Réévaluation des réponses à la recommandation en matière de sécurité aérienne A00-15
Installation et mise en service d'un système automatique d'alerte et de prévision de conflit
Introduction
Le Boeing 767 du vol 987 des Lignes aériennes Canadien International (CDN 987) avait quitté Toronto (Ontario) et se rendait à Vancouver (Colombie-Britannique) au niveau de vol (FL) 390. Le Boeing 767 du vol 118 d'Air Canada (ACA 118) avait décollé de Calgary (Alberta) à destination de Toronto et volait au FL 370. Quelque 55 milles marins (nm) à l'ouest du radiophare omnidirectionnel (VOR) à très haute fréquence (VHF) de Langruth (Manitoba), ACA 118 a demandé à monter au FL 410 et y a été autorisé. À environ 35 nm à l'ouest du VOR de Langruth, le pilote de CDN 987 a signalé au contrôleur qu'il quittait le FL 390 pour monter plus haut à cause d'un avis de résolution (RA) d'un conflit avec un autre appareil droit devant que lui donnait son système de surveillance du trafic et d'évitement des collisions (TCAS). Les 2 avions sont passés à moins de 3 nm l'un de l'autre sur le plan horizontal et à moins de 1000 pieds sur le plan vertical. L'espacement aurait dû être de 5 nm ou de 2000 pieds.
Le Bureau a terminé son enquête. Le rapport d'enquête A99H0001 a été publié le 13 juin 2000.
Recommandation A00-15 (31 août 2000)
Des risques de collision entre de gros avions de transport évoluant sous couverture radar continuent de se produire dans l'espace aérien canadien. Il existe plusieurs dispositifs de sécurité, tant au sol qu'à bord des aéronefs, pour éviter des collisions en vol résultant d'erreurs humaines. Le dernier dispositif de sécurité au sol (c'est-à-dire la présence d'une deuxième personne) qui aurait pu éviter le présent incident n'était pas en place, puisque le secteur n'était occupé que par un seul contrôleur et que le surveillant assumait toutes les fonctions d'un autre contrôleur dans un autre secteur. Le TCAS, en sa qualité de dispositif de sécurité embarqué, a atténué la gravité de la situation. Cependant, vouloir se fier au seul moyen de protection automatique que représente le TCAS pour parer aux erreurs humaines pouvant conduire à des collisions en vol n'offre pas une protection à tous les aéronefs immatriculés au Canada transportant des passagers. En effet, la réglementation canadienne n'exige pas la présence d'un TCAS à bord des avions effectuant des vols intérieurs de transport de passagers, et aucune exigence relative au TCAS ne s'applique aux avions-cargos.
Le BST a déjà enquêté sur d'autres pertes d'espacement similaires (rapport no A98H0002, rapport no A97H0007 et dossier no A99W0064 dont l'enquête n'est pas terminée) qui présentent beaucoup d'éléments identiques à ceux étudiés dans le présent rapport. L'incident le plus récent (dossier no A00H0002 dont l'enquête est en cours) concerne 2 avions Airbus A-340. Les avions volaient à la même altitude sur des trajectoires de collision (qui n'avaient pas été décelées) au-dessus du Golfe du Saint-Laurent quand le pilote de l'un des avions a reçu un avertissement de son TCAS et a alerté le contrôleur. Tous ces événements soulèvent des inquiétudes concernant le manque de bons systèmes au sol d'alerte et de prévision de conflit, au Canada.
Dans sa recommandation BCSA 90-36, le Bureau canadien de la sécurité aérienne (BCSA) a identifié la nécessité d'élaborer et de mettre en œuvre des mécanismes automatiques d'alerte et de prévision de conflit à l'intérieur des services de la circulation aérienne au Canada. Bien que, au fil des ans, Transports Canada (TC) et, plus récemment, NAV CANADA, aient poursuivi leurs travaux dans ce sens, aucun engagement ferme n'a encore été pris quant à la date de mise en service de tels mécanismes.
