de l'Autorité aéroportuaire du Grand Toronto (GTAA) qui servent à des fins autres que celles du contrôle de la circulation aérienne. L'anémomètre de la GTAA est du même type que l'anémomètre officiel, et il est installé, étalonné et entretenu selon les mêmes spécifications.
La piste 24L est dotée d'une manche à vent éclairée se trouvant du côté gauche de la piste, 500 pieds au-delà du seuil de piste et 200 pieds à gauche du bord de piste. Une manche à vent additionnelle se trouve près du seuil de la piste 06R, du côté nord.
1.7.7 Intensités des précipitations enregistrées
Le tableau suivant a été préparé à partir de l'intensité de la pluie mesurée au site d'observation de NAV CANADA à CYYZ.
Heure de début de la période de collecte | Durée de la période de collecte (minutes) | Accumulation pendant la période (mm) | Taux d'accumulation moyen (mm/min) |
---|---|---|---|
16 h 21 | 46 | 0,2 | 0,004 |
17 h 07 | 11 | 7,8 | 0,709 |
17 h 18 | 37 | 1,0 | 0,027 |
17 h 55 | 6 | 2,2 | 0,367 |
18 h 01 | 9 | 0,2 | 0,022 |
18 h 55 | 45 | 2,0 | 0,044 |
19 h 02 | 7 | 0,6 | 0,086 |
19 h 55 | 13 | 21,0 | 1,615 |
1.7.8 Orages
Les données radar provenant du radar météorologique exploité par le SMC à King City (Ontario), environ 33 km au nord de la piste 24L, ont servi à analyser l'activité orageuse. Il s'agit là du radar météorologique le plus proche de CYYZ, lequel a une portée qui lui permet d'aller aussi bas que 280 m au-dessus de la piste 24L. L'analyse a révélé la présence, au moment de l'accident, d'une rafale descendante à environ 8 km au nord-est de la piste 24L. Les vents créés par cette rafale descendante ont été analysés à l'aide des données des signaux Doppler et réfléchis du radar ainsi qu'à l'aide des renseignements sur le vent provenant des anémomètres et des autres sources météorologiques classiques. Les conditions qui prévalaient à ce moment-là n'étaient pas caractéristiques d'une microrafale. Bien que des courants ascendants et descendants soient associés à des microrafales en surface, la condition limite a permis d'éviter une forte composante de vent ascendant au niveau de la piste.
1.7.9 Éclairs
Il y avait de nombreux éclairs aux abords de la piste, tard en approche. Une analyse des éclairs entre les nuages et le sol susceptibles d'avoir coupé la trajectoire de l'avion a été effectuée à l'aide des renseignements sur les foudroiements ayant été enregistrés. Cette analyse a montré que, vers 20 h 0 min 17 s, il y avait eu, dans un laps de temps d'environ une seconde, six éclairs entre les nuages et le sol dans la région du seuil de la piste 24L. À 20 h 1 min 20 s, alors que l'avion se trouvait approximativement à 400 pieds agl, il y a eu un groupe de cinq éclairs entre les nuages et le sol par le travers de la zone de toucher des roues, à gauche de la piste 24L. Vers 20 h 1 min 49 s (en moins d'une seconde), cinq secondes avant le toucher des roues, il y a eu neuf éclairs entre les nuages et le sol au-delà de l'extrémité de piste. Ces chiffres sont probablement une estimation prudente du nombre des éclairs visibles par l'équipage, car ils ne tiennent compte que des éclairs entre les nuages et le sol susceptibles d'avoir coupé la trajectoire d'approche.
1.7.10 Alertes rouges
La GTAA dispose d'une procédure servant à protéger le personnel au sol des dangers de la foudre. Lorsque les détecteurs de foudre enregistrent un nombre prédéterminé de foudroiements dans un rayon précis de l'aéroport, la GTAA déclenche une alerte rouge. Les exploitants peuvent, sur une base individuelle et à leur discrétion, réagir à une alerte rouge en cessant leurs activités au sol. La GTAA avait déclenché une alerte rouge à 16 h 20, plus de trois heures avant l'arrivée d'AFR358. À cause de cette alerte rouge, il y avait, au moment des faits, un grand nombre d'avions stationnés un peu partout sur l'aéroport, incapables de se rendre à leurs portes d'embarquement. Une alerte rouge n'est pas une fermeture de l'aéroport.
1.7.11 Conditions météorologiques au sol
Les photos ci-après, prises par une personne qui se trouvait sur l'aire de trafic près de la porte C39 et qui regardait en direction du seuil de la piste 24L, donnent une bonne idée des variations de la météo au moment de l'accident. (Remarque : l'heure imprimée sur les photos indique une heure de moins que l'heure réelle et devrait indiquer « 4:00 », « 4:02 » et « 4:04 »).
La Photo 1 a été prise deux minutes avant l'arrivée d'AFR358. Il pleut et la visibilité est bonne, un certain nombre d'avions étant visibles sur la ligne de vol.
La Photo 2, prise deux minutes plus tard, montre AFR358 en approche finale à quelque 230 pieds agl. L'appareil photographique est orienté légèrement à droite par rapport à la Photo 1, et il est possible de voir que la pluie est plus forte et que la visibilité diminue.
La Photo 3, prise environ deux minutes plus tard, montre comment la visibilité avait diminué alors que l'orage s'était intensifié. Moins d'avions sont visibles sur la ligne de vol.
1.8 Aides à la navigation
1.8.1 Radar du contrôle de la circulation aérienne
Le système radar utilisé au Centre de contrôle régional (ACC) de Toronto a été acquis dans le cadre du Programme de modernisation des radars (RAMP) de la fin des années 1980 et du début des années 1990. Ce système, qui fait appel à la technologie mono-impulsion pour déterminer l'azimut, est fabriqué par Raytheon Canada Limitée et porte le numéro de modèle RYC8405. La précision de position du radar est de 1/64 nm en distance et la précision en azimut près du seuil de piste correspond approximativement à une erreur de 0,07° pour un sigma, cette erreur passant à environ 0,15° pour trois sigmas à 50 nm.
Les écrans utilisés à l'ACC, y compris dans la sous-unité du contrôle terminal, sont appelés écrans du système d'affichage de la situation (RSit) et ils font partie du système de traitement des données radar (RDPS). Dans la tour, les contrôleurs utilisent un système d'affichage appelé système auxiliaire d'affichage radar de NAV CANADA (NARDS). Les deux systèmes RSit et NARDS ont été produits par NAV CANADA.
Le canal météo du radar primaire de surveillance (PSR) dont fait usage l'ACC de Toronto n'est pas un vrai radar météorologique, car il utilise un faisceau en éventail vertical plutôt qu'un faisceau en pinceau. Par conséquent, l'intensité des chutes de pluie qui est détectée est une intégration des précipitations à toutes les altitudes. L'intensité détectée dépend de la hauteur et de l'intensité du système météorologique. Le niveau de clutter de sol a également une incidence sur le filtre utilisé et, de ce fait, a une incidence sur l'intensité des précipitations détectées.
À l'heure actuelle, les contrôleurs en Amérique du Nord ne disposent pas d'écrans météo de type évolué qui pourraient leur servir à un usage tactique. Une communication antérieure intéressant la sécurité, à savoir l'avis de sécurité A020052-1 en date du 9 septembre 2002 envoyé par le BST à NAV CANADA, suggérait à NAV CANADA d'envisager de doter certains postes de contrôle d'un radar Doppler afin de mieux sensibiliser les contrôleurs aux conditions météorologiques dangereuses. NAV CANADA a répondu que ce genre de matériel est habituellement réservé aux météorologues et que les contrôleurs devraient suivre une formation poussée afin de pouvoir se servir correctement des renseignements météorologiques fournis par un radar Doppler. Toutefois, NAV CANADA utilise des données provenant du Réseau canadien de détection de la foudre (RCDF) qui apparaissent en surimpression sur les écrans afin de permettre aux contrôleurs d'être au courant de la présence d'orages (voir la Figure 3). Un rapport intitulé « Advanced Weather Displays for TRACON Controllers »Note de bas de page 8 [écrans météo de type évolué à l'usage des contrôleurs du contrôle d'approche radar terminal], qui a paru dans le numéro d'avril-juin 2005 de The Journal of Air Traffic Control publié par l'Air Traffic Control Association, indiquait que des simulations faites avec des contrôleurs ayant accès à des renseignements météorologiques montraient un éventuel apport bénéfique au niveau de l'augmentation de l'écoulement du trafic. Toutefois, ce rapport précisait que d'autres recherches étaient nécessaires afin de déterminer quels types de renseignements pourraient être les plus utiles aux contrôleurs et quelle pourrait être la façon optimale d'afficher de tels renseignements.
Le RSit présente les renseignements météorologiques au contrôleur selon deux niveaux. Le niveau 1 montre les précipitations de basse intensité et est réglé à 23 dB au-dessus du niveau de bruit. Dans les régions où il n'y a pas de clutter de sol, l'intensité correspond à des chutes de pluie ayant un taux de 4 à 6 mm/h. Le niveau 2 montre les précipitations plus fortes et est réglé à 32 dB au-dessus du niveau de bruit. Dans les régions où il n'y a pas de clutter de sol, cette intensité correspond à des chutes de pluie d'environ 10 mm/h ou plus.
Les renseignements sur l'intensité des précipitations sont très stylisés et sont présentésNote de bas de page 9 au contrôleur comme le montre la Figure 3. Les renseignements sur les déplacements des phénomènes météorologiques ne sont pas indiqués sur l'écran, et toute interprétation ne se fonde que sur les observations du contrôleur. Quand ARF358 se trouve en approche finale avant d'atterrir, une bande ayant une intensité de niveau 2 est présente dans le coin supérieur gauche de la représentation. Les autres bandes correspondent à une intensité de niveau 1.
1.8.2 Approche aux instruments de la piste 24L
L'équipage d'AFR358 a effectué l'approche ILS/DME 24L de la piste 24L (voir l'Annexe A). Les approches simultanées sont autorisées sur les pistes 24L et 23.
La hauteur de décision (DH) publiée de l'approche ILS/DME 24L est de 797 pieds asl (250 pieds agl); les procédures d'Air France utilisent 800 pieds asl. La visibilité et la portée visuelle de piste (RVR) recommandées pour pouvoir faire l'approche sont de 1 sm ou 5000 pieds. D'après les procédures d'Air France, ces valeurs de visibilité constituent une limite (et non pas une recommandation).
NAV CANADA a effectué une vérification d'étalonnage de l'ILS de la piste 24L le 4 août 2005. Cette vérification a permis d'établir que la trajectoire de descente se trouvait dans les limites permises, l'angle mesuré étant de 2,9976°. L'alignement de piste (LOC) n'a pu être vérifié, car il était alimenté par le même réseau électrique que celui desservant les feux de piste et d'approche endommagés. Il a été établi qu'il serait dangereux de rétablir le courant près du lieu de l'accident.
1.9 Télécommunications
1.9.1 Généralités
En général, les communications pendant le vol qui a mené à l'accident ont été pertinentes et normales. Les communications entre l'équipage de conduite et le chef de cabine principal ainsi que parmi les PNC avant et pendant l'évacuation d'urgence ont été efficaces et se sont faites dans le respect des principes de gestion des ressources de l'équipage (CRM).
Les lignes qui suivent donnent un aperçu des moments où les communications externes (entre l'équipage de conduite et d'autres organismes) et internes (parmi les membres d'équipage) ont semblé être ambiguës ou incomplètes. Des détails supplémentaires entourant ces événements sont donnés ailleurs dans le rapport.
1.9.2 Communications externes
À 14 h 44 (et à plusieurs autres moments), l'équipage a demandé les conditions météorologiques de son terrain de destination et des éventuels terrains de dégagement. Compte tenu du type de demande faite, il n'a pas reçu les renseignements des messages TAF de ces aéroports.
À 17 h 53, le chef d'escale à Toronto a envoyé un message ACARS à l'avion, dans lequel figuraient des renseignements sur la porte d'embarquement. Aucun renseignement sur l'alerte rouge n'a été communiqué à l'avion, toutes les parties ne considérant pas qu'il s'agissait d'un point touchant les activités au sol.
À 19 h 13, AFR358 a demandé si l'ATC avait des précisions sur le déplacement du système météorologique. L'équipage pensait qu'il se déplaçait du nord au sud. L'ATC a signalé que le système semblait se déplacer vers l'est.
À 19 h 20, l'ATC a annoncé à l'équipage qu'il lui fallait prévoir une attente à AMERT et il lui a demandé s'il avait ce point dans son système de navigation. Aucune autorisation d'attente n'a été délivrée; toutefois, à 19 h 22, AFR358 a signalé à l'ATC qu'il se mettait en attente mais, à la place, il a reçu des vecteurs.
À 19 h 23, AFR358 a demandé à l'ATC l'heure d'autorisation subséquente prévue (EFC), laquelle fait normalement partie de l'autorisation d'attente. Il a reçu une EFC de 19 h 50. À 19 h 40, le PNF a demandé à l'ATC si la météo à CYYZ se dégradait. Le contrôleur n'a donné aucun renseignement météorologique mais, à la place, il a signalé qu'il était maintenant possible d'envoyer des avions vers CYYZ. L'équipage de conduite a demandé à être tenu au courant de l'évolution de la situation, car il lui faudrait peut-être se dérouter s'il lui fallait encore attendre.
À 19 h 44, l'équipage a demandé au contrôleur d'être averti si les conditions météorologiques venaient à empirer, et le contrôleur a répondu qu'il le ferait. L'équipage est resté sur la fréquence de ce contrôleur jusqu'à 19 h 51. Aucune autre mise à jour des conditions météorologiques ne lui a été communiquée. (Voir le paragraphe 1.8.1 - Radar du contrôle de la circulation aérienne, pour connaître les renseignements météorologiques dont disposent les contrôleurs.)
1.9.3 Communications internes
À 19 h 9, le PF a fait un exposé au PNF sur l'arrivée prévue (WASIE 2 pour une approche de la piste 05). Cet exposé relatif à la piste 05 renfermait trois erreurs que le PNF n'a pas remarquées. À 19 h 36, le PF a commencé l'exposé sur l'approche ILS/DME 24L, lequel a duré jusqu'à 19 h 40 et a été interrompu à plusieurs reprises pour des raisons opérationnelles. Cet exposé n'a traité ni de la longueur de la piste ni de la procédure d'approche interrompue. Toutefois, des options d'approche interrompue non standard ont fait l'objet de discussions plus tard en approche. La longueur de la piste 24L n'a été ni mentionnée ni discutée jusqu'à ce que l'avion se trouve à deux minutes de l'atterrissage. À 19 h 59, les pilotes ont exprimé verbalement la longueur de la piste de façon exacte (2743 mètres). Pendant la course à l'atterrissage, les deux annonces obligatoires du PNF, à savoir « Spoilers » (déporteurs) et « Reverse verts » (inverseurs au vert) n'ont pas été faites.
1.10 Renseignements sur l'aérodrome
1.10.1 Généralités
L'aéroport international de Toronto/Lester B. Pearson (CYYZ) est situé dans la ville de Toronto (Ontario) au Canada. Il est exploité en vertu du certificat d'aéroport 5151-1-157 délivré par Transports Canada. Ce certificat a été délivré le 28 novembre 1996 à l'exploitant de l'aéroport, à savoir la GTAA. La GTAA est une entreprise privée à but non lucratif. CYYZ occupe le premier rang au Canada pour le nombre de passagers.
CYYZ est régi par l'article 302 du RAC. Par conséquent, l'exploitation de CYYZ doit se faire dans le respect des normes publiées dans le document intitulé Aérodromes - Normes et pratiques recommandées (TP 312F), manuel publié par Transports Canada en vigueur à la date de certification de l'aéroport.
L'aéroport était certifié pour des opérations de jour et de nuit selon les règles de vol à vue (VFR) et selon les règles de vol aux instruments (IFR). Il possède les cinq pistes suivantes, toutes recouvertes d'asphalte mélangé à chaud :
la piste 05/23, qui mesure 11 120 pieds sur 200 (3389 m sur 61);
la piste 06L/24R, qui mesure 9697 pieds sur 200 (2956 m sur 61);
la piste 06R/24L, qui mesure 9000 pieds sur 200 (2743 m sur 61);
la piste 15R/33L, qui mesure 9088 pieds sur 200 (2770 m sur 61);
la piste 15L/33R, qui mesure 11 050 pieds sur 200 (3368 m sur 61).
La station d'observation météorologique contractuelle de NAV CANADA se trouve à environ 4000 pieds au sud-ouest du seuil de piste et à 800 pieds à la gauche (au sud-est) de la piste 24L. On y trouve tous les instruments nécessaires pour que l'observateur officiel puisse préparer des METAR, y compris un anémomètre et un pluviomètre à auget basculeur.
1.10.2 Fermeture de l'aéroport
La fermeture d'un aéroport ou d'une partie de son infrastructure ou de son aire de manoeuvre relève de l'exploitant de l'aéroport. La GTAA dispose de procédures bien établies (au chapitre 2 consacré aux opérations hivernales) traitant de la fermeture d'une piste dans des conditions bien précises, notamment à cause du verglas, de la neige ou d'un freinage nul. De plus, la GTAA ferme des pistes obstruées par des obstacles dont la présence est connue. La GTAA ne ferme pas de pistes ni l'aéroport dans les circonstances propres aux conditions météorologiques estivales, comme le vent, la pluie ou les éclairs. Les responsables d'aéroports situés au Canada, aux États-Unis et en France ont été consultés, et tous ont indiqué ne pas avoir de procédures prévoyant la fermeture d'un aéroport en raison du vent, de la pluie ou des orages.
Pendant la tenue de l'enquête, il a été établi qu'il semblait y avoir, chez les deux pilotes de l'avion accidenté et parmi d'autres pilotes, une perception voulant qu'il soit possible de fermer les aéroports en cas de conditions météorologiques trop mauvaises pour permettre aux avions de faire des approches et des atterrissages en toute sécurité. À cet égard, il incombe uniquement au contrôleur de la circulation aérienne de s'assurer que la piste devant servir à un avion au départ ou à l'arrivée est ou sera libre de tout obstacle connu, qu'il s'agisse de véhicules, d'équipement et de membres du personnel, avant que l'avion au départ ne commence le décollage ou avant que l'avion à l'atterrissage ne franchisse le seuil de piste. L'ATC peut limiter l'écoulement du trafic aérien vers un aéroport donné en raison des conditions météorologiques, mais la décision ultime de faire une approche ou un atterrissage revient au pilote.
1.10.3 Utilisation de la piste 24L
La piste servant aux atterrissages avait changé plusieurs fois au cours de l'après-midi. Au moment des faits, c'est la piste 24L qui était en service, car d'autres équipages avaient refusé de se poser sur la piste 23 à cause de la proximité des orages en approche, et également parce que la piste 24R n'était pas disponible, son ILS ayant été frappé par la foudre et étant devenu inutilisable vers 18 h 56. Après vérification, le bon fonctionnement de l'ILS de la piste 24R a été confirmé à 19 h 44; toutefois, rien d'indiquait que les contrôleurs de la tour avaient été mis au courant de ce fait. À 19 h 33, AFR358 avait été averti par l'ATC de Simcoe de prévoir un atterrissage sur la piste 24L et avait été guidé au radar en conséquence. De plus, comme un certain nombre d'avions précédents avaient tous été autorisés à faire une approche de la piste 24L, aucune mesure n'avait été prise pour faire basculer les approches vers la piste 24R au moment des faits. C'est la piste 23 qui servait aux décollages, mais il n'y avait aucun départ puisque les opérations sur l'aire de trafic et aux portes d'embarquement des aérogares principales avaient cessé à cause de l'alerte rouge et qu'il n'y avait aucun appareil de l'aviation générale au départ. Les éclairs avaient nui au fonctionnement des installations aidant aux autres approches ILS, les rendant inutilisables à divers moments dans les heures ayant précédé l'accident.
1.10.4 Description de la piste 24L
D'après le TP 312F, la piste 24L possède le code 4. Le TP 312F définit une piste de code 4 comme une piste ayant une longueur supérieure à 2400 m et une largeur d'au moins 45 m pour les aéronefs de catégorie D et d'au moins 60 m pour ceux de catégorie ENote de bas de page 10. L'utilisation de cette piste nouvellement construite avait été certifiée en octobre 2002, piste qui était entièrement revêtue d'asphalte mélangé à chaud. La piste 24L a des relèvements de 227°V/237°M. Elle mesure 9000 pieds (2743 m) de longueur sur 200 pieds (61 m) de largeur et n'est pas rainurée. La longueur de roulement utilisable au décollage (TORA) est de 9000 pieds, la distance de décollage utilisable (TODA)Note de bas de page 11 est de 10 000 pieds, la distance accélération-arrêt utilisable (ASDA) est de 9000 pieds et la distance d'atterrissage utilisable (LDA) est de 9000 pieds.
La piste possède une plate-forme anti-souffle asphaltée à chacune de ses extrémités. Ces plates-formes sont longues de 100 pieds (30 m) et font toute la largeur de la piste; elles sont marquées de chevrons et ne sont pas incluses dans les distances déclarées.
Les dessins techniques montrent que la piste 24L a une pente longitudinale de 0,0 % sur les premiers 1115 pieds (340 m). Elle présente ensuite une pente descendante de 0,0686 % sur les 2963 pieds (903 m) qui suivent, cette pente descendante augmentant à 0,40 % sur les derniers 4922 pieds (1500 m). Au total, la piste présente un dénivelé de 21,65 pieds (6,6 m) sur sa longueur, les altitudes étant mesurées sur l'axe de la piste. Au total, la piste présente une pente de −0,24 %. Ces chiffres se situent à l'intérieur des exigences établies. Les cartes d'approche d'Air France pour CYYZ indiquent que la piste 24L a une pente de −0,1 %.
Les dessins techniques indiquent la présence, des deux côtés, d'une pente transversale typique de 1,5 % de part et d'autre de l'axe de piste. Ce chiffre se situe lui aussi à l'intérieur des exigences établies. La structure de la piste comprenait également des collecteurs d'eaux pluviales. Des relevés effectués après l'accident n'ont montré aucun écart dans la pente par rapport à ce qu'indiquaient les dessins techniques. La piste n'a pas été observée alors qu'elle était mouillée ou inondée.
1.10.5 Marquage et balisage lumineux de la piste 24L
Le balisage lumineux d'approche de la piste 24L est constitué d'un SSALS (balisage lumineux d'approche de précision à haute intensité avec feux séquentiels indicateurs d'axe de piste), lequel donne une trajectoire d'atterrissage visuelle aux avions en train d'atterrir.
La piste 24L est équipée d'un PAPI (indicateur de trajectoire d'approche de précision) réglé pour une hauteur entre les yeux et les roues de 45 pieds. De par sa conception, l'angle de la projection du faisceau est de 3° et il doit se conformer le plus possible à l'angle de la trajectoire de descente de l'ILS. Le PAPI se compose de quatre feux situés du côté gauche de la piste qui forment une barre horizontale. L'avion est sur la trajectoire si les deux feux les plus près de la piste sont rouges et si les deux feux les plus loin sont blancs; l'avion est trop haut si tous les feux sont blancs et il est trop bas s'ils sont tous rouges. Selon l'information recueillie, trois feux du PAPI étaient blancs et un était rouge lorsque l'avion était en courte finale, ce qui indique que l'avion était de 31 à 40 pieds au-dessus de la trajectoire de descente quand il a franchi le seuil de piste.
La piste 24L est équipée de feux de bord de piste à haute intensité espacés uniformément de 200 pieds, ces feux pouvant être réglés à cinq intensités différentes. Au moment de faits, les feux de bord de piste étaient réglés à l'intensité 5, leur réglage maximal. La piste est équipée de feux d'axe de piste. Ces feux sont blancs sur les 6000 premiers pieds de la piste, rouges et blancs alternés sur les 2000 pieds suivants et rouges sur les 1000 derniers pieds. La piste 24L est également équipée de feux de voie de sortie rapide.
La piste 24L possède des marques de piste de couleur blanche qui sont celles d'une piste permettant les approches aux instruments longue de plus de 5000 pieds. Les marques de piste étaient composées de ce qui suit :
- des marques de seuil - une série de barre verticales marquant le seuil;
- des marques d'identification de piste, sous la forme du numéro de la piste;
- des marques de zone de toucher des roues, sous la forme d'un ensemble de barres verticales récurrentes situées, de part et d'autre de l'axe de piste, tous les 500 pieds sur les 3000 premiers pieds de la piste;
- des marques de point cible à 1500 pieds du seuil de piste;
- des marques d'axe de piste - une ligne pointillée indiquant l'axe de piste.
Tous les éléments pertinents du marquage et du balisage lumineux de la piste 24L respectaient les normes de marquage et de balisage lumineux de piste figurant au chapitre 5 du TP 312F.
Pour évaluer la distance de l'avion par rapport au seuil de piste, le pilote doit compter le nombre de marques de la zone de toucher des roues que franchit l'avion. L'orientation de l'avion sur la piste peut être évaluée à l'aide des marques d'axe de piste, des feux d'axe de piste, des bords de la piste et des feux de bord de piste. La piste n'était pas dotée d'une signalisation indiquant la distance restante, ce qui n'était pas exigé par la réglementation canadienne ni par les normes de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI).
1.10.6 Pistes contaminées par l'eau
En cas de fortes précipitations, le manque de renseignements sur l'état de la piste pose un problème de sécurité; toutefois, il n'y a pas eu de consensus sur la façon dont les comptes rendus de freinage des avions précédents devaient être interprétés par les avions suivants. C'est notamment le cas si l'avion précédent est relativement petit par rapport à l'avion suivant. Dans le présent accident, les rapports sur la qualité du freinage communiqués à AFR358 et ayant fait l'objet d'un accusé de réception, provenaient d'avions de transport régional à réaction. Peu d'aéroports, pour ne pas dire aucun, donnent des renseignements sur l'épaisseur de l'eau qui recouvre une piste. Toutefois, certains aéroports ont adopté la technique qui consiste à utiliser un ensemble de pistes préférentielles où, dans des conditions humides, on procède à un changement afin de mettre en service des pistes plus longues ou celles ayant une composante moindre de vent traversier.
Les renseignements ci-après sont tirés de la Partie 2, État de la surface des chaussées, du Manuel des services d'aéroport (Doc 9137) de l'OACI :
2.1.10 On a cherché à déterminer si la mesure de l'épaisseur d'eau ne pourrait remplacer la mesure du coefficient de frottement sur une piste. À cette fin, une étude a été effectuée dans le but d'établir une liste des spécifications auxquelles devraient répondre les dispositifs de mesure de l'épaisseur d'eau. [. . .] Même si elle est possible, la mise au point d'un dispositif répondant à toutes les conditions [. . .] ne serait pas très utile; il vaudrait mieux mettre au point des programmes visant à améliorer la texture superficielle et le drainage des pistes plutôt que de mesurer l'épaisseur d'eau. [. . .] En supposant la mise au point d'un dispositif qui réponde aux conditions spécifiées, une autre difficulté importante semble résider dans le nombre et l'emplacement des dispositifs nécessaires pour une piste. Compte tenu de ce qui précède, on n'a pas jugé réaliste de normaliser les dispositifs de mesure de l'épaisseur d'eau utilisés pour déterminer le coefficient de frottement sur une piste.
Les travaux en la matière se poursuivent.
1.10.7 Aquaplanage
L'aquaplanage survient lorsqu'il y a une fine pellicule d'eau entre les pneus de l'avion et la chaussée. Les coefficients de frottement deviennent alors presque nuls. Pendant l'aquaplanage, il se produit une hausse de la pression hydrodynamique entre les pneus et la piste inondée égale à neuf fois la racine carrée de la pression de gonflage des pneus. Lorsque la pression hydrodynamique dépasse la pression de résistance entre les pneus de l'avion et la chaussée, l'eau pénètre dans la surface de contact des pneus, et les éléments de la bande de roulement ne peuvent plus s'appuyer complètement sur la surface de la chaussée. Dans des conditions d'aquaplanage dynamique total, la capacité d'adhérence des pneus est presque réduite à zéro, compte tenu de l'incapacité du liquide à résister à des forces de cisaillement importantes. L'enquête n'a relevé aucun indice (marques sur la piste ou dérapage ou traces d'usure par aquaplanage des pneus) permettant de penser qu'il y aurait eu aquaplanage pendant la course à l'atterrissage d'AFR358.
1.10.8 Rainurage des pistes
Faire des stries ou des rainures dans le revêtement d'une chaussée déjà existante ou nouvellement construite est un moyen efficace reconnu pour améliorer le drainage de certaines pistes et réduire le dérapage et prévenir l'aquaplanage par temps de pluie. Des résultats d'essais ont montré que, sur des pistes pareillement mouillées, les niveaux de frottement au freinage des avions sur des pistes rainurées dans le sens de la largeur étaient nettement supérieurs à ceux obtenus sur des surfaces non rainurées. Les données permettent également de supposer que les effets de l'usure de la bande de roulement sont secondaires à la capacité nettement améliorée d'évacuation de l'eau entre les pneus et la chaussée offerte par les pistes rainurées. Toutefois, en cas de fortes chutes de pluie, comme celles qui étaient présentes au moment de l'atterrissage, une piste rainurée ne devrait pas permettre à un avion de s'immobiliser beaucoup plus rapidement. La piste 24L n'était pas rainurée.
Au Canada, seules quatre pistes ont été rainurées, ce qui traduit la politique d'employer le rainurage que là où existent des problèmes de drainage inhabituels. De plus, le rainurage permet à la glace et à la neige de s'accumuler dans les rainures, ce qui peut mener à une détérioration de la piste et à l'apparition de corps étrangers sur la piste.
1.10.9 Frottement sur piste
Il est essentiel que la surface d'une piste en dur soit construite de manière à présenter de bonnes caractéristiques de frottement lorsque la piste est mouillée. Des caractéristiques suffisantes de frottement sur la piste sont nécessaires à la décélération de l'avion, à sa maîtrise en direction et à la mise en rotation de ses roues au moment du toucher des roues. Les dépôts de caoutchouc risquent d'entraîner d'importantes réductions des indices de frottement lorsque la piste est mouillée.
Le service d'entretien de l'aéroport de la GTAA dispose d'un programme de mesure régulière des coefficients de frottement sur piste. Dans le cas de la piste 24L, la dernière mesure effectuée avant l'accident avait eu lieu le 3 juin 2005. Les résultats indiquaient une lecture moyenne de 0,75 dans le premier tiers de la piste 24L, de 0,67 dans le second et de 0,75 dans le troisième. Le paragraphe 9.4 du TP 312F oblige à prévoir des mesures de maintenance corrective dès que l'indice de frottement moyen d'une piste dans son ensemble se situe au-dessous de 0,60 ou tombe au-dessous de 0,40 sur une section de 100 m.
Une mesure de l'indice de frottement de la piste 24L a été effectuée le 9 août 2005, sept jours après l'accident, la piste n'ayant pas été utilisée depuis. Des mesures normales ont été effectuées dans la zone de passage des roues sur la piste, environ 3 m à gauche et à droite de l'axe de piste. Des mesures additionnelles de l'indice de frottement sur toute la longueur de la piste ont été effectuées 5 et 10 m à gauche et à droite de l'axe afin de mieux définir les caractéristiques de la piste. Les résultats ont alors indiqué que, à 3 m à gauche et à droite de l'axe, l'indice moyen du premier tiers de la piste était de 0,78, qu'il était de 0,82 dans le deuxième et de 0,75 dans le troisième. Dans le premier tiers, l'indice le plus bas mesuré sur 100 m était de 0,53, ce chiffre étant de 0,59 dans le deuxième comme dans le troisième tiers. Ces résultats se situaient bien au-dessus des chiffres qui auraient nécessité des mesures d'entretien, les résultats obtenus à 5 et à 10 m de l'axe allant par ailleurs en augmentant.
1.10.10 Exigences relatives à la certification des pistes
Le document TP 312F de Transports Canada est le document qui fait autorité en matière de spécifications d'aéroport, qu'il s'agisse des caractéristiques physiques, des surfaces de limitation d'obstacles, du balisage lumineux, des balises, des marques et des panneaux de signalisation. Le TP 312 est rédigé conformément à l'Annexe 14 de la Convention de l'aviation civile internationale. Il reprend les mots « normes »Note de bas de page 12 ou « pratiques recommandées » qui font partie de la terminologie utilisée par l'OACI.
Le chapitre 3 du TP 312F décrit les normes et pratiques recommandées relatives aux caractéristiques physiques des pistes. En vertu de l'article 3.1.6, « une piste ainsi que les prolongements d'arrêt qu'elle peut comporter doivent être inclus à l'intérieur d'une bande ». Une bande de piste est définie comme étant une aire destinée à réduire les risques de dommages matériels au cas où un aéronef sortirait de la piste et à assurer la protection des aéronefs qui survolent cette aire au cours des opérations de décollage et d'atterrissage. La norme 3.1.6.2 précise que la bande doit s'étendre au-delà de l'extrémité de la piste sur une distance d'au moins 200 pieds (60 m) tout en ayant une pente longitudinale ne dépassant pas 1,5 %. La largeur de la bande doit être d'au moins 500 pieds (150 m) de part et d'autre de l'axe de la piste et dans le prolongement de cet axe, et ce, sur toute la longueur de la bande.
Au-delà de l'extrémité de la piste 24L, la plate-forme anti-souffle en asphalte s'étend sur les 100 premiers pieds (30 m), suivie d'une surface gazonnée qui part en pente descendante d'environ 1,5 % dans laquelle se trouvent, sur les 100 pieds (30 m) restants, les supports des feux d'approche de la piste inverse 06R. Cette aire respecte les normes du TP 312F.
L'article 3.1.7 du TP 312F recommande, pour une piste comme la piste 24L, qu'une aire de sécurité d'extrémité de piste (RESA) soit aménagée à l'extrémité de la bande de piste. Cette aire est définie comme étant une aire symétrique par rapport au prolongement de l'axe de piste et adjacente à l'extrémité de bande, qui est destinée principalement à réduire les risques de dommages matériels au cas où un avion atterrirait trop court ou dépasserait l'extrémité de la piste. Parmi divers critères, il est recommandé que la RESA s'étende à partir de l'extrémité de la bande (qui se prolonge sur 200 pieds [60 m] au-delà de la piste) aussi loin que possible, mais au moins sur 295 pieds (90 m). D'après le manuel d'exploitation de l'aéroport de la GTAA, la piste 24L n'est pas dotée d'une RESA.
Avant 1999, le TP 312F se conformait aux critères relatifs aux RESA qui étaient décrits à l'Annexe 14 de l'OACI. En 1999, l'OACI a élevé la « pratique recommandée » prévoyant une RESA longue de 295 pieds (90 m) au rang de norme et a incorporé une pratique recommandée prévoyant une RESA longue de 780 pieds (240 m). À la suite de ce changement de statut de la spécification de l'OACI, le Canada a fait connaître sa différence à l'OACI en s'appuyant sur l'entente contractuelle prévue par la Convention de Chicago; par conséquent, une RESA n'est toujours pas obligatoire au Canada. Toutefois, Transports Canada examine actuellement les exigences en matière de certification des aérodromes canadiens, y compris la possibilité de procéder à une harmonisation avec les exigences actuelles de l'OACI relatives aux RESA. Transports Canada est d'avis qu'une telle harmonisation ne prendra pas effet avant plusieurs années.
1.10.11 Solutions de rechange aux aires de sécurité d'extrémité de piste (RESA)
La Federal Aviation Administration (FAA) des États-Unis a effectué une étude sur les sorties en bout de piste couvrant une période de 12 ans (de 1975 à 1987) et a découvert qu'environ 90 % de toutes les sorties de piste étaient survenues à des vitesses de 70 noeuds ou moins, la plupart des avions finissant par s'immobiliser dans les 1000 pieds au-delà de l'extrémité de piste. C'est pour cette raison que la FAA exige que les aéroports commerciaux possèdent une aire de sécurité de piste (RSA) s'étendant 1000 pieds au-delà de chaque extrémité de piste et ayant une largeur de 500 pieds. Comme la plupart des aéroports ont été construits avant l'adoption de la mesure exigeant une RSA de 1000 pieds, un grand nombre de ces aéroports ne peuvent respecter cette norme relative aux RSA. Cela est dû à la présence d'obstacles comme des plans d'eau, des voies publiques, des voies de chemin de fer, des zones habitées ou une forte déclivité du relief. L'Annexe E contient une description visuelle des aires propres aux RESA et aux RSA dans le but de mieux faire comprendre quelle doit être la taille de chacune de ces RESA.
Consciente des difficultés liées à la réalisation d'aires de sécurité normalisées dans tous les aéroports, la FAA permet de recourir à d'autres moyens de conformité, comme l'utilisation d'un dispositif d'arrêt à matériau absorbant (système EMAS), afin d'obtenir un niveau de sécurité somme toute équivalent à celui offert par une véritable RSA.
Un EMAS est une aire composée de matériaux ayant une résistance et une densité bien précises qui est située à l'extrémité d'une piste dans le but d'immobiliser ou de ralentir un avion qui viendrait à sortir en bout de piste. Lorsque l'avion pénètre dans l'EMAS, ses pneus s'enfoncent dans le matériau qui compose le lit d'arrêt, et l'avion décélère. L'EMAS ordinaire s'étend sur 600 pieds à partir de l'extrémité de la piste. Il est possible d'aménager un lit d'arrêt EMAS pour aider à ralentir ou à immobiliser un avion qui sort en bout de piste, même si le terrain disponible fait moins de 600 pieds. À l'heure actuelle, le seul dispositif qui respecte la norme de la FAA est celui qui fait appel à du béton léger conçu pour s'écraser sous le poids de l'avion. Aux États-Unis, ce dispositif équipe 18 pistes à 14 aéroports différents, 4 autres EMAS devant être installés à 4 autres aéroports. Il est déjà arrivé à plusieurs reprises que des avions sortent en bout de piste et réussissent à s'immobiliser grâce à la présence d'un EMAS, ce qui a permis d'éviter des dommages à l'avion et des blessures aux passagers.
À la suite de la sortie en bout de piste d'un Cessna Citation 550 survenu en mai 1993 à l'aéroport Eastleigh de Southampton, au Royaume-Uni, la Air Accidents Investigation Branch (AAIB) du Royaume-Uni avait recommandé ce qui suit à la Civil Aviation Authority (CAA) du Royaume-Uni :
[Traduction]
La CAA devrait examiner tous les terrains du Royaume-Uni possédant une licence afin d'identifier les dangers potentiels situés au-delà des RESA et déterminer s'il y aurait lieu ou s'il serait possible d'installer des dispositifs d'arrêt au sol.
La CAA a répondu ce qui suit :
[Traduction]
L'Autorité tient actuellement des consultations avec les aérodromes portant sur les lignes directrices en cours de préparation, et notamment avec ceux ayant un intérêt en la matière. Deux aérodromes, en plus de celui de Southampton qui s'est doté d'un dispositif d'arrêt, ont préparé des plans en vue de l'aménagement de lits d'arrêt à sol meuble.
