Canadian Helicopters Offshore
Sikorsky S-92A (hélicoptère), C-GICB
Halifax (Nouvelle-Écosse), 155 NM ESE
L'événement
Le , à 11 h 54 (heure avancée de l’Atlantique), un hélicoptère Sikorsky S-92A (immatriculation C-GICB, numéro de série 920121) exploité par Canadian Helicopters Offshore (CHO) a décollé de l’aéroport international Stanfield d’Halifax (Nouvelle-Écosse) pour un vol aux instruments à destination de l’installation centrale Thebaud, à environ 155 milles marins à l’est-sud-est. Deux pilotes et 11 passagers se trouvaient à bord.
Deux approches aux instruments ont été tentées vers la plateforme, mais elles ont toutes deux échoué en raison de nuages à basse altitude et d’une mauvaise visibilité. Au cours de la 2e approche interrompue, l’équipage de conduite a établi un contact visuel avec la plateforme et choisi d’effectuer une approche à vue. Peu après le début de l’approche à vue, un état de descente à taux élevé et de faible vitesse anémométrique s’est déclaré, dans des conditions de faible visibilité. Au cours de la descente, les moteurs de l’hélicoptère ont été poussés jusqu’à un surcouple maximal de 146 %. L’équipage a repris la maîtrise de l’aéronef et arrêté la descente à environ 13 pieds au-dessus de la surface de l’eau.
Au cours du départ subséquent par pilotage manuel, une 2e descente inopinée s’est produite, mais la situation a été rectifiée rapidement. L’aéronef est ensuite retourné à l’aéroport international Stanfield d’Halifax sans autre incident. L’étendue des dommages causés à l’hélicoptère est inconnue, puisque l’hélicoptère a été retiré du service. Il n’y a pas eu de blessés.
L’enquête a permis de déterminer que pendant l’approche finale à vue, l’hélicoptère est entré dans un état de faible énergie : il volait à faible vitesse anémométrique, avec un taux de descente élevé, une assiette en cabré et un réglage de faible puissance. L’état de faible énergie de l’hélicoptère n’a pas été détecté par l’équipage de conduite, dont l’attention était portée vers l’héliplateforme, qui surplombait le brouillard dans une zone sans horizon perceptible. L’environnement visuel dégradé (DVE) a fait en sorte qu’il était difficile pour les pilotes de déceler l’état d’approche instable de l’aéronef.
Fait contribuant aux difficultés, les procédures d’utilisation normalisées (SOP) de CHO ne faisaient aucune référence à l’état énergétique dans ses critères d’approche stabilisée, ce qui augmentait le risque qu’un état de faible énergie survienne et ne soit pas détecté. De plus, CHO n’avait pas adopté la pratique recommandée d’exiger des équipages qu’ils vérifient et confirment verbalement que l’approche était stable à des points cibles (qu’on appelle couramment en anglais des « gates ») au cours d’une approche finale. Par conséquent, les directives données aux équipages de conduite dans les SOP étaient insuffisantes pour garantir que les approches étaient menées conformément aux lignes directrices d’approche stabilisée recommandées dans l’industrie.
Par ailleurs, l’enquête a permis de déterminer qu’au cours de l’approche finale dans un DVE, le pilote aux commandes a enfoncé le bouton de débrayage du compensateur cyclique et l’a tenu enfoncé. Comme cela a été constaté dans des événements antérieurs, cette technique réduit l’efficacité globale du système de commandes automatiques de vol (AFCS). Dans l’événement à l’étude, l’hélicoptère a atteint une assiette en cabré de 17°, avec un taux de descente excessif et un glissement accentué vers la gauche au cours de l’approche finale. Le fait d’effectuer une approche à vue dans un DVE en tenant enfoncé le bouton de débrayage du compensateur cyclique a augmenté la charge de travail du pilote et contribué à des difficultés de contrôle qui ont entraîné une approche instable. Alors que l’hélicoptère descendait sous l’altitude radar de 250 pieds, il était en descente prononcée de 800 pi/min, à très basse vitesse anémométrique et les moteurs produisaient de la puissance. Lorsque le pilote aux commandes a instinctivement augmenté le collectif, le taux de descente de l’hélicoptère a augmenté rapidement jusqu’à 1800 pi/min. Le fait d’augmenter la puissance alors que l’hélicoptère se trouvait en descente prononcée à basse vitesse anémométrique et à taux de descente élevé a entraîné son entrée dans un anneau tourbillonnaire. (état de vortex).
Ni le manuel de vol du fabricant ni les SOP de l’exploitant ne mettaient en garde contre les dangers possibles associés à l’utilisation du bouton de débrayage du compensateur dans des conditions telles qu’un DVE.
Si les manuels de vol des fabricants et les SOP des exploitants ne contiennent pas de lignes directrices pour l’utilisation du bouton de débrayage du compensateur cyclique, il pourrait en résulter des problèmes de contrôle de l’aéronef dans un DVE, en raison de l’utilisation sous-optimale de l’AFCS.
