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Watchlist 2022

Sorties en bout de piste

Les sorties en bout de piste continuent de poser un risque aux personnes, aux biens et à l’environnement.

Transcription

Chaque année, des millions de décollages et d’atterrissages aux aéroports canadiens sont réussis. Toutefois, il arrive parfois qu’un aéronef quitte l’extrémité de la piste pendant un atterrissage ou un décollage interrompu.

Les conséquences peuvent être très néfastes en l’absence d’une aire de sécurité d’extrémité de piste convenable ou d’un dispositif d’arrêt approprié destiné à réduire les conséquences de ces sorties.

Ces événements peuvent entraîner des dommages aux avions, des blessures et même des pertes de vie.

Depuis 2005, il y a eu en moyenne 9,3 sorties en bout de piste par année aux aéroports canadiens.

La plupart de ces sorties se sont produites à l’atterrissage.

Même si Transports Canada a publié de nouveaux règlements sur les aires de sécurité d’extrémité de piste, il reste encore beaucoup de travail à faire parce que les sorties en bout de piste continuent de se produire.

L’enjeu des sorties en bout de piste demeurera sur la Liste de surveillance jusqu’à ce que les exploitants d’aéroports évaluent les risques et Transports Canada démontre que le risque résiduel est au niveau le plus faible raisonnablement réalisable.

Pour en savoir plus sur la Liste de surveillance 2022, consultez ce site : bst.gc.ca/Surveillance.

Contexte

Chaque année au Canada, malgré les millions de mouvements sans incident sur les pistes d’aéroports, des avions dépassent parfois l’extrémité de la piste au moment de l’atterrissage ou d’un décollage interrompu. Ces situations, appelées « sorties en bout de piste », peuvent causer des dommages aux avions et à l’environnement, des blessures et même des pertes de vie, et les conséquences peuvent être particulièrement néfastes en l’absence d’une aire de sécurité d'extrémité de piste (RESA) convenable ou d’un dispositif d’arrêt approprié destiné à immobiliser un avion.

Depuis 2010, la Liste de surveillance du Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST) aborde les risques que posent les sorties en bout de piste pour la sécurité et ce qui est nécessaire pour en réduire la fréquence. Bien que des mesures aient été prises par certains exploitants d’aéroports et par Transports Canada (TC), des sorties en bout de piste continuent de se produire aux aéroports canadiens.

Nombre d’événements au Canada

Du 1er janvier 2005 au 30 juin 2022, il y a eu en moyenne 9,3 sorties en bout de piste par année aux aérodromes canadiens (figure 1). De ce nombre, 6,7 se sont produites à l’atterrissage. Même si le nombre de sorties en bout de piste varie d’une année à l’autre, il n’y a aucune tendance statistiquement importante. Le BST a enquêté sur 24 de ces événements pendant cette période et a émis six recommandations à l’intention des autorités canadiennes. Cinq recommandations sont toujours activesNote de bas de page 1 et une est closeNote de bas de page 2.

Figure 1. Accidents et incidents mettant en cause une sortie en bout de piste au Canada, du 1er janvier 2005 au 30 juin 2022 (Source : BST)
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Accidents et incidents mettant en cause une  sortie en bout de piste au Canada, du 1<sup>er janvier 2005 au 30 juin 2022  (Source : BST)
Figure 1. Tableau de données
Tableau 1. Accidents et incidents mettant en cause une sortie en bout de piste au Canada, du 1er janvier 2005 au 30 juin 2022
  2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 2022 Moyenne
Total de sortie en bout de piste 11 11 9 13 4 15 8 11 5 9 11 11 7 9 12 6 9 3 9.3
Atterrissage 10 10 7 8 2 12 5 8 3 6 5 9 5 7 10 5 7 1 6.7
Décollage 1 1 2 4 1 3 3 3 1 2 4 2 2 2 1 1 2 1 2.1
Indéterminé 1 1 1 1 2 1 1 0.5
Moyenne globale au 30 juin 2022 9.3 9.3 9.3 9.3 9.3 9.3 9.3 9.3 9.3 9.3 9.3 9.3 9.3 9.3 9.3 9.3 9.3 9.3