Le document CAP 168, Licensing of Aerodromes (délivrance des licences des aérodromes) de la CAA renferme les mêmes exigences en matière de RESA que l'Annexe 14 de l'OACI (longueur minimale de 90 m, longueur recommandée de 240 m). Les renseignements suivants tirés du CAP 168 s'appliquent aux solutions de rechange aux RESA :
[Traduction]
Si la présence d'une RESA au-delà du minimum de 90 m est jugée nécessaire mais que des contraintes physiques empêchent de disposer de la distance souhaitée, les distances déclarées devraient être réduites, à moins qu'il soit possible de démontrer que des mesures de compensation permettent d'obtenir, en matière de sécurité, un résultat équivalent pour le même ensemble de circonstances opérationnelles. Comme mesures de compensation pouvant être acceptées, seules ou avec d'autres, comme solutions de rechange à la réduction des distances déclarées figure (notamment) l'aménagement de lits d'arrêt conçus et situés de façon judicieuse afin de suppléer aux RESA là où cela est possible. Les lits d'arrêt à sol meuble ne sont pas censés remplacer les RESA, ce qui veut donc dire qu'ils ne devraient pas être situés dans ce qui constitue la longueur minimale des RESA.
Aucun aéroport canadien ne possède de lits d'arrêt à sol meuble.
1.10.12 Accident antérieur dû à une sortie en bout de piste à Toronto
En 1978, au cours d'un décollage interrompu, un McDonnell Douglas DC-9 est sorti en bout de piste 23L (l'actuelle piste 24R) à CYYZ. Des 107 personnes à bord, 2 ont été tuées et 47 ont été grièvement blessées. Le Comité de révision des accidents d'aviation de Transports Canada, un prédécesseur de l'actuel Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST), avait préparé le rapport A78H0002, où figuraient 10 faits établis. Le fait établi numéro 10 indiquait que l'aire de dépassement de la piste 23L de Toronto respectait les normes internationale acceptées, mais qu'un ravin situé au-delà de cette aire n'avait laissé aucune marge d'erreur additionnelle et avait contribué au grand nombre de blessés. Les faits entourant cet accident sont différents, mais les problèmes de sécurité sont les mêmes, en ce sens que le relief situé au bout de la piste a contribué à la gravité de l'accident.
Le Bureau du coroner de l'Ontario a tenu une enquête sur les deux décès, et le jury du coroner a formulé 12 recommandations. La recommandation numéro 7 proposait la création d'une aire de sécurité de piste de 1000 pieds dans le prolongement de la piste 23L de CYYZ sous la forme d'une chaussée surélevée traversant le ravin. La recommandation 9 proposait que la partie gazonnée située entre le ravin et la piste 23L reçoive immédiatement un revêtement en dur afin d'améliorer le freinage des avions. Aucune de ces deux recommandations n'a été acceptée; toutefois, la partie située au bout de la piste 24R (actuelle) a fait l'objet de travaux de terrassement.
1.10.13 Messages du service automatique d'information de région terminale (ATIS)
[Traduction]
Météo à 19 h ZuluNote de bas de page 13 : vent du 220 à 7, visibilité 4 sm, orages, forte pluie, plafond de nuages fragmentés à 5000 pieds avec nuages fragmentés, cumulus bourgeonnants fragmentés à 8000 pieds, température 24, point de rosée 23, altimètre 3002, cumulonimbus associés. SIGMET Kilo 1 valide jusqu'à 23 h 15 Zulu, dans les 20 nm d'une ligne débutant 20 nm à l'ouest de Buffalo et allant jusqu'à 50 nm au sud-ouest de Muskoka, présence d'une ligne brisée d'orages observée au radar, sur les images satellite et par les détecteurs de foudre. Sommets à 440. Ligne quasiment stationnaire devant faiblir vers 0 h Zulu. À cause des conditions météorologiques changeant rapidement, c'est l'ATC qui va assigner la piste à l'atterrissage. La piste au départ sera assignée par l'ATC. Surveillez 133,1 pour NOTAM non disponibles par liaison de données. Informez l'ATC que vous avez l'information Uniform.
1.10.14 NOTAM
Au moment de l'accident, un Avis aux navigants (NOTAM) était en vigueur afin de signaler que les deux premiers feux à éclats séquentiels de l'approche de la piste 24L ne fonctionnaient pas. L'absence de ces feux n'a eu aucune incidence sur l'approche d'AFR358 et sur l'accident.
À 20 h 12, environ 10 minutes après l'accident, un NOTAM a été publié afin de signaler la fermeture de la piste 24L/06R. À 20 h 41, un autre NOTAM a été publié afin d'annoncer que la piste 24R/06L était elle aussi fermée.
À 21 h 57, un NOTAM a été publié pour avertir que les services de sauvetage et de lutte contre les incendies d'aéronefs (SLIA) n'étaient pas disponibles à CYYZ. À 1 h 22, ce NOTAM a été annulé, des services SLIA de catégorie 9 ayant été rétablis au poste d'incendie nord.
1.11 Enregistreurs de bord
1.11.1 Enregistreur de la parole dans le poste de pilotage (CVR)
L'enregistreur de la parole dans le poste de pilotage (CVR) a été récupéré sur les lieux de l'accident. Il s'agissait d'un modèle SSCVR de Team portant la référence AP7123-2101 et le numéro de série 170. Ce modèle de CVR est un enregistreur à semi-conducteurs ayant une capacité de stockage d'environ deux heures. Un examen externe du CVR a révélé que celui-ci avait été exposé à une forte chaleur. La plaque signalétique du CVR manquait, la ferrure de l'ULB (radiobalise sous-marine de détresse) était endommagée et l'ULB manquait. Toutes les données pertinentes ont été transcrites dans leur intégralité.
1.11.2 Enregistreur de données de vol (FDR)
1.11.2.1 Généralités
Le FDR à semi-conducteurs était un modèle ESPAR de SFIM Industries portant la référence AP41116101 et le numéro de série 197. Sur l'A340, ce genre de FDR enregistre plus de 500 paramètres selon une trame de données de 128 mots à la seconde, et la compression des données lui donne une capacité de stockage d'environ 45 heures. Un examen externe du FDR a révélé que celui-ci avait été exposé à une forte chaleur. Malgré les brûlures, il a été possible d'identifier le FDR grâce à sa plaque signalétique. Il n'y avait aucun dommage apparent dû à l'impact, et l'ULB était toujours fixée à sa ferrure.
Les données de ce genre d'enregistreur peuvent être téléchargées directement sans le moindre démontage, à condition que les connecteurs du module de mémoire n'aient pas été endommagés. Si le module semblait intact, le connecteur du module de mémoire et les cartes d'interface externe présentaient des dommages dus à la chaleur. Après démontage, il était clair de par l'étendue des dommages qu'il ne serait pas possible de faire un téléchargement direct et qu'il faudrait déposer les cartes de mémoire pour récupérer les données. Il a fallu poursuivre le démontage de l'enregistreur pour avoir accès aux cartes de mémoire. Les circuits internes avaient été exposés à une chaleur intense et certains connecteurs avaient fondu. Le module ne présentait aucun signe de dommage interne dû à la chaleur. Il est apparu que la carte mémoire était en parfait état.
Compte tenu de l'étendue des dommages observés sur les enregistreurs, il a été jugé plus prudent de réparer le connecteur et son interface, et de télécharger les données, avec l'aide du Bureau d'Enquêtes et d'Analyses pour la Sécurité de l'Aviation Civile (BEA). L'équipe du BST s'est rendue en France pour procéder à cette délicate opération. Il a été possible de télécharger le contenu des modules de la mémoire grâce aux outils logiciels de SFIM Industries, ce qui a permis de récupérer les 45 heures de données dans leur intégralité.
1.11.2.2 Données FDR
Le vent auquel a été confronté l'avion en courte finale a été calculé à partir des paramètres de vitesse anémométrique, de vitesse sol, de cap, de route et d'angle d'attaque enregistrés par le FDR. Le vent moyen calculé était le suivant :
Position | Vent enregistré par le FDR | Vent calculé | Vent arrière par rapport à l'axe de piste | Vent traversier par rapport à l'axe de piste |
---|---|---|---|---|
Débrayage de la poussée automatique | 327°M/15 kt | -1 kt | 15 kt | |
Survol du seuil | 004°M/22 kt | 12 kt | 18 kt | |
Toucher des roues | 330°T/11 kt | 005°M/24 kt | 12 kt | 19 kt |
Sélection de l'inversion de poussée | 360°M/20 kt | 10 kt | 16 kt | |
Extrémité de la piste | 355°M/21 kt | 10 kt | 18 kt |
Les données FDR ont révélé que l'avion s'était posé à 20 h 1 min 53 s à une vitesse anémométrique calculée d'environ 143 noeuds et à une vitesse sol enregistrée d'environ 150 noeuds. L'avion s'est posé à une force d'accélération normale enregistrée de 1,2 g au cap de 243°M. Les déporteurs sol étaient armés pour l'approche et sont entièrement sortis à 20 h 1 min 58 s. Le contacteur d'interdiction du train avant s'est fermé 5,75 secondes après le toucher des roues. Il y a eu freinage au pied environ 2,5 secondes après le toucher des roues, et la déflexion des pédales a augmenté à 70° quelque 5 secondes après le toucher des roues et est restée ainsi pendant toute la course à l'atterrissage. Cela correspond à une commande de freinage maximal, soit une pression de freinage de 2500 livres par pouce carré (lb/po²). L'inversion de poussée a été sélectionnée quelque 13 secondes après le toucher des roues, et les paramètres N1 des quatre moteurs se sont stabilisés à la poussée inverse maximale environ 5 secondes plus tard. Le FDR a cessé d'enregistrer à 20 h 2 min 23 s, soit 4 secondes après la sortie de piste de l'avion.
Les indications de temps du FDR, les données de l'accéléromètre longitudinal et la vitesse sol enregistrée ont servi aux divers calculs effectués pour déterminer le point de toucher des roues sur la piste. Il a été établi que le point de toucher des roues sur la piste 24L se situait entre 3800 et 3900 pieds au-delà du seuil de piste. Une comparaison entre l'accélération longitudinale enregistrée et celle, fournie par Airbus, prévue dans des conditions identiques à celles du jour de l'accident, montre une corrélation avec les performances attendues sur une piste recouverte par ¼ de pouce d'eau.
Un examen des données des systèmes n'a montré aucune défaillance qui aurait pu entraîner une dégradation des performances d'arrêt de l'avion.
1.12 Renseignements sur l'épave et sur l'impact
1.12.1 Renseignements sur l'impact
Des marques de pneu des deux trains d'atterrissage principaux, du train d'atterrissage central et du train d'atterrissage avant étaient visibles à l'extrémité de la piste 24L, la plate-forme anti-souffle et la pente descendante gazonnée. Les pneus intérieurs du train d'atterrissage principal gauche de l'avion ont roulé directement sur le repère de localisation sur le seuil de la piste 06R, indiquant que l'avion se trouvait tout juste à droite de l'axe de la piste 24L lorsqu'il est sorti de piste. Les marques de pneu laissées sur la plate-forme anti-souffle et la zone gazonnée indiquent que l'avion accusait un léger mouvement de lacet vers la droite.
L'avion a traversé la voie de service, puis la promenade Convair, le train d'atterrissage et les deux moteurs intérieurs laissant des marques sur la chaussée de la promenade Convair. L'avion a fauché la glissière de sécurité le long du côté ouest de la promenade Convair ainsi que la quatrième tour des feux d'approche. Une petite quantité de débris de l'avion a été retrouvée sur le terrain menant au bord du ravin.
L'avion s'est immobilisé dans un ravin le long du ruisseau Etobicoke, sur le prolongement d'axe de la piste 24L. La plus grande partie de l'épave est demeurée dans les limites du rayon de l'avion, mais plusieurs petits morceaux se trouvaient sur le terrain précédant le ravin. L'avion a heurté et détruit le cinquième ensemble de feux d'approche au moment où il est entré dans le ravin. Cet ensemble de feux comprend trois paires de
tours de feux frangibles, chacune montée sur des piliers de béton coulé et disposée perpendiculairement à l'axe de piste. Le train d'atterrissage principal droit a heurté et arraché le pilier de béton intérieur de l'ensemble des feux de droite.
L'incendie qui a éclaté après l'accident a consumé presque toute la partie supérieure du fuselage principal, de la dérive et des parties intérieures de la voilure. L'incendie a été intense et s'est principalement limité au fuselage. L'incendie a roussi et brûlé une partie de la végétation avoisinante, mais il ne s'est pas propagé au-delà de la surface occupée par l'avion.
Une des bouteilles d'oxygène des passagers a explosé pendant l'incendie; la partie supérieure de la bouteille a été projetée à environ 84 m (276 pi) de l'autre côté du ruisseau Etobicoke.
1.12.2 Fuselage
L'avion s'est disloqué en grande partie lorsqu'il s'est écrasé dans le ravin. Le cône de nez a subi une légère perforation à la position sept heures. La partie supérieure du fuselage avant, où se trouvent le poste de pilotage et les portes passagers avant, n'a pas été très endommagée. Le pare-brise était intact et ne semblait pas endommagé. La partie supérieure du fuselage ainsi que l'intérieur à l'arrière de la porte L1 ont été consumés par l'incendie. La partie inférieure du fuselage avant a été gravement enfoncée.
La cabine avant sur le côté gauche a été consumée par l'incendie. La soute avant, située sous le plancher de la cabine, a conservé sa forme, mais elle a aussi été consumée par l'incendie. La porte de soute avant était en place et fermée. À côté de la porte de soute, au même endroit où se trouvaient les bouteilles d'oxygène des passagers, il y avait un gros trou dans la paroi du fuselage qui présentait les signes d'une explosion. Les cadres de hublot n'étaient pas déformés, indiquant que cette partie du fuselage n'avait pas subi de contraintes excessives pendant l'accident.
La partie arrière du fuselage, du côté gauche, a été consumée par l'incendie ainsi que le plancher de la cabine. Une partie de la paroi gauche de la cabine était toujours debout, mais elle avait été gravement endommagée par l'incendie. À environ quatre pieds devant la porte R4 de la cabine, il y avait un pli dans le revêtement extérieur du fuselage, ce qui indique que l'endroit a été soumis à d'importantes forces de flexion pendant la décélération et la dislocation. La déformation permanente du fuselage a fort probablement été transmise au cadre de porte, ce qui expliquerait la difficulté du PNC à ouvrir la porte R4. La porte a d'abord résisté à toute ouverture, et il a fallu deux PNC pour l'ouvrir en poussant. La porte de la soute arrière était en place et fermée, mais elle était brûlée presque de part en part. La porte du fret en vrac reposait au sol, et des restes carbonisés du fret étaient répandus à l'extérieur de la porte.
La partie non pressurisée du fuselage arrière (derrière la cloison étanche arrière) a été moins touchée par l'incendie que le reste du fuselage. Des morceaux affaissés et brûlés de la dérive et des stabilisateurs ont empêché une évaluation immédiate de la queue du fuselage, mais on a confirmé plus tard qu'elle ne présentait aucun défaut préexistant.
1.12.3 Voilure
L'aile gauche était toujours fixée à l'avion. Le longeron arrière du caisson d'aile allant jusqu' au bord de fuite de l'aile du côté intérieur du mât numéro 2 était brisé. Les revêtements d'extrados et d'intrados de l'aile, y compris les nervures internes connexes, étaient arrachés, et le longeron arrière était brisé à la nervure 1. Le train d'atterrissage gauche était fixé à ce morceau de structure d'aile. L'aile gauche a été gravement endommagée par l'incendie dans la zone du longeron arrière et de la nervure 1. Le revêtement d'extrados a fondu dans le voisinage de la nervure 5. Le volet intérieur était brisé et il s'était séparé de la structure de l'aile.
Toutes les autres surfaces mobiles du bord de fuite de l'aile gauche ont pu être identifiées. Quatre panneaux de déporteurs extérieurs étaient fixés en place et en position fermée. Deux panneaux de déporteurs intérieurs se trouvaient sur la partie détachée de l'aile. Les panneaux d'aileron et les volets extérieurs étaient fixés en place et déployés. La penne (winglet) de gauche était en place et essentiellement non endommagée. Les surfaces mobiles du bord d'attaque (sept becs) étaient en place et déployées. Le bord d'attaque de l'aile gauche était gravement endommagé dans le voisinage du mât numéro 2.
L'aile droite était toujours fixée à l'avion. Le longeron arrière du caisson d'aile allant jusqu'au bord de fuite du côté intérieur du mât numéro 3 était brisé. Les revêtements d'extrados et d'intrados d'aile, y compris les nervures internes connexes, étaient arrachés. Le longeron arrière était brisé à la nervure 1. Le train d'atterrissage droit était brisé et il s'était séparé de l'aile. Le longeron arrière de l'aile droite avait subi d'importants dommages causés par l'incendie, entre les nervures 1 et 5. Le revêtement d'extrados et la structure interne de l'aile avaient littéralement fondu. Le volet intérieur était brisé et il s'était séparé de la structure de l'aile. Toutes les autres surfaces mobiles du bord d'attaque et du bord de fuite (becs, ailerons et volets) étaient présentes. La penne de droite était en place et essentiellement non endommagée. Le bord d'attaque de l'aile droite avait été gravement endommagé au mât numéro 3. Des mesures des becs aux trois rails ont confirmé que les becs s'étaient complètement déployés. Les déporteurs étaient rentrés.
1.12.4 Stabilisateurs
Le stabilisateur réglable était toujours fixé au fuselage par son caisson principal. Le stabilisateur gauche était fixé en place et présentait des dommages d'impact. La gouverne de profondeur de gauche était partiellement détachée, mais en place, et elle présentait des dommages d'impact. Le stabilisateur et la gouverne de profondeur de droite étaient en place et consumés partiellement. On a examiné les extrémités de l'empennage, faites d'alliage d'aluminium, et une partie du système de protection contre la foudre pour voir s'ils présentaient des signes de foudroiement; aucun n'a été découvert. La dérive était en place sur l'avion. Ce n'est qu'après un incendie intense que la demi-partie inférieure de la dérive et de la gouverne de direction a été entièrement consumée, et le reste de la structure s'est affaissé sur le côté droit. La gouverne de direction était séparée du caisson de dérive.
1.12.5 Moteurs de l'avion et groupe auxiliaire de bord (APU)
L'examen des quatre moteurs n'a révélé aucune anomalie avant impact. Des matières organiques retrouvées dans l'aubage directeur d'entrée des quatre moteurs indiquent que les moteurs tournaient pendant la séquence d'impact. Le déploiement des pistons de commande des inverseurs de poussée indique que les coquilles des inverseurs de poussée étaient déployées pendant la séquence d'impact.
Le module de régulation électronique (ECU) de chaque moteur a été déposé et expédié à General Electric pour téléchargement de la mémoire non volatile. Le téléchargement s'est bien déroulé et a permis de conclure que les moteurs n'avaient subi aucune anomalie avant impact. Deux enquêteurs du BST assistaient à l'opération.
Les huit bouteilles extincteurs des moteurs ont été déposées, et sauf pour la bouteille avant du moteur numéro trois, elles avaient toutes conservé leur charge. Aucun des déclencheurs pyrotechniques ne s'était activé.
Le moteur du groupe auxiliaire de bord (APU) était en bon état. Il ne présentait aucun signe d'anomalie avant impact. La gaine du moteur avait été roussie, et l'isolant du câblage était amolli, ce qui correspond à des températures excessives dans le compartiment, causées par l'incendie après l'impact.
L'APU est équipé d'une bouteille extincteur au Halon qui se trouve devant la structure logeant le groupe et à l'extérieur de celle-ci. La bouteille ne présentait aucun dommage matériel, mais elle avait perdu sa charge. Une analyse en laboratoire a révélé que la soupape de surpression était ouverte. Le déclencheur pyrotechnique ne s'était pas activé.
1.12.6 Porte L2
On a évalué, dans la mesure du possible, l'état avant incendie de toutes les portes passagers et des portes issues de secours. Certaines portes avaient été gravement endommagées par l'incendie. Les toboggans ont aussi fait l'objet d'un examen, et plus particulièrement la porte passagers L2 qui se serait ouverte pendant que l'avion décélérait. La porte L2, son cadre et le toboggan ont été transportés au Laboratoire technique du BST pour examen et analyse détaillés.
Les photos prises par un passager qui évacuait montrent que la porte L2 était ouverte, mais que son toboggan ne s'était pas déployé. Au cours de l'incendie, la structure supportant la porte s'était affaiblie, et la porte était tombée au sol. L'examen initial sur les lieux a permis de découvrir que la poignée de porte intérieure était en position relevée (ouverte) et que la poignée d'ouverture de secours était armée. L'ensemble goupille de dégagement et câble arrière du toboggan était toujours fixé à la porte, ainsi qu'un morceau de paquetage carbonisé. La barre de retenue, qui fixe le toboggan au fuselage, était verrouillée sur le seuil du cadre de porte. Le mécanisme d'assistance de porte avait été actionné, puisque le disque frangible de l'actionneur avait été perforé.
La face intérieure de la porte avait été gravement endommagée par l'incendie, la doublure et l'isolant ayant été consumés à 90 %. Un certain nombre de pièces structurales avaient fondu. La biellette du mécanisme de la poignée de commande avait été complètement consumée. Le mécanisme de verrouillage de porte ouverte à bras d'articulation (crochets et dispositif géométrique) était verrouillé en position ouverte. Le mécanisme de levage était en position de levage. Les crochets, guides, ferrures de butée et galets étaient en bon état. Il n'y avait aucun signe de blocage, de coincement ni de contrainte excessive. Des marques de brûlures localisées étaient présentes sur la porte, le coin avant inférieur était enfoncé, et la structure interne voisine était déformée. La poignée extérieure de porte a été trouvée en position fermée, et on pouvait la déplacer librement à la main.
Les divers mécanismes de verrouillage, de levage et d'abaissement ont été actionnés à plusieurs reprises afin qu'on puisse vérifier leur fonctionnement. Le verrou du bras d'articulation a fonctionné comme prévu. La tige de verrouillage a été déplacée d'avant en arrière, et le ressort a retenu la tige de verrouillage dans sa position géométrique comme prévu. Le déverrouillage de la porte ne peut se faire que par la rotation de la tige de verrouillage au moyen de la poignée intérieure de porte. Le ressort de la barre de torsion à masselotte était débranché, et le mécanisme de levage de porte était réglé en position porte abaissée (fermée). On a tenté de remettre le mécanisme en position de levage (ouverte). Il était impossible de faire tourner la tige de levage, parce que la course du dispositif géométrique bloquait tout déplacement, comme prévu. Le levage (l'ouverture) de la porte ne peut se faire que si l'on déplace la poignée intérieure de porte. On a testé la poignée extérieure, et elle fonctionnait bien. La poignée d'ouverture de secours est revenue en position désarmée lorsque la poignée extérieure a été soulevée, comme prévu.
Le toboggan avait été consumé à environ 50 % par l'incendie dans la cabine. Le toboggan avait basculé dans la cabine et était toujours replié. Son tablier de retenue (de couleur gris foncé) n'a pas été retrouvé. Le paquetage, qui fixe le toboggan replié à la porte, n'a pas été retrouvé, et on présume qu'il a été détruit par l'incendie. Une petite partie carbonisée du paquetage, comprenant l'ensemble goupille de dégagement et câble arrière, était toujours fixée à la porte. La goupille de dégagement était pliée et ternie par la chaleur. La goupille de dégagement avant du toboggan a été retrouvée intacte à l'intérieur de la cabine, ce qui indique qu'elle s'était dégagée comme prévu lors de l'ouverture de la porte. Une force d'environ 80 livres a été nécessaire pour extraire la goupille du rail de fixation arrière. La barre de retenue qui fixe le toboggan au seuil de la porte a été retrouvée verrouillée en place, comme elle devrait si elle avait fonctionné lors d'une évacuation d'urgence.
1.12.7 Sièges du poste de pilotage
Les deux sièges ont été soumis à des forces verticales élevées pendant l'événement. Le siège du commandant de bord a été déplacé de sa position normale. Le plancher sous le socle du siège s'est rompu, ce qui a permis au siège de se détacher de son socle. L'écrou fixant la vis centrale à la base du socle du siège du copilote avait été arraché de sa pièce de retenue. La force nécessaire pour arracherl'écrou de sa pièce de retenue a été calculée mathématiquement. On a déterminé qu'une accélération verticale minimale de 16 g avait probablement été atteinte avant que le siège ne cède. Les sièges étaient conçus pour résister à une accélération verticale de 5,7 g et à une accélération longitudinale de 9 g.
1.12.8 Poste de pilotage
On a photographié le poste de pilotage pour documenter la position de certains éléments comme les dispositifs de commutation et les leviers, ainsi que les indications des instruments. Le levier de commande des aérofreins a été trouvé dans la position RETRACT. La longueur du levier a été mesurée et elle correspondait à environ 66,5 mm, soit la position non armée des déporteurs sol. Après qu'on a documenté sur place la position physique du levier, on a tiré ce levier en position relevée pour l'armer, puis on l'a ramené à la position RETRACT. Le levier des volets a été trouvé en position FULL (complètement sortis). La commande du train d'atterrissage a été trouvée en position DOWN.L'interrupteur d'antidérapage et d'orientation du train avant était sur ON. Le bouton-poussoir « EVAC ON » a été trouvé tiré, en position OFF.
L'avion est équipé de trois radiobalises de repérage d'urgence (ELT); une des radiobalises est équipée d'un détecteur d'accélération automatique unidirectionnel dans le sens longitudinal. Selon l'information recueillie, aucun signal n'a été reçu des radiobalises. Le gros incendie après impact a détruit la structure où se trouvaient les trois radiobalises. Aucun composant de ces radiobalises n'a été identifié ni récupéré de l'épave.
Les essuie-glaces de pare-brise étaient déployés et ils se trouvaient à mi-chemin de leur débattement sur les pare-brise du commandant de bord et du copilote. Les sélecteurs d'essuie-glace du commandant de bord et du copilote étaient tous deux réglés sur la position SLOW. Le chasse-pluie n'avait pas été utilisé.
Le radar météorologique était réglé sur le mode Weather and Turbulence (conditions météo et turbulence), et la fonction de prédiction de cisaillement du vent était sur AUTO, la fonction de suppression de clutter de sol était sur OFF, et la commande GAIN était sur la position étalonnée (calibrated).
1.12.9 Pneus et freins
Aucun des pneus ne présentait de traces d'aquaplanage. Les pistons de tous les freins étaient déployés, et l'usure moyenne des freins laissait environ 66 % de l'épaisseur de la bande. On n'a découvert aucun signe de fuite de liquide hydraulique avant l'impact. La tringlerie des pédales de frein dans le compartiment avionique (sous le plancher du poste de pilotage) étaient en bon état. Le module de commande de freinage et d'orientation (BSCU, FIN 3GG) et les deux modules d'interface de commande de train d'atterrissage (LGCIU, FIN 5GA1 et FIN 5GA2) ont été retrouvés. Tous les modules avaient été gravement endommagés par l'incendie, comme l'avaient été les composants de freinage dans le compartiment du train d'atterrissage principal. Les capuchons de moyeu de roue et les tachymètres ont été retirés des roues 1, 2, 3, 4, 5, 7 et 8 du train principal; le tachymètre de la roue numéro 6 n'a pu être retiré. On n'a observé aucune anomalie visuelle sur les arbres d'entraînement des tachymètres.
1.13 Renseignements médicaux
Au cours des dernières années, le commandant de bord avait été exempté de diverses tâches de vol pour des raisons médicales, pour une condition, selon l'information recueillie, qui le rendait vulnérable à la fatigue. Le 4 septembre 2003, il a été jugé apte au vol avec une restriction l'empêchant de voler en Afrique et à Madagascar pour une durée de six mois. Le 1er juin 2004, la même restriction a été maintenue. Le 24 février 2005, la restriction l'empêchant de voler en Afrique et à Madagascar a été imposée pour une période d'un an.
Le 11 juillet 2005, le commandant de bord a de lui-même demandé un calendrier de vol réduit à cause d'un niveau inhabituel de fatigue. Le 25 juillet 2005, de retour d'un vol, et après avoir consulté son médecin traitant, le commandant de vol a demandé au personnel médical d'Air France huit jours de congé, suivis d'une réduction de 50 % de son calendrier de vol pour trois mois, ce qui lui a été accordé. Ses vols ont été limités à l'Amérique du Nord pendant cette période, mais des vols vers la côte ouest de l'Amérique du Nord ont été exclus. On a demandé au personnel médical du BEA d'autres éclaircissements sur l'état de santé du commandant de bord et ses conséquences possibles sur son rendement. À part l'information fournie ci-dessus, aucune évaluation médicale n'était disponible qui pourrait expliquer les symptômes de fatigue permanente présentés par le commandant de bord ou leurs conséquences possibles sur son rendement.
1.14 Incendie
1.14.1 Début et propagation de l'incendie
L'évaluation du sillon laissé par l'épave a indiqué qu'il n'y avait eu aucune fuite de carburant jusqu'à ce que l'avion franchisse la promenade Convair. Les premiers débris liés aux réservoirs de carburant et au circuit de distribution de carburant ont été retrouvés sur le terrain voisin du ravin. Des traces de carburant étaient visibles sur le dessus du remblai, du côté gauche du sillon laissé par l'avion. Un morceau de nervure interne de caisson d'ailea aussi été retrouvé au même endroit. Un panneau de porte d'accès d'aile légèrement endommagé par l'incendie a été identifié parmi les débris laissés à mi-chemin entre la promenade Convair et le bord du ravin. Il n'y avait aucun signe d'incendie sur le dessus du remblai, car on ne voyait aucune trace de gazon ou de sol roussi.
L'incendie s'est intensifié lorsque l'avion s'est immobilisé. Le chemin suivi par l'incendie allait de la voilure vers le fuselage. Les occupants ont eu le temps d'évacuer l'avion avant que l'incendie ne menace sérieusement le fuselage. Il y a eu quatre principaux foyers d'incendie :
- zone du train d'atterrissage principal à l'emplanture d'aile gauche;
- zone du train d'atterrissage principal à l'emplanture d'aile droite;
- fuselage, de la porte du poste de pilotage jusqu'à la cloison étanche arrière;
- zone APU.
L'aile gauche a été gravement endommagée par l'incendie dans la zone du longeron arrière et de la nervure 1, et le revêtement d'extrados a fondu près de la nervure 5. Le longeron arrière, entre les nervures 1 et 5 de l'aile droite a été gravement endommagé par l'incendie. Le revêtement d'extrados et la structure interne de l'aile ont fondu à cet endroit (voir la Photo 5). Le fuselage a brûlé de la porte du poste de pilotage jusqu'à la cloison étanche arrière. La plus grande partie du fuselage a été consumée par l'incendie ainsi que le plancher de la cabine. Une partie du côté droit de la paroi de la cabine était toujours debout, mais elle a été gravement endommagée par l'incendie.
1.14.2 Services de sauvetage et de lutte contre les incendies d'aéronefs (SLIA)
Conformément à l'article 301 de la sous-partie 3 du RAC, la GTAA fournit des services SLIA de catégorie 9 à CYYZ. En raison de la taille de l'aéroport, la GTAA a divisé l'aéroport en deux aéroports distincts, chacun ayant son propre poste d'incendie. L'aéroport nord comprend la piste 23/05 ainsi que le doublet 15L/33R et 15R/33L. L'aéroport sud comprend le doublet 24R/06L et 24L/06R. Le poste d'incendie sud est voisin de la piste 24L, à environ 3000 pieds du seuil de piste.
L'avion est sorti de la piste à 20 h 2 min 19 s. Lorsque le contrôleur de la tour a sonné l'alarme à 20 h 2 min 45 s, les deux postes d'incendie de l'aéroport, le centre des opérations de la GTAA et les postes d'incendie voisins de la ville de Mississauga (Ontario) ont été avisés. Un groupe de pompiers des services SLIA se trouvait dans la salle d'alarme du poste d'incendie sud et surveillait l'orage, et il a été témoin de l'atterrissage de l'avion. Les pompiers ont répondu avant l'activation de l'alarme par le contrôleur de la tour, et le premier véhicule d'intervention est arrivé sur les lieux dans la minute suivant le déclenchement de l'alarme. Ce délai d'intervention se situe largement à l'intérieur du délai de trois minutes exigé à l'article 303 de la Section IV du RAC.
Le personnel des services de lutte contre les incendies de la GTAA suit régulièrement un entraînement portant sur les aéronefs desservant CYYZ. En 2003, il avait suivi un stage de formation d'une semaine sur un A340 d'Air Canada. Des dossiers de formation sont conservés et Transports Canada effectue une vérification annuelle de la formation des pompiers. Tous les résultats des vérifications ont été positifs. Les services SLIA de la GTAA se servent régulièrement de sources de renseignements éélectroniques, y compris d'un site Web d'Airbus, pour étudier les types d'aéronef desservant CYYZ.
L'équipe d'intervention initiale des services SLIA comprenait 15 personnes. Le niveau de dotation minimal est de 11 personnes par quart de travail. Il y avait d'autres membres de l'équipe présents à ce moment parce que des pompiers commençaient à arriver en vue du changement de quart. D'autres ont été appelés, sont arrivés pour leur quart normal, ou sont venus de leur propre initiative après avoir entendu parler de l'accident dans les médias.
L'équipement d'intervention des services SLIA comprend un véhicule de commandement, un véhicule d'intervention rapide d'une capacité de 6000 litres, deux autopompes et quatre gros véhicules de projection de mousse d'une capacité de 12 000 litres chacun. Deux de ces véhicules étaient équipés d'une buse perforante. Une buse perforante est une perche fixée à l'extrémité d'un bras hydraulique, lui-même fixé à un camion à incendie. Elle sert à percer la structure d'un aéronef à des endroits désignés pour y injecter des agents extincteurs à l'intérieur. Cet équipement d'intervention dépassait le nombre de véhicules de lutte contre les incendies et la quantité totale d'eau qui sont nécessaires selon l'article 303.09 du RAC pour un service de sauvetage et de lutte contre les incendies d'aéronefs de catégorie 9. Les premiers véhicules ont pris position près d'un chemin public, à la queue de l'appareil. Compte tenu du relief de l'endroit où l'avion a fini par s'immobiliser, la buse perforante n'a pas pu être utilisée.
Les camions des services SLIA de la GTAA ont déversé sur l'incendie une quantité initiale d'eau s'élevant à 39 500 litres, soit 63 % de plus que la quantité exigée en vertu de la réglementation pertinente. Une quantité d'eau additionnelle a été obtenue au moyen des bornes d'incendie et, par la suite, grâce à une entente d'approvisionnement avec les villes de Mississauga et Caledon (Ontario).
Le principal agent extincteur utilisé a été la mousse à formation de pellicule aqueuse. Ce concentré de mousse est mélangé avec de l'eau et de l'air et il produit une pellicule aqueuse à la surface d'hydrocarbures pour éviter toute évaporation. Les bornes d'incendie les plus proches du lieu de l'accident se trouvaient environ 1 km plus loin, au terminus d'autobus de la GTAA, situé près du poste d'incendie sud. Une fois leur citerne vide, les camions à incendie ont dû faire la navette jusqu'aux bornes d'incendie en attendant qu'une opération d'approvisionnement par camions-citernes soit mise en place par les services d'urgence et d'incendie de Mississauga pour alimenter sur place les camions de la GTAA.
Le Centre des opérations d'urgence de la GTAA a été ouvert à 20 h 18. À 20 h 22, le poste de commandement mobile de la GTAA est arrivé sur les lieux, et trois autobus pour les passagers et un autobus pour blessés multiples des services d'urgence de Toronto ont été envoyés sur les lieux.
À 21 h 41, on avait compté 297 passagers, mais les équipes d'urgence attendaient toujours un manifeste pour confirmer le nombre total de personnes à bord.
Au moment de l'accident, le véhicule de commandement des services SLIA de la GTAA était équipé d'un microordinateur permettant de consulter les tableaux d'aéronef publiés sur le Web.
1.14.3 Tableaux de sauvetage d'aéronef
Comme cela a été dit au paragraphe 1.14.2, les pompiers de la GTAA avaient suivi une formation complète sur l'A340 et avaient accès sur place aux tableaux de sauvetage d'aéronef publiés sur Internet. Le personnel des services SLIA de la GTAA a indiqué qu'il effectuait régulièrement des séances de familiarisation sous la forme de visites d'aéronefs en stationnement à une porte d'embarquement ou se trouvant dans un hangar à des fins de maintenance.
Un manuel contenant des tableaux de sauvetage d'aéronef a été récupéré d'un des camions des services SLIA de la GTAA. Ces tableaux donnent des renseignements propres à chaque modèle d'aéronef, comme l'emplacement et le volume des réservoirs de carburant, l'emplacement des conduites de carburant, des issues de secours, des batteries, des points de pénétration d'urgence, ainsi que d'autres renseignements importants pour les pompiers. Les tableaux sont une aide à l'entraînement précieuse pour les pompiers et les autres membres du personnel d'intervention d'urgence, ainsi qu'une source de référence rapide en cas d'intervention. Le manuel qui a été récupéré est le document de Transports Canada intitulé SIU Manuel de diagrammes d'aéronefs (TP 11183).
Certains avionneurs, comme Airbus et Boeing, rendent ces tableaux accessibles à partir d'Internet. Il est possible de s'abonner afin de recevoir des copies papier tout comme des copies éélectroniques qui peuvent être incorporées aux systèmes d'amélioration de la visibilité du conducteurNote de bas de page 14 dont sont équipés les camions à incendie.
Vers le milieu des années 1990, lorsque l'exploitation des aéroports a été dévolue à des exploitants d'aéroport locaux, Transports Canada a mis un terme à la production du TP 11183 et a transféré ses droits d'auteur à la National Fire Protection Association. Au moment de l'accident de l'avion d'Air France, le TP 11183 n'était plus produit, et la fourniture de tels tableaux de sauvetage d'aéronef au personnel des services SLIA était laissée à la discrétion de chaque exploitant d'aéroport.
L'état et le contenu du manuel trouvé dans le camion indiquaient qu'il ne servait pas de document de référence principal. Le manuel contenait des cartes d'aéronefs qui ne sont plus en service nulle part dans le monde et il ne contenant aucune carte de l'Airbus 340.
Les normes du RAC exigent l'entraînement du personnel des services SLIA dans le domaine suivant :
323.14(1)b)(ii) Familiarisation avec les types d'aéronefs évoluant régulièrement à l'aéroport ou à l'aérodrome où le pompier va exécuter ses fonctions de pompier.
323.14 (2)b)(ii)(H) Utiliser un tableau de sauvetage d'aéronef pour reconnaître et situer les sorties normales et de secours, les réservoirs de carburant, la cabine passagers et le poste de pilotage, les réservoirs d'huile, les bâches hydrauliques, les réservoirs d'oxygène, les batteries et les points d'entrée forcée d'un aéronef.
Malgré l'absence de toute exigence réglementaire directe obligeant une autorité aéroportuaire à posséder un ensemble de tableaux de sauvetage d'aéronef appropriés, une telle exigence est sous-entendue dans les normes du RAC portant sur la formation.
À la fin des années 1990, Transports Canada a lancé une série d'Avis de proposition de modification (APM) devant servir à mettre à jour les dispositions du RAC relatives aux aérodromes et aux aéroports. Les APM 2000-243 et 2000-244 s'intéressaient au fait que les exigences visant le plan d'intervention d'urgence en vertu de l'article 302 du RAC et du TP 312 ne permettaient pas de croire que les exploitants d'aéroport avaient élaboré une planification cohérente en tenant compte du type d'aéronef et de la densité du trafic. L'APM 2000-243 proposait des modifications réglementaires en vertu desquelles le paragraphe 302.104(1) - Diagrammes d'urgence d'aéronefs et cartes quadrillées - allait exiger ceci : « L'exploitant d'aéroport doit fournir des diagrammes d'urgence d'aéronefs, conformément aux normes relatives aux aéroports. » Les normes pertinentes, dont l'ébauche se trouvait dans l'APM 2000-244, proposaient ce qui suit : « L'exploitant d'aéroport doit fournir les diagrammes d'urgence propres aux aéronefs commerciaux de transport de passagers desservant l'aéroport... ».