Toute collision en vol entre 2 gros avions de transport est lourde de conséquences. De plus, les dispositifs de sécurité au sol sont insuffisants pour tenir compte du niveau normal d'erreurs humaines pouvant donner lieu à des pertes d'espacement. C'est pourquoi le Bureau recommande, tant à l'intention de NAV CANADA que du ministre des Transports, que :
NAV CANADA s'engage, en précisant une date, à installer et à faire fonctionner un système automatique d'alerte et de prévision de conflit dans toutes les unités de contrôle de la circulation aérienne au Canada, dans le but de diminuer les risques de collision en vol.
Recommandation A00-15 du BST
Réponse de NAV CANADA (16 octobre 2000)
Dans sa réponse, NAV CANADA ne s'engage pas sur une date à laquelle un système automatique d'alerte et de prévision de conflit pourrait être installé et opérationnel. À la place, NAV CANADA signale que le logiciel d'alerte de conflit dont elle a hérité de TC en 1996 est affligé de problèmes si graves qu'il ne peut être utilisé dans certains milieux. Des essais d'un logiciel amélioré d'alerte de conflit sont actuellement en cours, et un essai opérationnel partiel dans des secteurs en route de niveau supérieur devrait avoir lieu au centre de contrôle régional de Toronto, d'ici au 31 mars 2001.
Réponse de Transports Canada (21 novembre 2000)
Dans sa réponse, TC indique que NAV CANADA a l'intention de procéder à des essais d'un système d'alerte de conflit au centre de contrôle régional de Toronto, d'ici au 31 mars 2001. TC ne précise aucunement s'il est d'accord avec cette recommandation, se bornant à dire qu'il va surveiller les essais, puis évaluer s'il y a lieu d'adopter une approche réglementaire pour traiter la recommandation du Bureau. De plus, TC précise qu'un Avis de proposition de modification (APM) a été présenté à la réunion du Comité technique du Conseil consultatif sur la réglementation aérienne canadienne (CCRAC), qui a eu lieu en juin 2000, afin d'exiger la pose d'un système anticollision embarqué (ACAS) dans certains aéronefs, d'ici au 1er janvier 2003.
Évaluation de la réponse de NAV CANADA (21 mars 2001)
Dans sa réponse, NAV CANADA indique être d'accord avec l'obligation de mettre un outil opérationnel d'alerte de conflit à la disposition des contrôleurs dans certains milieux uniquement, sans toutefois s'engager sur une date à laquelle un tel système pourrait être opérationnel dans les installations de contrôle de la circulation aérienne du pays. NAV CANADA donne cependant une date à laquelle les essais opérationnels vont débuter dans des secteurs en route de niveau supérieur.
Par conséquent, on estime que la réponse de NAV CANADA dénote une intention en partie satisfaisante.
Évaluation de la réponse de Transports Canada (21 mars 2001)
Dans sa réponse, TC indique que son personnel va surveiller le déroulement des essais et évaluer s'il y a lieu d'adopter une approche réglementaire pour répondre au but visé par la recommandation.
On estime que la réponse de TC dénote une intention satisfaisante.
Suivi exercé par le BST (21 mars 2001)
Le BST doit continuer à suivre les mesures prises par NAV CANADA et TC.
Réévaluation du Bureau (9 juin 2004)
NAV CANADA fait savoir que le système d'alerte de conflit est maintenant opérationnel dans la majorité de l'espace aérien canadien bénéficiant d'une couverture radar, mais qu'il n'est pas et qu'il ne pourra probablement pas être mis en place dans certains espaces aériens de niveau inférieur et de région terminale. Toutefois, les activités de NAV CANADA qui ont eu lieu depuis la publication de la recommandation devraient concrètement réduire les risques inhérents à cette lacune de sécurité.
Par conséquent, on estime que la mesure décrite dans la réponse dénote toujours une intention en partie satisfaisante.
Suivi exercé par le BST
Aucune autre mesure ne s'impose.
Le dossier entourant cette lacune est classé en veilleuse.