* Données sont de janvier à juillet 2022

Risques pour les personnes, les biens et l’environnement

Lorsqu’un avion dépasse l’extrémité d’une piste, cette sortie en bout de piste peut causer des dommages à l’appareil et à l’environnement, des blessures et même des pertes de vie. Par conséquent, il est capital d’atténuer les conséquences de ces événements : la piste doit être dotée d’une RESA suffisamment longue ou d’un dispositif d’arrêt conçu pour immobiliser un avion en toute sécurité. Néanmoins, il est tout aussi important de prendre des mesures préventives visant à réduire la probabilité d’une sortie en bout de piste avant qu’elle ne se produise.

Mesures prises

Les enjeux inscrits à la Liste de surveillance sont complexes et difficiles à résoudre. Ils exigent la participation de nombreux intervenants, y compris des exploitants et de l’organisme de réglementation. Bien que certaines mesures puissent avoir été prises, il reste encore du travail à faire. Voici certaines des mesures prises à ce jour.

Atténuation

En janvier 2022, en réponse à la recommandation A07-06 du BST, TC a publié des dispositionsNote de bas de page 3 qui 

  • exigeront une RESA de 150 m aux aéroports qui accueillent annuellement plus de 325 000 passagers de vols commerciaux;
  • exigeront l’utilisation d’un dispositif d’arrêt sur les pistes où une RESA de 150 m ne peut pas être mise en place;
  • viseront uniquement les pistes qui servent aux services commerciaux de passagers.

Ces dispositions ne s’appliqueront qu’à certaines pistes aux aéroports qui satisfont au critère particulier du nombre annuel de passagers de vols commerciaux, plutôt qu’à toutes les pistes de 1200 m ou plus de longueur, conformément à la norme de 150 m de l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI)Note de bas de page 4,Note de bas de page 5. L’écart entre la réglementation de TC et la norme de l’OACI s’élargit encore lorsqu’on constate que ces dispositions ne tiennent pas compte de la recommandation de l’OACI d’étendre la RESA à 300 m pour les pistes de 1200 m ou plus de longueur. TC affirme que les dispositions permettront d’étendre la protection contre les sorties en bout de piste à 95 % des passagers d’ici 2038, comparativement à 75 % en 2017.

Il est encourageant de constater que les activités visant à respecter la norme d’une RESA de 150 m de l’OACI ont commencé dans certains aéroportsNote de bas de page 6, et que d’autres aéroportsNote de bas de page 7 ont déjà mis en œuvre la recommandation d’une RESA de 300 m de l’OACI. Toutefois, la réglementation de TC n’étend pas la protection contre les sorties en bout de piste à tous les passagers, et elle ne tient compte ni du trafic aérien sans passagers, ni du relief à l’extrémité de toutes les pistes. En fait, sur les 24 événements de sortie en bout de piste Note de bas de page 8 ayant fait l’objet d’une enquête du BST du 1er janvier 2005 au 30 juin 2022, 17 se sont produits à des aéroports accueillant moins de 325 000 passagers par an. Par conséquent, le BST demeure préoccupé par le fait que des risques subsistent pour les personnes, les biens et l’environnement, et il demandera de l’information supplémentaire à TC en ce qui concerne le risque résiduel posé par l’écart entre la réglementation de TC et la norme et la recommandation de l’OACI.

En ce qui concerne les contraintes géographiques qui limitent la conception et la construction de RESA adéquates à de nombreux aéroports canadiens, une solution technique pour atténuer le risque de sortie en bout de piste est un dispositif d’arrêt à matériaux absorbants. Par exemple, en 2022, on comptait 117 dispositifs d’arrêt installés dans 69 aéroports aux États-UnisNote de bas de page 9. À ce jour, aucun de ces dispositifs n’a été installé au Canada.

Prévention

Depuis l’inscription de l’enjeu des sorties en bout de piste à la Liste de surveillance, de nombreuses initiatives visant à les prévenir ont été lancées. Même si la plupart d’entre elles sont encore en cours d’élaboration, elles pourraient, une fois pleinement mises en œuvre, aider à réduire la possibilité que des sorties en bout de piste se produisent.