Le 7 octobre 2006, les modifications proposées à l'article 302.206 du RAC ont été publiées sous la forme suivante dans la Partie I de la Gazette du Canada :
En vertu de la proposition d'article 302.206 Diagrammes d'urgence d'aéronefs et cartes quadrillées de l'aéroport, l'exploitant de l'aéroport sera tenu de mettre à la disposition du centre de coordination des urgences les diagrammes d'urgence d'aéronefs propres aux aéronefs utilisés par les exploitants aériens utilisant l'aéroport. Des exemplaires de ces diagrammes doivent être fournis aux organismes responsables des services de lutte contre les incendies qui figurent dans le plan d'urgence ainsi qu'au coordonnateur sur place.
1.15 Questions relatives à la survie des occupants
1.15.1 Généralités
L'avion transportait 297 passagers : 168 hommes adultes, 118 femmes adultes, 8 enfants et 3 bébés. Parmi les passagers adultes, il y avait trois passagers en chaise roulante et un passager aveugle. Trois passagers non payants étaient assis dans des sièges d'équipage : un sur le siège du troisième occupant dans le poste de pilotage, et deux dans la zone de repos réservée à l'équipage.
Les charges dynamiques liées à l'accident n'ont pas dépassé les limites de la résistance humaine. Par contre, compte tenu du nombre de blessures graves liées à l'impact subies par les passagers de la cabine avant et par les membres d'équipage dans le poste de pilotage, il est évident que ces parties de l'avion ont été soumises à des forces importantes.
1.15.2 Sortie de piste
Entre le moment où l'avion est sorti de piste et celui où il s'est immobilisé dans le ravin, l'avion a rebondi violemment et à répétition, et il y a eu au moins trois impacts distincts. À chaque impact, les occupants de la cabine ont été projetés vers l'avant dans leur siège, bras et jambes battant en tout sens. On estime que de 15 à 20 secondes se sont écoulées entre le moment où l'avion a quitté la surface en dur de la piste et celui où il s'est immobilisé dans le ravin. Les événements suivants se sont produits pendant la séquence d'impact :
- le combiné de l'interphone cabine est tombé de son support au poste PNC L1;
- des portes des coffres de rangement supérieurs se sont ouvertes d'elles-mêmes, et des bagages à main sont tombés dans la cabine;
- la porte passagers L2 s'est ouverte pendant que l'avion était en mouvement, quelque temps après être sorti en bout de piste;
- dans le couloir passagers près de la porte L2, une enseigne lumineuse d'issue de secours et une grille de ventilation se sont partiellement détachées et pendaient du plafond;
- des masques à oxygène sont tombés de leur logement;
- une table de service portable rangée/immobilisée dans l'office avant s'est délogée et est tombée dans le couloir transversal entre les portes de sortie L2 et R2;
- la tringle à rideau entre la zone des sièges passagers (couloir passagers de droite) et la sortie R4 s'est détachée et est tombée par terre;
- la tringle à rideau séparant la zone des sièges passagers (couloir passagers de gauche) de la sortie L1 s'est détachée et pendait dans le couloir passagers;
- l'extérieur de l'avion a pris feu avant l'arrêt complet de l'avion;
- de la fumée est entrée dans la cabine par les portes d'évacuation ouvertes avant que l'évacuation soit terminée.
1.15.3 L'évacuation
Après l'arrêt complet de l'avion, le chef de cabine principal, à l'avant de l'avion, a détaché sa ceinture et a récupéré le combiné de l'interphone cabine tombé sur le plancher. De l'endroit où il se trouvait, il ne savait pas qu'il y avait de la fumée et un incendie, ni que de nombreux passagers se trouvaient déjà dans les couloirs pour se rendre aux issues de secours. Il a annoncé : Tout va bien, restez assis, l'équipage va s'occuper de vous. Le chef de cabine L2 est alors arrivé et a dit au chef de cabine principal qu'il y avait le feu en porte L3 et qu'il fallait évacuer. Le chef de cabine principal s'est retourné pour faire face à la cabine et il a vu l'incendie à l'extérieur de l'avion par les hublots du côté gauche ainsi que les passagers dans les couloirs. Lorsque le commandant de bord a été avisé de l'incendie et de la nécessité d'évacuer, conformément aux procédures d'urgence de l'équipage de conduite, il a appuyé sur le bouton-poussoir EVAC ON pour déclencher le système d'alarme d'évacuation. Le PNC a ordonné l'évacuation à 4 des 8 issues de secours de l'avion.
On pouvait voir les flammes sur l'aile gauche par la porte L2 ouverte, par le hublot d'observation de la porte L3 et par le hublot de la porte L4. Quarante-deux pour cent des personnes qui ont rempli le questionnaire envoyé aux passagers du vol ont indiqué avoir aperçu des flammes à l'extérieur de l'avion alors que l'appareil était toujours en mouvement, et 10 pour cent ont indiqué avoir vu de la fumée dans la cabine avant que l'avion s'immobilise. De la fumée noire est d'abord entrée dans la cabine par le côté gauche de l'avion, juste sous les hublots des rangées 29 et 31 des sièges passagers. Lorsque l'avion s'est immobilisé, la fumée a continué à entrer dans la cabine, nuisant à la visibilité pendant l'évacuation. Le PNC L3, dont le poste se trouvait tout juste derrière la rangée 31, a enfilé une cagoule antifumée pour sa protection personnelle. Il n'y a eu aucun incendie dans la cabine durant l'évacuation.
Les passagers ont évacué l'avion sous une forte averse de pluie. De fortes averses de pluie et des orages ont été signalés à CYYZ, de 19 h jusqu'à au moins 22 h pour se transformer en une pluie légère. La plupart des passagers ont semblé remonter le remblai du côté droit de l'avion; d'autres étaient répartis dans les deux directions le long du ruisseau. Un passager avec une jambe brisée a été retrouvé à cet endroit, près de l'avion. Le PNC R3, les PNC supplémentaires et un employé de la GTAA sont demeurés avec le passager blessé jusqu'à ce qu'une équipe de pompiers soit en mesure de se réunir et de transporter le passager sur une planche dorsale. On a pu pénétrer à l'intérieur de l'avion par la porte avant de la cabine. On a vérifié le poste de pilotage et les six premières rangées de sièges passagers à la recherche d'occupants avant que les pompiers reçoivent l'ordre d'évacuer l'avion à cause des risques croissants, car des explosions se produisaient. On a constaté qu'il n'y avait plus personne à bord. Sauf pour le passager à la jambe brisée, les pompiers du SLIA n'ont eu à porter secours à aucun autre passager.
1.15.4 Utilisation des issues de secours
Dès le début de l'évacuation, les PNC ont évalué que les issues R1 et R2 étaient inutilisables parce qu'elles donnaient directement sur le ruisseau. Les deux PNC ont suivi la procédure prescrite en cas d'issues inutilisables. À mesure que l'évacuation progressait, les PNC ont réévalué leur première décision concernant les issues R1 et R2 et ont conclu qu'elles devaient être utilisées pour accélérer l'évacuation, compte tenu du fait que la quantité de fumée augmentait dans la cabine.
Le chef de cabine avant savait que l'issue L2 ouverte était inutilisable parce que l'incendie faisait rage à l'extérieur et que le toboggan ne s'était pas déployé. Toutefois, lorsque l'avion s'est immobilisé, il s'est rendu compte que le chef de cabine principal ne savait pas que l'avion était déjà en feu. Il s'est précipité vers lui pour lui dire qu'il fallait évacuer, ce qui a probablement permis à l'évacuation de commencer plus tôt. Ce faisant, il n'a pas eu le temps de fermer la porte de sortie et a laissé la sortie ouverte sans surveillance pour une période indéterminée. Pendant son absence, au moins 16 passagers sont sortis de l'avion par l'issue L2. Deux de ces passagers ont subi des blessures graves : un lorsqu'il a sauté à l'extérieur d'une hauteur de 10 à 12 pieds, l'autre, lorsqu'il a été poussé à l'extérieur par d'autres passagers. Le chef de cabine est par la suite retourné à l'issue de secours L2 et a redirigé les passagers vers l'issue L1.
Lorsque l'issue R3 a été ouverte, le toboggan s'est déployé mais il s'est immédiatement dégonflé après avoir été perforé par des débris, ce qui rendait dangereuse son utilisation. Comme le PNC responsable fermait la porte de l'issue, deux passagers ont forcé le passage et ont sauté à l'extérieur par cette porte. On ne sait pas s'ils ont subi des blessures. Le PNC a par la suite fermé l'issue R3 et a redirigé les passagers vers une autre issue.
L'incendie à l'extérieur de l'avion a rendu les issues de secours L3 et L4 inutilisables. Le PNC à l'issue L3 a bloqué l'issue inutilisable et a redirigé les passagers à la prochaine issue utilisable selon les procédures d'urgence prescrites par l'exploitant. Le chef de cabine arrière s'est posté à l'issue de secours L4, n'a pas bloqué l'issue inutilisable et n'a pas assigné un passager valide ou un PNC supplémentaire pour la bloquer; compte tenu du feu qui faisait rage de ce côté, il était évident que cette issue ne pouvait être utilisée.
La porte R4 était difficile à ouvrir, nécessitant deux PNC pour lever la poignée de commande de la porte en position complètement relevée et pousser la porte vers l'extérieur. Une fois à l'extérieur de son cadre, la porte s'est déplacée facilement vers l'avant. Il a semblé au PNC que le mécanisme d'assistance de porte ne s'était pas engagé; toutefois, après l'accident, le manomètre du vérin d'actionnement d'urgence a été documenté comme étant dans la plage rouge, indiquant qu'il avait fonctionné comme prévu. À environ une largeur de porte devant la porte R4, il y avait un pli permanent dans le revêtement extérieur du fuselage, indiquant que l'endroit avait été soumis à une force de flexion considérable. La déformation du fuselage a très probablement été transmise au cadre de porte, ce qui expliquerait la difficulté d'ouvrir l'issue R4.
L'incendie a rendu deux (L3 et L4) des huit issues inutilisables pour l'évacuation. Les issues L2 et R3, même si leur toboggan ne s'était pas déployé ou s'était dégonflé, ont été empruntées par quelques passagers, et certains d'entre eux ont subi des blessures. Les issues L1, R1, R2 et R4 ont été utilisées. Deux PNC ont bloqué l'accès aux issues inutilisables et ont redirigé les passagers à la prochaine issue de secours utilisable, selon le manuel des procédures d'urgence de la compagnie.
Quatre des huit issues étaient par conséquent dangereuses ou inutilisables : L2, L3, L4 et R3. Toutefois, les issues L2 et R3 auraient pu être utilisées s'il n'y avait pas eu d'autres solutions. Les PNC assignés aux issues L3 et R3 sont demeurés près de leur issue, selon les procédures d'urgence, et ils ont dirigé les passagers vers les autres issues utilisables. Après l'accident, le PNC L2 se rappelait très peu ses actions pendant l'évacuation. Le chef de cabine à l'issue L4 a aussi laissé son issue sans surveillance (inutilisable à cause de l'incendie/n'a jamais été ouverte) alors que cette personne ordonnait l'évacuation à l'issue R4. Le chef de cabine à l'issue L4 a ordonné au PNC R4 d'évacuer et d'aider les passagers au pied du toboggan.
Environ les deux tiers des passagers ont évacué par l'issue R4. Les autres ont évacué par les issues L1, R1 et R2, et quelques-uns ont évacué par les issues L2 et R3. On estime que l'avion a été évacué en un peu plus de deux minutes. Un certain nombre de passagers ont emporté leurs bagages à main. Compte tenu de l'urgence d'évacuer rapidement à cause de la présence de fumée dans la cabine et de l'incendie, cette action présentait un risque de sécurité important.
Au cours de l'entraînement aux procédures d'urgence, les PNC apprennent à se servir d'un mégaphone pour être bien entendus et compris lorsqu'ils portent une cagoule antifumée. Le PNC à l'issue L3 ne pouvait accéder facilement à aucun des mégaphones à bord de l'avion.
1.15.5 Toboggans
Le toboggan L1 ne s'est déployé et gonflé que partiellement. Du fait de l'assiette en piqué aile gauche haute de l'avion, ni le dispositif de retenue intermédiaire ni le dispositif de retenue inférieur ne se sont séparés du toboggan, de sorte que le toboggan est demeuré plié en deux contre le fuselage. Lorsque des passagers ont sauté par l'issue L1, certains se sont empêtrés dans la partie repliée du toboggan et ils n'ont pu se dégager avant que d'autres passagers sautent sur eux. Au cours de l'évacuation, le toboggan s'est dégonflé complètement. L'examen du toboggan après l'accident a révélé qu'il avait été perforé en deux endroits. Les déchirures étaient d'une longueur de 18 cm et de 13 cm.
Le toboggan L2 ne s'est pas déployé, ce qui a rendu l'issue dangereuse, mais quelques passagers ont tout de même sauté à l'extérieur par cette issue. Comme les issues L3 et L4 n'avaient pas été ouvertes, les toboggans de ces portes n'ont pas été déployés. Le toboggan R1 s'est déployé automatiquement, comme prévu. Par contre, le toboggan présentait un angle très peu prononcé, parce qu'il était presque perpendiculaire à l'avion. En conséquence, le taux de descente a été considérablement ralenti. Au bas du toboggan, de la végétation de part et d'autre s'appuyait contre le toboggan pour le retrousser vers l'intérieur et former un tube. À un moment donné, le PNC à l'issue R1 a dû interrompre l'évacuation pour attendre que les passagers déjà engagés sur le toboggan traversent ce tube. À mesure que les passagers se servaient du toboggan, le bas du toboggan a fini par s'aplatir. Le toboggan R2 a fonctionné normalement. Le toboggan R3 s'est déployé comme prévu; toutefois, il s'est immédiatement dégonflé. Le PNC à l'issue R3 a fermé la porte pour éviter que des passagers tentent d'utiliser cette issue et se blessent. On a par la suite déterminé que le toboggan s'était déchiré sur un morceau d'épave. Le toboggan R4 s'est déployé comme prévu. Les passagers ont évacué à la file indienne par les toboggans à deux lignes d'évacuation des issues R1, R2 et R4.
1.16 Essais et recherches
1.16.1 Essais en simulateur
Le 25 septembre 2005, les enquêteurs du BST ont mené des essais en simulateur au centre de formation d'Airbus. Le simulateur Airbus utilisé pour les essais est un simulateur d'entraînement pour équipage de conduite, et non un simulateur technique. Par conséquent, les essais n'ont pu donner de résultats quantitatifs, mais plutôt des résultats qualitatifs et une idée générale du comportement de l'avion et de la technique de pilotage utilisée en fonction des procédures d'utilisation normalisées (SOP) d'Air France. Les essais en simulateur ont permis aux enquêteurs d'observer divers modes de fonctionnement automatiques et manuels à partir du profil de vent et de l'état de la piste réels à Toronto au moment de l'accident. Divers profils ont été exécutés pour permettre de déterminer quel profil de vol avait été suivi par l'avion.
Un des essais en mode manuel consistait à exécuter le même profil que celui de l'avion accidenté. À environ 300 pieds agl, lorsque le vent a changé de direction pour souffler de l'arrière, le vecteur tendance vitesse a accusé une diminution de vitesse. Pour maintenir la vitesse ciblée poussée automatique débrayée, on a porté la poussée à environ 70 % de N1. Lorsque cette poussée additionnelle a été maintenue comme dans le cas du vol de l'accident, la vitesse a augmenté. Sans aucune correction en tangage, le simulateur est passé au-dessus du faisceau de descente et a reproduit des résultats semblables à ceux du profil de l'accident. Le vent arrière et la poussée supplémentaire ont contribué à prolonger le flottement, ce qui s'est soldé par un atterrissage plus long qu'en temps normal. La sélection des inverseurs de poussée a été retardée après le toucher des roues, ce qui a augmenté la distance d'arrêt.
Lors d'un atterrissage avec poussée automatique embrayée et pilote automatique débrayé, les essais ont montré que la vitesse ciblée était maintenue et que le simulateur exécutait l'atterrissage sur les 2000 premiers pieds de la piste.
À partir des procédures d'Air France et abstraction faite de toute condition météorologique comme une microrafale, les essais en simulateur ont montré qu'une remise des gaz pouvait être exécutée en toute sécurité n'importe quand jusqu'au déploiement des inverseurs de poussée. En cas de remise des gaz à faible énergie par vent arrière, il fallait faire extrêmement attention pour que la queue de l'appareil ne vienne en contact avec le sol. Les essais en simulateur n'ont pas été en mesure de reproduire complètement les conditions qui évoluaient, et notamment la visibilité associée aux conditions météorologiques extrêmes présentes à Toronto au moment de l'accident, et aucune conclusion ne peut être tirée des essais en simulateur en ce qui a trait au jugement du pilote relativement à une remise des gaz.
1.16.2 Essai des freins de l'avion
Le 13 octobre 2005, les huit freins du train d'atterrissage principal ont été transportés par les enquêteurs du BST à la Goodrich Corporation, aux États-Unis, pour essai. On a remarqué au cours de l'examen du frein numéro 1 qu'il avait été exposé à une chaleur élevée. Avant l'essai, un nouveau raccord rapide avait été monté sur le circuit principal, parce que le raccord d'origine avait subi des dommages par impact. À mesure que la pression hydraulique augmentait, un des pistons s'est mis à fuir. À cause des dommages subis pendant l'accident, aucun autre essai de fonctionnement n'a été possible sur ce frein. La fuite relevée sur le piston du frein numéro 1 était prévue du fait de l'ampleur des dommages par impact subis par le frein. Rien n'indique qu'il y avait une fuite interne, ce qui laisse croire que les joints d'étanchéité des goupilles étaient probablement intacts au moment de l'accident. Si le circuit principal présentait des traces de liquide dans tous les cylindres, le circuit de secours ne présentait aucune trace de liquide dans trois des cylindres. Cette constatation s'explique probablement par une fuite de liquide après l'accident par des raccords qui avaient été endommagés. Le démontage n'a révélé aucune anomalie préexistante qui aurait mené à une défaillance ou à un fonctionnement réduit du frein.
Un piston du frein numéro 2 présentait une légère fuite au moment de l'essai de ce dernier. Cette fuite était prévue en raison de l'ampleur des dommages par impact. Le frein a réussi tous les essais de fonctionnement. Les autres freins (numéros 3 à 8) ont tous réussi les essais de fonctionnement. En conclusion, les freins et le système de freinage ont été trouvés en bon état de service.
1.16.3 Questionnaire envoyé aux passagers du vol
Un questionnaire a été envoyé aux passagers du vol de l'accident afin de recueillir des renseignements précieux pour la sécurité. Le BST a envoyé des questionnaires à 264 des 297 passagers. Du fait que 33 passagers étaient âgés de moins de 16 ans, on ne leur a pas envoyé le questionnaire. Le taux de réponse général a été de 35,6 %, ce qui représente un échantillonnage de 31,31 % de tous les passagers. Des statistiques de base non paramétriques tirées d'un résumé des données brutes sont présentées dans la partie Renseignements de base du présent rapport.
1.17 Renseignements sur les organismes et la gestion
1.17.1 Formation sur les facteurs humains chez Air France
Le programme sur les facteurs humains d'Air France vise principalement à améliorer la culture chez Air France lorsqu'il s'agit de traiter de façon appropriée les enjeux relatifs aux facteurs humains. Deux mécanismes sont utilisés pour atteindre cet objectif : la formation (initiale et périodique) en facteurs humains et le retour d'expérience (c.-à-d. l'analyse des conditions préalables aux incidents recueillies dans le cadre d'un programme sur la sécurité aérienne). Ces deux éléments sont complémentaires, en ce que le retour d'expérience sert à orienter les efforts déployés ultérieurement pour la formation.
Il y a 65 formateurs en facteurs humains à la disposition des équipages de conduite. Ces formateurs reçoivent un cours de pédagogie de deux jours fourni par Air France, un cours de formation de quatre jours en facteurs humains présenté par la société Dédale (un fournisseur) et ils participent chaque année à un programme CRM (gestion des ressources de l'équipage) conjoint d'une journée présenté par Air France.
Tous les membres d'équipage de conduite reçoivent de la formation en CRM à différents moments pendant leur carrière. Pour la plupart des membres d'équipage, leur initiation à la CRM prend la forme d'un cours de formation à la coordination d'un équipage multiprofessionnel d'une durée de deux jours au cours de la formation initiale. Suit un cours initial en CRM d'une durée de deux jours présenté en deux parties, la première avant la formation de qualification sur type, et la seconde, six mois après la formation de qualification sur type. De plus, certains sujets touchant les facteurs humains sont traités au cours de la formation de qualification sur type. Les pilotes passant à commandant de bord reçoivent deux jours de formation CRM de plus pendant le processus de promotion, la première partie étant présentée après la formation de qualification sur type, et la seconde partie, le suivi, étant présentée six mois après la formation de qualification sur type. La CRM est aussi couverte pendant la formation périodique sur simulateur, différents sujets étant sélectionnés chaque année.
1.17.2 Politique de non-punition d'Air France
Une politique avec un engagement de non-punition a été publiée le 17 janvier 2001. Elle était signée du directeur général et s'appliquait à tout le monde dans la compagnie. Selon cette politique, il est de la responsabilité de chaque agent de communiquer toute information sur des événements pouvant affecter la sécurité des opérations. L'engagement stipule ceci :
Pour favoriser ce retour d'expérience, je m'engage à ce qu'Air France n'entame pas de procédure à l'encontre d'un agent qui aura spontanément et sans délai révélé un manquement aux règles de sécurité dans lequel il est impliqué et dont Air France n'aurait pas eu connaissance autrement. Toutefois, ce principe ne peut s'appliquer en cas de manquement délibéré ou répété aux règles de sécurité.
Cette politique est jugée comme un moyen de permettre au service des facteurs humains de cerner les domaines qui feront l'objet de la formation périodique chaque année.
1.17.3 Entraînement sur A340 chez Air France
La Division des normes professionnelle d'Air France produit un programme d'entraînement général, un manuel de normes et des plans de cours particuliers (utilisés par les instructeurs). L'entraînement est ensuite donné par les divisions de pilotage et le centre d'entraînement.
En général, la formation sur simulateur chez Air France porte sur l'exécution des manoeuvres précisées par les règlements pertinents. La prise de décision et le traitement de circonstances opérationnelles spéciales sont enseignés lors de l'entraînement type vol de ligne ou durant la formation en ligne. Des exercices particuliers sont ajoutés au cursus sur la foi de la rétroaction reçue de l'organisation de la sécurité aérienne d'Air France. Les points suivants étaient particulièrement pertinents au sujet du vol de l'accident :
- Remise des gaz après la MDA (altitude minimale de descente)/DH : En 2003, un exercice d'atterrissage interrompu a été ajouté à la formation sur simulateur, où l'avion pénètre dans du brouillard au moment du toucher des roues pendant une approche manuelle. Les deux membres d'équipage de conduite du vol ayant mené à l'accident ont reçu cette formation. En 2006-2007, des exercices exigeront que chaque membre d'équipage de conduite fasse une remise des gaz après la DH.
- Pistes contaminées : En 2004-2005, un exercice d'entraînement type vol de ligne comprenait des manoeuvres sur pistes contaminées. L'équipage de conduite devait décoller d'une piste enneigée à Toronto et déterminer la masse maximale au décollage. L'exercice se terminait par un atterrissage à CYOW.
- Utilisation du radar météorologique : En 2006-2007, un élément portera sur l'utilisation du radar météorologique pour détecter la turbulence.
1.17.4 Manuels, politiques et procédures d'Air France
Le manuel d'exploitation d'Air France (MANEX) constitue la seule référence réglementaire pour le personnel d'exploitation d'Air France. La Direction Générale de l'Aviation Civile (DGAC) française approuve les sections obligatoires et accepte le manuel comme un tout. Le MANEX se divise en quatre parties :
- La Partie A porte sur les procédures d'exploitation générales et s'appelle le manuel Généralités Opérations (GEN.OPS). Ce manuel fournit l'ensemble de la politique et des normes d'exploitation générales visant la flotte d'Air France.
- La Partie B comprend les manuels TU (Technique Utilisation) pour chaque type d'aéronef. Cette partie fournit les normes techniques aux équipages d'Air France.
- La Partie C contient des données sur les routes et les aérodromes.
- La Partie D comprend les programmes et les procédures destinés à la vérification et à la formation du personnel de l'exploitation aérienne.
Le manuel aéronautique complémentaire (MAC) ne fait pas partie du MANEX. C'est un recueil d'informations aéronautiques générales à l'intention des équipages d'Air France (on y retrouve notamment des informations sur les phénomènes météorologiques spéciaux, comme le givrage et les cendres volcaniques).
Chez Air France, le service responsable du MANEX est la Direction des Opérations et du Développement Technique. Les modifications aux manuels sont apportées en fonction d'un calendrier. Le GEN.OPS est normalement mis à jour deux fois par année, mais il a été mis à jour trois fois en 2005. Les manuels TU sont mis à jour quatre fois par année. Les modifications sont distribuées sous format papier à tous les pilotes et sous forme d'un disque numérique à tous les pilotes d'A330 et d'A340. La version papier est la version officielle.
Les modifications apportées aux manuels sont proposées par le Groupe Normes et Standards (GNS) d'Air France, qui se réunit tous les mois et reçoit des données de différentes sources, y compris des services de la sécurité des vols et de la formation. On trouve aussi un groupe de discussion sur l'intranet d'Air France, auquel environ 100 membres d'équipage de conduite, gestionnaires et instructeurs ont accès, et qui offre l'occasion de recueillir des avis avant la mise en vigueur des modifications.
Comme principe directeur, Air France essaie de demeurer le plus près possible des recommandations de l'avionneur pour ce qui est des normes d'exploitation. Toutefois, il y a des exceptions à ce principe, basées sur l'expérience opérationnelle ou sur les efforts d'harmonisation entre les différentes flottes d'aéronefs et les différents avionneurs. Au cas où une procédure viendrait à différer de celle de l'avionneur, Air France demande à celui-ci s'il n'y voit aucune objection technique avant de mettre en oeuvre cette procédure.
1.17.5 Planification des vols
Le logiciel de planification de vol d'Air France, Octave, est optimisé pour sélectionner la route, le niveau de vol et le terrain de dégagement les plus efficaces pour un vol donné. Un agent d'exploitation utilisant cet outil prépare des plans de vol opérationnels pour les équipages. L'équipage examine le plan de vol et apporte toute modification jugée nécessaire.
Les équipages d'Air France volent vers de nombreuses destinations, et il n'est pas rare que les équipages volent vers des destinations pour lesquelles ils n'ont pas une grande ni une récente expérience. Permettant de partager l'information relative à des destinations données, des feuilles d'information ont été rédigées par le bureau de la sécurité aérienne des flottes d'A330/340 pour fournir des renseignements de base aux équipages volant vers une destination donnée. Ces feuilles peuvent être obtenues du bureau de la sécurité aérienne ou elles sont accessibles sur le site Internet de la Division A340 de la compagnie. Ce n'est pas une pratique courante de les inclure avec les renseignements donnés à l'exposé fourni aux équipages en train de faire leur préparation de vol. La feuille pour le vol vers Toronto indiquait ce qui suit, mais l'équipage du vol AFR358 ne l'a pas consultée, car il en connaissait très bien le contenu :
Il est rare d'être mis en attente à CYYZ, sauf pour des conditions météorologiques (neige, orages...), mais nous ne disposons pas toujours de la trajectoire ni du niveau de vol planifié. Les conditions météo à KIAG sont très similaires à celles de CYYZ. En cas de doute lorsqu'un front traverse la région, anticiper un déroutement devant le front (CYUL ou CYOW) ou derrière le front (KORD) [Chicago].
Pour les vols long-courriers en partance de LFPG, les équipages de conduite se réunissent dans la salle de préparation de vol au moins une heure et quarante-cinq minutes avant l'heure de départ prévue. L'équipage reçoit un dossier de vol préparé par un agent d'exploitation comprenant des copies papier de tous les plans de vol, des conditions météorologiques, etc. L'équipage se rend ensuite dans une pièce réservée à l'exposé où il dispose de bureaux et d'un accès informatique pour obtenir des renseignements supplémentaires.
Le commandant de bord et le copilote passent en revue tous les aspects pertinents du vol, notamment les conditions météo, le plan de vol, les NOTAM, la sûreté, etc. Ils se partagent les tâches et travaillent individuellement avant d'échanger leurs notes. Ils parlent de leurs calculs finals sur le carburant, puis ils entrent la valeur sur laquelle ils se sont entendus dans le système informatique. Ce système (appelé Peter Pan) calcule les performances de décollage. L'équipage imprime ensuite une feuille de décollage. Au cours de ce processus, l'équipage de conduite peut téléphoner à l'agent d'exploitation s'il a des questions sur le vol. Lorsque la préparation de vol est terminée, l'équipage de conduite laisse une copie du plan de vol opérationnel dans une boîte se trouvant dans la salle de préparation de vol. L'équipage de conduite rencontre ensuite le PNC, et le commandant de bord donne un exposé couvrant les aspects opérationnels du vol, y compris la sécurité, la sûreté et les conditions météo.
À bord de l'avion, l'équipage dispose de plusieurs moyens d'obtenir des mises à jour des systèmes de bord, notamment les radios VHF et HF ainsi que l'ACARS. Ces moyens donnent accès à des rapports météorologiques et à des prévisions à jour ainsi qu'aux répartiteurs et aux préposés au suivi de vol d'Air France par l'intermédiaire de l'ACARS ou de communications par satellite.
Les exigences suivantes représentent le carburant minimal requis pour la planification du vol. De plus, le commandant de bord peut, à sa discrétion, décider d'emporter plus de carburant. Le carburant minimum pour un vol standard chez Air France se calcule de la façon suivante :
- Carburant pour le roulage : comprend le démarrage des moteurs, l'utilisation du groupe auxiliaire de bord (APU), le roulage et des imprévus comme le temps nécessaire au dégivrage.
- Carburant pour le voyage : carburant requis du lâcher des freins jusqu'au toucher des roues à destination, compte tenu des conditions de vol et de la route anticipées.
- Réserve pour la route : carburant additionnel transporté pour des imprévus. Il doit correspondre à 3 ou 5 % du carburant du voyage (à l'exclusion du coefficient de transport), selon qu'un terrain de dégagement en route est accessible, mais dans tous les cas il ne doit pas être inférieur à la quantité de carburant nécessaire pour demeurer en attente 5 minutes à 1500 pieds au-dessus de l'aéroport de destination.
- Réserve pour déroutement : carburant nécessaire à l'exécution d'une approche interrompue à destination, puis au vol vers le terrain de dégagement déclaré, compte tenu des conditions de vol anticipées.
- Réserve finale : suffisamment de carburant pour demeurer en attente 30 minutes à une altitude de 1500 pieds au-dessus du terrain de dégagement déclaré.
Le plan de vol opérationnel du vol AFR358 indiquait les quantités de carburant suivantes :
Carburant voyage | 54 800 kg |
---|---|
Réserve déroutement (vers KIAG) | 2400 kg |
Réserve route | 1300 kg |
Réserve finale | 2800 kg |
Carburant roulage | 700 kg |
Carburant total requis | 62 000 kg |
Compte tenu des conditions météorologiques au moment de l'arrivée, le commandant de bord a décidé d'emporter 3000 kg de carburant supplémentaire. Compte tenu de la consommation de carburant nécessaire à l'emport de ce carburant supplémentaire, le commandant de bord disposerait de 2250 kg de carburant supplémentaire à l'arrivée à destination.
Le terrain de dégagement principal, KIAG, a été automatiquement sélectionné par le logiciel de planification de vol. Cette sélection se fait uniquement en fonction de la proximité de l'aéroport de destination et sans tenir compte des conditions météo. Une page additionnelle du logiciel, également fournie à l'équipage, indique le carburant nécessaire pour d'autres aéroports de dégagement. Pour le vol de l'accident, les autres terrains de dégagement étaient KCLE (4300 kg), CYOW (4500 kg), Montréal (CYUL) (5900 kg), Chicago (KORD) (6900 kg) et KJFK (7400 kg).
Dans le cas d'AFR358 à destination de Toronto, le plan de vol opérationnel indiquait une masse maximale à l'atterrissage de 190 000 kg, ce qui constitue la masse structurale maximale admissible pour cet avion. Aucun autre calcul entourant les performances à l'atterrissage n'avait été fourni à l'équipage.
Dans le cas d'un vol long-courrier, un agent d'exploitation optimise et vérifie le plan de vol en tenant compte des caractéristiques propres au vol, y compris les conditions météo et les minimums d'atterrissage. L'agent complète, et révise s'il le faut, sa préparation de vol en ajoutant des commentaires en vue d'attirer l'attention de l'équipage de conduite sur des points précis. Au cours de la préparation de vol, l'équipage peut appeler un agent d'exploitation afin d'obtenir des calculs additionnels en fonction de divers imprévus, comme des trajectoires vers les terrains de dégagement ou des niveaux de vol. Comme le système optimise la sélection des trajectoires et des niveaux de vol, il n'est pas rare que les nombreux vols qui partent à peu près en même temps vers des cheminements identiques fassent l'objet, une fois en vol, de fréquentes déviations par rapport aux trajectoires prévues. Dans le cas du vol de l'accident, le vol a été exécuté sur une trajectoire différente et à une altitude inférieure par rapport à ce qui était indiqué dans le plan de vol opérationnel en vigueur au moment du départ.
Tôt lors de la descente à Toronto, l'équipage a décidé qu'en cas d'approche interrompue à Toronto, il se dérouterait vers CYOW. Le carburant minimum requis pour un déroutement à CYOW a été calculé par les enquêteurs du BST, et il se chiffrait à 4500 kg, plus une réserve finale de 2800 kg pour un total de 7300 kg. Cette quantité était basée sur la masse de l'avion pour des heures données au cours de l'approche et de l'atterrissage. L'avion s'est posé à Toronto avec 7630 kg de carburant à bord, suffisamment pour exécuter l'approche interrompue et se rendre au terrain de dégagement CYOW.
Les procédures de gestion du carburant d'Air France indiquent que le commandant de bord doit prendre la décision de se dérouter ou de poursuivre le vol à destination au plus tard lorsqu'il estime que le carburant qui reste pour se rendre à destination équivaut au carburant minimal permettant de se dérouter.
Vers la fin du vol, l'équipage a consulté le MANEX pour confirmer la définition de carburant minimum. Le MANEX précise que si l'on prévoit que le carburant estimé à l'atterrissage est inférieur à 1,5 fois la réserve finale, l'équipage doit déclarer « carburant minimum » (dans ce cas, 4200 kg) à l'ATC. Cette annonce ne confère pas à l'avion un traitement prioritaire, mais avise l'ATC qu'une situation d'urgence peut survenir si le vol est retardé. La procédure indique aussi que l'équipage doit déclarer une situation d'urgence pour cause de faible niveau de carburant (un Mayday ou un PAN PAN, selon la situation) s'il reste au vol moins que la réserve finale de carburant (dans ce cas, 2800 kg).
Pour le vol de l'accident, si l'équipage avait décidé de se dérouter sur CYOW après une approche interrompue à CYYZ, il aurait dû faire une annonce « carburant minimum ». En cas de retards causés par le trafic ou les conditions météo, il est probable que l'équipage aurait déclaré une situation d'urgence pour cause de faible quantité de carburant.
Pendant le vol, l'équipage avait envisagé la nécessité de disposer d'une plus grande quantité de carburant additionnel (en plus du minimum de 7300 kg) pour le déroutement sur CYOW. La copie du commandant de bord du plan de vol opérationnel récupérée du poste de pilotage était annotée du chiffre 5000 près de CYOW sur la page de planification du terrain de dégagement, ce qui indiquerait que l'équipage envisageait la nécessité de disposer de carburant additionnel en sus de la quantité de carburant minimal pour déroutement en vue du trajet vers CYOW, compte tenu des conditions du moment.
1.17.6 Procédures d'approche et d'atterrissage d'Air France
Les minima et les conditions météorologiques pour exécuter une approche ILS CAT I figurent dans le GEN.OPS d'Air France. Les minima régissant l'exécution d'une approche ILS sont la visibilité ou la RVR. L'approche peut être exécutée sans répartition spécifique des tâches (appelée approche standard CAT I) si la visibilité ou la RVR est supérieure à 800 m (2600 pieds). Si la visibilité signalée ou la RVR est inférieure à 800 m, les tâches de vol doivent être redistribuées entre les membres d'équipage puisque l'approche se situe sous la limite autorisant les copilotes à l'exécuter. L'approche ne peut se poursuivre au-delà du repère d'approche finale (appelé « gate »), si la visibilité signalée ou la RVR est inférieure à celle précisée sur la carte d'approche appropriée.
Une remise des gaz à la DH doit être amorcée si les références visuelles nécessaires à la poursuite de l'approche n'ont pas été établies, ou si le contact visuel avec les environs de la piste a été établi mais que la position ou la trajectoire de l'avion est telle qu'elle compromet la poursuite de l'atterrissage.
Dans le dossier de vol de l'équipage se trouve une feuille contenant des renseignements sur les terrains de dégagement pour l'entretien courant des avions et le traitement des voyageurs. Pour le vol de l'accident, il y avait cinq terrains de dégagement : KIAG, CYOW, CYUL, KORD et KJFK. La feuille mentionnait que si KIAG était utilisé, les passagers seraient transportés par autobus à Toronto, un trajet de trois heures. Pour CYOW, un trajet en autobus d'une durée de cinq heures était précisé. Sur la copie de cette feuille pour l'équipage, la durée des trajets en autobus depuis KIAG et CYOW avait été encerclée. Rien n'indique que ces renseignements aient été pris en compte dans la décision de l'équipage d'exécuter l'approche.
Le MANEX précise les exposés à faire et leur contenu pour chaque vol. Règle générale, la procédure souligne qu'un bon exposé devrait être court et facilement compris par tous les membres d'équipage. Il devrait susciter des questions et permettre aux autres membres d'équipage de s'exprimer.
Au cours de l'exposé à l'arrivée, donné idéalement avant d'entamer la descente, le PF présente les éléments suivants :
- les paramètres d'atterrissage (carburant restant, masse et vitesses);
- les cartes d'aérodrome à utiliser (préciser les numéros de page);
- les points de cheminement clés pour l'arrivée, l'approche et l'approche interrompue ainsi que les altitudes minimales de sécurité;
- les aides radio à utiliser;
- l'objectif d'altitude de stabilisation;
- l'altitude minimale de stabilisation;
- l'ampleur de l'automatisation prévue;
- des détails sur l'approche et l'atterrissage menant, au besoin, à une revue des procédures pour le dispositif avertisseur de proximité du sol (GPWS), le système de surveillance du trafic et d'évitement des collisions (TCAS), une approche non stabilisée, etc.;
- les points clés du trajet au roulage après l'atterrissage.
Deux listes de vérifications doivent être exécutées à chaque arrivée : la liste de vérifications d'approche et la liste de vérifications avant atterrissage. La liste de vérifications d'approche comprend quatre éléments : exécution de l'exposé, vérification de l'état de l'ECAM, calage des altimètres au QNH et contre-vérification, et allumage des consignes lumineuses ceintures.