L’hélicoptère est entré en descente inopinée à taux très élevé et à basse vitesse anémométrique dans le banc de brouillard, avec le train d’atterrissage sorti. Pourtant, le système d’avertissement de proximité du sol amélioré (EGPWS) de l’hélicoptère n’a pas alerté l’équipage à propos de la situation. Cela découle d’une lacune, déjà cernée par le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST), dans la couverture assurée par l’EGPWS du S-92. Si une descente inopinée se produit avec le train d’atterrissage sorti et une vitesse anémométrique inférieure à 50 nœuds, l’EGPWS n’émet aucun avertissement de risque d’impact sans perte de contrôle.
En 2016, le BST a émis une recommandation prônant l’installation de systèmes d’avertissement et d’alarme d’impact à bord d’hélicoptères commerciaux qui effectuent des vols la nuit ou dans des conditions météorologiques de vol aux instruments. Au moment de la rédaction du présent rapport, la réglementation ne contient toujours pas une telle exigence. Par conséquent, les fabricants et les exploitants d’hélicoptères sont libres de désactiver des modes d’EGPWS, comme c’était le cas à bord du S-92A. Tant que les EGPWS et les systèmes d’avertissement et d’alarme d’impact pour hélicoptères ne sont pas obligatoires à bord des hélicoptères commerciaux canadiens qui volent de nuit ou dans des conditions météorologiques de vol aux instruments, l’équipage de conduite et les passagers à bord de ces vols courent un risque accru d’impact sans perte de contrôle.
Ressources pour les médias
Communiqué de presse
Les pilotes d’un hélicoptère extracôtier se remettent d’une descente inopinée à 13 pieds au-dessus de l’eau près de l’île de Sable, en Nouvelle-Écosse
Lire le communiqué de presse
Informations d'enquête
A19A0055
Canadian Helicopters Offshore
Sikorsky S-92A (hélicoptère), C-GICB
Halifax (Nouvelle-Écosse), 155 NM ESE
Enquêteur désigné
Daryl Collins s’est joint au BST en 2009 après une carrière de 20 années au sein des Forces armées canadiennes, ayant travaillé comme pilote d’hélicoptère de recherche et de sauvetage à bord du CH146 Griffon, du CH113 Labrador et du CH149 Cormorant. Dans son dernier poste au service des Forces armées canadiennes, M. Collins était commandant du 103e Escadron de recherche et de sauvetage basé à Gander (Terre-Neuve-et-Labrador).
Au fil de ses années au service des Forces armées canadiennes, M. Collins a été responsable de l’élaboration et de la mise en œuvre de la formation sur la performance humaine à l’échelle des Forces armées canadiennes, pour tous les équipages de vol, le personnel de maintenance et le personnel de contrôle du trafic aérien. Par ailleurs, il a grandement contribué à la sécurité des vols. En outre, il a obtenu une maîtrise en science aéronautique avec une double spécialisation dans les facteurs humains et la sécurité du système.
Depuis son arrivée au BST, M. Collins a participé activement à de nombreuses enquêtes sur des accidents.
M. Collins est titulaire d’une licence de pilote de ligne – hélicoptère, et a plus de 3000 heures de vol à son actif
Voir des images en haute résolution sur la page Flickr du BST.
Catégorie de l’enquête
Cette enquête est une enquête de catégorie 2. Ces enquêtes sont complexes et portent sur plusieurs problèmes de sécurité exigeant une analyse approfondie. Les enquêtes de catégorie 2, qui donnent souvent lieu à des recommandations, se concluent généralement en 600 jours. Pour de plus amples renseignements, consultez la Politique de classification des événements.Processus d'enquête du BST
Une enquête du BST se déroule en 3 étapes :
- L'étape du travail sur le terrain : une équipe d'enquêteurs examine le lieu de l'événement et l'épave, interviewe les témoins et recueille toute l'information pertinente.
- L'étape d'examen et d'analyse : le BST examine toute la documentation liée au dossier, effectue des tests en laboratoire sur des composantes de l'épave, établit la chronologie des événements et identifie toute lacune en matière de sécurité. Lorsque le BST soupçonne ou constate des lacunes en matière de sécurité, il en informe sans tarder les organismes concernés sans attendre la parution du rapport final.
- L'étape de production du rapport : une version confidentielle du rapport est approuvée par le Bureau et envoyée aux personnes et organismes qui sont directement touchés par le rapport. Ceux-ci ont l'occasion de contester ou de corriger l'information qu'ils jugent erronée. Le Bureau tient compte de toutes les observations fournies avant d'approuver la version définitive du rapport, qui est ensuite publiée.
Vous trouverez de plus amples détails à la page sur le Déroulement des enquêtes.
Le BST est un organisme indépendant qui mène des enquêtes sur des événements de transport aérien, ferroviaire, maritime et pipelinier. Son seul but est de promouvoir la sécurité des transports. Le Bureau n'est pas habilité à attribuer ni à déterminer les responsabilités civiles ou pénales.