La recommandation A07-01 du BST demande à TC d’établir des normes claires limitant les approches et les atterrissages dans du temps convectif pour tous les exploitants du transport aérien utilisant les aéroports canadiens. TC a indiqué qu’il suivra les progrès scientifiques et technologiques réalisés en ce qui concerne cet enjeu et qu’il appuiera les efforts internationaux d’harmonisation lorsque cet enjeu deviendra actif à l’OACI.

En 2019, en réponse à la recommandation A07-03 du BST, qui demandait de prendre des mesures pour permettre aux pilotes de prendre de meilleures décisions relatives à l’atterrissage dans des conditions météorologiques qui se dégradent, TC a instauré de nouvelles normes de formation en gestion des ressources de l’équipage pour les exploitants de services de travail aérien, de taxi aérien, de navette aérienne et de transport aérien.

En réponse à la recommandation A07-05 du BST, TC a lancé le processus réglementaire visant à exiger que les exploitants aériens mettent en place des mesures pour aider à prévenir les sorties en bout de piste à l’atterrissage en augmentant la distance d’atterrissage calculée lorsque les pistes sont mouillées ou contaminées.

En réponse à la recommandation A20-01 du BST, TC a lancé le processus réglementaire visant à simplifier les minimums opérationnels pour les approches et les atterrissages aux aérodromes canadiens.

En réponse à la recommandation A20-02 du BST, TC œuvre à instaurer un mécanisme pour stopper les approches et les atterrissages faisant l’objet d’une interdiction d’approche.

En 2021, TC a instauré l’obligation d’utiliser le Global Reporting Format (GRF)Note de bas de page 10, le document d’évaluation et de communication de l’état de la surface des pistes harmonisé à l’échelle mondiale mis au point par l’OACI. On prévoit que l’utilisation du GRF réduira le risque de sortie en bout de piste en offrant aux équipages de conduite de meilleurs renseignements sur l’action prévue des freins lorsqu’ils déterminent les performances d’atterrissage.

À l’échelle mondiale, le secteur s’efforce également d’aborder l’enjeu des sorties en bout de piste, par exemple en déployant des efforts dans le domaine des moyens de défense technologiques dans le poste de pilotage. Ainsi, les dispositifs de connaissance et d’alerte en cas de sortie en bout de piste (ROAAS)Note de bas de page 11 sont désormais utilisés dans de nombreuses flottes d’Airbus et de Boeing, et ils peuvent être intégrés à d’autres types d’avions. À compter de 2025, l’Agence de l’Union européenne pour la sécurité aérienne exigeraNote de bas de page 12 l’installation de ROAAS sur les gros avions de la partie 25 nouvellement conçus et exploités dans le transport aérien commercial; toutefois, il n’existe à l’heure actuelle aucune exigence réglementaire au Canada en ce qui a trait aux ROAAS.

Enfin, les exploitants aériens canadiens reconnaissent l’enjeu. À l’occasion d’une conférence du secteur du transport aérien en 2021, un sondage du BST a permis de déterminer que 62 % des répondants avaient indiqué que leurs processus de gestion de la sécurité avaient signalé l’enjeu des sorties en bout de piste et que la plupart d’entre eux avaient pris ou prenaient des mesures pour rectifier la situation.

Mesures à prendre

Malgré les mesures prises jusqu’à présent, le nombre de sorties en bout de piste au Canada est demeuré constant depuis 2005. Afin de réduire ce nombre, un effort concerté est de mise.

L’enjeu des sorties en bout de piste demeurera sur la Liste de surveillance du BST jusqu’à ce que 

  • TC démontre que le risque résiduel aux aéroports ayant des pistes qui ne sont pas tenues de respecter la norme de 150 m de l’OACI est au niveau le plus faible raisonnablement réalisable;
  • TC oblige les exploitants d’aéroports ayant des pistes de plus de 1800 m dont la RESA est plus courte que la longueur de 300 m recommandée par l’OACI à réaliser des évaluations officielles des risques propres à chaque piste et à prendre des mesures pour atténuer les risques de sortie en bout de piste pour les personnes, les biens et l’environnement.