La liste de vérifications avant atterrissage comprend deux éléments : poussée automatique en mode vitesse ou sur Off et mémo d'atterrissage en vert. Si le mémo d'atterrissage n'est pas affiché sur l'ECAM, il peut être exécuté par l'équipage et il comprend la vérification des éléments suivants : consignes lumineuses, cabine, train d'atterrissage, volets et déporteurs. Les listes de vérifications se trouvent au dos du Manuel de référence rapide (QRH) et elles sont aussi affichées sur les tablettes coulissantes des pilotes.
Le MANEX indique les annonces que doit faire le PNF si des écarts par rapport à la trajectoire d'approche idéale sont observés. Au plancher de l'approche stabilisée (1000 pieds agl pour le vol de l'accident), si l'approche n'est pas stabilisée, le PNF devrait annoncer : « x pi non stabilisée ». Sous l'altitude minimale de stabilisation, les annonces suivantes devraient être faites, le cas échéant :
- « Vitesse », si la vitesse s'écarte de plus de 10 noeuds au-dessus de VAPP ou de plus de 5 noeuds au-dessous de VAPP;
- « Vario », si la vitesse verticale dépasse 1000 pieds par minute;
- « Inclinaison », si l'angle d'inclinaison latérale dépasse 5°;
- « Assiette », si l'assiette dépasse la limite précisée pour l'avion;
- « x pieds non stabilisée », s'il devient évident que l'approche n'est plus stabilisée.
Le MANEX comprend une note qui précise qu'une annonce d'approche non stabilisée nécessite une décision du commandant de bord. Il fait en outre remarquer que si le copilote juge qu'une remise des gaz est nécessaire, il doit en faire la suggestion au commandant de bord.
Le manuel de l'A330/A340 précise que les deux pilotes surveillent l'alignement de piste et l'alignement de descente sous 500 pieds agl. Les tolérances indiquées sont de plus ou moins un point pour l'alignement de piste (LOC) et l'alignement de descente entre 500 et 300 pieds agl, et de plus ou moins ½ point sur le LOC et de plus ou moins un point sur l'alignement de descente entre 300 et 200 pieds agl. Il n'est pas nécessaire de surveiller le LOC ni l'alignement de descente sous 200 pieds agl.
Le MANEX indique qu'à la DH, le commandant de bord (que ce soit le PF ou le PNF) annonce : « on continue » ou « remise des gaz ». Comme tel, c'est le commandant de bord qui prend la décision aux minima de poursuivre l'approche ou d'exécuter une approche interrompue.
Air France a révisé ses procédures, à compter du 2 septembre 2004, pour traiter du risque qu'une approche devienne non stabilisée ou que les références visuelles soient perdues après que l'avion a déjà franchi la DH. La procédure révisée indique que :
[Traduction]
Après avoir franchi la DH, si les références visuelles, la trajectoire ou la position de l'avion évoluent de façon à compromettre l'approche ou l'atterrissage, le commandant de bord doit amorcer une remise des gaz, une approche interrompue ou un atterrissage interrompu.
Cette modification s'applique aussi aux procédures pour les approches de non précision, les approches indirectes et les approches ILS CAT II/III. Elle a été mise en oeuvre conformément au plan de prévention annuel d'Air France (avril 2004 à mars 2005), lequel mentionnait les sorties de piste comme un risque à cibler ainsi que l'énoncé de l'objectif d'améliorer la prise de décision pour ce qui est de l'exécution des approches interrompues à la suite d'une perte de stabilisation ou de références visuelles après franchissement de la DH ou de la MDA.
La procédure normale pour l'atterrissage de l'A340 précise que le PF commence son arrondi à environ 40 pieds agl tout en plaçant les manettes des gaz à la position de ralenti. Après le toucher des roues du train principal, le PF passe au ralenti poussée inverse. Le PNF annonce « Reverse verts », ce qui indique que les quatre inverseurs se sont déployés) et « Spoilers » dans l'ordre que ces indications de bon fonctionnement des systèmes s'affichent dans le poste de pilotage. Si un inverseur ne fonctionne pas, le PNF annonce : « La X [1, 2, 3, 4] ne passe pas », indiquant quel inverseur ne s'est pas déployé correctement.
Le PF sélectionne l'inversion maximale dès qu'il entend l'annonce « Reverse verts ». La procédure précise qu'un atterrissage doit être complété une fois les inverseurs sélectionnés (à savoir le point auquel une remise des gaz en toute sécurité n'est plus possible). On applique normalement la poussée d'inversion après que le train avant se trouve sur la piste.
Pendant la course à l'atterrissage, le PNF surveille la présentation du système de freinage automatique sur la page Trains de l'ECAM pour s'assurer qu'il fonctionne correctement. En cas d'anomalie du freinage automatique, ou si cela devient nécessaire, le PF freine au pied.
À 70 noeuds, le PNF annonce « 70 noeuds » et, à ce moment, le PF déplace les manettes des gaz au ralenti poussée inverse, à moins que ne survienne une situation d'urgence. Une fois la vitesse de roulage atteinte, le PF déplace les manettes des gaz au ralenti, et les inverseurs se referment. Il faut débrayer le freinage automatique avant d'atteindre 20 noeuds.
1.17.7 Radar météorologique
Les pratiques suggérées par Air France pour l'utilisation du radar météorologique et l'évitement des orages comprennent les éléments suivants :
- régler régulièrement l'inclinaison et la portée;
- exécuter toute manoeuvre vent debout par rapport aux orages;
- éviter de passer à moins de 5000 pieds au-dessus ou au-dessous d'une cellule orageuse;
- éviter les zones de rouge ou de magenta et leurs bords (image radar);
- décider d'éviter du mauvais temps avant que les échos radar ne se trouvent à moins de 40 nm;
- au-dessus de 23 000 pieds, se tenir à 20 nm des cellules;
- au-dessous de 23 000 pieds, se tenir de 5 à 20 nm des cellules, selon la température.
1.17.8 Calcul de la distance d'atterrissage chez Air France
La distance d'atterrissage homologuée est la distance horizontale entre le point où l'avion franchit les 50 pieds agl et le point où l'avion fait un arrêt complet sur la piste. Cette distance est démontrée par l'avionneur dans les conditions suivantes :
- vitesse de l'avion à 50 pieds équivalent à 1,23 fois la vitesse de décrochage en configuration d'atterrissage;
- piste en dur, sèche et plate;
- température standard;
- freinage maximal sans recours au freinage automatique, avec antidérapage et sortie automatique des déporteurs, inverseurs de poussée non utilisés.
Les procédures du FCOM d'Air France énoncent que le pilote doit vérifier avant le départ que la longueur de piste disponible à destination est au moins égale à la distance d'atterrissage nécessaire, compte tenu de la masse à l'atterrissage prévue. Pour une piste sèche, la distance réglementaire requise est la distance d'atterrissage homologuée divisée par 0,6. Pour une piste mouillée, la distance sur piste sèche est augmentée de 15 %. Pour une piste contaminée, l'exigence réglementaire demande de prendre la plus élevée des valeurs suivantes : la longueur de piste nécessaire sur piste mouillée ou la distance d'atterrissage réelle démontrée, nécessaire sur une piste contaminée. Il n'existait aucune procédure particulière chez Air France exigeant que, avant le départ, les équipages calculent la distance d'atterrissage en tenant compte des conditions environnementales attendues ou prévues à destination. Avant le début d'une approche vers un aéroport, la liste de vérifications avant descente prévoyait une vérification des conditions météorologiques à destination. Chez Air France, les procédures avant descente n'obligeaient pas l'équipage à calculer la distance d'atterrissage nécessaire en fonction des conditions attendues à l'atterrissage.
Le tableau TU 04.01.64. 14Note de bas de page 15 du MANEX sert à déterminer la distance d'atterrissage (non pondérée) volets complètement sortis ou sortis en position 3 sur une piste sèche ou mouillée, et freinage automatique réglé sur faible ou moyen. Une note indique que ces données sont fournies pour information seulement puisque l'homologation n'est pas menée avec freinage automatique. D'autres tableaux sont fournis pour permettre de déterminer la longueur de piste (distance pondérée) requise pour un atterrissage sur piste contaminée. Ces tableaux doivent être utilisés en temps normal pour déterminer le caractère adéquat d'une piste donnée.
Les tableaux de la Section 34 du QRH servent à déterminer la distance d'atterrissage nécessaire pour diverses masses, configurations et divers états de piste. Ces tableaux comprennent une note indiquant qu'ils doivent être utilisés en cas de défaillance d'un système de bord en vol. En d'autres temps, le tableau TU 04.01.64. 14 du MANEX sert pour les atterrissages sur pistes contaminées ou mouillées; le tableau TU 04.02.50. 13Note de bas de page 16 du MANEX sert pour les atterrissages sur pistes contaminées. Dans ces tableaux, des corrections sont prévues pour tenir compte de l'altitude-pression de l'aéroport, du vent arrière et de l'utilisation des inverseurs de poussée. Il n'y a aucune instruction quant à la façon d'appliquer ces corrections et, au cours de l'enquête, il a été constaté que l'on pouvait obtenir différents résultats en fonction des méthodes utilisées pour appliquer les corrections.
Selon Air France, une piste est dite contaminée lorsqu'elle est recouverte partiellement ou complètement par plus de 3 mm (1/8 po) d'eau. De plus, les termes piste inondée et eau stagnante sont utilisés pour décrire cette situation. Tout atterrissage est interdit (sauf en cas d'urgence) sur une piste recouverte par plus de 13 mm (½ po) d'eau stagnante.
Se poser sur une piste contaminée par moins de 13 mm (½ po) d'eau stagnante est permis sous réserve des limites de vent traversier. La limite de vent traversier est de 15 noeuds pour un atterrissage sur une piste contaminée :
- si l'indice de frottement est supérieur à 0,25;
- si aucun indice de frottement n'est disponible, le freinage est qualifié de moyen à mauvais, ou mieux.
La limite de vent traversier pour un atterrissage sur piste contaminée diminue à 10 noeuds :
- si l'indice de frottement se situe entre 0,2 et 0,25;
- si aucun indice de frottement n'est disponible, le freinage est qualifié de mauvais.
La procédure à utiliser pour se poser sur une piste contaminée est la suivante :
- régler le freinage automatique à moyen si le contaminant recouvre uniformément la piste, autrement freiner au pied;
- utiliser la vitesse d'approche normale;
- par vent traversier sur piste glissante, toucher des roues en crabe;
- après un bref arrondi, se poser fermement;
- abaisser le train avant et inverser la poussée au maximum; ne pas garder le train avant en l'air;
- sans freinage automatique et dans les cas où la longueur de piste est limitée, commencer à freiner avant que le train avant se pose, mais être prêt à contrer la tendance au tangage produite;
- maintenir la maîtrise en direction au moyen de la gouverne de direction le plus longtemps possible;
- se servir prudemment de l'orientation du train avant.
Il est également noté qu'il est souhaitable de poser simultanément les deux atterrisseurs principaux pour favoriser le déploiement complet des déporteurs. Si seulement un atterrisseur est en contact avec le sol, les déporteurs se déploieront partiellement.
1.17.9 Politique d'Air France sur l'inversion de poussée à l'atterrissage
- relâcher immédiatement la pression sur les freins;
- ramener toutes les manettes des gaz au ralenti poussée inverse;
- utiliser la gouverne de direction et le freinage différentiel pour revenir sur l'axe de piste;
- après avoir repris la maîtrise en direction, inverser de nouveau la poussée et freiner au maximum.
1.17.10 Procédures d'Air France pour faire face à un cisaillement du vent
Le GEN.OPS d'Air France comprend une procédure pour gérer le cisaillement du vent. Le document mentionne que, dans la plupart des accidents mettant en cause le cisaillement du vent, l'équipage n'avait pas été suffisamment prévenu de la présence du cisaillement du vent pour éviter l'accident. Les équipages sont avisés que les moyens de détection du cisaillement du vent comprennent des systèmes au sol, comme le système de détection des microrafales (LLWAS) et le radar météorologique Doppler d'aérodrome (TDWR), surtout présent aux États-Unis, l'équipement de bord pour la détection et la prévention du cisaillement du vent, et la vigilance de l'équipage dans la reconnaissance des premiers effets du cisaillement du vent sur les performances ou la trajectoire de l'avion.
Par mesure de prévention, la procédure spécifie que les équipages devraient éviter les zones où la présence de cisaillement du vent est probable. Les zones qui présentent une forte probabilité d'important cisaillement du vent (orages, fortes précipitations, traînées de précipitations, etc.) doivent être évitées. Lorsque du cisaillement du vent est annoncé ou qu'il y a une forte activité d'orages dans le voisinage de l'aéroport de départ ou de destination, l'équipage de conduite devrait attendre que les conditions s'améliorent avant de décoller ou d'exécuter son approche (ou éventuellement se dérouter).
Voici les procédures à suivre si l'on soupçonne la présence de cisaillement du vent, mais que les conditions sont telles qu'elles permettent d'entreprendre un décollage ou une approche. En général, les équipages sont avisés d'utiliser le système de prédiction de cisaillement du vent (s'il est installé) pour assurer que la trajectoire de l'avion est exempte de cisaillement du vent, et de surveiller de près la vitesse et la trajectoire de l'avion. Pour ce qui est de l'approche, les équipages doivent :
- utiliser le braquage de volets recommandé;
- augmenter la vitesse d'approche (jusqu'à 20 noeuds) ou, dans le cas d'un avion Airbus, utiliser la vitesse gérée;
- viser à stabiliser l'approche tôt pour faciliter la détection du cisaillement du vent;
- en poussée manuelle, éviter de brusques réductions de puissance en réaction à une augmentation de vitesse, car il est courant de subir un cisaillement inverse après avoir traversé un premier cisaillement du vent.
Les procédures propres à l'A340 sont également présentées dans le manuel d'utilisation de l'A340. La procédure stipule que si un très fort cisaillement du vent est signalé, ou détecté par le système de prédiction de cisaillement du vent, l'équipage devrait retarder l'atterrissage ou se dérouter sur un autre aérodrome. Là où la présence de cisaillement du vent est probable et que l'équipage décide d'exécuter une approche, les mesures suivantes sont précisées :
- utiliser la piste la plus favorable;
- utiliser le radar météorologique et le système de prédiction de cisaillement du vent (s'il est installé);
- sélectionner CONF 3;
- utiliser la vitesse gérée pour l'approche;
- activer la phase APPR sur le MCDU;
- utiliser les deux directeurs de vol réglés sur le mode ILS, FPA ou V/S;
- utiliser le pilote automatique si l'ILS est disponible;
- il est recommandé d'utiliser la poussée automatique et la vitesse gérée.
Une note dans la procédure indique que si la vitesse sol mini est employée, le système augmente la vitesse par grand vent. Si des vents rabattants sont prévus, les équipages sont avisés d'augmenter la VAPP sur le MCDU jusqu'à un maximum de VLS+15 kt.
Si l'on soupçonne un cisaillement du vent ou si on y fait face à l'atterrissage, les équipages doivent appliquer la procédure d'urgence Cisaillement du vent TOGA. Cette procédure prévoit la sélection de la poussée TOGA, sans modification de la configuration de l'avion, jusqu'à ce que le cisaillement du vent se soit dissipé et de maintenir ou de surveiller l'assiette en tangage pour assurer le maintien de l'altitude.
1.17.11 Renseignements d'Air France sur les orages
Au moment de l'accident, la seule procédure chez Air France relatives aux orages se trouvait au chapitre « radar météo » du manuel TU du MANEX d'Air France (voir le paragraphe 1.17.7).
Le MAC d'Air France comprend un chapitre portant sur la météorologie générale des cumulonimbus, de la foudre et des orages, ainsi qu'un chapitre portant sur la théorie des cumulonimbus, des orages et de la grêle. Ces chapitres fournissent aux équipages un rappel des conditions susceptibles de produire des phénomènes météorologiques résultant de l'activité de convection, les risques associés à ce type de temps et les difficultés associées à la prédiction de l'endroit où seront présents ces risques.
Les cumulonimbus sont très particuliers. Ce sont des manifestations locales des effets de la convection atmosphérique. Ils peuvent produire et concentrer toute une panoplie de préoccupations de nature météorologique auxquelles un pilote peut faire face durant sa carrière. En somme, les cumulonimbus constituent un environnement aérien hostile, inhospitalier, et il faut toujours chercher des moyens de les éviter. Au moment de l'accident, Air France n'avait aucune procédure spécifique traitant des orages pendant l'approche et l'atterrissage.
1.17.12 Air France - Gestion de la fatigue
Air France a mis en place des mesures visant à gérer le risque de fatigue au cours des vols long-courriers. Par exemple, les durées de service et les durées de vol sont limitées et elles font l'objet d'un suivi; il y a des pilotes de réserve sur les vols plus longs; et sur les vols à deux pilotes seulement, on permet aux membres d'équipage de faire une sieste sur leur siège pendant le vol, pourvu que certaines conditions soient respectées. Pendant le vol de l'accident, aucun des pilotes ne s'est senti suffisamment fatigué pour faire une sieste.
Air France, comme bien d'autres compagnies aériennes, n'a aucune exigence spécifiée concernant le temps de déplacement entre le lieu de résidence des équipages de conduite et l'aéroport de départ. Les équipages sont tenus de se présenter au travail suffisamment reposés.
1.17.13 Air France - Initiatives de sécurité antérieures concernant des accidents à l'atterrissage
La possibilité d'un accident à l'approche et à l'atterrissage est au coeur des préoccupations du Service de Prévention et Sécurité des Vols d'Air France depuis un certain temps, et le plan de prévention annuel (avril 2004 à mars 2005) comprenait les sorties de piste comme élément de risque à cibler. Cette attention était justifiée par le fait que les accidents à l'atterrissage préoccupent tous les exploitants, la plupart des accidents étant attribuables à la réticence des pilotes à remettre les gaz à basse altitude lorsqu'ils font face à une réduction de visibilité ou à une approche qui n'est plus stabilisée. Deux objectifs précis étaient inclus dans ce plan relativement aux sorties de piste : améliorer la prise de décision relativement à l'exécution d'approches interrompues dans les conditions décrites ci-dessus, et participer aux travaux entrepris par l'Association internationale du transport aérien (IATA) dans ce domaine.
Air France a pris des mesures pour réduire le risque de ce type d'accident en communiquant aux équipages les leçons tirées d'accidents antérieurs, en en parlant lors de la formation périodique et en modifiant les procédures pour mettre l'accent sur la capacité d'exécuter une remise des gaz à tout moment jusqu'au déploiement des inverseurs de poussée. De nombreux articles portant sur les accidents à l'atterrissage, les approches interrompues en raison de conditions météorologiques dangereuses, les atterrissages par forte pluie et les sorties de piste ont été publiés dans son bulletin mensuel de sécurité aérienne Survol au cours des dernières années.
Cette question a également été vue lors de la formation périodique. Par exemple, la formation périodique de 2003 comprenait une présentation portant sur les approches déstabilisées en courte finale qui mènent à une perte de maîtrise à l'atterrissage. Une autre présentation traitait des dangers associés au cisaillement du vent et aux microrafales, de la perte de visibilité en courte finale et des atterrissages courts. Sa diapositive de conclusion indiquait qu'une remise des gaz est une solution qui demeure ouverte jusqu'à l'atterrissage. Une fois les inverseurs de poussée déployés, il est trop tard.
En 2004, le service de sécurité aérienne a présenté un cas au Groupe Normes et Standards pour que soient révisées les procédures relatives aux atterrissages interrompus. La procédure révisée exigerait qu'un atterrissage soit interrompu quand l'approche n'est plus stabilisée ou que les références visuelles sont perdues après que la décision de poursuivre l'atterrissage a été prise à la DH ou à la MDA. Air France a sondé ses équipages de conduite sur leur expérience dans l'exécution d'une remise des gaz.
1.17.14 Procédures d'urgence
L'éclairage de secours dans la cabine (y compris les enseignes lumineuses des issues et le chemin lumineux au plancher) est alimenté par huit batteries indépendantes. Celles-ci sont commandées depuis le poste de pilotage par un sélecteur à trois positions : ON, OFF et ARM. Le sélecteur est normalement sur la position ARM. Une fois le circuit armé, les lumières s'allument s'il y a une interruption de l'alimentation électrique ou si le bouton d'évacuation dans la cabine est enfoncé.
Les mesures prises par l'équipage de conduite en cas d'évacuation figurent sur la liste de vérifications évacuation dans le QRH. La liste de vérifications impose les mesures suivantes :
- avion immobilisé et frein de stationnement serré (PF)
- demande par interphone que les PNC prennent leur poste (commandant de bord)
- contact avec l'ATC ou le personnel de piste sur VHF 1 (copilote)
- pression différentielle cabine vérifiée à zéro (commandant de bord)
- interrupteurs principaux des moteurs sur OFF (commandant de bord)
- poignées coupe-feu (tous les moteurs et l'APU) (commandant de bord)
- décharge de l'agent extincteur 1 et 2 (tous les moteurs et APU) (commandant de bord)
- communication avec les passagers (commandant de bord)
- si une évacuation est requise - communiquer directement avec les passagers et enfoncer le bouton EVAC
- si une évacuation n'est pas requise, communiquer normalement avec les passagers.
1.17.15 Différences relevées dans les manuels, les procédures et les recommandations entre Air France et Airbus
Le FCOM d'Airbus fournit un tableau des annonces standard qui doivent être faites par le PF et le PNF pendant l'approche et l'atterrissage. Comme pour le MANEX d'Air France, les annonces qui doivent être faites par le PNF après le toucher des roues sont « Spoilers sol, Reverse verts «. Le FCOM d'Airbus comprend une note : « Si le déploiement des inverseurs ne se passe pas comme prévu, annoncer AUCUNE REVERSE MOTEUR X ou AUCUNE REVERSE, selon le cas. » Le MANEX d'Air France ne prévoit pas d'annonce en cas de non-déploiement de tous les inverseurs de poussée. La philosophie sous-jacente d'Air France est que les annonces standard ne doivent concerner que des anomalies spécifiques et que le fait d'établir une annonce pour chaque chose qui ne s'est pas produite aurait tôt fait de surcharger l'équipage. Comme le non-déploiement d'un seul inverseur de poussée peut compromettre la stabilité latérale, Air France a décidé de maintenir cette annonce.
Selon les annonces standard du FCOM d'Airbus au cours de l'approche et de l'atterrissage, dès que les minima sont atteints, le PNF annonce « minima », et le PF annonce « atterrissage » ou « remise des gaz - volets », selon le cas. Comme tel, il revient au PF de faire l'annonce de poursuivre ou de remettre les gaz. Le MANEX d'Air France précise les annonces qui doivent être faites en approche. Dès qu'il entend l'annonce « minima » du PNF (ou l'annonce automatique), le commandant de bord doit annoncer « On continue » ou « Remise des gaz ». Il y a deux différences entre les procédures d'Air France et celles d'Airbus. La première est l'annonce spécifique devant être faite si les références visuelles sont établies. Alors qu'Airbus utilise « atterrissage », Air France utilise « On continue » pour mettre l'accent sur le fait qu'une remise des gaz en toute sécurité est toujours possible. La deuxième différence est qu'Air France précise que c'est au commandant de bord de prendre la décision de remettre les gaz. Toutefois, le MANEX d'Air France comprend aussi une note indiquant que si le copilote juge qu'une remise des gaz est nécessaire, il doit en faire la suggestion au commandant de bord.
Les procédures d'Air France et celles d'Airbus portant sur l'utilisation de l'inversion de poussée sont les mêmes, si ce n'est qu'Airbus recommande l'utilisation de la poussée automatique pour gérer la vitesse en approche, même dans des turbulences ou des rafales. Un bulletin FCOM publié par Airbus explique la raison de cette position et suggère comme suit les procédures à suivre dans diverses conditions :
[Traduction]
La poussée automatique, en particulier, convient le mieux pour suivre une vitesse ciblée en déplacement lorsqu'on vole en mode de vitesse gérée. Statistiquement, la poussée automatique offre la meilleure protection contre les variations de vitesse, et son utilisation est, par conséquent, recommandée même dans des turbulences, à moins que les variations de poussée deviennent excessives.
La réaction de la poussée automatique aux variations de vitesse résulte d'un compromis à la conception entre performances et confort, et elle est optimisée lorsque le pilote automatique est embrayé. Par conséquent, dans des turbulences en vol manuel, le pilote peut parfois trouver la poussée automatique lente ou décalée. Si les conditions sont telles qu'une grande diminution de vitesse est prévue une fois les moteurs au ralenti, le pilote peut, au-dessus de 100 pieds au radioaltimètre, déplacer la manette des gaz légèrement au-dessus du cran CL (montée) pour réduire le temps de réaction de la poussée automatique. Cette action désactivera temporairement et armera la poussée automatique. Dès qu'il y a une accélération positive, et avant que la poussée soit trop élevée, le pilote doit ramener les manettes des gaz au cran CL pour que la poussée automatique reprenne.
Après avoir étudié la méthode ainsi suggérée, Air France a décidé de ne pas l'adopter, car elle lui semblait contraire à la règle d'or d'Airbus en matière d'automatisation. Les lignes qui suivent sont extraites de la fiche des « règles d'or » de la formation en vol d'Airbus :
[Traduction]
No 6 - Si les choses ne se passent pas comme prévu, PRENDRE LA RELÈVE;
No 7 - Recourir au niveau d'automatisation adapté à la tâche.
Si un atterrissage doit être exécuté en poussée manuelle, le FCTM et le FCOM d'Airbus pour les A340 recommandent de débrayer la poussée automatique au-dessus de 1000 pieds agl en approche.
Un sondage informel auprès des pilotes et des exploitants de l'A340 a été effectué sur l'utilisation de la poussée automatique. La plupart des compagnies aériennes exploitant des A340-300 avaient une grande confiance en la poussée automatique et, règle générale, la poussée automatique est utilisée pendant toute la durée de l'atterrissage. Les compagnies aériennes recommandent habituellement une hauteur minimale comprise entre 500 et 1000 pieds agl pour débrayer la poussée automatique.
Air France recommande l'utilisation de la poussée automatique en approche que si l'on soupçonne la présence d'un cisaillement du vent. De nombreux pilotes d'Air France ont indiqué qu'ils préféraient débrayer la poussée automatique en vol manuel, car ils trouvaient que les commandes réagissaient plus vite quand ils commandaient manuellement à la fois le tangage et la poussée. Ils ont également fait part de leurs préoccupations à propos des situations où la poussée automatique pourrait permettre au régime moteur de diminuer au point où une récupération risque de ne plus être possible.
1.17.16 Formation périodique en cas d'urgence dispensée au PNC
En France, les exigences réglementaires relatives aux tâches de sécurité du PNC, y compris l'organisation des évacuations d'urgence, ainsi que la formation périodique en procédures d'urgence du PNC se trouvent dans l'ordonnance du 5 novembre 1987. La formation périodique en procédures d'urgence doit comprendre des exercices pratiques, p. ex. des exercices en situation d'urgence. L'Annexe 10 de l'Ordonnance indique que ces exercices pratiques doivent être exécutés dans des conditions qui reproduisent au plus près l'environnement dans lequel elles peuvent survenir en vol, en présence de fumée, si possible, et que des éléments seront répartis partout dans la cabine pour créer des obstacles à l'évacuation.
Les programmes de formation périodique doivent être soumis à l'autorité réglementaire pour approbation. Le PNC doit participer à la formation périodique aux procédures d'urgence tous les 12 mois, mais une période de grâce de 3 mois peut être accordée pour porter cet intervalle à 15 mois.
Les inspecteurs de la sécurité des cabines de la DGAC effectuent des audits sur place des programmes de formation initiale et périodique des exploitants et, aussi, ils mènent des audits en vol. Sur la foi des audits de formation effectués par la DGAC, la formation aux procédures d'urgence d'Air France destinée au PNC respectait toutes les exigences réglementaires en vigueur et dépassait les exigences dans certains cas.
L'enquêteur du BST a assisté à une séance de formation périodique aux procédures d'urgence chez Air France. La durée allouée à l'exercice d'évacuation d'urgence était d'environ 35 minutes, y compris un exposé avant exercice et un exposé après exercice. Au cours de l'exercice d'évacuation d'urgence, aucun article n'a été réparti dans la cabine pour créer des obstacles à l'évacuation, et aucun des PNC n'ont été assignés pour jouer le rôle de passagers tentant de récupérer leurs bagages à main pour se diriger vers les issues de secours.
1.18 Renseignements supplémentaires
1.18.1 Accidents à l'atterrissage liés aux conditions météorologiques - Enquêtes internes d'Air France
Le 4 mars 1999, l'équipage d'un Boeing 737-200 d'Air France effectuait une approche de nuit à l'aéroport de Biarritz, en France, dans une forte pluie et des rafales de vent. Au cours de l'arrondi, l'avion a dérivé sur la gauche et est sorti de piste sur le côté. L'avion a été détruit et s'est immobilisé le long de la piste. Il n'y a eu aucun incendie ni aucune victime. Les mesures prises par Air France à la lumière de cet accident comprenaient une formation additionnelle pour les équipages en ce qui a trait aux atterrissages par rafales de vent traversier, l'examen de solutions visant à améliorer la visibilité par forte pluie (c.-à-d. chasse-pluie, pare-brise traités) et la prise de mesures visant à encourager les aéroports à installer des feux d'axe de piste ou des marques réfléchissantes, ou les deux.
Le 11 septembre 1999, un Boeing 747 d'Air France effectuait une approche à l'aéroport de Pointe-à-Pitre, dans les Antilles françaises, dans l'obsécuritéé, par temps orageux, la cellule orageuse étant située sur l'aéroport. Peu après le toucher des roues, l'avion est entré dans une forte pluie et a dérivé vers la gauche. Le PF a perdu ses références visuelles avec la piste, et les deux pilotes ont compensé à droite au pied pour revenir sur l'axe de piste. Ils ont retrouvé leurs références visuelles, et l'avion a pu être maîtrisé. L'avion était sorti de piste sur le côté gauche, endommageant plusieurs feux de piste et deux de ses pneus. Au cours de l'approche, l'équipage était au courant de la présence de la cellule orageuse située à l'extrémité éloignée de la piste et de la pluie qui tombait sur l'aéroport.
Le rapport d'accident interne d'Air France a conclu que l'équipage avait sous-estimé les effets de la cellule orageuse par rapport à sa capacité à exécuter un atterrissage en toute sécurité. Le rapport résume aussi les difficultés associées à l'estimation de l'effet d'une cellule orageuse à partir de l'image fournie sur le radar de l'avion. Le rapport indiquait que certaines compagnies fournissaient des directives supplémentaires aux équipages, à savoir s'il fallait poursuivre en finale (p. ex. sur les 3 derniers milles marins avant un orage sous 1000 pieds agl). À la suite de l'accident, Air France a examiné la question et a décidé que des renseignements plus génériques relativement aux orages seraient incorporés dans le MAC. Toutefois, on a estimé que la fourniture de directives plus précises aux équipages pour leur permettre d'éviter les orages ne correspondait pas très bien à la culture au sein de la compagnie, car les équipages ont besoin d'être investis de l'autorité de prendre des décisions en fonction des particularités de chaque situation. On a également noté que pour cet accident les inverseurs de poussée avaient été déployés avant que le train avant ait fait contact avec le sol. À la suite de l'accident, Air France a effectué une analyse des données enregistrées de 180 atterrissages de la plupart des types d'aéronef et a trouvé un assez bon nombre de cas d'inversion de poussée avant contact du train avant avec le sol. Compte tenu des risques de problèmes de maîtrise en direction liés à cette pratique, on a recommandé de mettre l'accent sur l'importance d'attendre que le train avant commence à descendre vers le sol avant de passer en inversion complète de la poussée.
Le 14 janvier 2001, un Boeing 747 d'Air France effectuait une approche ILS CAT I à Houston (Texas) aux États-Unis, et le copilote était le PF. Tout juste après la DH, le copilote a indiqué qu'il était incapable de se poser parce qu'il avait perdu ses références visuelles. Le commandant de bord a pris les commandes pour le reste de l'atterrissage et, au cours de l'arrondi, les deux moteurs extérieurs ont touché la piste.
Le 25 mai 2001, un Airbus A340 d'Air France se trouvait en approche stabilisée de jour à Cayenne, en Guyane française. En très courte finale, l'avion est descendu sous le faisceau d'alignement de descente et a touché des roues 30 pieds avant la piste. Un orage était passé sur l'aéroport environ cinq minutes avant que l'avion n'entame sa descente. L'équipage pouvait voir des zones de fortes précipitations pendant l'approche, et l'avion est entré dans ces précipitations en courte finale, alors que la piste était toujours visible. L'approche et l'atterrissage avaient été exécutés poussée automatique embrayée. L'enquête interne d'Air France a conclu que l'avion avait fait face à un cisaillement du vent à énergie supérieure à basse altitude (vent de face accru) qui avait causé une augmentation de la vitesse indiquée et, par le fait même, une réduction importante de la poussée des moteurs causée par la poussée automatique. Tout de suite après, un changement de direction du vent et un écart par rapport à la trajectoire normale sont survenus. À ce moment, le commandant de bord agissant comme PNF a annoncé l'écart par rapport à la trajectoire de descente, l'équipage a entendu une alarme de taux d'enfoncement au moment où l'avion a commencé à descendre, ce qui a été immédiatement suivi par l'annonce « Réduire ». Le copilote a cabré l'avion en réaction à l'alarme de taux d'enfoncement et il a réduit les gaz en vue de l'arrondi. Même si le commandant de bord a immédiatement augmenté la puissance, il était trop tard pour empêcher l'avion de heurter le sol. L'équipage n'a reçu aucun autre avertissement ni aucune autre alarme à propos de la vitesse de l'avion, cette fonction étant neutralisée au-dessous de 100 pieds agl. L'avion n'était pas doté d'un équipement de prédiction de cisaillement du vent. Après l'accident, Air France a pris les mesures suivantes : revoir le manuel GEN.OPS pour qu'il donne plus de renseignements sur le cisaillement du vent, étudier la possibilité de monter en rattrapage l'équipement de prédiction de cisaillement du vent sur l'avion, intégrer des exercices sur le cisaillement du vent à la formation périodique (en exigeant une remise des gaz sous la MDA) et entreprendre des discussions avec Airbus en ce qui a trait à l'utilisation recommandée de la poussée automatique en conditions possibles de cisaillement du vent.
Le 28 décembre 2001, un Airbus A340 d'Air France en très courte finale pendant une approche ILS CAT I de nuit à l'aéroport de Port-Harcourt, au Nigéria, a fait face à une visibilité extrêmement réduite à cause du brouillard. Au même moment, l'avion est entré dans une zone de vents changeants (d'un léger vent de face à un fort vent trois quarts arrière) qui a fait dévier l'avion de l'axe de piste. Le commandant de bord a ordonné une remise des gaz au cours de laquelle la partie arrière du fuselage a touché le sol. Le copilote était le PF, et la remise des gaz avait été amorcée par le commandant de bord qui avait remis les gaz à environ 5 pieds agl. Au même moment, une double sollicitation au manche a été enregistrée lorsque le commandant de bord et le copilote ont tous deux tiré sur le manche. L'avion a cabré, ce qui a contribué au contact de la queue avec le sol. Air France a conclu que le commandant de bord n'avait pas eu l'intention de reprendre les commandes de l'avion, mais que la sollicitation des commandes avait été instinctive pendant la remise des gaz. Les mesures prises par Air France à la lumière de cet événement ont été : la rédaction de procédures plus détaillées pour l'exécution des remises des gaz de chaque type d'appareil, y compris une procédure d'atterrissage interrompu; l'installation d'une alarme " double commande " dans les avions Airbus; et des mesures pour améliorer l'infrastructure à l'aéroport de destination.
Le 4 mars 2004, un Airbus A330 d'Air France effectuait une approche à l'aéroport de Libreville, au Gabon, pendant un orage. Au cours de l'approche précédant l'atterrissage, on a signalé que le vent était calme, et la piste, mouillée. L'équipage avait l'aéroport et les alentours de la piste en vue avant d'atteindre la MDA, et il faisait face à un vent traversier soufflant de la droite. Tout juste avant le toucher des roues, le vent est passé à un vent trois quarts arrière soufflant de la gauche. Au toucher des roues, l'avion a traversé un rideau de pluie qui a réduit la visibilité à près de zéro. L'équipage a retrouvé le contact visuel avec la piste environ 1 km plus loin sur la piste et a ramené l'avion sur l'axe de piste. Pendant l'atterrissage, le train principal droit est sorti de la piste sur le côté. Après l'accident, Air France a pris les mesures suivantes : communiquer avec l'exploitant de l'aéroport pour souligner l'importance de renseignements exacts et à jour relativement à la météorologie; sensibiliser les équipages aux conditions qui pourraient nécessiter une remise des gaz après la MDA; promouvoir chez les équipages le recours au circuit chasse-pluie; et modifier les manuels pour donner plus de détails sur le concept des pistes contaminées afin d'y inclure les pistes recouvertes d'eau.
1.18.2 Accidents à l'atterrissage liés aux conditions météorologiques - Autres exploitants
1.18.2.1 Hawaiian Airlines à TahitiLe BEA français a fait enquête sur la sortie de piste d'un DC-10 d'Hawaiian Airlines à Tahiti, le 24 décembre 2000 (rapport du BEA numéro n-aa001224). L'accident s'est produit alors que l'avion se posait pendant qu'un orage se trouvait au-dessus de l'aérodrome. Le rapport précise ceci : « L'accident est dû à la non-prise en compte lors de la préparation de l'approche du risque de passage d'un orage sur le terrain au moment de l'atterrissage. » Le rapport donne plus de détails sur le problème auquel font face les équipages lorsqu'ils décident d'interrompre un certain plan d'action, que ce soit interrompre l'approche en faveur d'une attente ou interrompre l'atterrissage pour effectuer une remise des gaz, puisqu'ils sont susceptibles de sous-estimer la gravité des risques présentés par ce type de temps. En conséquence, le BEA avait recommandé :
que les exploitants s'assurent que les équipages sont sensibilisés à l'importance de prévoir explicitement lors du briefing arrivée les circonstances qui amèneraient une modification de la stratégie d'approche, lorsque la situation météorologique le justifie.
1.18.2.2 American Airlines à Little Rock (Arkansas)
Le National Transportation Safety Board (NTSB) des États-Unis a fait enquête en 1999 sur la sortie de piste d'un MD-83 d'American Airlines à Little Rock (Arkansas) (rapport du NTSB numéro DCA99 MA060). Le NTSB a indiqué que :
[Traduction]
La cause probable de cet accident tient à l'omission par l'équipage de conduite d'interrompre l'approche alors que de gros orages et leurs dangers connexes pour les opérations aériennes se sont déplacés dans la zone aéroportuaire, et à l'omission par l'équipage de conduite de s'assurer que les déporteurs étaient bien sortis après le toucher des roues.
Le rapport indique que l'exécution d'une approche dans du temps convectif n'est pas un événement isolé et que l'entrée d'aéronef dans des orages est une pratique répandue dans l'industrie. Le rapport indique également que le jugement du pilote, à savoir pénétrer ou non dans un orage, a été influencé par les limites du radar météorologique de bord dans sa description de la gravité des orages, et par des facteurs opérationnels, comme le stress et la fatigue. Le rapport note qu'il existe de grands écarts entre les transporteurs aériens en termes de directives données aux équipages pour les aider à faire face à ces situations. La valeur de ces directives est résumée ici :
[Traduction]
...ces aides explicites et formalisées de reconnaissance des repères et d'aides à la décision réduisent au minimum les risques de pénétrer dans un orage à la suite d'un jugement ou d'une prise de décision compromis par le stress et la fatigue. (p. 142).
À la suite de l'enquête, le NTSB a publié la recommandation suivante à l'intention de la FAA :
[Traduction]
Établir un groupe de travail mixte gouvernement-industrie pour traiter, comprendre et élaborer des stratégies opérationnelles et des directives efficaces visant à réduire les risques de pénétrer dans un orage, et vérifier que ces stratégies et directives sont intégrées dans les manuels de vol et les programmes de formation du transporteur aérien à mesure qu'elles sont prêtes. Le groupe de travail devrait concentrer ses efforts sur toutes les facettes du système de l'espace aérien, y compris les solutions au sol et celles dans le poste de pilotage. L'objectif à court terme du groupe de travail consiste à établir des critères clairs et objectifs visant à faciliter la reconnaissance des repères associés à une grave activité de convection, et des directives visant à améliorer la prise de décision au sein des équipages de conduite. (A-01-55)
La FAA a indiqué qu'elle avait déjà créé des groupes de travail sur le sujet, lesquels avaient livré à l'industrie une aide à la formation sur le cisaillement du vent en 1987 et une aide à la formation sur les turbulences en 1997. De plus, la FAA a précisé qu'elle avait créé un autre groupe de travail sous l'égide de l'Équipe pour la sécurité de l'aviation commerciale (CAST) pour examiner la faisabilité de solutions au sol et dans le poste de pilotage.
En évaluant la réponse de la FAA à cette recommandation, le NTSB cite les résultats d'une étude technique du Massachusetts Institute of Technology (MIT) qui démontrait qu'un nombre important d'aéronefs pénétraient dans des zones à activité de convection, confirmant que les documents de formation produits par la FAA en 1987 et en 1997 n'avaient pas réussi à améliorer la sensibilisation aux risques associés à l'activité de convection. Le NTSB n'était pas non plus certain que le mandat du Groupe de travail CAST comprenait tous les éléments de la recommandation. L'état de cette recommandation demeure ouvert, du fait que la réponse était inacceptable.
Le NTSB a fait enquête sur le DC-9 d'US Air qui a heurté le relief le 2 juillet 1994 lors d'une remise des gaz dans du temps convectif (rapport du NTSB DCA94MA065). L'enquête a conclu que l'avion avait traversé une microrafale produite par un orage se trouvant au-dessus de l'aéroport au moment de l'atterrissage. En raison de la logique utilisée par le système de détection de bord du cisaillement du vent, l'équipage n'a reçu aucun avertissement de cisaillement du vent et il a exécuté une approche interrompue standard plutôt qu'une manoeuvre plus énergique pour éviter le cisaillement du vent. Des simulations effectuées pendant l'enquête ont démontré que l'avion aurait pu éviter le cisaillement du vent si des réglages d'assiette, de puissance et de configuration avaient été exécutés. Le NTSB a déterminé que les causes probables de l'accident sont :
[Traduction]
...la décision de l'équipage de conduite de poursuivre l'approche dans une importante activité de convection favorisant une microrafale; l'omission par l'équipage de conduite d'établir et de maintenir l'assiette et la puissance nécessaires permettant d'éviter le cisaillement du vent; et le manque de communication en temps réel de renseignements sur le mauvais temps et les risques de cisaillement du vent de la part du contrôle de la circulation aérienne. Tous ces facteurs ont mené à la rencontre d'un cisaillement du vent induit par une microrafale produite par un orage se développant rapidement à l'extrémité approche de la piste 18R.
Le rapport indique également que la décision de l'équipage de poursuivre l'approche pourrait avoir été influencée par l'information fournie par des aéronefs précédents.
1.18.2.3 Australian Transportation Safety Board
L'Australian Transportation Safety Board (ATSB) a fait enquête sur la sortie de piste d'un Boeing 747-400. Dans le résumé de l'accident, l'ATSB note ceci :
[Traduction]
En termes de statistiques générales, les sorties de piste sont un événement relativement courant. Des 49 accidents à des avions à réaction de grande capacité et de construction A05H0002entale signalés en 1999, 11 concernaient des sorties de piste à l'atterrissage. Les sorties de piste à l'atterrissage se produisent habituellement lorsque la piste est mouillée ou contaminée ou que l'avion vole haut et à vitesse élevée pendant l'approche finale.
Au moment de l'accident, il y avait une forte pluie et des orages à l'aéroport. L'équipage n'a remarqué aucun effet nuisible du temps jusqu'à ce qu'il se trouve en très courte finale, lorsque l'avion a pénétré dans une zone de visibilité réduite dans une forte pluie et qu'il a commencé à dériver au-dessus de la trajectoire de descente. Le commandant de bord a ordonné une remise des gaz, et le copilote, qui était le PF, a poussée les manettes de gaz. Peu après, le train principal de l'avion a touché le sol, et le commandant de bord a décidé d'annuler la remise des gaz en ramenant les manettes des gaz vers l'arrière. Les inverseurs de poussée n'ont pas été déployés, et l'avion a aquaplané sur la piste recouverte d'eau. L'avion ne s'est pas arrêté avant la fin de la piste.
Le rapport de l'ATSB indique que l'équipage a permis à l'avion de dériver au-dessus de la trajectoire de descente; a annulé la décision de remettre les gaz en ramenant les manettes des gaz vers l'arrière, ce qui a créé de la confusion; et n'a pas déployé les inverseurs de poussée. Toutefois, sur le plan opérationnel, l'ensemble du rapport de l'ATSB porte sur l'utilisation des procédures appropriées pour se poser sur des pistes recouvertes d'eau. Le rapport de l'ATSB conclut que l'équipage n'a pas envisagé la possibilité que la piste pouvait être contaminée et, comme tel, a utilisé une configuration d'approche inappropriée pour l'état de la piste. Le rapport indique également que des lacunes liées à l'information, aux procédures et à la formation fournies à l'équipage de conduite sont des facteurs contributifs dans cet événement.
1.18.3 Étude sur les remises des gaz
Le système d'évaluation des tendances sur la sécurité, d'analyse et d'échange de données de l'IATA (STEADES) a fait une étude qui a analysé 4991 remises des gaz entre janvier 2003 et septembre 2004Note de bas de page 17. Motivée par une conclusion du groupe de travail sur la classification des accidents de l'IATA selon laquelle un accident à l'approche et à l'atterrissage sur trois aurait pu être évité si une remise des gaz avait été exécutée en temps opportun, l'étude avait pour objet de permettre de mieux comprendre les facteurs menant à une remise des gaz. Au premier niveau de l'analyse, 34 % des remises des gaz ont été attribuées à la gestion du trafic, 22 % à la météorologie, 16 % à des approches instables et 28 % à d'autres causes. Dans le groupe météorologie, les rapports ont été répartis en sous-groupes par ordre de fréquence : cisaillement du vent; références visuelles insuffisantes; et vent arrière, turbulence et mauvais temps (comprenant au moins deux des autres événements). Une observation intéressante ressort des rapports relatifs aux vents arrière :
[Traduction]
La série de menaces soulignées dans le sous-groupe Vent arrière peut se présenter sous la forme d'une chaîne où chaque facteur vient enchérir le risque du facteur précédent pour créer un scénario dans lequel l'issue devient de plus en plus dangereuse. La chaîne commence par la communication avec l'unité ATC supervisant l'approche. Vingt-et-un pour cent des rapports d'accident faisant état des risques les plus élevés en raison d'un vent arrière citaient un mauvais exposé météo et de l'information à l'approche ou l'absence d'un tel exposé, ce qui a amené l'équipage à faire une remise des gaz. Les centrales inertielles de référence de bord calculent avec précision les composantes du vecteur vitesse arrière à l'approche, mais celles-ci deviennent souvent non fiables et trop élevées lorsque les mesures sont prises dans l'effet de sol, proche de la piste. (IATA, 2005)
1.18.4 Études sur les pénétrations dans du temps convectif
Des études ont été faites au Lincoln Laboratory du MIT visant à cerner les facteurs qui poussent les équipages de conduite à pénétrer dans du temps convectif. Ces études démontrent de façon concluante que les équipages de conduite sont disposés à voler dans du temps convectif lorsqu'ils pénètrent dans une région terminale pour se poser, décision qu'ils n'auraient pas prise dans la phase en route du vol. Ces études révèlent que :
- Les avions ont plus tendance à pénétrer dans du mauvais temps lorsqu'ils sont proches de l'aéroport.
- Les avions ont plus tendance à pénétrer dans du mauvais temps lorsqu'ils suivent un avion qui a déjà pénétré dans ce mauvais temps.
- Les avions ont plus tendance à pénétrer dans du mauvais temps lorsqu'ils ont plus de 15 minutes de retard sur leur horaire.
- Les avions ont plus tendance à pénétrer dans du mauvais temps pendant les heures d'obsécuritéé.
- Les pilotes se servent de repères visuels à l'extérieur de l'avion pour les aider à décider de contourner le temps convectif.
- La différence entre le nombre de pénétrations dans un orage dans l'espace aérien en route et l'espace aérien de région terminale est frappante. Les pilotes ne pénètrent à peu près jamais dans des précipitations de niveau 2+ en régime en route, tandis qu'ils pénètrent dans celles-ci des centaines de fois en région terminale.
Les auteurs présentent un certain nombre de raisons possibles pour expliquer cette différence. Tout d'abord, les avions à l'atterrissage ont plus de mal à détecter les orages parce qu'ils volent à basse altitude dans un espace aérien achalandé de région terminale. De ce fait, la charge de travail, les clutters de sol et les virages fréquents rendent plus difficile l'utilisation du radar de bord. Ensuite, si l'on présume que les équipages sont en mesure de détecter le mauvais temps, l'éviter en espace aérien de région terminale coûte plus cher que de l'éviter en route, car il pourrait en résulter une approche interrompue ou un déroutement. Finalement, les pilotes en région terminale disposent de moins d'options pour contourner le mauvais temps en raison de la densité du trafic et des limites de l'approche.
Les conclusions de ces études combinées indiquent clairement que les pénétrations d'avion dans de fortes précipitations sont courantes. De plus, la plupart de ces pénétrations n'ont aucune conséquence fâcheuse. La différence entre les pénétrations en route et celles en région terminale amène fortement à croire que les pilotes sont conscients des risques de voler dans des orages en route et qu'ils choisiront de les éviter si c'est possible, mais qu'ils sont prêts à accepter le risque de voler dans de fortes précipitations à l'atterrissage.
Un des auteurs indique que la pénétration dans des orages près d'un aéroport est parfois brusquement interrompue par les pilotes, supposément à cause des alertes au cisaillement du vent communiquées par les contrôleurs ou des rapports de mise en garde de pilotes d'autres avions dans cette situation. La présentation de fortes précipitations sur un écran radar ne suffit pas à convaincre les pilotes de ne pas pénétrer dans une zone donnée. Toutefois, il suffit qu'un avion interrompe son approche ou qu'un autre élément d'information indique que ce ne serait pas une bonne idée de poursuivre pour que les équipages des avions qui suivent soient plus enclins à éviter le même temps convectif.
1.18.5 Recherche sur la prise de décision des pilotes - Évaluation des risques et des conditions météorologiques
Des chercheurs du Centre de recherches Ames de la NASA (National Aeronautics and Space Administration) ont examiné des erreurs de décision dans un échantillon d'accidents d'aviation sur lesquels le NTSB a fait enquête Note de bas de page 18, Note de bas de page 19 dans l'espoir de comprendre les facteurs ayant contribué à ces erreurs et de trouver les moyens les plus efficaces d'éviter de telles erreurs. Les auteurs ont cerné bien des cas où l'équipage a persévéré dans son plan d'action alors qu'il était évident que ce plan ne convenait pas. Ils ont avancé comme hypothèse quatre facteurs susceptibles de contribuer à de telles erreurs : ambiguïté de l'information, modification dynamique des risques, conflits d'objectifs (pressions de l'organisation ou pressions sociales) et conséquences non prévues.
Ces quatre facteurs peuvent influencer la décision de l'équipage d'exécuter une approche dans du temps convectif. Le temps convectif est imprévisible, et il est difficile de fournir des indications claires sur la gravité de ce type de temps. Les équipages font régulièrement face à du temps convectif et ont, semble-t-il, réussi par le passé à se poser à proximité immédiate d'orages. Les équipages se concentrent sur l'atteinte de leur objectif, qui est la destination, et le déroutement entre en conflit avec cet objectif. Finalement, les décisions à prendre sur la façon de faire face aux orages pendant l'approche et l'atterrissage surviennent pendant la partie la plus occupée du vol, où les ressources nécessaires pour analyser toutes les conséquences sur le vol sont les plus limitées.
Cette situation est rendue plus difficile par la façon dont sont perçus les risques dans un contexte opérationnel. Une étude de la FAA sur la perception et la tolérance des risques chez les pilotesNote de bas de page 20 indique que c'est la mauvaise perception des risques plutôt qu'une tolérance élevée aux risques qui influence le plus les décisions des pilotes par rapport aux divers dangers. L'étude démontre également que l'expérience est inversement proportionnelle à la perception du risque : à mesure que l'expérience augmente, la perception du niveau de risque associé à un danger donné diminue.
Compte tenu de ce qui précède, des mesures de prévention peuvent être envisagées. On peut prendre des mesures pour réduire l'ambiguïté de l'information (p. ex. au moyen d'affichages de prédiction du temps), améliorer l'estimation des risques par l'équipage (p. ex. par la formation ou des aides à la décision), éliminer les conflits d'objectifs (p. ex. par le recours à des limites météorologiques claires) ou fournir des outils pour aider les membres d'équipage à prévoir les issues possibles d'un plan d'action donné.
Elgin et Thomas (2004)Note de bas de page 21 ont utilisé les modèles actuels de prise de décision et de conscience de la situation comme cadre pour comprendre comment les produits d'information météorologique aidaient les équipages à prendre des décisions liées à la météo, en vue de mettre au point des représentations améliorées de la situation météorologique. Ils ont envisagé l'hypothèse que la capacité d'une personne à maintenir une conscience de la situation pour les conditions météo dépend de l'exactitude et de la disponibilité de l'information météorologique et de la phase de vol. Les auteurs citent McAdaragh (2002)Note de bas de page 22, qui souligne les caractéristiques des produits d'information météorologique qui sont nécessaires pour optimiser la prise de décision à chaque phase de vol.
Lors de la phase pré-opérationnelle, le temps disponible pour passer en revue et assimiler l'information rend utiles tout produit d'information météorologique disponible ou toute aide à la prise de décision existante. Pendant la phase de planification opérationnelle, les contraintes de temps plus élevées signifient que l'information météorologique devrait idéalement être présentée dans un format qui réduit au minimum les efforts de synthèse et d'interprétation requis de la part de l'utilisateur. Les données météorologiques qui seront utiles pendant cette phase de vol comprennent les mises à jour les plus récentes des conditions existantes et de l'information de bord, comme celle du radar météorologique. Finalement, la phase opérationnelle immédiate comporte des contraintes de temps importantes; par conséquent, l'information doit être présentée de façon à être comprise facilement et en peu de temps, et elle devrait être présentée en temps réel. L'exemple le plus immédiat est celui du radar météorologique de bord.
1.18.6 Rapport ALAR de la Flight Safety Foundation
La Flight Safety Foundation (FSF) a créé un groupe de travail pour étudier les accidents à l'approche et à l'atterrissage. Le groupe de travail a produit l'outil de réduction des accidents à l'approche et à l'atterrissage (ALAR), qui présente ses conclusions et recommande des mesures visant à réduire les accidents à l'approche et à l'atterrissage selon diverses catégories.
Une note d'information incluse avec l'outilNote de bas de page 23 porte sur les sorties de piste et les sorties en bout de piste. Elle indique que 20 % des 76 accidents et graves incidents à l'approche et à l'atterrissage survenus à travers le monde entre 1984 et 1997 se situent dans la catégorie des sorties de piste ou sorties en bout de piste.
L'outil propose des stratégies de prévention visant à réduire la probabilité de ces situations ou leurs conséquences dans les domaines suivants : politiques, procédures d'utilisation normalisées (SOP), données de performances, procédures et sensibilisation des équipages. Il convient de noter les recommandations suivantes par rapport à l'accident du vol AFR358 : établir une politique visant à encourager la remise des gaz lorsque c'est justifié, établir une politique interdisant tout atterrissage hors de la zone de toucher des roues, établir des procédures visant à identifier la distance de piste restante, et améliorer la sensibilisation des équipages sur les rapports existant entre les limites par vent traversier et l'état de la piste.
Une note d'information additionnelle porte sur les facteurs humains dans les accidents à l'approche et à l'atterrissageNote de bas de page 24. La note précise que des exposés répétitifs présentés comme une formalité n'ont qu'une utilité limitée avec le temps. Les exposés doivent porter sur les situations en approche qui peuvent compromettre la sécurité du vol. La note souligne également l'omission des équipages à reconnaître une situation changeante, surtout les changements de direction du vent, ainsi que la possibilité que les équipages ne sentent pas le besoin de modifier leur plan d'action. Cette attitude peut être due à une réticence à chercher des renseignements additionnels ou à vérifier les données d'atterrissage à mesure que la situation évolue, ou à un manque de temps pour observer, évaluer et maîtriser l'assiette et la trajectoire de vol de l'avion dans une situation dynamique.
1.18.7 Recherches sur la gestion des risques par l'équipage
Pour mieux comprendre le rôle de l'équipage dans la gestion des risques pendant les opérations normales, l'équipe du projet Facteurs humains et ressources de l'équipage de la NASA-Université du Texas a mis au point un modèle de gestion des menaces et des erreurs appelé Threat and Error Management (TEM). Le modèle TEM a été utilisé avec efficacité pour recueillir des données pendant les opérations de vol de routine grâce aux audits de sécurité des opérations en ligne.
Le modèle est fondé sur la prémisse que lors de chaque vol, l'équipage doit s'occuper de dangers. Ces dangers augmentent les risques en vol et ils sont désignés « menaces » dans le modèle TEM. Les menaces comprennent entre autres les conditions météorologiques, le trafic, l'état de service des avions, des aéroports non familiers, etc. Pourvu que l'équipage ait la possibilité de s'occuper de la menace, une gestion efficace du danger débouche sur une issue positive sans conséquences fâcheuses (c.-à-d. l'équipage prend des mesures pour réduire la menace). Par contre, une mauvaise gestion de la menace peut mener à une erreur de l'équipage, que l'équipage doit aussi gérer. La mauvaise gestion d'une erreur de l'équipage peut déboucher sur une situation qui peut mener à un accident. Dans tous les cas, la gestion efficace de la situation par l'équipage peut réduire les risques, et la situation peut alors ne pas porter à conséquences.
Le modèle TEM identifie cinq types d'erreur : non-conformité intentionnelle (non-respect des SOP); erreurs de procédure (écarts, manquements dans l'application des procédures); erreurs de communication (l'information est incorrectement communiquée ou interprétée); erreurs de compétence (manque d'habileté et de connaissances pour gérer l'avion); et erreurs de décision opérationnelle (la décision prise augmente le risque). L'équipage peut repérer l'erreur et la corriger, exacerber l'erreur en commettant une erreur subséquente ou ne pas réagir à l'erreur.
En ce qui a trait aux erreurs de l'équipage, 64 % des segments de vol observés contenaient au moins 1 erreur. En moyenne, chaque segment de vol contenait 2 erreurs pour un maximum de 14 erreurs observées dans un segment de vol. La descente, l'approche et l'atterrissage constituaient les segments de vol où la plupart des erreurs de l'équipage ont été observées, le plus grand nombre d'erreurs ayant trait à l'utilisation des listes de vérifications, à l'automatisation et à la compétence de l'équipage. De plus, plus que tout autre segment de vol, les erreurs observées au cours de cette phase de vol étaient celles qui pouvaient le plus se traduire par des conséquences fâcheuses.
Les comportements de l'équipage les plus courants cités dans la gestion efficace des erreurs comprenaient la vigilance, la demande de renseignements et l'assertivité de la part d'un membre d'équipage. La gestion des ressources de l'équipage (CRM) peut se définir comme l'utilisation efficace des ressources par l'équipage pour assurer la sécurité du vol. Les données ci-dessus démontrent clairement que bien que des menaces et des erreurs soient présentes dans la plupart des segments de vol, elles portent rarement à conséquences parce qu'elles sont gérées efficacement par l'équipage. Par conséquent, la gestion des risques dans le poste de pilotage est intrinsèquement liée à une gestion efficace des ressources de l'équipage.
1.18.8 Système de sonorisation cabine
Lorsque le commandant de bord a essayé de se servir du système de sonorisation cabine, ce dernier n'a pas fonctionné. On ne sait pas quelles directives ni quels renseignements le commandant de bord avait l'intention de communiquer si le système avait fonctionné. Le moment auquel le commandant de bord a tenté de se servir du système n'a pu être déterminé par rapport au moment où le personnel de cabine a fait ses annonces.
Le personnel de cabine a fait trois annonces sur le système de sonorisation cabine avant qu'il cesse de fonctionner. La première annonce était une annonce directe : Tout va bien, restez assis. Le chef de cabine arrière a fait une deuxième annonce directe, en français seulement : Porte 4 gauche, je vois des flammes, un incendie. J'évacue par la porte 4 droite - j'évacue. Le chef de cabine principal n'a pas entendu l'annonce du chef de cabine arrière relativement à l'incendie. Les autres PNC ont entendu l'annonce. Par la suite, le chef de cabine avant a informé le chef de cabine principal qu'il y avait un incendie. La troisième et dernière annonce faite par le système de sonorisation cabine a été l'ordre d'évacuer l'avion par le chef de cabine principal. Le chef de cabine principal a tenté de répéter l'ordre d'évacuation, mais le système de sonorisation cabine ne fonctionnait plus.
En 1995, le BST a publié un document intitulé Étude de sécurité portant sur l'évacuation des gros avions de passagers (rapport numéro SA9501)Note de bas de page 25. L'étude examine 21 cas d'évacuation. Dans 8 des 21 cas, le système de sonorisation cabine était inutilisable ou inaudible, et l'équipage ou les passagers, ou les deux, n'ont pas entendu l'ordre d'évacuation initial ou n'ont pas entendu les autres instructions d'urgence. Le début de ces évacuations a été retardé, ce qui a compromis la sécurité des passagers et de l'équipage.
1.18.9 Système d'alarme d'évacuation
Après que le chef de cabine principal eut donné l'ordre d'évacuer, il a appuyé sur le bouton EVAC/CMD sur le panneau du système de sonorisation cabine pour demander à l'équipage de conduite d'activer le système d'alarme d'évacuation. Le système fonctionne de la façon suivante : lorsque le bouton EVAC/CMD est enfoncé, il s'allume, et le bouton-poussoir EVAC/ON situé dans le poste de pilotage clignote en rouge et une sonnerie retentit trois fois. Le système d'alarme d'évacuation sert à avertir tous les PNC qu'ils doivent commencer une évacuation immédiatement. Lorsque le chef de cabine principal a enfoncé le bouton EVAC/CMD, celui-ci ne s'est pas allumé. Aucun membre de l'équipage de conduite n'a remarqué le bouton-poussoir clignoter en rouge dans le poste de pilotage, ni n'a entendu les trois sonneries.
Néanmoins, le commandant de bord a précisé par la suite qu'il avait enfoncé le bouton-poussoir EVAC ON pour activer le système d'alarme d'évacuation, mais que le système n'avait pas fonctionné. Il n'a pas été possible de déterminer à quel moment le commandant de bord avait tenté d'activer le système par rapport aux mesures prises par le chef de cabine principal.
Dans le cadre de la présente enquête, on a noté ou photographié, ou les deux, la position de tous les dispositifs de commutation (interrupteurs, commutateurs, etc.) dans le poste de pilotage. Le bouton-poussoir EVAC ON a été retrouvé en position sortie (position normale). Lorsque le bouton est enfoncé pour activer le système, il demeure enfoncé. Si le bouton est enfoncé une deuxième fois, il revient de lui-même en position normale. Le système d'alarme d'évacuation est conçu pour être activé à partir du panneau PNC et du poste de pilotage. Toutefois, les procédures d'exploitation d'Air France indiquent que le système doit être installé de manière à n'être activé que depuis le poste de pilotage et, par conséquent, le commutateur dans le poste de pilotage était réglé sur la position CAPT plutôt que sur la position CAPT & PURSER.
L'étude du BST mentionnée précédemment s'est penchée sur la communication entre les membres d'équipage pendant les évacuations et l'équipement de communication. À la lumière des problèmes de communication identifiés dans l'étude du BST et compte tenu de la prémisse qu'une alarme d'évacuation livre le message immédiat et non équivoque dans tout l'avion qu'une évacuation doit commencer, le NTSB a rappelé une recommandation précédente (A-98-22) voulant que les aéronefs nouvellement construits devraient être équipés de système d'alarme d'évacuation alimentés de façon indépendante à chaque poste PNC.
La recommandation du NTSB voulant que chaque poste PNC soit équipé d'un système d'alarme d'évacuation est appuyée par la SAE International, qui recommande que la commande d'évacuation (des systèmes de signalisation d'évacuation d'un avion) se trouve à chaque poste PNC, près du mécanisme d'ouverture de porte et dans le poste de pilotage. La FAA n'a pas accepté la recommandation du NTSB.
1.18.10 Éclairage d'urgence de l'avion
D'après les renseignements fournis par les PNC et les passagers, et selon l'information fournie par les passagers dans les questionnaires envoyés aux passagers du vol, il semble que durant la séquence d'impact l'éclairage normal de la cabine s'est éteint. Le système d'éclairage d'urgence s'est allumé, a papilloté et s'est éteint à certains endroits de la cabine, mais est resté allumé ailleurs. Le chemin lumineux au plancher ne s'est pas allumé dans le couloir passagers menant à la porte R4 pendant l'évacuation. Des photos prises par les passagers à l'intérieur de la cabine pendant l'évacuation ont confirmé que le panneau sortie/exit, au plafond, près de la sortie L2 était allumé. L'éclairage d'urgence dans la cabine avant est tombé en panne en même temps que le système de sonorisation cabine.
Dans le questionnaire envoyé aux passagers du vol, on a demandé d'indiquer quelle était la visibilité après l'arrêt complet de l'avion. Vingt pour cent des répondants ont indiqué que, depuis leurs sièges, ils ne pouvaient voir que quelques rangées autour d'eux; 14 % ont indiqué qu'ils ne pouvaient voir que quelques sièges autour d'eux. Les répondants n'ont pas indiqué pourquoi leur visibilité était limitée, même si on leur avait posé la question. Même s'il faisait assez sombre dans la cabine, la capacité des passagers à évacuer n'a pas été compromise par un éclairage insuffisant.
1.18.11 Hublots - Évaluation des dangers extérieurs lors d'une évacuation
Lorsque l'avion a été homologué, rien n'exigeait que les issues de secours soient équipées de hublots d'observation. Néanmoins, chaque issue de secours de l'avion était pourvue d'un tel hublot. Le rayon de la lentille prismatique circulaire des hublots d'observation était d'environ 15 cm (6 pouces). L'angle de vision vers l'extérieur était de 31° symétriques dans toutes les directions. La vue à l'extérieur, selon une distance de 1 m entre un point entre les yeux et le panneau transparent intérieur du hublot d'observation, offrait un secteur visible sur 62°.
Les procédures d'Air France relativement aux évacuations d'urgence exigent que les PNC évaluent la situation à l'extérieur avant d'ouvrir une issue pour déterminer s'il y a des dangers et si l'issue peut être utilisée. Les PNC sont entraînés à effectuer cette tâche en regardant dans le hublot d'observation de l'issue de secours ou dans le hublot de cabine le plus proche. Lors de l'accident, le PNC L3 n'a pas utilisé le hublot d'observation pour évaluer la situation à l'extérieur parce que le hublot était trop petit pour pouvoir bien voir à l'extérieur. Le PNC L3 a quitté son poste, est allé dans la section passagers, a regardé par un hublot et a vu des flammes à l'extérieur. Il est par la suite retourné à l'issue de secours, l'a bloquée et a redirigé les passagers.
Lorsque le PNC L1 a regardé par le hublot d'observation, il ne pouvait voir que de la lumière. Lorsque l'issue de secours a été ouverte, le PNC L1 a constaté que l'issue était utilisable.
Le PNC R3 a évalué la situation à l'extérieur par le hublot d'observation, mais il n'a pas vu de flammes au-dessous de l'issue ou de l'avion sur la trajectoire de déploiement du toboggan. Lorsque l'issue de secours a été ouverte, de la fumée noire est entrée dans la cabine, puis le toboggan s'est dégonflé après avoir été perforé par des débris de l'avion.
Le PNC R1 a évalué la situation à l'extérieur par le hublot d'observation, mais n'a pas vu qu'il y avait un ruisseau avant d'ouvrir l'issue. Lorsque le toboggan s'est déployé, le pied du toboggan était très proche de l'eau. L'issue a été bloquée et les passagers ont été redirigés.
Même s'il pleuvait très fort, aucun PNC n'a eu l'impression que sa capacité à évaluer visuellement la situation à l'extérieur avait été compromise par la pluie.
En 1992, le NTSB s'est penché sur les risques pour les passagers lorsqu'un PNC quitte son issue de secours pour aller dans la section passagers pour évaluer la situation à l'extérieur. Le 30 juillet 1992, de jour, un Lockheed L-1011 a été détruit par un incendie après que l'équipage a exécuté un décollage suivi d'un atterrissage d'urgence à l'aéroport international John F. Kennedy, à New York. Le PNC de la sortie L2, incapable de voir clairement à l'extérieur par le hublot d'observation, a quitté sa porte et est allé regarder par le hublot d'un passager pour évaluer la situation. Après avoir évalué la situation, le PNC a été dans l'impossibilité de regagner son issue parce que des passagers bloquaient le couloir. Un autre PNC avait pris sa place à l'issue et, lorsque le PNC L2 lui a dit que c'était dégagé à l'extérieur, l'autre PNC a ouvert la porte pour permettre aux passagers de s'échapper de l'avion en flammes.
Le NTSB a examiné un hublot d'observation sur un autre Lockheed L-1011 exploité par le transporteur aérien pour déterminer pourquoi le PNC n'avait pas été en mesure de voir clairement la situation à l'extérieur par le hublot d'observation. Les enquêteurs ont découvert que plusieurs des panneaux transparents extérieurs étaient faïencés ou égratignés au point où il était difficile de voir le sol clairement. D'autres panneaux transparents présentaient aussi des égratignures et un faïençage qui gênaient la vue, spécialement quand on regardait vers l'arrière.
En raison des importants dommages causés par l'incendie, il n'a pas été possible de déterminer si l'état des hublots d'observation de l'avion du vol AFR358 avait contribué à la difficulté éprouvée par le PNC à évaluer la situation à l'extérieur de l'avion.
1.18.12 Notices de sécurité pour passagers voyageant dans le poste de pilotage
La JAR-OPS 1.285 , Sous-partie D, Information des passagers, stipule, en partie, que les exploitants doivent s'assurer que les passagers voyageant dans le poste de pilotage reçoivent, avant le vol, une notice de sécurité sur laquelle des instructions illustrées indiquent le fonctionnement de l'équipement de secours et des issues de secours susceptibles d'être utilisés par les passagers. Dans le présent accident, le passager assis dans le poste de pilotage avait reçu la notice de sécurité propre au poste de pilotage. La notice indiquait qu'en cas d'évacuation, les occupants devaient évacuer par la porte avant de l'équipage et des passagers. Elle ne comprenait aucune indication sur l'évacuation par le panneau d'évacuation/de décompression de la porte du poste de pilotage ni par les fenêtres issue de secours situées de chaque côté du poste de pilotage. Le passager a reçu un exposé de sécurité verbal avant le départ, mais il n'a pas été informé de l'emplacement et de l'utilisation de la corde de descente d'urgence. Le passager a évacué en sautant par la fenêtre issue de secours de gauche que le commandant de bord avait ouverte pour lancer sa sacoche de vol. On a retrouvé la corde de descente pendante à l'extérieur de la fenêtre gauche, mais on ne sait pas si elle avait été déroulée au moment où le passager a sauté.
1.18.13 Ordre d'adopter la position de sécurité
Lorsque l'avion a quitté la piste, il a rebondi violemment et de façon répétée jusqu'à ce qu'il s'immobilise brusquement dans le ravin. À chaque impact, les passagers ont été projetés de leur siège vers le haut; au moins trois impacts distincts ont été signalés. En même temps, les occupants ont été soumis à des forces de décélération longitudinales. Un certain nombre de passagers se sont heurtés la tête sur le dossier devant eux ou sur les panneaux latéraux de la cabine.
Pendant ce temps, le personnel de cabine n'a donné aucune instruction aux passagers sur les mesures à prendre, notamment il n'a pas dit aux passagers d'adopter la position de sécurité. La réglementation européenne n'exige pas d'ordonner aux passagers d'adopter la position de sécurité (BRACE) et, par le fait même, n'exige aucune formation périodique en cas d'accident. Par conséquent, l'examen des procédures d'urgence d'Air France destinées au personnel de cabine a révélé qu'elles ne contenaient pas l'instruction de crier « BRACE » en cas d'accident. En effet, les PNC ne sont tenus de crier « BRACE » que dans le cas des atterrissages d'urgence préparés. La réglementation de Transports Canada exige que les manuels du personnel de cabine et les manuels de formation du personnel de cabine comprennent des procédures selon lesquelles les membres du personnel de cabine doivent crier « BRACE » au premier signe d'un risque d'accident.
En 1996, au cours de l'enquête sur une sortie de piste au décollage d'un Boeing 747, le NTSB a déterminé que seulement 3 des 12 PNC avaient ordonné aux passagers d'adopter la position de sécurité pendant la séquence d'impact. Compte tenu de l'importance de fournir des instructions en cas d'urgence pour prévenir ou réduire les blessures chez les passagers, le NTSB a recommandé que la FAA :
[Traduction]
publie un bulletin d'information sur les normes de vol destiné aux inspecteurs principaux de l'exploitation des transporteurs aériens régis par la 14 CFR, Partie 121, pour assurer que les programmes de formation du personnel de cabine insistent sur l'importance de crier les instructions de protection appropriées [ordre d'adopter la position de sécurité] au premier signe d'un risque d'accident, même lorsque les membres du personnel de cabine ne sont pas certains de la nature précise de la situation. (A-96-156)
Les exigences de formation actuelles de la FAA pour le personnel de cabine stipulent que les membres du personnel de cabine doivent être formés à ordonner aux passagers d'adopter la position de sécurité appropriée lors d'impacts imprévus.
1.18.14 Communication de renseignements de sécurité - Positions de sécurité recommandées
Bien qu'on n'ait pas ordonné aux passagers du vol AFR358 de prendre la position de sécurité pendant la séquence d'impact, certains passagers ont quand même pris cette position. Par contre, les mesures et les positions prises peuvent ne pas avoir toutes été appropriées. Par exemple, certains passagers se sont agrippés aux côtés du dossier se trouvant devant eux pour se préparer au choc. Une étude visant à évaluer la connaissance des passagers sur les positions de sécurité a déterminé qu'environ 50 % des passagers (y compris les grands voyageurs) ne savaient pas comment prendre la position de sécurité appropriée et que la position dangereuse la plus courante était de s'asseoir bien droit plutôt que de s'incliner vers l'avant.
Deux positions de sécurité figuraient sur les notices de sécurité à la disposition des passagers du vol AFR358. La première montrait un occupant assis bien droit, la tête légèrement inclinée vers le bas, les mains agrippées aux accoudoirs. La seconde montrait un occupant incliné vers l'avant, les avant-bras repliés sur les genoux. La tête de l'occupant ne touchait pas les genoux. Les mots « OU/OR » figuraient entre les deux pictogrammes. Le personnel d'Air France a précisé que la position redressée était destinée aux passagers voyageant en classe économique, puisque l'espace entre les rangées de sièges les empêchait de s'incliner de 90 degrés vers l'avant. La seconde position de sécurité, où l'occupant est incliné vers l'avant, est destinée aux passagers de la classe affaires, car l'espace entre les rangées de sièges est plus grand. On a également indiqué que les positions de sécurité illustrées sur les notices de sécurité avaient été acceptées par la DGAC.
L'examen de la documentation de sécurité n'a révélé aucune étude recommandant la position de sécurité redressée pour les passagers. Plus de 50 notices de sécurité fournies par d'autres transporteurs aériens, y compris des transporteurs européens, ont été examinées. Seuls deux exploitants aériens recommandaient la position de sécurité redressée.
Transports Canada, la FAA, la SAE International, la CAA du Royaume-Uni et la CAA australienne recommandent tous l'une ou l'autre des deux positions de sécurité suivantes : l'occupant de l'avion est incliné vers l'avant contre le dossier devant lui (taux d'occupation élevé, typique de la classe économique), ou le corps incliné vers l'avant, visage sur les genoux, les bras entourant les jambes ou placés sous les jambes (taux d'occupation faible, typique de la classe affaires ou de la première classe).
1.18.15 Communication de renseignements de sécurité sur les bagages à main
Au Canada, l'article 725.43, Exposé donné aux passagers, des Normes de service aérien commercial de Transports Canada couvre les éléments obligatoires qui doivent se trouver dans l'exposé donné aux passagers avant et après le décollage, pendant le vol dans certaines conditions et avant l'atterrissage. Aucune exigence réglementaire n'oblige d'ordonner aux passagers de ne pas emporter leurs bagages à main lors d'une évacuation d'urgence. De même, rien dans la réglementation ou dans la politique de la compagnie n'obligeait Air France à donner l'ordre de ne pas emporter ses bagages. La réglementation n'exigeait pas la présence de cette information sur les notices de sécurité, mais les notices de sécurité d'Air France sur le vol AFR358 comprenaient un pictogramme informant les passagers qu'il était interdit d'emporter ses bagages à main lors d'une évacuation d'urgence.
Les données actuelles indiquent que moins de la moitié des passagers lisent les notices de sécurité. Une enquête menée en 1989 auprès des voyageurs aériens canadiens a révélé que seulement 29 % des passagers lisaient ou regardaient les notices de sécurité. Dans une enquête menée par le NTSB en 2000 auprès de passagers ayant vécu une évacuation d'urgence, 68 % des passagers ont indiqué ne pas avoir lu la notice de sécurité.
Les procédures d'urgence d'Air France exigent que les PNC informent les passagers qu'ils doivent laisser leurs bagages à main à bord de l'avion lors d'une évacuation en criant « LAISSEZ VOS BAGAGES/LEAVE YOUR LUGGAGE ». Le personnel de cabine du vol AFR358 a crié cet ordre dans les deux langues pendant toute l'évacuation conformément aux procédures d'urgence.
Malgré cet ordre, 49 % des répondants au questionnaire envoyé aux passagers du vol ont tenté d'emporter leurs bagages à main au moment d'évacuer l'avion. Toutefois, 48 % ont indiqué que les bagages à main avaient ralenti l'évacuation, car les couloirs menant aux issues de secours étaient bloqués par des gens récupérant leurs bagages à main. Dans un cas, lorsqu'un PNC a dit à une passagère qu'elle ne pouvait évacuer avec son bagage, un autre passager a répondu : [Traduction] « Ne vous en occupez pas, nous avons suffisamment de temps. » Dans un autre cas, un PNC a constaté qu'un passager bloquait l'évacuation parce qu'il récupérait et rangeait ses affaires dans son bagage à main. Le passager ne s'est pas occupé des ordres du PNC de laisser son bagage et de se rendre à l'issue de secours, ni n'a réagi aux commentaires furieux des passagers debout derrière lui. En conséquence, le PNC a dû rediriger les passagers par les rangées de sièges du milieu jusque vers l'autre côté de l'avion pour qu'ils aient accès à la seule issue de secours disponible dans la cabine arrière.
Quinze ans avant l'accident du vol AFR358, l'Engineering Society for Advancing Mobility: Land, Sea, Air, and Space a publié un rapport sur les dangers que représentent les passagers qui récupèrent leurs bagages à main avant d'évacuer d'urgence un avion de transport. Le rapport indiquait ce qui suit :
[Traduction]
Cette action peut ralentir l'évacuation, endommager le toboggan et créer une situation où l'on se demande où placer les articles retirés aux passagers pendant l'évacuation. Les passagers qui ont emprunté les toboggans avec des bagages n'ont pas été en mesure de stabiliser leur descente, augmentant par le fait même le risque de blessures.
Pour réduire ces risques, la SAE International a recommandé que les passagers soient informés lors des exposés de sécurité avant le vol de l'interdiction d'évacuer avec des bagages de cabine pendant une situation d'urgence. Jusqu'à présent, il n'existe aucun règlement au Canada relativement aux directives fournies aux passagers sur l'interdiction d'évacuer avec des bagages de cabine pendant une situation d'urgence.
1.18.16 Communication de renseignements de sécurité pendant une urgence - Langues utilisées
1.18.17 Équipement de secours portable - Cagoules antifumée et mégaphones
L'avion était équipé de 13 cagoules antifumée pour le PNC (dont 11 se trouvaient aux postes PNC) et de deux mégaphones (un au poste PNC L1, et l'autre, au poste L4), conformément aux règlements applicables. Les cagoules antifumée étaient certifiées conformément à la Technical Standard Order (TSO) C116, Crewmember Protective Breathing Equipment (équipement de protection respiratoire pour membre d'équipage). La TSO précise en partie que la cagoule doit permettre des communications bilatérales intelligibles. Les cagoules antifumée des PNC étaient pourvues d'une membrane phonique qui améliorait la capacité de l'interlocuteur de communiquer efficacement.
La TSO mentionne également que cette cagoule n'est pas censée être un moyen d'aide à l'évacuation. Toutefois, la sous-section 3.11 de la section 3.0 consacrée aux normes minimales de rendement indique ce qui suit : [Traduction] « La cagoule doit permettre de tenir des communications bilatérales intelligibles, y compris en cas d'utilisation de l'interphone de l'avion ou d'un mégaphone. L'utilisateur doit être capable de communiquer avec un autre utilisateur ou avec un non-utilisateur à une distance d'au moins 4 m. Le recours à un bruit de fond de 65 dB et à une communication de l'utilisateur d'un niveau sonore de 85 dB, ou une méthode équivalente, est recommandé. »
Il y a eu une quantité importante de fumée noire à proximité du poste PNC L3. En conséquence, le PNC L3 a enfilé une cagoule antifumée qu'il a dû retirer par la suite, parce que les passagers ne pouvaient pas entendre ou comprendre ce qu'il leur disait.
Au cours de la séance de formation périodique sur les procédures d'urgence destinée aux PNC et observée par un enquêteur du BST et un représentant du BEA, chaque PNC devait crier un ordre d'urgence alors qu'il portait une cagoule antifumée. Même si l'on se tenait debout à côté des PNC, il était très difficile d'entendre ou de comprendre ce qu'ils disaient. On a ensuite remis un mégaphone à chaque PNC, on leur a montré comment le placer par rapport à la membrane phonique de la cagoule antifumée et on leur a demandé de crier le même ordre. Les ordres donnés à l'aide du mégaphone n'étaient pas difficiles à entendre. Lors de l'accident du vol AFR358, le PNC L3 n'avait pas facilement accès à l'un ou à l'autre des mégaphones de l'avion. Les règlements portant sur l'accessibilité de l'équipement de secours indiquent que le commandant doit s'assurer que l'équipement de secours pertinent demeure facilement accessible pour usage immédiat. Le règlement ne définit pas ce qu'est un équipement d'urgence pertinent.
1.18.18 Toboggans à deux lignes d'évacuation
Les toboggans à deux lignes d'évacuation améliorent la vitesse d'évacuation en permettant aux personnes évacuées de glisser en même temps dans chaque ligne. Les spécifications de certification des toboggans à deux lignes d'évacuation figurant dans la TSO-C69c ne précisent pas si les évacués doivent sauter sur le toboggan deux à la fois. Par contre, le taux d'évacuation est clairement indiqué et doit être d'au moins 70 personnes par minute par ligne d'évacuation. Goodrich Corporation a indiqué que lorsqu'elle teste les toboggans à deux lignes d'évacuation, leurs sujets sont entraînés à utiliser le toboggan et sautent sur le toboggan deux à la fois. Dans ces conditions d'essai, Goodrich Corporation a obtenu un taux d'évacuation de 80 personnes par minute par ligne d'évacuation. Toutefois, Goodrich Corporation a précisé que les gens sautent rarement deux à la fois sur le toboggan, sauf lors de tels essais.
Airbus a indiqué que l'Airbus A340 n'a jamais fait l'objet d'une démonstration d'évacuation complète au cours de laquelle les occupants évacuent par des toboggans à deux lignes d'évacuation. Les exigences de démonstration d'évacuation avaient été satisfaites par une analyse fondée sur un essai de démonstration d'évacuation complète mené sur un Airbus A300-600. Les portes de l'Airbus A340 sont de la même taille que celles de l'A300, et les toboggans sont similaires, sauf que les toboggans de l'A340 sont plus longs. Une démonstration d'évacuation a apparemment été filmée, mais une copie de la vidéo, ou toute autre vidéo montrant les occupants d'un avion évacuant par les issues de secours et les toboggans à deux lignes d'évacuation, n'a pas été fournie au BST.
Les PNC du vol AFR358 ont constaté qu'il n'y avait pas suffisamment de place pour former deux lignes de passagers à l'entrée du toboggan. Les PNC ont également indiqué qu'il était quelque peu difficile pour deux passagers de sauter en même temps sur le toboggan, compte tenu de la position du toboggan par rapport à l'ouverture de la porte et de l'emplacement de la porte de sortie le long du fuselage. Un PNC posté au pied d'un toboggan a constaté que les passagers avaient tendance à sauter au milieu du toboggan. Tous les toboggans utilisés pour l'évacuation du vol AFR358 étaient des toboggans à deux lignes d'évacuation. Seulement 23 % des passagers ayant indiqué avoir évacué par un toboggan ont indiqué l'avoir fait à côté d'une autre personne.
Aucune exigence réglementaire n'impose la présence de cloisons gonflées ni d'une autre caractéristique pour indiquer que le toboggan a deux lignes d'évacuation. Toutefois, Goodrich Corporation a indiqué que les toboggans à deux lignes d'évacuation montés sur l'avion étaient munis de cloisons tubulaires. Les cloisons des toboggans à deux lignes d'évacuation inclinées aux issues de secours L2 et R2 étaient bien visibles; elles servent à empêcher que des personnes se croisent en glissant sur le toboggan. Les cloisons des autres toboggans à deux lignes d'évacuation aux autres issues de secours n'étaient pas visibles. Dans le questionnaire envoyé aux passagers du vol AFR358, on a demandé aux passagers s'ils avaient utilisé un toboggan, et dans l'affirmative, s'il s'agissait d'un toboggan à deux lignes d'évacuation. Soixante-trois pour cent des répondants ont répondu « non ».
1.19 Techniques d'enquête utiles ou efficaces
1.19.1 Utilisation de l'animation du FDR et du CVR comme outil d'entrevue
Au cours de l'enquête, les enquêteurs ont interrogé les membres de l'équipage de conduite à plusieurs reprises. Comme l'entrevue finale a été menée environ six semaines après l'accident, il était possible que les pilotes aient oublié certains événements spécifiques.
L'animation du FDR a été utilisée avec succès pour structurer l'entrevue finale, qui s'est déroulée en trois étapes. À la première étape, les membres de l'équipage de conduite, qui dans ce cas ont été interrogés ensemble, ont eu l'occasion de poser des questions et d'échanger sur tout ce qui leur venait à l'esprit sur l'accident depuis leur dernier entretien avec les enquêteurs du BST. À la deuxième étape, l'animation du FDR sans superposition des données CVR a été visionnée par l'équipage. Au cours de la restitution de l'enregistrement, ils ont été encouragés à dire ce qui s'était passé à mesure que se déroulaient les différentes étapes de l'approche. On a arrêté l'animation pour la reculer au besoin afin de faciliter la discussion. À la troisième étape, l'animation a été visionnée par les pilotes avec superposition des données CVR, et le processus a été répété.
Cette technique a été utile car l'animation a permis à l'équipage de se rappeler certains événements spécifiques. Le recours à l'animation a aussi fourni un cadre de référence commun sur la position et l'emplacement de l'avion. Par exemple, en parlant de la météo pendant l'approche, les pilotes ont pu donner la position de l'avion au moment où la météo a commencé à se dégrader et ont pu indiquer les zones de l'aéroport qu'ils pouvaient voir.
L'utilisation de cette technique a eu un effet bénéfique pour l'équipage. Ayant vécu un accident dramatique, les deux membres d'équipage ont consacré beaucoup de temps et d'énergie à étudier ce qui s'était passé et à se demander ce qui s'était mal passé. Le recours à l'animation leur a donné l'occasion de revoir l'accident et de répondre eux-mêmes aux nombreuses questions qu'ils se posaient. Les deux membres d'équipage ont apprécié cette expérience.
2.0 Analyse
2.1 Introduction
Tous les systèmes de l'avion étaient utilisables et ont fonctionné comme prévu pendant l'approche et l'atterrissage d'AFR358. Aucun problème mécanique n'a contribué à l'accident. L'analyse porte sur les facteurs humains et sur les processus de décision.
Il existe un grand nombre de rapports d'enquête et d'études portant sur des sorties en bout de piste, comme cela a été dit dans la première partie du rapport. Bien que la plupart des accidents de ce genre, y compris celui du vol AFR358, aient des caractéristiques qui leur sont propres, ils présentent cependant de nombreux points communs. Les renseignements disponibles sur ces sorties en bout de piste ont servi à élaborer des programmes de sensibilisation et des procédures de formation améliorées. Avant l'accident du vol AFR358, Air France avait reconnu qu'elle pourrait connaître des accidents de ce genre dans le cadre de ses opérations et avait pris des mesures de prévention. Toutefois, malgré les efforts ciblés de la compagnie, la sortie en bout de piste à Toronto présente toutes les caractéristiques ou presque du type d'accident que ces programmes et ces procédures de formation visaient à éviter.
Les risques découlant de la dégradation rapide des conditions météo étaient supérieurs à ce que la plupart des pilotes auraient jugé acceptable. Toutefois, au moment où les pilotes d'AFR358 ont évalué les renseignements météo disponibles et l'écoulement du trafic vers l'aéroport, ils ne s'attendaient pas à ce qu'une dégradation aussi importante soit imminente. L'analyse porte sur les circonstances à l'origine de la sortie en bout de piste d'AFR358, sur le caractère adéquat des moyens de défense qui étaient censés empêcher un tel accident et sur les initiatives qui pourraient mener à de meilleurs moyens de défense.
2.2 L'avion
2.2.1 Porte L2
Aucune explication plausible n'a été trouvée pour élucider l'ouverture de la porte L2. On a envisagé l'hypothèse que quelque chose ait heurté la poignée extérieure et déclenché l'ouverture de la porte alors que l'avion franchissait les clôtures et les glissières de sécurité et glissait dans le ravin. Cette hypothèse a été jugée improbable, car la poignée extérieure est encastrée et il n'y avait aucune trace de dommage mécanique au niveau de la poignée ou de la porte aux abords de la poignée. De plus, lorsque la poignée extérieure est actionnée, le déploiement du toboggan est automatiquement désarmé. Comme la barre de retenue a été trouvée dans le seuil de la porte et que le levier d'armement était en position armée, il est raisonnable de conclure que ce n'est pas la poignée extérieure qui a servi à ouvrir la porte.
L'hypothèse que le panneau intérieur de la porte se soit desserré et ait délogé la poignée intérieure de sa position a également été envisagée. Dans la zone du renfoncement de la poignée, le panneau intérieur est solidement fixé à la structure du cadre de la porte à l'aide de vis. Il est très peu probable que les vis et les attaches se soient desserrées au point de permettre au panneau d'entrer en contact avec la poignée de la porte. De nombreuses hypothèses ont été avancées pour expliquer l'ouverture de la porte, mais aucune n'a pu être prouvée. L'analyse a permis de conclure avec certitude que la poignée intérieure de la porte devait être soulevée pour que la porte puisse s'ouvrir, mais l'enquête n'a pas révélé comment cette poignée avait pu se déplacer.
La porte a commencé à s'ouvrir avant l'arrêt complet de l'avion. Il se peut qu'une traction asymétrique sur le câble de libération du toboggan soit apparue, provoquant le coincement et la flexion de la goupille d'ouverture arrière. Toutefois, si la goupille arrière s'était coincée, elle aurait empêché l'ouverture complète de la porte. Comme la goupille avant s'est dégagée, l'extrémité avant du paquetage du toboggan a été libérée du rail avant, lequel était toujours fixé à la porte. La porte aurait continué à suivre sa trajectoire prédéterminée (à savoir, déplacement vers l'extérieur et translation vers l'avant). L'extrémité avant du paquetage aurait frotté contre le seuil de la porte tout en pivotant autour de l'extrémité arrière toujours reliée au rail de fixation arrière qui se déplace avec la porte. L'ouverture de la porte aurait continué jusqu'à ce que l'extrémité avant du paquetage vienne buter contre le cadre de porte ou le siège PNC. À ce moment-là, la porte aurait été suffisamment ouverte pour permettre aux passagers de se mettre en fil indienne pour sauter. Le paquetage, compte tenu de son orientation (extrémité arrière fixée à la porte partiellement ouverte et extrémité avant reposant contre le cadre de porte) n'aurait pas constitué un obstacle pour les passagers qui évacuaient l'avion. D'après l'emplacement des restes de paquetage déformés par rapport à la patte de fixation, il a été établi que le paquetage s'était immobilisé à un angle d'environ 40 degrés par rapport à la porte.
Lorsque le toboggan a commencé à se déployer, il a été gêné par la goupille d'ouverture arrière qui était coincée. En fait, le tablier servant à retenir le toboggan, qui est fixé à la barre de retenue dans le seuil de la porte, s'est effiloché suffisamment pour dépasser de la porte entrouverte. Ceci semble être étayé par une photo prise par un passager. On peut voir un matériau gris foncé (la couleur du tablier) dépassant du bas de la porte. Cela expliquerait aussi pourquoi aucun reste du tablier n'a été retrouvé, ce dernier ayant été consumé par l'incendie. La porte, le paquetage et le tablier seraient restés coincés dans cette position jusqu'à ce que l'incendie ait consumé une grande partie du paquetage et que le support du bras d'articulation de la porte se soit affaibli. Pendant l'incendie qui a suivi, l'assiette de l'avion immobile (en piqué et incliné à droite) aurait eu tendance à faire tomber le toboggan et son paquetage dans la cabine plutôt qu'au sol.
Une fois la porte ouverte de cette manière, il était possible que de la fumée ou des flammes entrent librement dans la cabine, ce qui aurait présenté un risque important pour les passagers et l'équipage. Aucun PNC n'a essayé de fermer la porte, car des passagers se sont mis à l'utiliser pour sortir ou ont été poussés à l'extérieur peu après l'immobilisation de l'avion.
2.2.2 ADIRS de l'avion - calculs du vent
La vitesse et la direction du vent sont présentées sur les écrans de navigation de l'équipage par le système de référence inertielle anémobarométrique (ADIRS). La documentation relative à ce système fournie par Airbus indique ce qui suit : [Traduction] « Les renseignements sur le vent présentés à l'équipage sont calculés à partir de la différence entre la vitesse sol (GS) et la vitesse vraie (TAS) pour ce qui est de la vitesse, et à partir de la différence entre la route (TRK) et le cap (HDG) pour ce qui est de la direction. Deux éléments doivent être pris en considération à propos de l'exactitude des renseignements sur le vent :
- les mouvements de lacet : il est sûr que, pendant un mouvement de lacet, la valeur indiquée sur les écrans de navigation risque d'être, de façon transitoire, différente de celle vue par l'ADIRS. Toutefois, dès que le lacet se stabilise, la valeur indiquée devrait être la même;
- l'exactitude de la GS et de la TAS : il est sûr que, compte tenu de la précision de chaque composant servant aux calculs de la vitesse et de la direction du vent dans l'ADIRS, la vitesse et la direction du vent présentées à l'équipage doivent être utilisées avec précaution.
Précision de la GS : ± 8 noeuds - Précision de la TAS : ± 4 noeuds
Précision du vent (> 50 noeuds) : ± 12 noeuds et ± 10°
Route vraie : ± 2,3° avec GS = 200 noeuds
Cap vrai : ± 0,4°
À noter que la valeur du vent n'est pas donnée pour des vitesses du vent inférieures à 50 noeuds. De plus, comme la vitesse sol était d'environ 6 noeuds en moins au moment de l'atterrissage, cela signifie que la composante de vent arrière présentée sur les écrans de navigation était sous-estimée.
2.3 Aéroports
2.3.1 Aires de sécurité d'extrémité de piste (RESA)
La plate-forme anti-souffle en asphalte située au-delà de l'extrémité de la piste 24L s'étend sur 30 m et est suivie d'une surface gazonnée en pente descendante. Cette surface n'est ni aménagée ni annoncée comme étant un prolongement d'arrêt, ce qui ne contrevient pas à la réglementation canadienne. Conformément au TP 312F publié en 1993 et à la norme applicable de l'OACI, une bande doit s'étendre au-delà de l'extrémité de piste sur une distance d'au moins 60 m, ce que fait la surface gazonnée. La norme de l'OACI exige également la présence d'une aire de sécurité d'extrémité de piste (RESA) s'étendant à partir de l'endroit où finit la bande sur une longueur d'au moins 90 m, la pente descendante ne devant pas dépasser 5 %. Comme le TP 312F recommande seulement que les aéroports respectent la longueur minimale de 90 m pour une RESA, les aéroports ne sont pas tenus d'en prévoir.
La distance séparant l'extrémité de piste du début de la route périphérique est de 155,7 m dans le prolongement de l'axe de piste, ce qui correspond approximativement à la trajectoire suivie par l'avion. Bien qu'aucune RESA ne soit publiée pour cette piste, la distance le long de cette trajectoire respectait la longueur stipulée pour une RESA dans la norme applicable de l'OACI. Néanmoins, le fossé de la promenade Convair, les clôtures et le ravin situé au-delà dans lequel se trouvent des piliers en béton soutenant le balisage lumineux d'approche de la piste 06R ont largement contribué aux dommages à l'avion et aux blessures de l'équipage et des passagers.
Dès 1989, la FAA a établi des critères de conception des aéroports qui exigeaient la présence d'une aire de sécurité de piste (RSA) longue de 300 m (1000 pieds). En 1999, reconnaissant la sécurité accrue offerte par une RESA plus longue, l'OACI a recommandé que la RESA s'étende au moins sur 240 m au-delà de l'extrémité de la bande de piste. Si une RESA avait été conçue et publiée pour la piste 24L conformément à la pratique recommandée de l'OACI, une aire de dépassement de piste, exempte d'obstacles, d'ornières, de creux et d'autres inégalités de surface dangereuses, se serait prolongée jusqu'à un endroit situé quelque 75 m au-delà de la promenade Convair.
Comme on l'a mentionné au paragraphe 1.10.11, il existe des solutions de rechange dans le cas des pistes qui ne peuvent respecter la norme relative à la RESA ou pour lesquelles la surface située au-delà de la RESA ne respecte pas la récente pratique recommandée de l'OACI, à savoir une aire de dépassement de 240 m au-delà de la bande de piste de 60 m. La technique faisant appel à un EMAS est conçue pour immobiliser un avion lorsqu'il n'est pas possible de construire une aire de dépassement de piste de 300 m (240 m + 60 m) pour l'OACI ou de 300 m pour la FAA. Cette technique a montré qu'elle offrait une solution de rechange pour les pistes où des obstacles naturels, par exemple des plans d'eau ou de fortes déclivités, comme c'est le cas pour la piste 24L, rendent impossible la construction d'une aire de sécurité standard. Si la piste 24L avait comporté une RESA construite selon la pratique recommandée de l'OACI, ou selon la norme de la FAA ou selon la solution de rechange prévue par la FAA, les dommages à l'avion et les blessures des passagers auraient peut-être été moindres.
2.3.2 Tableaux de sauvetage d'aéronef des services de sauvetage et de lutte contre les incendies d'aéronefs (TP 11183)
Le manuel contenant des tableaux de sauvetage d'aéronef (anciennement le TP 11183) récupéré d'un des camions d'incendie de la GTAA ne contenait aucun tableau de sauvetage pour l'Airbus A340. Des renseignements importants sur l'emplacement et le volume des réservoirs de carburant, sur l'emplacement des conduites de carburant, des issues de secours, des batteries, des points d'entrée forcée et sur d'autres éléments sont d'un grand secours pour les pompiers en cas d'intervention. Bien que la présence d'un manuel contenant des tableaux de sauvetage d'aéronef périmés n'ait eu aucun impact négatif sur l'intervention de la GTAA, il n'empêche que ce point met en lumière les carences des exigences du RAC quant à la fourniture des renseignements des tableaux de sauvetage.
Rien dans la réglementation n'oblige une autorité aéroportuaire à avoir en sa possession les tableaux de sauvetage d'aéronef appropriés. Toutefois, le RAC indique qu'il incombe aux autorités aéroportuaires d'obtenir et de tenir à jour un jeu de tableaux appropriés à des fins d'entraînement. Les autorités aéroportuaires peuvent se procurer facilement ces tableaux auprès des avionneurs. En vertu de la réglementation actuellement proposée par Transports Canada en matière de planification des interventions d'urgence aux aéroports, les autorités aéroportuaires seront tenues d'avoir en leur possession des tableaux à jour des aéronefs qui desservent régulièrement l'aéroport.
2.3.3 Renseignements sur le vent
Les deux sites de mesure du vent à l'aéroport de Toronto sont nécessaires pour donner des renseignements pertinents sur le vent aux équipages à l'atterrissage car les pistes sont relativement éloignées les unes des autres. Ces deux sites sont perçus comme étant redondants, et il arrive qu'on demande aux contrôleurs de fournir les renseignements sur le vent provenant du site utilisable quand l'autre site est inutilisable. La panne du dispositif WADDS du sud du terrain aurait dû amener les contrôleurs à fournir aux avions à l'atterrissage les renseignements sur le vent provenant du site au nord du terrain. Aucun renseignement provenant de ce site de mesure n'a été transmis. Du fait que les conditions changeaient rapidement à ce moment-là, des renseignements sur le vent provenant d'un site de mesure très éloigné de la piste d'atterrissage n'auraient eu aucune valeur.
Les renseignements provenant de la manche à vent fournis à la tour par les deux avions ayant atterri immédiatement en avant d'AFR358 ont permis d'obtenir des données propres au vent sur la piste, et ces renseignements ont été communiqués à l'équipage d'AFR358. Les renseignements sur le vent que l'ATC fournit à un avion sont les données au point de mesure du vent, et non pas à l'endroit où se trouve l'avion.
Quoi qu'il en soit, les renseignements sur le vent sont très importants pour les équipages au moment de l'atterrissage, notamment dans de mauvaises conditions météo où ils doivent concentrer une grande partie de leur attention à maintenir le contact visuel avec la piste. Dans de telles situations, les contrôleurs continuent souvent de communiquer des renseignements sur le vent qui vont au-delà des exigences prévues dans le manuel d'exploitation. Comme la capacité des contrôleurs à communiquer immédiatement des renseignements pertinents sur le vent pourrait s'avérer d'une importance capitale pour un atterrissage en toute sécurité, la fourniture d'un tel service ne devrait pas être compromise par la défaillance d'un simple composant électronique.
2.4 Conditions météorologiques
2.4.1 Données météorologiques
Les prévisionnistes du CMAC-E du SMC ont suivi les normes pour préparer les messages TAF (originaux et modifiés) et pour publier les SIGMET relatifs à l'activité de convection. Les prévisionnistes ont indiqué les orages dans les messages 14 heures avant l'accident. Ces orages sont restés mentionnés dans tous les messages TAF sous la forme d'une probabilité de 30 % (PROB 30) jusqu'à deux heures avant l'accident. Le dernier message TAF publié une heure et demie avant l'accident faisait état d'un TEMPO (changement temporaire) annonçant des orages accompagnés de visibilités de 2 sm jusqu'à 4 minutes avant l'atterrissage d'AFR358 et, par la suite, d'une PROB 30 des mêmes conditions. De plus, un SIGMET indiquant une ligne d'orages a été publié 45 minutes avant l'accident. Compte tenu des renseignements dont disposaient les prévisionnistes aux heures de publication, les prévisions étaient de bonne qualité et respectaient les pratiques acceptées. Toutes les prévisions respectaient les normes et elles ont été publiées à temps.
2.4.2 Renseignements météorologiques fournis par le contrôle de la circulation aérienne
En vertu du Manuel d'exploitation du contrôle de la circulation aérienne (MANOPS ATC), les contrôleurs sont tenus de fournir aux aéronefs des renseignements sur l'atterrissage. À Toronto, les dernières conditions météo sont enregistrées sur l'ATIS pour permettre aux équipages des appareils à l'arrivée d'en prendre connaissance. C'est le message ATIS Uniform qui renfermait les dernières conditions météo disponibles, et l'équipage d'AFR358 a indiqué qu'il avait reçu le message Uniform lorsqu'il a contacté les arrivées de Toronto. Mise à part l'information ATIS, l'ATC s'efforce de fournir d'autres renseignements qui pourraient être utiles aux équipages de conduite. Des renseignements sur le mauvais freinage ont été communiqués à plusieurs reprises. Le radar de la tour de Toronto n'est pas un radar météorologique spécialisé et ne fournit pas des renseignements météo très détaillés. Par conséquent, grâce au radar météorologique de son avion, l'équipage d'AFR358 avait une meilleure représentation radar des renseignements météo que les contrôleurs.
Rien n'indique que, si des renseignements provenant d'un radar météorologique plus perfectionné avaient été disponibles et communiqués à l'équipage d'AFR358, cela aurait modifié la décision de l'équipage de poursuivre l'atterrissage. Toutefois, s'ils n'ont pas un certain nombre d'indications sur la vitesse et la direction de phénomènes météorologiques intenses qui se déplacent rapidement, les contrôleurs sont limités dans leur capacité à fournir des renseignements susceptibles d'aider les équipages de conduite. Les contrôleurs essaient d'utiliser la piste qui est la mieux alignée par rapport à la direction du vent. Toutefois, à cause des conditions météo et des pannes d'ILS provoquées par la foudre, il avait fallu changer de piste d'atterrissage à plusieurs reprises.
À 18 h 56, le radiophare d'alignement de l'ILS de la piste 24R est devenu inutilisable, ce qui a obligé à mettre la piste 23 en service pendant un certain temps. Toutefois, certains avions à l'arrivée ont refusé de faire une approche de la piste 23 à cause de la proximité avec les orages se trouvant au nord de la trajectoire d'approche. À 19 h 13, le radiophare d'alignement de l'ILS de la piste 23 est devenu inutilisable, ce qui veut dire que, le radiophare d'alignement de la piste 24R étant déjà inutilisable, il ne restait plus que la piste 24L qui était alignée par rapport au vent. Dans des circonstances normales, l'approche et la piste d'atterrissage préférentielles sont annoncées dans le message ATIS. Les pannes d'équipement de longue durée sont signalées par NOTAM. L'équipage ne disposait d'aucune indication comme quoi il n'aurait pas été acceptable d'utiliser la piste 24L. C'est au commandant de bord de décider en dernier ressort si une piste en particulier est acceptable.
Compte tenu des limites des renseignements disponibles à bord, il se peut que les équipages demandent de l'aide pour pouvoir faire une projection de la situation météo dans le futur et se tournent vers l'ATC pour obtenir des renseignements supplémentaires. Ce qui a assurément été le cas dans le présent accident, puisque, dans la phase d'approche initiale, l'équipage a fait de multiples demandes de renseignements sur les conditions météo. Il se peut que les équipages de conduite pensent que les contrôleurs de l'ATC sont en mesure de leur fournir les conditions météo les plus à jour, car ils ont une connaissance de la climatologie locale, qu'ils sont situés à l'aéroport (dans le cas des contrôleurs de la tour) et qu'ils pourraient être au courant de la situation à laquelle sont confrontés les autres avions. Toutefois, la capacité de l'ATC à fournir des renseignements météo à jour dans des conditions qui changent rapidement en cas d'activité orageuse, sont somme toute limitées. De plus, certains équipages pensent à tort que l'ATC va fermer l'aéroport en raison des conditions météo.
2.5 Opérations aériennes
2.5.1 Repos de l'équipage
Peu de renseignements permettent de croire que l'équipage du vol AFR358 aurait été fatigué ou qu'il aurait eu un rendement moindre à cause des effets de la fatigue. L'accident s'est produit vers 16 h, heure locale, soit vers 22 h, en heure locale du point de départ de l'équipage et dans le fuseau horaire auquel l'équipage était adapté. Cette heure ne correspond pas à un creux du rythme circadien. L'équipage avait beau arriver à la fin d'un long vol, il n'avait effectué que 10 heures et demie de travail. Si l'équipage ressentait la fatigue normale après un tel vol, notamment parce qu'il s'agit d'un des plus longs vols assurés par Air France sans équipage renforcé, la journée de travail n'était pas longue au point où la fatigue aurait nui au rendement d'une personne ordinaire en bonne santé.
Tant le commandant de bord que le copilote avaient eu suffisamment de temps libre avant le vol pour pouvoir bénéficier d'un sommeil réparateur suffisant et les deux étaient frais et dispos avant le début du vol. Le commandant de bord avait déclaré avoir récemment ressenti un niveau de fatigue inhabituel, mais le centre aéromédical avait jugé que son état ne remettait pas en question son aptitude à voler. À la suite du constat fait par le centre aéromédical, le personnel médical d'Air France avait mis en place un horaire de vol réduit à l'intention du commandant de bord. Il a été demandé au médecin du BEA de fournir une évaluation de l'éventuel impact que la situation médicale du commandant de bord aurait pu avoir sur le rendement de celui-ci, mais le BST n'a eu accès à aucune évaluation.
2.5.2 Vol de l'accident
Il ne s'est rien passé d'inhabituel pendant que l'équipage de conduite s'occupait des préparatifs du vol. L'ajout de trois tonnes de carburant en cas d'attente en vol était considéré comme une pratique normale, compte tenu des conditions météo prévues. Il n'y avait aucun signe de pression au sein de la compagnie visant à empêcher de prendre du carburant supplémentaire, et le commandant de bord n'a pas hésité à le faire.
Chez Air France, le logiciel de planification de vol de la compagnie choisit le terrain de dégagement principal en se basant uniquement sur sa proximité. Toutefois, l'équipage de conduite doit en dernier ressort choisir le terrain de dégagement après avoir évalué les conditions météo et d'autres facteurs opérationnels. La facilité avec laquelle les plans de vol peuvent être modifiés permet d'assurer que les équipages de conduite ne seront pas soumis à une pression indue les contraignant à accepter automatiquement l'aéroport le plus proche.
Une fois en croisière, et même si les pilotes ne recevaient pas les messages TAF mis à jour pour leur terrain de destination et leur terrain de dégagement, les prévisions météo n'ont pas beaucoup varié. Par conséquent, il est peu probable que les pilotes auraient modifié leur décision s'ils avaient reçu les messages TAF à jour.
Quand il s'est trouvé plus près de Toronto, l'équipage de conduite s'est inquiété de l'activité orageuse à destination. Au début, ses inquiétudes ont porté davantage sur les retards à l'approche causés par les averses de pluie d'orage que sur la possibilité que l'activité orageuse nuise au vol pendant l'approche. Les pilotes n'étaient pas les seuls à penser ainsi, puisque plusieurs autres équipages faisaient les mêmes évaluations et portaient des jugements identiques sur les retards et les conditions météo. Certains pilotes ont choisi de se dérouter, tandis que d'autres ont décidé de continuer. Pour ne pas perdre leur possibilité de déroutement, les pilotes d'AFR358 surveillaient de près le carburant de l'avion afin d'être sûrs d'en avoir suffisamment pour se dérouter sur CYOW.
Dans leur préparation à l'atterrissage, les pilotes ont porté une attention supplémentaire à la météo et au carburant nécessaire au déroutement. Aucune de ces activités n'était inhabituelle, et rien n'indique que ces activités aient empêché les pilotes de s'acquitter efficacement de leurs autres tâches de pilotage, exception faite de l'exécution informelle de la liste de vérifications avant atterrissage. Tous les points de la liste de vérifications ont été exécutés, mais pas en vertu du processus normal de question et réponse. Rien n'indique que les pilotes étaient concentrés sur les conditions météo et le carburant au point d'en avoir perdu leur capacité à évaluer la situation dans son ensemble.
Rien n'indique que les pilotes aient déterminé la distance d'atterrissage nécessaire pour se poser à CYYZ dans l'une ou l'autre des conditions de piste auxquelles ils risquaient d'être confrontés. Les procédures d'Air France n'obligent pas à déterminer la distance d'atterrissage nécessaire.
À mesure que l'approche s'est poursuivie, les pilotes ont su que les CB tout proches auraient une incidence sur le temps qui régnait près de la piste. Toutefois, ils ont évalué que leur marge de sécurité n'était pas indûment compromise. Ils ont fait un exposé sur la procédure en cas de cisaillement du vent et ils étaient prêts à effectuer une remise des gaz immédiate en cas de réception d'une alerte de cisaillement du vent. La décision de poursuivre l'approche était caractéristique de la pratique normale dans l'industrie en ce sens que l'équipage pouvait s'en tenir à son intention d'atterrir tout en se gardant la possibilité d'interrompre l'approche s'il estimait que les conditions devenaient dangereuses. Jusqu'à la hauteur de décision de 200 pieds, l'avion était stabilisé, une augmentation de la vitesse et un écart par rapport à la trajectoire de descente étant toutefois en train d'apparaître vers cette hauteur. Par la suite, les écarts sont restés au-dessous du seuil à partir duquel le PNF aurait été tenu de les annoncer.
La situation est passée de normale et gérable à anormale et critique près du seuil de piste, quand l'avion est entré dans le périmètre d'activité de la cellule orageuse. À partir de cet instant, diverses circonstances se sont combinées pour mener directement à l'accident.
Le PF surveillait le vecteur de tendance de la vitesse aérodynamique et a réagi à une diminution de vitesse en augmentant la puissance; toutefois, il a gardé cette puissance trop longtemps. Si la poussée automatique avait été embrayée, la puissance des moteurs aurait été réglée de manière à maintenir la bonne vitesse aérodynamique, et les probabilités auraient été plus grandes que l'avion touche des roues plus près du point de toucher prévu sur la piste. À ce moment-là, les deux pilotes sont devenus préoccupés par la visibilité réduite vers l'avant, et la vitesse aérodynamique a fait l'objet d'une surveillance moins serrée. En l'absence de régulation de la vitesse aérodynamique grâce à la poussée automatique, l'augmentation de l'énergie découlant de la poussée supplémentaire a fait augmenter la vitesse aérodynamique et la vitesse sol.
Au moment du survol du seuil de la piste, au milieu d'une forte pluie, d'une mauvaise visibilité, d'éclairs et de sautes de vent, l'équipage de conduite a été dépassé par les violentes conditions météo et a été saturé par les tâches à accomplir, ce qui a rendu difficile la réalisation d'un atterrissage normal. Les pilotes qui, à ce moment-là, se concentraient tous les deux sur ce qui se passait à l'extérieur de l'avion, n'étaient pas conscients qu'une saute de vent était également en train de se produire. Pendant l'arrondi et le début du flottement au-dessus de la piste, les pilotes ne se sont pas rendu compte de la longueur de piste utilisée. La composante de vent arrière a contribué à la déviation de l'avion au-dessus de la trajectoire de descente et à la distance totale nécessaire à l'atterrissage.
La forte pluie a obscurci la vision à travers le pare-brise et a considérablement réduit la visibilité vers l'avant. Les deux pilotes devant principalement se fier à ce qu'ils voyaient par les fenêtres latérales pour essayer de déterminer la position de l'avion, latéralement et verticalement. Le fait que les pilotes essayaient tous les deux de déterminer la position de l'avion pourrait expliquer en partie la lenteur du PF à réduire la puissance au ralenti. Dans de telles circonstances, il peut être difficile de suivre une trajectoire vers le point de toucher normal sur la piste, ou même de distinguer ce point.
Les données FDR montrent que, au moment du toucher des roues, l'avion n'était pas aligné sur la piste et ne se trouvait pas dans l'axe. Pendant cette partie de l'atterrissage, le PF était entièrement occupé à aligner l'avion et à le garder sur la piste dans les conditions de vent traversier.
Le retard dans le déploiement des inverseurs de poussée peut être attribué à la surcharge de travail des pilotes au moment du toucher des roues. Dans la confusion, les annonces normales « Spoilers » et « Reverse verts » n'ont pas été faites par le PNF. Si les annonces exigées avaient été faites, le PF aurait peut-être utilisé l'inversion de poussée plus tôt. Le PF était complètement concentré sur la maîtrise de l'avion pour ne pas dériver au-delà du bord de la piste. Compte tenu de la visibilité réduite, il devait lui être difficile de corriger rapidement les écarts par rapport à l'axe. Même si les inverseurs de poussée avaient été déployés, il est peu probable que le PF aurait sélectionné la pleine inversion de poussée dans les premiers instants de la course à l'atterrissage, car les procédures d'Air France, conformément au FCOM, demandent de réduire l'inversion de poussée si l'avion n'est pas aligné et/ou s'il dérive par rapport à l'axe de piste dans des conditions de vent traversier.
Le retard dans la sélection des inverseurs de poussée et le retard subséquent dans l'application de l'inversion de poussée maximale ont ajouté à la distance d'atterrissage nécessaire. L'état de la piste a réduit la qualité du freinage disponible pour permettre à l'avion de s'immobiliser sur le reste de la piste. Compte tenu des sautes de vent rapides, la limite de vent traversier sur piste contaminée a été dépassée; ce facteur a augmenté les difficultés auxquelles l'équipage devait faire face pour garder l'avion dans l'axe de piste. À l'endroit où l'avion a touché des roues, dans des conditions de piste contaminée, il ne lui restait plus suffisamment de piste pour pouvoir s'immobiliser. D'après le deuxième tableau présenté au paragraphe 1.6.4, compte tenu du vent arrière de 10 noeuds qui prévalait au moment de l'atterrissage, l'avion n'aurait pas pu s'immobiliser sur le reste de la piste, même si celle-ci avait été mouillée plutôt que contaminée.
Les équipages d'Airbus A340 d'Air France ont la possibilité de remettre les gaz pendant une approche s'il devient évident que l'atterrissage ne peut être effectué en toute sécurité. En théorie, la décision de remettre les gaz peut être prise aussi tardivement qu'au moment où l'avion est au sol, pourvu qu'il n'y ait pas encore eu sélection des inverseurs. Dans des conditions normales, cela ne pose pas de problème.
Alors que l'avion approchait du seuil de piste, il y avait des orages menaçants accompagnés d'éclairs sur la trajectoire d'approche interrompue. À ce moment-là, l'équipage de conduite a donné la priorité à l'atterrissage, croyant qu'il n'était plus possible de faire une remise des gaz en toute sécurité.
2.5.3 Utilisation du pilote automatique et de la poussée automatique
Air France ne donne pas de directives particulières à ces équipages sur le moment où ils doivent débrayer le pilote automatique lors d'une approche de catégorie I. Airbus ne fait pas non plus de recommandation en la matière. Le pilote automatique est certifié pour une utilisation jusqu'à 160 pieds agl pour les approches de catégorie I, mais l'équipage a débrayé le pilote automatique vers 350 pieds. Il serait bon d'étudier les avantages qu'il y aurait à garder le pilote automatique embrayé jusqu'à l'altitude la plus basse autorisée en approche lorsque les conditions météorologiques sont à la limite de la catégorie d'approche et/ou lorsque la visibilité est mauvaise. Cela réduirait la charge de travail des pilotes et leur permettrait de se concentrer sur d'autres tâches.
En ce qui concerne le débrayage de la poussée automatique, la pratique d'Air France diffère de la recommandation d'Airbus et de la pratique des autres exploitants qui ont été interrogés. Il semble y avoir un consensus beaucoup plus élevé chez les pilotes d'Airbus pour ce qui est de suivre la recommandation préconisant de laisser la poussée automatique embrayée tout au long de l'approche, car cela réduit la charge de travail du PF. De plus, la poussée automatique peut généralement réagir plus vite et avec plus de précision que ne le ferait un pilote pour réguler la vitesse. Les résultats des essais en simulateur appuient l'utilisation de la poussée automatique pendant toute l'approche.
Les écarts par rapport à la trajectoire de descente et à la vitesse qui sont apparus en courte finale après une approche normale stabilisée peuvent être attribués directement à des conditions météo violentes et inattendues. Toutefois, l'analyse de l'accident a montré que si la poussée automatique était demeurée embrayée, elle aurait réduit de façon importante la charge de travail de l'équipage.
2.5.4 Approches dans du temps convectif
Les orages peuvent présenter un risque important à l'utilisation en toute sécurité d'un avion, et la capacité des équipages de conduite à évaluer en temps opportun les risques associés à ces dangers est capitale pour la sécurité des vols. Malgré les risques associés à ces dangers, tant la recherche que les enquêtes sur des accidents antérieurs ont montré que la pénétration dans du temps convectif en région terminale lors d'une approche à l'atterrissage est une pratique répandue dans l'industrie. La même recherche montre que les avions contournent plus souvent le temps convectif à l'extérieur des régions terminales, car il y a plus d'options disponibles. Les pilotes sont donc conscients des dangers que représente le temps convectif, mais il leur arrive régulièrement de juger que le risque associé au vol dans du temps convectif est acceptable afin de permettre l'atterrissage à destination.
Compte tenu de la nature du temps convectif et de la qualité des renseignements mis à la disposition des équipages pour les aider à évaluer les risques associés au temps convectif, il est difficile d'obtenir une représentation claire du niveau réel de risque associé à un orage en particulier. En fait, le temps convectif précède tous les facteurs associés à une augmentation du risque d'erreur de décision figurant dans les études antérieures sur la prise de décision des pilotes. Le temps convectif est dynamique, et un grand nombre des dangers les plus importants précités surviennent rapidement et avec peu d'avertissement (comme les changements rapides de la direction du vent, de la visibilité ou de l'état de la piste).
De plus, la plupart des renseignements dont dispose un équipage de conduite sont ambigus, en ce sens qu'ils ne fournissent que des renseignements indirects sur un danger pris isolément. Si les échos de fortes précipitations sont associés à tous les dangers du temps convectif, il se peut qu'une personne voie souvent des échos de fortes précipitations sans être confrontée au moindre danger. Par conséquent, il faut combiner de multiples sources de renseignements pour pouvoir porter un jugement sur le risque réel et pour pouvoir faire une projection des conditions météo. Ce jugement peut facilement se traduire par une sous-estimation des risques. La probabilité de sous-estimation du risque associé au temps convectif augmente chaque fois qu'une personne est confrontée à du temps convectif qui n'a pas de conséquences fâcheuses. De plus, de telles décisions sont prises alors que l'équipage se trouve face à des objectifs contradictoires; pour un équipage, prendre la décision de se dérouter sur la foi de renseignements ambigus dans une situation très changeante risque d'être difficile à justifier.
L'équipage était tout à fait conscient de la présence d'orages dans la région de Toronto. Ces orages étaient prévus, et l'équipage avait décidé de prendre du carburant supplémentaire afin d'avoir plus d'options disponibles à son arrivée à Toronto. Pendant la descente et l'approche, l'équipage a cherché activement à obtenir des renseignements supplémentaires sur les conditions météo tout en examinant la viabilité de divers terrains de dégagement. Il avait reçu des mises à jour régulières des conditions à Toronto, ayant fait de multiples demandes de METAR et ayant reçu le SIGMET en vigueur grâce au message ATIS. En approche, il a reçu des renseignements qui indiquaient clairement qu'il y avait des conditions météo significatives au-dessus de l'aéroport : le radar météorologique montrait des zones rouges près de la piste, des pilotes avaient signalé que le freinage était mauvais, l'équipage pouvait voir des éclairs aux abords de l'aéroport et plusieurs rapports de pilote signalaient que le vent augmentait et changeait de direction. Malgré tous ces indices, l'équipage a déterminé qu'il n'y avait aucune indication claire comme quoi l'approche devait être interrompue, et il a donné priorité à l'atterrissage. Il avait tenu un exposé sur le déroutement et il était prêt à faire une remise des gaz.
Ce n'est qu'en très courte finale que l'équipage a eu des indications claires que l'avion était rendu à un point où un atterrissage était déconseillé : l'avion n'était plus sur la trajectoire de descente et était entré dans une zone de précipitations intenses et de visibilité réduite. L'équipage avait deux choix et les deux pouvaient avoir des conséquences fâcheuses : poursuivre l'approche qui devenait de plus en plus difficile, ou faire une approche interrompue dans des conditions potentiellement dangereuses. À cet instant, et même si les procédures d'Air France demandent de faire une remise des gaz dès qu'il n'y a pas maintien de la trajectoire idéale jusqu'au déploiement des inverseurs de poussée, le commandant de bord, doutant de pouvoir faire une remise des gaz en toute sécurité, a décidé de poursuivre l'atterrissage.
Air France avait identifié le risque d'un accident à l'atterrissage lié aux conditions météo et avait traité ce point en priorité dans son programme de sécurité des vols avant l'accident du vol AFR358. La première mesure prise par Air France en la matière portait sur l'entraînement et encourageait les pilotes à remettre les gaz en tout temps avant le déploiement des inverseurs de poussée. Si cette mesure a traité jusqu'à un certain point du risque qu'un tel accident se produise, elle n'a pas complètement réglé le problème auquel doit faire face un équipage en approche dans du temps convectif; les dangers associés au temps convectif, y compris le cisaillement du vent et les microrafales, peuvent augmenter les risques liés à une remise des gaz à bas régime. De plus, ces dangers peuvent survenir sans beaucoup d'avertissement. Même s'il se peut que ces phénomènes se produisent dans un orage, cela ne veut pas dire qu'ils sont présents dans tous les orages. Comme ce fut le cas pour l'équipage du vol AFR358, les conditions peuvent changer très rapidement, un avion faisant face à des conditions possibles à gérer en approche, et l'avion suivant, à des conditions tout à fait différentes.
Pour ce qui est de la croisière, Air France, comme d'autres compagnies aériennes, possède des lignes directrices claires qui précisent à quelle distance les avions doivent se tenir du temps convectif. Bien que les équipages soient toujours tenus de faire preuve de jugement dans de telles situations, ils disposent de pratiques exemplaires bien établies qu'il leur faut suivre. Toutefois, pour l'approche et l'atterrissage, de telles lignes directrices n'existent pas, tant chez Air France que dans de nombreuses autres compagnies aériennes. Après l'accident de l'avion d'Air France survenu à Pointe-à-Pitre en 1999, la compagnie a examiné s'il serait possible d'incorporer de telles lignes directrices dans son manuel d'exploitation. Le rapport d'accident interne de la compagnie a clairement montré combien il serait difficile d'évaluer les risques associés au temps convectif, mais l'examen a conclu que de telles lignes iraient à l'encontre du but qui consiste à permettre aux équipages de prendre des décisions en fonction de chaque situation.
Toutefois, certaines compagnies fournissent de telles lignes directrices et, dans certains cas, celles-ci traitent des approches autour d'orages. Des enquêtes sur des accidents antérieurs ont reconnu la valeur de ces lignes directrices, car elles aident les équipages à prendre des décisions dans des situations où les choix sont loin d'être évidents. Ces lignes directrices et ces consignes permettent de réduire au minimum l'impact des pressions opérationnelles, du stress et de la fatigue dans la prise de telles décisions. En l'absence de lignes directrices claires sur la façon d'effectuer l'approche dans du temps convectif, la probabilité est plus grande que les équipages de conduite poursuivent l'approche dans de telles conditions.
2.5.5 Renseignements météorologiques servant à prévoir le temps convectif
La capacité des équipages de conduite à en arriver à une évaluation précise de la situation météorologique actuelle et future est un élément clé dans la prise de décision efficace. Compte tenu des contraintes de temps qui vont en augmentant à proximité du point de début de descente et pendant l'approche et l'atterrissage, les renseignements devraient être présentés dans un format qui réduit au minimum la synthèse et l'interprétation que doit faire l'utilisateur. Compte tenu du but qui consiste à développer la conscience de la situation, les renseignements météorologiques présentés devraient également permettre à l'utilisateur de se projeter dans le futur et de prévoir ce que seront les conditions météo.
L'accident du vol AFR358 montre clairement combien la nature changeante et imprévisible du temps convectif rend l'atteinte de ces buts difficile. L'équipage avait beau avoir fait un effort concerté afin de recueillir des renseignements sur les conditions météo actuelles, et la tour de contrôle avait beau lui avoir communiqué des renseignements additionnels sur le vent et l'état de la piste avant l'atterrissage, il n'empêche que l'équipage a été surpris par l'intensité des phénomènes météorologiques qu'il a rencontrés en approchant du seuil de piste.
Dans les minutes ayant précédé l'accident, la perception de l'équipage en approche était différente de celle qu'avaient de nombreuses personnes capables de se faire une idée de l'intensité de l'orage depuis le sol. Cette différence ne concernait pas que l'équipage du vol AFR358 puisque l'appareil se trouvait dans une file d'avions en approche à l'atterrissage. Des avions se sont posés sur la piste 24L environ 9, 6, 4 et 2 minutes avant qu'AFR358 atterrisse, et il y avait au moins un autre appareil en approche derrière AFR358. À noter que tous ces équipages avaient eux aussi choisi de faire une approche dans des conditions semblables à celles auxquelles AFR358 a été confronté.
Par conséquent, quand il faut composer avec du temps convectif, les renseignements mis à la disposition d'un équipage de conduite en approche n'aident pas au maximum cet équipage à se faire une bonne idée des conditions météo auxquelles il risque de faire face plus tard en approche. Compte tenu de la nature localisée et changeante des orages, les conditions que doivent affronter ceux qui se trouvent près d'un orage ou au-dessous d'un orage, risquent de ne pas être les conditions prévues par ceux qui approchent de l'orage.
2.5.6 Atterrissage sur piste contaminée
Dans le cas de l'A340-300, la limite maximale de vent traversier est de 10 ou 15 noeuds si la piste est contaminée. L'équipage de conduite savait qu'une forte pluie s'abattait sur la piste d'atterrissage. En approche, il a vu que la piste était brillante comme la surface d'un lac. Ces indications permettent de penser qu'il y avait probablement plus de 3 mm d'eau sur la piste; toutefois, l'équipage de conduite n'a pas tenu compte de cela ou n'a pas pris conscience de cette situation quand il a décidé de poursuivre l'approche et l'atterrissage, même s'il savait que le vent traversier était supérieur à 10 noeuds.
L'équipage de conduite connaissait la distance d'atterrissage disponible sur la piste 24L, mais rien n'indique qu'il savait que la distance nécessaire, pleins volets, indiquée dans le MANEX en cas de piste contaminée et d'une composante de vent arrière, dépassait la longueur de la piste 24L.
De plus, l'équipage de conduite savait par les rapports des deux avions ayant atterri avant lui que le freinage était mauvais. Les procédures d'Air France applicables dans pareil cas stipulent que, en l'absence de mesure de l'indice de frottement sur piste, il faut considérer que la piste est contaminée s'il a été signalé que le freinage était mauvais.
Au cours de l'enquête, des pilotes d'Air France et d'autres exploitants ont été consultés concernant les opérations sur pistes recouvertes d'eau. Il y a un fort consensus pour dire que, en cas de fortes précipitations, le manque de renseignements sur l'état de la piste pose un problème de sécurité; toutefois, il n'y a pas de consensus sur la façon dont les comptes rendus de freinage des avions précédents doivent être interprétés par les avions suivants. C'est notamment le cas si l'avion précédent est relativement petit par rapport à l'avion suivant.
On s'attend à ce que les équipages de conduite respectent les limites de l'avion, y compris les limites de vent traversier. Toutefois, pour les opérations sur piste mouillée, les équipages de conduite ne disposent d'aucun véritable moyen, par exemple l'épaisseur de la couche d'eau, pour déterminer l'état de la piste avant l'atterrissage. Les rapports de pilote donnant la qualité du freinage ne reçoivent pas régulièrement toute l'attention qu'il faudrait dans le processus de prise de décision.
2.5.7 Gestion des ressources de l'équipage / Gestion des menaces et des erreurs
La principale menace à laquelle AFR358 a été exposé a été la prévision de temps convectif à l'heure d'arrivée prévue à destination et au terrain de dégagement. L'équipage avait atténué cette menace en prenant 3 tonnes supplémentaires de carburant, ce qui aurait permis à l'avion d'attendre environ 23 minutes de plus. Compte tenu de la nature normalement passagère des orages, l'équipage pensait qu'il s'agissait là d'une mesure suffisante.
À 19 h 50, l'équipage a vu du rouge sur son écran radar près de sa trajectoire d'approche prévue et il a décidé de poursuivre l'approche avec prudence. Cela peut être considéré comme une erreur de décision opérationnelle d'après le cadre fourni par le modèle TEM; l'erreur de décision a exposé le vol à un risque plus grand. Toutefois, la poursuite de l'approche dans du temps convectif est largement répandue dans l'industrie, et l'équipage avait pris des mesures d'atténuation en examinant la procédure à suivre en cas de cisaillement du vent et en discutant de sa trajectoire dans l'éventualité où il devrait remettre les gaz. Il avait discuté de l'endroit où se trouvaient les cellules orageuses et avait prévu un virage à gauche pour passer entre deux cellules s'il lui fallait remettre les gaz. Ce qui indique que, à 19 h 50, l'équipage pensait toujours qu'il pourrait faire une approche interrompue en toute sécurité n'importe quand durant l'approche.
Dans les derniers moments de l'approche, la menace générale de temps convectif, que l'équipage avait prévue et pour laquelle il avait pris des mesures d'atténuation tout au long du vol, a commencé à se manifester sous la forme de dangers plus spécifiques. À ce moment-là, malgré le caractère inquiétant de ces dangers, l'équipage ne s'est pas senti suffisamment menacé au point de décider d'interrompre l'approche. Les dangers présents étaient un important vent traversier, des rapports signalant un mauvais freinage et une visibilité réduite à cause de la forte pluie et des éclairs. L'équipage a pris des mesures pour traiter deux de ces éléments : le freinage automatique a été réglé à moyenne intensité pour tenir compte de l'état de la surface de la piste; le commandant de bord a discuté de la nécessité de faire un atterrissage ferme sur la piste mouillée; et le PNF surveillait le vent et tenait le PF au courant.
La coordination de l'équipage pendant le vol et la première partie de l'approche a été raisonnablement efficace. L'équipage a géré les menaces importantes, et les erreurs observées ont été circonscrites ou sans conséquence. Le risque général pour la sécurité du vol a augmenté dans les derniers instants quand l'équipage a décidé de poursuivre l'approche à proximité du temps convectif. L'avion a alors dû faire face à une visibilité réduite et à une composante de vent traversier-vent arrière. L'équipage n'a pas jugé que les indices qu'il avait reçus plus tôt en approche étaient suffisamment dissuasifs pour le faire renoncer à l'approche. L'incapacité de l'équipage à prévoir les menaces qui sont apparues tard en approche et à y réagir a mené à plusieurs erreurs et, finalement, à l'éloignement de l'avion de la trajectoire de descente. La sous-estimation, de la part de l'équipage, des dangers associés à l'orage à l'aéroport ne peut être attribuée à une mauvaise interaction ni à de mauvaises communications.
2.5.8 Utilisation du chasse-pluie
Chez Air France, le système chasse-pluie de l'avion avait été remis en service opérationnel en 2002, mais l'équipage du vol AFR358 ne le savait pas. Un sondage mené parmi d'autres pilotes utilisant des avions munis d'un tel système a révélé qu'un grand nombre de ces pilotes ne l'utilisaient pas ou ne savaient pas dans quelles conditions il serait bénéfique de l'utiliser. L'industrie devrait tirer avantage d'un plus grand nombre de renseignements définitifs sur l'efficacité des systèmes chasse-pluie et d'un plus grand nombre de directives sur leur utilisation, y compris sur le moment d'utiliser ces systèmes.
2.5.9 Annonce d'approche interrompue réservée au commandant de bord
Chez Air France, la décision de faire une remise des gaz, une approche interrompue ou un atterrissage interrompu (ci-après appelé approche interrompue) revient au seul commandant de bord, peu importe qui est le pilote aux commandes. Toutefois, il incombe au copilote de suggérer d'effectuer une approche interrompue s'il le juge nécessaire. Le fait de confier à plus d'un pilote la responsabilité d'annoncer une approche interrompue peut augmenter la probabilité qu'une situation dangereuse soit reconnue plus tôt et diminuer le temps qu'il aurait autrement fallu pour déclencher la procédure d'approche interrompue.
2.5.10 Formation à la prise de décision en cas d'approche difficile
L'accident du vol AFR358 présente un grand nombre de facteurs communs à beaucoup d'autres accidents similaires. Ces accidents sont survenus pendant une approche de jour ou de nuit exécutée par des équipages bien entraînés. Ce n'était pas la première fois que les équipages de ces avions atterrissaient dans des conditions difficiles et ils étaient fiers de leurs capacités et de leur professionnalisme. Les enquêtes détaillées qui ont été menées sur des accidents similaires à l'accident du vol AFR358, ainsi que leurs conclusions, leurs constatations et leurs recommandations des plus pertinentes, n'ont pas eu une grande incidence sur le nombre des accidents de ce type qui continuent de se produire partout dans le monde. En fait, 20 accidents de ce type touchant de grands exploitants commerciaux sont survenus dans les 5 dernières années. De plus, un certain nombre d'incidents récents mettant en cause des facteurs similaires avaient sans l'ombre d'un doute tout ce qu'il fallait pour se terminer en catastrophe. Si cette tendance se maintient, les risques de pertes de vie et de dommages aux biens et à l'environnement qui vont en résulter vont augmenter considérablement. Il y a de quoi s'inquiéter, car il est clair que, malgré les efforts de toutes les personnes concernées, et bien que nous apprenions de ces accidents ou des expériences vécues par d'autres, nous semblons être incapables de mettre au point les bons outils pour atténuer ce risque bien précis.
Certaines des conditions ci-après, et dans certains cas, toutes les conditions ci-après, étaient présentes dans ces accidents :
- l'équipage était en approche derrière ou devant d'autres avions qui se posaient ou qui avaient l'intention de le faire;
- un cumulonimbus ou un orage de mousson approchait ou se trouvait au-dessus de la zone d'atterrissage au moment de l'atterrissage;
- il pleuvait à verse;
- la piste était contaminée par de l'eau;
- un mauvais freinage avait été signalé par des avions précédents ou l'équipage de l'avion accidenté a été confronté à un tel freinage;
- il y avait un fort vent traversier, un fort vent arrière ou les deux;
- l'avion s'est écarté de la vitesse cible et de la trajectoire de descente en courte finale;
- il y a eu un cisaillement du vent, peut-être associé à des courants descendants;
- une remise des gaz ou un atterrissage interrompu n'a ni été envisagé ni été tenté;
- l'avion a fait un atterrissage long;
- les mesures prises par l'équipage après le toucher des roues n'étaient pas les mesures standard;
- très souvent, l'équipage de l'avion accidenté a été confronté à une baisse soudaine de la visibilité qu'il n'avait pas prévue ou qu'il ne s'était pas préparé à affronter.
Malgré tous les signes alarmants présents, les équipages des avions accidentés étaient confiants dans leurs capacités à se poser en toute sécurité. La décision de poursuivre l'atterrissage après avoir perdu de vue la piste et ses abords a souvent été celle qui a mené à l'accident.
Il faut que les équipages soient beaucoup plus conscients qu'une approche exécutée à proximité de zones de temps convectif est une situation dangereuse dès le début. Ils doivent mieux comprendre toutes les conditions auxquelles ils risquent d'être confrontés en approche finale. Ils doivent être prêts à faire une approche interrompue dès que l'une de ces conditions échappe à leur contrôle ou à leur compréhension. Ils ne doivent pas se mettre dans une situation où il ne sera plus possible de faire une approche interrompue en toute sécurité.
Suffisamment tôt en approche, un certain nombre de conditions décrites ci-devant qui étaient en train d'évoluer ont échappé à la compréhension et par le fait même au contrôle de l'équipage du vol AFR358. Ces conditions justifiaient la décision de se rendre au terrain de dégagement avant que le commandant de bord ait le sentiment qu'une remise des gaz en toute sécurité n'était plus possible.
Lorsqu'un équipage arrive à la DH lors d'une approche de précision, il y a deux options à prendre en considération, soit continuer et atterrir, soit remettre les gaz. La décision de remettre les gaz est la plus simple, car les pilotes s'entraînent à une telle possibilité. Les vols effectués en simulateur dans le cadre de la formation annuelle ou périodique visent à confirmer que les équipages effectueront bien une approche interrompue si les critères de visibilité ne sont pas respectés à la DH.
Par ailleurs, la décision de poursuivre et d'atterrir lorsque les repères visibles sont très peu apparents au mieux à la DH est une situation stressante pour un pilote. Si ces repères visibles diminuent ou disparaissent après qu'il a été décidé d'atterrir, le premier sentiment du pilote est une impression d'incompréhension, suivie d'une période d'inaction, pendant laquelle il se demande ce qui vient de se passer tout en souhaitant que tout rentre bientôt dans l'ordre. Ce manque de réaction en attendant que la piste et ses abords réapparaissent est dû au fait que le cerveau devient saturé de tâches à ce moment précis, à moins que le pilote ait été entraîné à réagir instinctivement et immédiatement à la menace. Naturellement, la bonne mesure à prendre consiste à remettre les gaz sans attendre. Le Bureau croit que, si une formation plus poussée pouvait être dispensée en la matière, le taux de ces types d'accident diminuerait.
2.6 Possibilités de survie
2.6.1 Généralités
L'évacuation s'est bien déroulée grâce à la formation suivie et aux mesures prises par l'ensemble des PNC. Sauf de petites exceptions, les PNC ont agi de manière professionnelle et exemplaire, ce qui a joué un rôle important dans le bon déroulement de l'évacuation après l'accident. Il y a eu de bonnes communications entre les pilotes et les PNC. Comme ils avaient été avertis de la possibilité d'une remise des gaz, les PNC étaient davantage aux aguets pendant la phase d'atterrissage et étaient prêts à réagir immédiatement en cas d'urgence.
La présence à bord du vol AFR358 de trois PNC supplémentaires a sans aucun doute contribué au bon déroulement de l'évacuation, comme en fait foi le rôle joué par ces PNC pendant l'évacuation. Deux PNC ont dirigé l'évacuation des passagers à des issues de secours, tandis que le troisième PNC a joué un rôle primordial en ouvrant une issue de secours et en aidant par la suite les passagers au pied du toboggan R4.
2.6.2 Incendie
Tout indique que l'intégrité des réservoirs de carburant a été compromise après que l'avion a franchi la promenade Convair. Une fois que le carburant s'est mis à fuir, les moteurs intérieurs ou des étincelles entre des pièces métalliques peuvent avoir enflammé le carburant. Il se pourrait également que le liquide hydraulique qui fuyait du train d'atterrissage ait fourni le carburant initial et que les freins surchauffés soient la source d'inflammation. Il n'y a eu aucun incendie important avant que l'avion atteigne le ravin et, lorsque l'avion s'est immobilisé, l'incendie a pris de l'ampleur. Le carburant qui fuyait au point de former une flaque a offert à l'incendie une abondante source d'alimentation. Au début, l'incendie dans l'emplanture des ailes n'a pas touché directement le fuselage. L'incendie a augmenté en intensité pendant l'évacuation et, peu après la fin de l'évacuation, le fuselage a été enveloppé par les flammes. L'aménagement intérieur de la cabine, les bagages à main et le contenu des soutes ont alimenté l'incendie. La pluie diluvienne a dilué la mousse utilisée par les pompiers au point de la rendre moins efficace pendant les opérations de lutte contre l'incendie.
2.6.3 Sièges de l'avion
En octobre 1989, les Joint Aviation Authorities (JAA) ont publié le modificatif 13 aux JAR 25. Dans le cas des conditions d'atterrissage d'urgence (articles 25.561 et 25.562 des JAR), les nouvelles dispositions étaient très similaires à celles du modificatif 25-64 des FAR, renfermant des tests de facteurs de charge statiques et dynamiques identiques. La principale différence tenait au fait que, dans le modificatif des JAR, les exigences des tests dynamiques devaient s'appliquer uniquement aux sièges passagers alors que dans le modificatif des FAR, ces mêmes exigences devaient s'appliquer aux sièges passagers et aux sièges de l'équipage. Les sièges du poste de pilotage d'AFR358 étaient par conséquent certifiés en vertu de l'article 25.561 des JAR. D'après les documents de conception, les sièges du poste de pilotage dépassaient les exigences de l'article 25.561 des JAR, mais ils ne respectaient pas les exigences des charges dynamiques de l'article 25.562, lequel renferme les exigences relatives aux sièges passagers. Les normes de certification de l'AESA exemptent les sièges des occupants du poste de pilotage des exigences de l'article 25.562 des normes de certification.L'enquête n'a pas permis de déterminer les forces maximales d'accélération positive atteintes au cours de l'accident, puisque le FDR a cessé d'enregistrer avant l'arrêt complet de l'avion. Toutefois, les sièges passagers ont résisté. Il n'a pas été possible de déterminer si la rupture du siège du commandant de bord avait atténué les charges d'impact ou avait aggravé ses blessures.
2.6.4 Sécurité et évacuation des passagers
2.6.4.1 Liste de vérifications pour l'exposé de sécurité du poste de pilotageIl n'existait pas de liste de vérifications pour l'exposé de sécurité à donner aux passagers voyageant dans le poste de pilotage, et l'exposé donné de mémoire au passager assis à cet endroit ne contenait pas toutes les informations nécessaires. Le niveau de surveillance exercé par l'autorité de réglementation en matière de notice de sécurité n'a pas facilité l'identification des notices ne contenant pas toute l'information nécessaire et qui sont utilisées par les transporteurs aériens.
2.6.4.2 Exposés de sécurité avant l'atterrissage
En cas d'évacuation d'urgence à l'atterrissage après un long vol, il est possible que les passagers aient oublié des consignes de sécurité très importantes qui leur ont été données plusieurs heures auparavant, au moment de l'exposé de sécurité précédant le départ. Les passagers peuvent consulter la notice de sécurité placée devant eux; toutefois, dans le questionnaire envoyé aux passagers du vol AFR358, moins d'un tiers des passagers ont indiqué avoir lu la notice de sécurité. Il serait avantageux d'ajouter à l'exposé de sécurité précédant le décollage des renseignements importants, comme l'emplacement des issues de secours et le danger qu'il y a à essayer de récupérer ses bagages à main en cas d'évacuation d'urgence. Le risque mentionné ci-devant serait ainsi réduit, et la sécurité des passagers s'en trouverait améliorée. À l'heure actuelle, la réglementation canadienne prévoit que, pour les vols de plus de quatre heures, l'exposé précédant le décollage mentionne, en plus, des instructions non liées aux situations d'urgence, l'emplacement des issues de secours, mais elle ne dit rien sur les bagages à main.
Il est obligatoire d'informer les passagers des mesures à prendre si l'on s'attend ou se prépare à une situation d'urgence; toutefois, les procédures d'urgence d'Air France tout comme la réglementation française n'exigent pas que le personnel navigant commercial ordonne aux passagers d'adopter la position de sécurité en cas d'accident soudain et inattendu, ce qui augmente les risques que les passagers soient blessés à l'impact en pareilles circonstances.
2.6.4.3 Position de sécurité
La position de sécurité redressée qui est illustrée sur les notices de sécurité d'Air France n'est pas une position de sécurité recommandée aux États-Unis ni au Canada ni par un certain nombre d'autorités respectées dans le domaine de la réglementation aérienne. Des études de sécurité montrent que cette position n'offre pas une protection suffisante contre les mouvements désordonnés ou les blessures causées par des impacts secondaires. De plus, compte tenu des circonstances entourant l'accident, il se pourrait que les passagers qui adoptent cette position de sécurité soient exposés à de plus grands risques de blessures à la colonne vertébrale. Toute blessure, même légère, nuit à la capacité du passager d'évacuer l'avion en toute sécurité. Et tout obstacle gênant l'évacuation présente un risque particulièrement important pour la sécurité des passagers dans le cas d'un accident d'aviation suivi d'un incendie.
2.6.4.4 Cabine passagers et bagages
Comme la plus grande partie de l'avion a été consumée par l'incendie, les enquêteurs n'ont pas pu examiner les verrous des coffres de rangement supérieurs et des portes des offices ainsi que les tringles à rideau qui s'étaient détachées. De plus, pour les raisons indiquées ci-devant, il n'a pas été possible de déterminer les forces d'accélération ressenties. En conséquence, les forces d'accélération exactes nécessaires pour que les verrous de porte s'ouvrent et que les tringles à rideau se détachent n'ont pu être clairement établies. Certains verrous de porte se sont ouverts et des tringles à rideau se sont détachées pendant la séquence d'impact. Résultat, des bagages à main et d'autres articles sont tombés dans la cabine, blessant des passagers et bloquant les couloirs menant aux issues de secours, ce qui a nui à l'évacuation d'urgence.
L'article 725.43 des Normes de service aérien commercial précise l'information à fournir lors de l'exposé donné aux passagers avant le décollage et l'atterrissage, mais il ne mentionne aucune exigence destinée à avertir les passagers des dangers qui les guettent s'ils essayaient d'emporter leurs bagages de cabine lors d'une évacuation d'urgence. Des recherches ont montré que lors d'une évacuation, la sécurité des passagers et de l'équipage est menacée par les passagers (environ 50 %) qui récupèrent leurs bagages de cabine avant d'évacuer l'avion. Il y a au moins deux facteurs qui influencent le comportement du passager qui veut absolument récupérer ses bagages de cabine. Le premier facteur réside dans la propension humaine au comportement affiliatif en situation d'urgence. Le passager a tendance à faire ce qui lui est familier; le plus souvent le passager récupère ses bagages de cabine dans les coffres de rangement supérieurs (train, avion) ou retourne à sa cabine (train, bateau de croisière, traversier) pour prendre ses objets de valeur avant d'évacuer. Le deuxième facteur résulte d'un manque d'information. Il se peut que de nombreux passagers ne sachent pas qu'ils ne doivent pas emporter leurs bagages de cabine en cas d'évacuation d'un avion. Moins de la moitié des passagers regardent ou lisent les notices de sécurité et, en vertu de la réglementation actuelle, il s'agit là du seul moyen qui permet de communiquer cette information aux passagers avant le départ.
Bien que le personnel de cabine crie aux passagers de laisser leurs bagages à main dans l'avion lors d'une évacuation d'urgence, cette consigne est donnée à un moment où les passagers sont soumis à un stress important et où le niveau de bruit dans la cabine est probablement assez élevé, ce n'est donc pas le meilleur moment pour comprendre des consignes de sécurité ou pour les exécuter. Rappeler ou dire aux passagers pendant l'exposé avant atterrissage qu'en cas d'évacuation, ils ne doivent pas emporter leurs bagages de cabine, permettrait probablement d'accélérer l'évacuation. De plus, un programme d'éducation des passagers préparé et mis en oeuvre au niveau international dans le but de faire diminuer un tel comportement dangereux serait bénéfique.
2.6.4.5 Toboggans d'évacuation
Rien n'indique clairement que certains toboggans ont deux lignes d'évacuation. Lors d'une évacuation d'urgence au cours de laquelle un PNC ne peut être présent à chaque issue de secours équipée d'un toboggan à deux lignes d'évacuation, il y a risque que les passagers utilisent le toboggan comme un toboggan à une ligne d'évacuation et ralentissent l'évacuation.
2.6.4.6 Communications du personnel navigant commercial et mesures prises
L'absence d'alimentation électrique de secours a rendu le système de sonorisation cabine inutilisable, ce qui a introduit le risque que le début de l'évacuation soit retardé, mettant ainsi la sécurité des passagers en péril. Ce risque était particulièrement important pour la sécurité des occupants puisque l'avion était en feu. Comme le système de sonorisation cabine et le système d'alarme d'évacuation recevaient leur alimentation électrique de la même source, le système d'alarme d'évacuation lui aussi ne s'est pas activé. Une source d'alimentation électrique différente pour chacun de ces systèmes et un système d'alimentation électrique de secours moins vulnérable augmenteraient les chances que les systèmes de sonorisation cabine et d'alarme d'évacuation d'urgence continuent de fonctionner après un accident offrant des chances de survie.
Les inhalateurs protecteurs (cagoules antifumée) fournis aux PNC étaient certifiés conformément à la TSO-C116. Le seul PNC qui a enfilé une cagoule antifumée pour sa propre protection a été incapable de communiquer de façon intelligible. Pendant qu'il portait sa cagoule, ce PNC n'a pu communiquer d'instructions, de directives et d'ordres de manière à être comprise par les passagers. Comme il n'y avait pas de mégaphone à son poste, le PNC a dû enlever son masque pour se faire comprendre. En cas de port d'une cagoule, un mégaphone à chaque poste PNC permettrait à l'équipage de se faire entendre des passagers.
Dans l'ensemble, les communications ont été bonnes entre les PNC pendant la situation d'urgence. L'annonce qu'a faite le chef de cabine arrière au moyen du système de sonorisation cabine pour dire qu'il y avait un incendie et qu'il commençait l'évacuation à la porte R4 a permis une intervention d'urgence coordonnée de la part des PNC. De plus, cette annonce a donné des directives aux passagers qui comprenaient le français.
Il y a eu une bonne gestion des risques et une bonne prise de décision. Le chef de cabine arrière a bien évalué les risques qui menaçaient la sécurité des passagers, compte tenu de la présence d'un incendie, et n'a pas hésité à prendre immédiatement la décision de procéder à une évacuation d'urgence. D'autres PNC ont eux aussi bien géré les risques et pris de bonnes décisions, comme le montrent les mesures prises par les PNC aux portes R1 et R2. Ils avaient d'abord établi à bon escient que leurs issues de secours étaient inutilisables à cause du ruisseau qui se trouvait juste à l'extérieur de l'avion; toutefois, alors que la quantité de fumée augmentait dans la cabine, ils ont rapidement réévalué l'ensemble des risques qui menaçaient la sécurité des passagers et en ont conclu que le risque lié au ruisseau était moindre que la menace immédiate qui découlait de la présence de fumée dans la cabine. Ces deux PNC ont pris des mesures afin que l'évacuation puisse débuter à leur porte respective. Quand le PNC de la porte R3 a vu que les passagers ne suivaient pas ses instructions qui les enjoignaient de ne pas utiliser cette porte, il a su rapidement faire preuve de plus d'autorité, si bien que les passagers ont réagi rapidement et de la bonne façon à ses ordres. Malgré le fait que la porte L2 se soit ouverte alors que l'avion était toujours en mouvement et le fait que le toboggan de cette porte ne se soit pas déployé, l'évacuation a été couronnée de succès, essentiellement grâce à la formation des PNC et aux mesures qu'ils ont prises.
3.0 Faits établis
3.1 Faits établis quant aux causes et aux facteurs contributifs
- L'équipage de conduite a effectué une approche et un atterrissage au milieu d'un violent orage où les conditions changeaient rapidement. Air France ne disposait d'aucune procédure quant à la distance à respecter par rapport aux orages en approche et à l'atterrissage, ce qui ne contrevenait toutefois pas à la réglementation.
- Après le débrayage du pilote automatique et de la poussée automatique, le pilote aux commandes (PF) a augmenté la poussée à la suite d'une diminution de la vitesse aérodynamique et d'une impression d'enfoncement de l'avion. L'augmentation de puissance a contribué à un accroissement de l'énergie de l'avion qui a alors dévié au-dessus de la trajectoire de descente.
- Vers 300 pieds au-dessus du sol (agl), le vent de surface a commencé à passer d'une composante de vent de face à une composante de vent arrière de 10 noeuds, ce qui a augmenté la vitesse sol de l'avion et modifié tangiblement sa trajectoire de vol. L'avion a franchi le seuil de piste à quelque 40 pieds au-dessus de la hauteur normale de franchissement du seuil.
- À l'approche du seuil de piste, l'avion a pénétré dans de la pluie diluvienne, et la visibilité vers l'avant a été fortement réduite.
- Alors que l'avion approchait du seuil de la piste, l'équipage de conduite a donné la priorité à l'atterrissage, croyant qu'il n'était plus possible de faire une remise des gaz en toute sécurité.
- L'avion a fait un atterrissage long parce qu'il a flotté en raison de sa vitesse excessive au-dessus du seuil de piste et parce que la pluie intense et les éclairs ont rendu le contact visuel avec la piste très difficile.
- L'avion a touché des roues à quelque 3800 pieds au-delà du seuil de la piste 24L, ce qui lui laissait quelque 5100 pieds pour s'immobiliser sur la piste. L'avion est sorti en bout de piste à une vitesse d'environ 80 noeuds, est tombé dans un ravin et a été détruit par l'incendie qui a suivi.
- La sélection des inverseurs de poussée a été retardée, tout comme l'application subséquente de la poussée inverse maximale.
- Pendant la course à l'atterrissage, le pilote non aux commandes (PNF) n'a pas fait les annonces standard concernant les déporteurs et les inverseurs de poussée, ce qui a ajouté au retard du PF à sélectionner les inverseurs de poussée.
- Comme la piste était contaminée par de l'eau, la force du vent traversier au moment du toucher des roues dépassait les limites de l'avion à l'atterrissage.
- Le plan de vol opérationnel ne comprenait aucune distance d'atterrissage sur piste contaminée à l'aéroport international de Toronto/Lester B. Pearson (CYYZ).
- Malgré les messages d'observation météorologique régulière pour l'aviation (METAR) qui annonçaient des orages à CYYZ à l'heure d'arrivée prévue, l'équipage n'a pas calculé la distance d'atterrissage nécessaire sur la piste 24L. En conséquence, l'équipage n'était pas conscient de la marge d'erreur que présentait la piste d'atterrissage ni du fait que cette marge avait été éliminée dès l'apparition du vent arrière.
- La zone située dans les 150 mètres au-delà de l'extrémité de la piste 24L respectait les normes du document intitulé Aérodromes - Normes et pratiques recommandées (TP 312F), mais la topographie du relief au-delà de ce point, dans le prolongement de l'axe de piste, a contribué aux dommages de l'avion et aux blessures de l'équipage et des passagers.
- La pluie diluvienne a dilué la mousse utilisée par les pompiers et a rendu la mousse moins efficace pendant les opérations de lutte contre l'incendie. L'incendie alimenté par le carburant a détruit la plus grande partie de l'avion.
3.2 Faits établis quant aux risques
- En l'absence de lignes directrices claires sur la façon d'exécuter des approches dans du temps convectif, la probabilité est plus grande que les équipages continuent de faire des approches dans de telles conditions, d'où une augmentation des risques d'accident en approche et à l'atterrissage.
- La politique voulant que seul le commandant de bord puisse décider d'effectuer une approche interrompue risque d'augmenter la probabilité qu'une situation dangereuse ne soit pas reconnue à temps, ce qui risque d'augmenter le temps qu'il faudrait autrement pour faire une approche interrompue.
- Bien qu'il n'ait pu être établi si l'utilisation du système chasse-pluie aurait permis d'améliorer la visibilité vers l'avant dans la pluie diluvienne, l'équipage de conduite ne disposait pas de renseignements suffisants sur les possibilités et le fonctionnement d'un tel système, et il n'a pas envisagé de l'utiliser.
- Les renseignements auxquels ont accès les équipages de conduite en approche initiale dans du temps convectif ne les aident pas de façon optimale à se faire une idée claire du temps qu'ils risquent de rencontrer plus loin en approche.
- Lors d'une approche dans du temps convectif, il se pourrait que les équipages se fient à tort au contrôle de la circulation aérienne (ATC) pour leur suggérer ou leur ordonner d'atterrir ou non.
- Certains pilotes pensent que l'ATC va fermer l'aéroport si les conditions météorologiques rendent les atterrissages dangereux, mais l'ATC ne dispose pas d'un tel mandat.
- Les renseignements sur le vent provenant des systèmes de mesure au sol (anémomètres) jouent un rôle capital dans l'atterrissage en toute sécurité des avions. La redondance du système devrait empêcher que la défaillance d'un seul élément entraîne une perte totale des renseignements pertinents sur le vent.
- Les batteries pour l'alimentation électrique de secours du système de sonorisation cabine et du système d'alarme d'évacuation sont situées dans le compartiment avionique. Un système et/ou un emplacement moins vulnérables augmenteraient les chances que les systèmes de sonorisation cabine et d'alarme d'évacuation d'urgence continuent de fonctionner après un accident offrant des chances de survie.
- Le PNC n'a pas donné l'ordre d'adopter la position de sécurité pendant la situation d'urgence imprévue. Bien qu'il n'ait pu être établi si certains passagers avaient été blessés pour cette raison, les recherches montrent que la position de sécurité minimise le risque de blessures chez les passagers.
- Les notices de sécurité fournies aux passagers qui voyagent dans le poste de pilotage des A340-313 d'Air France ne comportent aucun pictogramme décrivant les fenêtres issues de secours, les cordes de descente ou le panneau d'évacuation se trouvant dans la porte du poste de pilotage.
- Rien n'indique clairement que certains toboggans ont deux lignes d'évacuation. En conséquence, ces toboggans ont été essentiellement utilisés comme des toboggans à une seule ligne d'évacuation, ce qui a probablement ralenti l'évacuation, même si ce fait n'est pas considéré comme un facteur contributif aux blessures des passagers.
- Tous les passagers ont réussi à évacuer l'avion, mais le fait que près de 50 % d'entre eux ont récupéré leurs bagages à main a gêné l'évacuation.
3.3 Autres faits établis
- Rien n'indique que l'état de santé du commandant de bord ou la fatigue aient joué un rôle dans l'accident.
- Pendant la croisière, l'équipage n'a pas demandé de prévisions d'aérodrome (TAF) à long terme. Cela n'a eu aucune conséquence sur le dénouement des événements, puisque les prévisions météorologiques de CYYZ n'ont pas beaucoup varié par rapport aux renseignements que l'équipage avait reçus avant de partir et que l'équipage a reçu des mises à jour des METAR de CYYZ et de l'aéroport international de Niagara Falls (KIAG).
- La possibilité de déroutement a amené l'équipage de conduite à vérifier la météo de divers terrains de dégagement et à faire les calculs de carburant. Bien que cela ait demandé beaucoup de temps et d'énergie, rien n'indique que cela soit inhabituel pour ce genre de vol ou que cela ait surchargé l'équipage de conduite.
- La décision de poursuivre l'approche est caractéristique de la pratique normale dans l'industrie, en ce sens que l'équipage pouvait s'en tenir à son intention d'atterrir tout en se gardant la possibilité d'interrompre l'approche s'il estimait que les conditions devenaient dangereuses.
- Rien n'indique que des renseignements provenant d'un radar météorologique de l'ATC plus perfectionné, à supposer qu'ils aient été disponibles et communiqués à l'équipage, auraient pu faire revenir l'équipage sur sa décision de poursuivre l'atterrissage.
- L'enquête n'a pas révélé pourquoi la porte L2 s'est ouverte avant l'arrêt complet de l'avion.
- Rien n'indique que l'avion ait été frappé par un éclair.
- Rien n'indique que l'avion ait traversé une zone de cisaillement du vent en approche ou à l'atterrissage.
- Les sièges de l'équipage de conduite sont certifiés en vertu d'une norme inférieure à celle applicable aux sièges de cabine, ce qui peut avoir contribué aux blessures du commandant de bord.
4.0 Mesures de sécurité
4.1 Mesures prises
4.1.1 Mesures prises par Air France
4.1.1.1 Chasse-pluie
Au moment de l'accident du 2 août 2005, l'utilisation du chasse-pluie ne faisait l'objet d'aucune procédure, si ce n'est qu'il fallait vérifier la quantité et la pression du liquide au moment de la préparation prévol du poste de pilotage. Une nouvelle procédure et des renseignements additionnels ont été ajoutés au manuel d'exploitation (MANEX) d'Air France le 1er septembre 2005 afin d'indiquer que ce dispositif pouvait être utilisé dans de la pluie d'intensité moyenne à forte. De plus, une note technique a été envoyée à tous les pilotes le 15 décembre 2005 afin de signaler que l'utilisation du chasse-pluie n'était assujettie à aucune restriction, quelles que soient les conditions de vol.
4.1.1.2 Alerte rouge
La révision du manuel Généralités Opérations (GEN.OPS) d'Air France en date du 29 septembre 2005 comprenait une procédure portant sur les opérations au sol en cas d'orage. Cette procédure souligne les risques (essentiellement les éclairs de foudre) que les orages font courir aux opérations au sol et prévoit trois niveaux d'alerte que le chef d'escale d'Air France peut déclarer, ainsi que les mesures à prendre pour chacun de ces niveaux. La procédure précise que le déclenchement d'une alerte incombe au chef d'escale ou à son représentant et que l'une ou l'autre de ces personnes devra également communiquer le niveau d'alerte à l'équipage de conduite en utilisant les moyens disponibles.
4.1.1.3 Orages
Pour compléter les renseignements déjà publiés dans le manuel Technique Utilisation (manuel TU) du MANEX, la question des orages a été abordée devant le Groupe Normes et Standards (GNS) d'Air France en avril 2005. Un forum de discussions a été organisé à propos des modifications proposées au MANEX; les modifications ont été apportées en moins de quatre mois. Les paragraphes révisés du GEN.OPS traitant des orages sont entrés en vigueur au moment de la révision du 29 septembre 2005.
4.1.1.4 Approche interrompue décidée seulement par le commandant de bord
À la suite de l'accident du 2 août 2005, Air France a modifié sa politique voulant que seul le commandant de bord puisse décider de faire une approche interrompue; l'un ou l'autre des pilotes peut maintenant prendre cette décision.
4.1.2 Mesures prises par Transports Canada
Après l'accident, Transports Canada a fait savoir publiquement qu'il allait obliger d'ici peu tous les aéroports à construire des « aires de sécurité » aux extrémités de piste. Transports Canada, en collaboration avec des experts de l'industrie, examine actuellement les normes de certification des aéroports, dont les spécifications des aires de sécurité d'extrémité de piste (RESA). La décision de passer aux normes internationales n'a pas encore été prise; toutefois, le groupe de travail de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) sur la conception des aérodromes étudie la question. L'équipe a examiné les spécifications actuelles de l'OACI ainsi que les spécifications d'autres États, et elle appuie les spécifications des RESA de l'OACI (soit une longueur de 90 mètres). Le groupe fera connaître sa recommandation finale au terme de son analyse de sécurité. Les résultats du groupe de travail de l'OACI sont attendus plus tard cette année.
Le Ministère n'a pas encore déterminé quelle sera la longueur des aires de sécurité ni le temps dont disposeront les aéroports pour les construire.
4.1.3 Mesures prises par Airbus
À la suite de l'accident du 2 août 2005, les procédures du manuel d'exploitation de l'équipage de conduite (FCOM) d'Airbus ont été modifiées, et le mot « atterrissage » a été remplacé par « on continue ».
4.2 Mesures à prendre
4.2.1 Approches dans du temps convectif
La pénétration dans des orages par des aéronefs en approche est une pratique répandue dans l'industrie et qui a contribué à un certain nombre d'accidents à travers le monde. De nombreux exploitants, y compris Air France, ne mettent pas à la disposition de leurs équipages des critères, comme des lignes directrices fondées sur la distance, afin d'éviter le temps convectif en approche finale et à l'atterrissage.
Environnement Canada a fait savoir que les orages peuvent présenter des risques importants à l'exploitation d'un aéronef en toute sécurité. Ces risques sont les suivants :
- un plafond bas et une mauvaise visibilité dus aux intenses précipitations sous les nuages d'orage, ce qui souvent limite grandement la visibilité;
- des variations rapides de la pression en surface qui peuvent mener à des erreurs d'altitude;
- des éclairs dont la fréquence augmente proportionnellement à l'intensité de l'orage et qui peuvent aussi nuire à la visibilité;
- de la grêle, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur des nuages;
- du givrage, notamment dans la partie supérieure d'une cellule en phase de maturité;
- des changements rapides de vitesse et de direction du vent pouvant entraîner de façon rapide et soudaine un dépassement des limites de vent traversier ou d'autres limites de l'aéronef;
- des rafales de vent potentiellement destructrices;
- des courants descendants dus aux microrafales;
- des surfaces de piste contaminées par la pluie et/ou la grêle;
- de la turbulence;
- des difficultés à effectuer une remise des gaz en toute sécurité.
La gravité de ces dangers peut varier d'un orage à l'autre, et le tout est difficile à prédire car les conditions météorologiques aux abords d'un orage sont susceptibles de changer rapidement.
Tous les exploitants entraînent leurs équipages à faire face aux dangers associés aux orages et insistent pour dire que mieux vaut les éviter chaque fois que cela est possible. Quoi qu'il en soit, les recherches du BST effectuées à la suite de cet accident ont montré clairement que la pénétration dans du temps convectif en région terminale pendant l'approche à l'atterrissage était une pratique répandue dans l'industrie. Cette constatation implique que les pilotes ou bien sont conscients des dangers inhérents au temps convectif en approche mais qu'ils acceptent le niveau de risque perçu afin de faciliter l'atterrissage à destination, ou bien, à l'opposé, qu'ils ne peuvent facilement assimiler et appréhender les dangers découlant de la nature très changeante d'un orage et réagir en conséquence. En conséquence, des accidents en approche et à l'atterrissage provoqués par du temps convectif surviennent régulièrement de par le monde.
Lors du vol qui a mené à l'accident du 2 août 2005, l'équipage disposait de renseignements qui indiquaient clairement la présence de conditions météorologiques significatives au-dessus de l'aéroport : le radar météo de l'avion affichait du temps violent près de la piste; des rapports de pilote signalaient un mauvais freinage; l'équipage pouvait voir des éclairs aux abords de l'aéroport; et plusieurs rapports de pilote et des services de la circulation aérienne (ATS) indiquaient que les vents augmentaient et changeaient de direction. Toutefois, le fait de savoir que l'avion allait évoluer très près d'un orage n'a pas été suffisamment dissuasif pour que l'équipage décide de faire une approche interrompue. À noter que l'équipage d'AFR358 n'est pas le seul à avoir accepté le risque de s'approcher très près du temps convectif. D'autres avions ont atterri 9, 6 et 4 minutes avant l'arrivée d'AFR358, et au moins un autre appareil se trouvait en approche derrière AFR358 au moment de l'accident. Il est clair qu'eux aussi n'ont pas jugé le danger suffisamment menaçant.
Il est donc nécessaire de disposer de normes claires traitant de l'évitement du temps convectif en approche et à l'atterrissage. Ces normes permettront de réduire l'ambiguïté de la prise de décision face un phénomène météorologique changeant rapidement ainsi que la probabilité que des facteurs comme les pressions opérationnelles, le stress ou la fatigue ne jouent un rôle dans la décision d'un équipage de faire une approche.
En conséquence, le Bureau recommande que :
le ministère des Transports établisse des normes claires limitant les approches et les atterrissages dans du temps convectif pour tous les exploitants du transport aérien utilisant les aéroports canadiens.
Recommandation A07-01 du BST
De tels accidents en approche et à l'atterrissage ne se limitent pas à un pays en particulier ou à une région géographique. Ils surviennent régulièrement dans n'importe quelle partie du monde.
En conséquence, le Bureau recommande que :
la Direction Générale de l'Aviation Civile française et d'autres autorités de l'aviation civile établissent des normes claires limitant les approches et les atterrissages dans du temps convectif.
Recommandation A07-02 du BS
4.2.2 Prise de décision du pilote
Conformément aux techniques d'enquête habituelles, les processus de prise de décision des pilotes de l'avion accidenté ont été analysés, ainsi que les mesures prises par d'autres pilotes impliqués dans des accidents similaires. Il faut cependant faire bien attention de ne pas juger la qualité des décisions d'un pilote à la lumière des résultats. Par souci d'équité envers les intéressés et dans le but d'améliorer la sécurité des transports, il faut, si nous voulons faire diminuer les risques de récurrence, que les mesures prises par les pilotes soient comprises dans le contexte dans lequel ils évoluaient à ce moment-là.
D'après les indices perçus ou compris, on peut dire que les décisions prises dans le poste de pilotage ont deux composantes : l'évaluation de la situation et le choix du plan d'action. Les indices, ou les renseignements sur la situation, peuvent varier de clairs à ambigus. Des indices clairs permettent de prendre des décisions avec facilité. Les indices ambigus sont beaucoup plus difficiles à saisir, à comprendre et à assimiler. Par conséquent, plus un indice est ambigu ou complexe, plus il y a de risques que la décision soit loin d'être idéale.
Dans le cas de l'accident du 2 août 2005, le processus de prise de décision a obligé les pilotes à évaluer la situation et à choisir entre continuer vers l'aéroport dans du très mauvais temps ou se dérouter sur l'aéroport de dégagement. Cette deuxième solution aurait occasionné des désagréments aux passagers. Par conséquent, les deux solutions étaient loin d'être idéales. Toutefois, les indices croissants dont disposait l'équipage à son arrivée en courte finale n'ont pas été suffisamment dissuasifs pour le faire renoncer à sa décision de poursuivre l'atterrissage.
Une fois que des personnes ont opté pour un plan d'action, il faut des indices très dissuasifs pour les sensibiliser au fait qu'il serait peut-être plus sage de modifier leur plan. Ayant pris la décision d'atterrir, les pilotes ont concentré toutes leurs énergies sur cette tâche et ont laissé passer des indices qui auraient peut-être pu justifier de repenser leur décision. Ces indices étaient les suivants : la piste ressemblait à un lac; l'avion a dévié au-dessus de la trajectoire de descente; l'avion allait toucher des roues plus loin que d'habitude; la vitesse du vent était, semble-t-il, en train d'augmenter alors que sa direction changeait; la qualité du freinage avait été qualifiée de mauvaise; et la visibilité était quasiment nulle aux abords du seuil de piste.
On a déjà beaucoup écrit sur le processus de prise de décision des pilotes en général au moment de l'atterrissage. Quoi qu'il en soit, l'accident du 2 août 2005 et d'autres accidents indiquent clairement qu'il existe encore des risques associés à la prise de décision. Le Bureau croit que la capacité à saisir et à interpréter des indices essentiels dans le processus entourant la décision d'atterrir est insuffisante, notamment quand ces indices sont ambigus ou ne sont pas immédiatement dissuasifs. En conséquence, des pilotes vont continuer à atterrir dans des conditions météo qui se dégradent, une fois que la décision d'atterrir aura été prise, même si des indices révèlent qu'une remise des gaz ou une approche interrompue devrait être exécutée.
En conséquence, le Bureau recommande que :
le ministère des Transports oblige tous les pilotes de transport aérien au Canada à suivre une formation leur permettant d'être mieux préparés à prendre la décision d'atterrir dans des conditions météo qui se dégradent.
Recommandation A07-03 du BST
et que :
la Direction Générale de l'Aviation Civile française et d'autres autorités de l'aviation civile obligent les pilotes de transport aérien à suivre une formation leur permettant d'être mieux préparés à prendre la décision d'atterrir dans des conditions météo qui se dégradent.
Recommandation A07-04 du BST
4.2.3 Considérations entourant les distances d'atterrissage
L'équipage ne connaissait pas la distance d'atterrissage nécessaire pour se poser en toute sécurité sur une piste contaminée. Cela était dû en partie à des ambiguïtés dans les renseignements sur la distance d'atterrissage fournis à l'équipage et à l'absence d'instructions d'Air France sur l'obligation faite aux équipages de déterminer les distances d'atterrissage nécessaires.
Au moment du départ de l'avion à Paris, le système Octave d'Air France a fourni à l'équipage la masse maximale permise à l'atterrissage de l'avion à Toronto. Cette masse était de 190 000 kg, soit la masse structurale maximale admissible pour cet avion. Il semble qu'il s'agisse là du seul calcul sur les performances à l'atterrissage effectué pendant le déroulement du vol AFR358.
Les mesures prises par l'équipage dans les dernières étapes de l'approche indiquent une certaine préoccupation face à la distance d'atterrissage nécessaire pour atterrir sur la piste 24L. L'enquête révèle qu'il est clair que les pilotes connaissaient la distance d'atterrissage disponible sur la piste 24L. Rien n'indique qu'ils aient calculé les distances d'atterrissage nécessaires à l'arrivée ni qu'il y ait eu des procédures claires et précises chez Air France qui les auraient obligés à faire de tels calculs.
L'examen des tableaux des performances à l'atterrissage dont disposait l'équipage a révélé la présence d'un certain nombre de problèmes potentiels. Par exemple, l'application de certaines corrections, comme l'utilisation de l'inversion de poussée et d'autres variables, n'était pas nécessairement intuitive et n'était pas toujours faite correctement.
L'accident montre clairement qu'il faut que les pilotes connaissent la distance d'atterrissage nécessaire à l'avion en fonction des conditions devant être présentes à l'heure d'arrivée prévue et qu'il est nécessaire qu'ils comparent cette distance avec la longueur de la piste qui leur a été assignée. Les pilotes doivent connaître ces deux valeurs afin de calculer la marge d'erreur dont ils disposent, ce qui leur permettra, en cas d'arrivée dans des conditions qui se dégradent, d'être mieux préparés à prendre la bonne décision. Le 2 août 2005, l'équipage d'AFR358 s'est rendu compte durant l'atterrissage que l'avion allait faire un atterrissage long. S'il avait eu conscience de la marge d'erreur très mince, voire nulle, dont il disposait, l'équipage aurait probablement fait une remise des gaz.
Le 8 décembre 2005, un Boeing 737 est sorti à l'extrémité départ de la piste 31C à l'aéroport Midway de Chicago, dans l'État de l'Illinois aux États-Unis, après s'être posé dans des conditions neigeuses. À l'arrivée à Chicago, des rapports indiquaient un freinage de mauvaise qualité et la présence d'une composante de vent arrière de plus de 5 noeuds. Au moment de l'accident, la réglementation n'obligeait pas à évaluer la distance d'atterrissage à l'arrivée. À la suite de l'enquête sur cet accident, le National Transportation Safety Board (NTSB) a recommandé, le 4 octobre 2007, que la Federal Aviation Administration (FAA) :
[Traduction]
exige immédiatement que tous les exploitants régis par les parties 121, 135 et 91, sous-partie K, du titre 14 du Code of Federal Regulations (CFR 14) évaluent à l'arrivée les distances d'atterrissage avant chaque atterrissage en tenant compte des données sur les performances existantes et sur les conditions actuelles, et en incorporant une marge d'erreur minimale de 15 pour cent (A-07-57) Urgent.
D'après les renseignements sur les performances figurant dans le MANEX d'Air France, la distance d'atterrissage prévue pour que l'avion puisse atterrir à Toronto en toute sécurité sur une piste contaminée par vent nul et sans inversion de poussée était de 8780 pieds. Pour la piste 24L, cela laissait une marge de seulement 220 pieds. Cette marge très mince de la distance d'atterrissage a disparu en raison de l'arrondi qui s'est prolongé à l'atterrissage. En présence d'un vent arrière, la marge était négative, ce qui correspondait à une sortie en bout de piste. Les pilotes ne savaient pas que, en cas d'atterrissage par vent arrière, le MANEX prévoyait une distance d'atterrissage supérieure à la longueur de la piste 24L. Si les pilotes ne connaissent pas la distance d'atterrissage nécessaire pour leur avion dans des conditions qui font varier les performances de l'avion, ils ne seront pas conscients des conditions se développant rapidement et menant à une sortie en bout de piste. En conséquence, il y a une forte possibilité que les équipages prennent de mauvaises décisions comme la décision de poursuivre la manoeuvre ou de l'interrompre, ce qui augmente le risque de dommages aux personnes, aux biens et à l'environnement.
En conséquence, le Bureau recommande que :
le ministère des Transports et d'autres autorités de l'aviation civile obligent les équipages à établir une marge d'erreur entre la distance d'atterrissage nécessaire et la distance d'atterrissage disponible avant d'effectuer une approche dans des conditions météo qui se dégradent.
Recommandation A07-05 du BST
4.2.4 Exigences relatives aux aires de sécurité d'extrémité de piste (RESA)
La piste 24L respectait le document Aérodromes - Normes et pratiques recommandées (TP 312F), puisque, de par sa conception, elle possédait une bande de 60 m située au-delà de son extrémité, bande qui était exempte de tout obstacle non frangible et qui était nivelée afin de réduire les risques de dommages aux aéronefs en cas de sortie en bout de piste. Bien que, en ce qui concerne la piste 24L, aucune RESA n'était exigée ni ne figurait dans les publications, il n'y avait aucun objet non frangible le long de la trajectoire suivie par l'avion du vol AFR358 sur une distance de 150 m à partir de l'extrémité de piste. Cela créait de facto une RESA qui dépassait de 90 m la norme stipulée dans l'actuel TP 312F. Quoi qu'il en soit, l'enquête a révélé que c'est le relief situé au-delà de ce point qui a grandement contribué aux dommages à l'avion et aux blessures de l'équipage et des passagers.
Au Canada, on compte d'autres pistes de code 4 qui présentent des conditions similaires. Sur de telles pistes, pourtant conformes au TP 312F, on note la présence d'un relief hostile au-delà de l'aire de dépassement de piste de 60 m exigée par la norme. Le Bureau croit que de telles pistes pourraient tirer avantage de la présence d'une RESA conforme à la pratique recommandée de l'Annexe 14 de l'OACI ou à la norme sur les aires de sécurité de piste (RSA) de la FAA. Cette mesure de sécurité permettrait d'éliminer tous les objets non frangibles et de créer une surface nivelée de manière à réduire les risques de dommages aux aéronefs sur une distance pouvant atteindre 300 m au-delà de l'extrémité de piste.
Le Bureau sait pertinemment que le fait de rendre obligatoire la présence d'une RESA de 300 m risque de toucher de nombreuses pistes actuelles de code 4 situées à des endroits où des obstacles naturels, l'urbanisation aux abords de l'aéroport et/ou des contraintes environnementales vont rendre impossible la construction d'une RESA d'une telle longueur. Le Bureau croit qu'il est possible d'exiger le recours à un autre moyen de conformité, comme l'utilisation d'un dispositif d'arrêt à matériau absorbant, capable d'offrir un niveau de sécurité équivalent à une RESA de 300 m.
En conséquence, le Bureau recommande que :
le ministère des Transports exige que toutes les pistes de code 4 soient pourvues d'une aire de sécurité d'extrémité de piste (RESA) de 300 m ou d'un autre moyen d'immobilisation des aéronefs offrant un niveau de sécurité équivalent.
Recommandation A07-06 du BST
4.2.5 Bagages à main
Lors de l'évacuation d'urgence d'AFR358, de nombreux passagers ont récupéré leurs bagages à main. Du fait que les occupants devaient évacuer l'appareil au plus vite, les bagages présentaient un risque de sécurité important. Les bagages peuvent empêcher d'assurer l'évacuation rapide et en bon ordre de l'avion, endommager un toboggan d'évacuation et augmenter le risque de blessures.
Bien que la réglementation ne l'exige pas, les notices de sécurité utilisées à bord d'AFR358 comprenait un pictogramme informant le lecteur qu'il était interdit d'emporter ses bagages à main lors d'une évacuation. De plus, pendant l'évacuation, et conformément aux procédures d'urgence d'Air France, le personnel de cabine a ordonné aux passagers de laisser leurs bagages à main dans l'avion.
Ces mesures sont d'une efficacité limitée, puisque les données existantes indiquent que moins de la moitié des passagers lisent les notices de sécurité. De même, le fait d'ordonner aux passagers d'AFR358 de ne pas emporter leurs bagages à main pendant l'évacuation a été loin d'être efficace, car dans le questionnaire envoyé aux passagers du vol, environ la moitié des passagers ont indiqué avoir essayé d'emporter leurs bagages à main.
Toute mesure susceptible de mieux conscientiser les passagers aux dangers qu'ils courent en essayant d'emporter leurs bagages à main lors d'une évacuation d'urgence pourrait permettre d'atténuer les risques. Des recherches montrent que le fait d'informer les passagers, lors des exposés de sécurité en situation d'urgence, qu'il est interdit d'évacuer l'appareil avec leurs bagages à main en situation d'urgence, pourrait venir compléter les mesures actuelles visant à améliorer l'efficacité des évacuations d'urgence.
En conséquence, le Bureau recommande que :
le ministère des Transports exige que les exposés de sécurité donnés aux passagers contiennent des instructions claires enjoignant aux passagers de ne pas emporter leurs bagages à main lors d'une évacuation.
Recommandation A07-07 du BST
Le présent rapport met un terme à l'enquête du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) sur cet événement. Le Bureau a autorisé la publication du rapport le .
5.0 Annexes
- Annexe A - Carte d'approche de la piste 24L d'Air France
- Annexe B - Plan de l'aéroport international de Toronto/Lester B. Pearson (CYYZ)
- Annexe C - Résumé des conditions météorologiques
- Annexe D - Emplacement de l'équipement de secours de l'A330/A340
- Annexe E - Aires de sécurité d'extrémité de la piste 24L
- Annexe F - Données FDR
- Annexe G - Tableau des distances d'atterrissage nécessaires sur piste contaminée
- Annexe H - Tableau des distances d'atterrissage nécessaires avec freinage automatique maximal
- Annexe I - Sigles et abréviations
Annexe A - Carte d'approche de la piste 24L d'Air France
Annexe B - Plan de l'aéroport international de Toronto/Lester B. Pearson (CYYZ)
Annexe C - Résumé des conditions météorologiques
Heure (UTC) | Temps restant avant atterrissage | Renseignements météorologiques de CYYZ |
---|---|---|
Prévol | TAF CYYZ 0539 z 06-06 280@10 P6SM SCT 40 FM 17Z VARIABLE@3 P6SM -SHRA BKN 30 PROB 30 17-22 2SM TSRA BKN CB 20 FM 22Z 300@8 P6SM BKN 30 RMK NEXT FCST BY 09Z | |
14 h 44 | 5 hr 18 min | METAR 14Z CYYZ Wind 360 @ 4 15SM 35 few 260 few 28/19 30.07 remark cu, ci |
16 h 08 | 3 hr 54 min | AFR358 reçoit par l'ACARS l'ATIS Julliet (donnant la météo de 16 h à CYYZ). ATIS JULLIET - 16Z 360@5 15SM SCT 45 SCT 120 SCT 260 30/20 30.04 |
18 h 11 | 1 hr 51 min | METAR CYYZ 18Z 120@2 8SM -TSRA SCT TCU 35 BKN 90 23/22 30.03 RECENT RAIN RMK TCU3 AC 3 CB ASOCTD |
19 h 13 | 0 hr 49 min | AFR358 demande à l'ATC s'il a des renseignements sur le déplacement du système - pense qu'il va du nord au sud. L'ATC répond que le système semble se déplacer vers l'est. |
19 h 15 | 0 hr 47 min | AFR358 est averti de retards à Toronto - demande un cap pour s'écarter du mauvais temps. |
19 h 17 | 0 hr 45 min | METAR CYYZ 19Z 220@07 4SM +TSRA BKN 05TCU BKN 080 24/23 A30.03 RMK TCU 6 AC1 CB ASSOCTD |
19 h 22 | 0 hr 40 min | L'ATC signale à AFR358 que les avions commencent à rentrer vers Toronto. |
19 h 33 | 0 hr 29 min | AFR358 reçoit par l'ACARS l'ATIS Uniform. AFR358 reçoit par l'ACARS les METAR de KCLE, CYOW et KIAG. |
19 h 40 | 0 hr 22 min | AFR358 demande à l'ATC si la météo se dégrade à Toronto. L'ATC indique qu'il peut maintenant envoyer des avions mais qu'il n'est pas sûr de pouvoir continuer. AFR358 demande à être tenu au courant, car il devra peut-être « se dérouter ». |
19 h 44 | 0 hr 18 min | AFR358 demande à être avisé si la météo se dégrade. L'ATC indique qu'il va le tenir au courant de la météo. |
19 h 49 | 0 hr 13 min | AFR358 demande à virer à gauche pour éviter du mauvais temps |
19 h 53 | 0 hr 09 min | Le contrôleur demande à JZA 8677 s'il va pouvoir passer. L'équipage signale que le mauvais temps se trouve au nord et qu'il a l'air assez menaçant. |
19 h 59 | 0 hr 03 min | La tour signale ce qui suit à AFR358 : 2 avions précédents ont signalé que le freinage était mauvais; l'orage a fait sauter les instruments de mesure du vent - dernière lecture : vent du 230° à 7 noeuds. Il y a des éclairs tout autour de l'aéroport. |
20 h 00 | 0 hr 02 min | La tour indique que l'avion qui vient de se poser a signalé un vent du 290 à 15 noeuds avec rafales à 20 noeuds. La tour indique que le RJ en avant a signalé que le freinage avait été mauvais jusqu'à 60 noeuds, puis elle autorise AFR358 à se poser. |
Annexe D - Emplacement de l'équipement de secours de l'A330/A340
Annexe E - Aires de sécurité d'extrémité de la piste 24L
Annexe F - Données FDR
Les quatre figures suivantes n'existent pas en français.
Annexe G -Tableau des distances d'atterrissage nécessaires sur piste contaminée
Annexe H - Tableau des distances d'atterrissage nécessaires avec freinage automatique maximal
Annexe I - Sigles et abréviations
- AAIB
- Air Accidents Investigation Branch (Royaume-Uni)
- ACARS
- système embarqué de communications, d'adressage et de compte rendu
- ACC
- Centre de contrôle régional
- ADIRS
- système de référence inertielle anémobarométrique
- AESA
- Agence Européenne de la Sécurité Aérienne
- AFM
- manuel de vol
- AFR358
- vol 358 d'Air France
- agl
- au-dessus du sol
- ALAR
- réduction des accidents à l'approche et à l'atterrissage
- APM
- Avis de proposition de modification
- APU
- groupe auxiliaire de bord
- ASDA
- distance accélération-arrêt utilisable
- asl
- au-dessus du niveau de la mer
- ATC
- contrôle de la circulation aérienne
- ATIS
- service automatique d'information de région terminale
- ATS
- services de la circulation aérienne
- ATSB
- Australian Transportation Safety Board (Australie)
- BEA
- Bureau d'Enquêtes et d'Analyses pour la Sécurité de l'Aviation Civile (France)
- BRACE
- ordre d'adopter la position de sécurité
- BST
- Bureau de la sécurité des transports du Canada
- CAA
- Civil Aviation Authority
- CAP
- publication de la CAA
- CAP 168
- Licensing of Aerodromes (publication de la CAA)
- CAST
- Équipe pour la sécurité de l'aviation commerciale
- CB
- cumulonimbus
- CL
- montée
- CMAC-E
- Centre météorologique aéronautique du Canada - Est
- CRJ
- Canadair Regional Jet
- CRM
- gestion des ressources de l'équipage
- CVR
- enregistreur de la parole dans le poste de pilotage
- CYOW
- aéroport international d'Ottawa/Macdonald-Cartier (Ontario) (code OACI)
- CYUL
- aéroport international de Montréal (Québec) (code OACI)
- CYYZ
- aéroport international de Toronto/Lester B. Pearson (Ontario) (code OACI)
- DGAC
- Direction Générale de l'Aviation Civile (France)
- DH
- hauteur de décision
- DME
- équipement de mesure de distance
- ECAM
- moniteur électronique centralisé de bord
- ECU
- module de régulation électronique
- EFIS
- système d'instruments de vol éélectroniques
- ELT
- radiobalise de repérage d'urgence
- EMAS
- dispositif d'arrêt à matériau absorbant
- EPSU
- bloc d'alimentation d'urgence
- ETA
- heure d'arrivée prévue
- EXCDS
- système d'affichage amélioré
- FAA
- Federal Aviation Administration (États-Unis)
- FCOM
- manuel d'exploitation de l'équipage de conduite (Airbus)
- FCTM
- manuel de formation des membres d'équipage de conduite
- FCU
- module de commande de vol
- FDR
- enregistreur de données de vol
- FL
- niveau de vol
- FMA
- annonciateur de mode de vol
- FMGS
- système de guidage et de gestion de vol
- FSF
- Flight Safety Foundation
- g
- facteur de charge
- G/S
- alignement de descente
- GA
- remise des gaz
- GA TRK
- trajectoire de remise des gaz (mode)
- GEN.OPS
- manuel Généralités Opérations (Air France)
- GFA
- prévision de zone graphique
- GPWS
- dispositif avertisseur de proximité du sol
- GS
- vitesse sol
- GTAA
- Autorité aéroportuaire du Grand Toronto (Ontario)
- HF
- haute fréquence
- hPa
- hectopascal
- IATA
- Association internationale du transport aérien
- ILS
- système d'atterrissage aux instruments
- IMC
- conditions météorologiques de vol aux instruments
- JAA
- Joint Aviation Authorities
- JAR
- Joint Aviation Requirements
- KBOS
- aéroport de Boston (Massachusetts, États-Unis) (code OACI)
- KCLE
- aéroport de Cleveland (Ohio, États-Unis) (code OACI)
- KEWR
- aéroport international de Newark (New Jersey, États-Unis) (code OACI)
- kg
- kilogramme
- KIAG
- aéroport de Niagara Falls (New York, États-Unis) (code OACI)
- KIAS
- vitesse indiquée en noeuds
- KJFK
- aéroport international John F. Kennedy (New York, États-Unis) (code OACI)
- KORD
- aéroport international O'Hare de Chicago (Illinois, États-Unis) (code OACI)
- kt
- noeuds
- LFPG
- aéroport international de Paris-Charles-de-Gaulle (France) (code OACI)
- lb/po²
- livre par pouce carré
- LDA
- distance d'atterrissage utilisable
- LOC
- alignement de piste
- m
- mètre
- MAC
- manuel aéronautique complémentaire (Air France)
- MAC
- corde aérodynamique moyenne
- MANEX
- manuel d'exploitation (Air France)
- MCDU
- bloc de commande et d'affichage multifonctions
- MDA
- altitude minimale de descente
- METAR
- message d'observation météorologique régulière pour l'aviation
- MIT
- Massachusetts Institute of Technology (États-Unis)
- mm
- millimètre
- N1
- vitesse de rotation du compresseur moteur
- NARDS
- système auxiliaire d'affichage radar de NAV CANADA
- NASA
- National Aeronautics and Space Administration
- nm
- mille marin
- NOTAM
- Avis aux navigants
- NTSB
- National Transportation Safety Board (États-Unis)
- OACI
- Organisation de l'aviation civile internationale
- PAPI
- indicateur de trajectoire d'approche de précision
- PCB
- personnel complémentaire de bord
- PF
- pilote aux commandes
- PFD
- écran de vol principal
- PNC
- personnel navigant commercial (personnel de cabine)
- PNF
- pilote non aux commandes
- pi
- pied
- po
- pouce
- po Hg
- pouce de mercure
- PSR
- radar primaire de surveillance
- QRH
- Manuel de référence rapide
- RAC
- Règlement de l'aviation canadien
- RAMP
- Programme de modernisation des radars
- RCDF
- Réseau canadien de détection de la foudre
- RESA
- aire de sécurité d'extrémité de piste
- RJ
- Regional Jet
- RSA
- aire de sécurité de piste
- Rsit
- système d'affichage de la situation
- RVR
- portée visuelle de piste
- SIGMET
- renseignements météorologiques significatifs
- SLIA
- sauvetage et lutte contre les incendies d'aéronefs
- sm
- mille terrestre
- SMC
- Service météorologique du Canada
- SOP
- procédures d'utilisation normalisées
- SPECI
- message d'observation météorologique spéciale
- SRS
- système de référence vitesse
- STEADES
- système d'évaluation des tendances sur la sécurité, d'analyse et d'échange de données
- TAS
- vitesse vraie
- TAF
- prévisions d'aérodrome
- TCAS
- système de surveillance du trafic et d'évitement des collisions
- TDWR
- radar météorologique Doppler d'aérodrome
- TEM
- gestion des erreurs et des menaces (Threat and Error Management)
- TODA
- distance de décollage utilisable
- TOGA
- décollage et remise des gaz
- TP 11183
- SIU Manuel de diagrammes d'aéronefs (Transports Canada)
- TP 312F
- Aérodromes - Normes et pratiques recommandées (Transports Canada)
- TRACON
- contrôle d'approche radar terminal
- TSO
- norme technique (Technical Standard Order) (FAA des États-Unis)
- TU
- manuel propre à chaque avion; les manuels TU (Technique Utilisation) font partie du MANEX d'Air France
- ULB
- radiobalise sous-marine de détresse
- UTC
- temps universel coordonné
- VAPP
- vitesse d'approche
- VHF
- très haute fréquence
- VLS
- vitesse d'atterrissage
- VMC
- conditions météorologiques de vol à vue
- VREF
- vitesse certifiée de survol du seuil
- WADDS
- système d'affichage numérique de calage altimétrique et de vent
- Z
- heure Zulu (équivalent à UTC)
- °
- degré
- °C
- degré Celsius
- °V
- degré vrai